c) L'apparition de tensions sur la dette française ?
Selon les réponses au questionnaire, le programme de financement brut à moyen long terme 2011 au 23 août 2011 s'établit comme suit :
Mise en oeuvre du programme de financement de l'Etat en 2011
(émissions brutes, en milliards d'euros)
Source : Agence France Trésor
Les émissions à moyen et long terme (OAT et BTAN) nettes des rachats s'élèvent à 131,1 milliards d'euros au 24 août (et à 147,7 milliards d'euros hors rachats), soit 71,2 % des 184 milliards d'euros annoncés pour l'année 2011 ; le degré d'avancement est donc légèrement supérieur à celui de l'année dernière , puisqu'à la même époque, en 2010, 68,9 % du programme avait été réalisé. La part des émissions sur les maturités supérieures à 10 ans, sur l'ensemble des émissions à taux fixe, s'établit à 46,7 %, soit un niveau équivalent à l'année dernière où elle s'établissait à 47,5 %. La demande reste soutenue sur les maturités très longues (supérieures à 15 ans), qui représentent 19,2 % des émissions à taux fixe à fin juillet 2011, contre 20,8 % sur l'ensemble de l'année 2010. Selon l'AFT, la maturité 15 ans a fait l'objet d'une demande particulièrement forte puisque les émissions sont en hausse sur ce point de courbe de 11,6 milliards d'euros par rapport à 2010 à la même date.
Le taux de couverture moyen des adjudications de moyen long terme en 2011 s'élève à 243 %, soit un niveau légèrement supérieur à celui de 2010 (214 %). Le taux de couverture le plus bas s'établit lui aussi en hausse à 195 % en janvier 2011, contre 153 % en mai 2009. Pour les BTF, le taux de couverture moyen est de 270 %, soit un niveau très légèrement inférieur à celui de 2010 (280 %). Le taux de couverture le plus bas est en hausse à 191 % en avril 2011, contre 172 % en juin 2010.
Si l'ensemble de ces indicateurs tendent à montrer que la réalisation du programme de financement de l'Etat s'opère sans difficulté majeure en 2011, les tensions qui se font jour sur la dette de l'Etat ne doivent pas pour autant être mésestimées. A titre d'illustration, l'écart des conditions de financement ( spread ) des titres de maturité 10 ans entre la France et l'Allemagne s'est creusé depuis la survenue de la crise financière, jusqu'à connaître une envolée au cours de l'été 2011. Compris entre 10 et 20 points de base début 2008, cet écart était récemment passé à une fourchette de 60 à 70 points de base. Le creusement du spread entre la France et l'Allemagne au cours de l'été est la conséquence de plusieurs facteurs. La hausse de l'aversion pour le risque des investisseurs suite aux incertitudes entourant la résolution de la crise grecque a provoqué une baisse des rendements qui a mécaniquement favorisé un écartement des spreads . Ainsi entre le 30 juin et le 1 er septembre 2011 le taux à 10 ans allemand a baissé de 87 points de base et le taux français de 60 points de base. Autrement dit, la France et l'Allemagne ont toutes deux bénéficié du phénomène de « fuite vers la qualité », mais dans des proportions différentes.
La dégradation de la note des Etats-Unis et la contagion de la crise à l'Espagne et à l'Italie ont ensuite focalisé l'attention des investisseurs sur la France qui est parfois considérée par les analystes comme le pays AAA le plus vulnérable de la zone euro, notamment en raison de son déficit public plus élevé. Ces craintes ont pu également être favorisées par les inquiétudes des investisseurs sur les banques françaises en raison de leurs expositions réelles ou supposées aux pays du Sud de l'Europe.
Source : Agence France Trésor
Par ailleurs, les contrats d'assurance contre le défaut de paiement, ou CDS ( credit default swaps ), ont atteint des niveaux records pour la France au cours de l'été en dépassant les 160 points de base 97 ( * ) . Si ce phénomène a pu être observé pour l'ensemble des Etats de la zone euro notés triple A, un décrochage avec l'Allemagne n'en est pas moins observé depuis 2010, la prime de risque sur la dette française équivalant au double de celle pesant sur les titres allemands.
CDS sur titres français et Allemands
(en points de base)
Source : Agence France Trésor
Au sein de la zone euro, la Finlande, les Pays-Bas, l'Autriche et l'Allemagne ont des niveaux de CDS inférieurs à ceux de la France. En dehors de la zone euro, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Japon, la Norvège, le Danemark et la Suède se situent également à des niveaux inférieurs 98 ( * ) .
Il faut toutefois rappeler que le faible nombre de transactions sur ce marché peu profond doit conduire à relativiser les tendances que l'on y constate.
* 96 Soit l'écart entre le niveau réel du PIB et son niveau potentiel.
* 97 Un niveau de 160 points de base signifie qu'il faut payer 160 dollars pour s'assurer contre le défaut de paiement de 10 millions de dollars de dette à cinq ans.