N° 3630
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 TREIZIÈME LÉGISLATURE |
N° 735
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2010-2011 |
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Enregistré à la Présidence de
l'Assemblée nationale
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Annexe au procès-verbal de la séance
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RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (1) CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI , pour le développement de l' alternance et la sécurisation des parcours professionnels ,
PAR M. GÉRARD CHERPION, Rapporteur, Député. |
PAR MME. MUGUETTE DINI, Rapporteure, Sénatrice. |
( 1) Cette commission est composée de : M. Pierre Méhaignerie, député, président ; Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente ; M. Gérard Cherpion, député, Mme Muguette Dini, sénatrice, rapporteurs.
Membres titulaires : MM. Jean-Charles Taugourdeau, Bernard Perrut, Jean-Patrick Gille, Alain Vidalies et Jean-René Marsac, députés , Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Claude Carle, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger et M. Guy Fischer, sénateurs.
Membres suppléants : Mmes Marie-Christine Dalloz, Cécile Dumoulin, Marie-Jo Zimmermann, MM. Jean Mallot, Alain Rousset et Francis Vercamer députés , Mmes Anne David, Isabelle Debré, Christiane Demontès, Catherine Deroche, Françoise Férat, MM. Alain Gournac et Ronan Kerdraon, sénateurs .
Voir les numéros :
Assemblée nationale : 3369, 3512, 3519, T.A. 689, et 3591
Sénat : 651, 659, 660 et T.A. 149 (2010-2011)
TRAVAUX DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE
Mesdames, Messieurs,
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels s'est réunie à l'Assemblée nationale le mercredi 6 juillet 2011.
La commission a d'abord procédé à la désignation de son bureau qui a été ainsi constitué :
- M. Pierre Méhaignerie, député, président ;
- Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente ;
- M. Gérard Cherpion, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;
- Mme Muguette Dini, sénatrice, rapporteure pour le Sénat.
La commission mixte paritaire a ensuite procédé à l'examen du texte.
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M. Pierre Méhaignerie, député, président . Vingt-deux articles ont été adoptés conformes et trois ont été supprimés par nos deux assemblées. Il reste vingt-sept articles en discussion. Je rappelle que la proposition de loi initiale n'en comportait que quatorze, ce qui témoigne de l'importance des ajouts de nos deux assemblées.
Je vais maintenant donner la parole à Mme Procaccia, puis aux deux rapporteurs, afin qu'ils nous indiquent les principaux points de divergence entre nos deux assemblées, points de divergence qui ne me semblent pas insurmontables.
Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente . Je ne doute pas, en effet, que nous trouvions un compromis sur ce texte qui est très attendu.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. Sylvie Desmarescaux, qui a été notre rapporteure pour le Sénat et qui ne peut être présente cet après-midi pour des raisons de santé, m'a chargée de saluer le travail du rapporteur de l'Assemblée nationale, Gérard Cherpion. Le texte dont il a pris l'initiative apporte des réponses constructives aux problèmes d'accès à l'emploi auxquels sont confrontés les jeunes comme les salariés victimes d'un licenciement économique. L'ampleur du sujet a entraîné l'ajout de nombreuses dispositions par les deux assemblées. Voici les principales modifications apportées par le Sénat.
Premièrement, en ce qui concerne le développement de l'alternance, le Sénat a voté conformes les dispositions essentielles : carte d'étudiant des métiers pour les apprentis, apprentissage saisonnier ou dans le secteur du travail temporaire, service dématérialisé consacré à l'alternance.
Il est toutefois revenu sur la délivrance de la carte d'étudiant des métiers à certains détenteurs d'un contrat de professionnalisation ainsi que sur la création d'un label reconnaissant l'engagement d'entreprises en faveur de l'alternance. Il a introduit des mécanismes nouveaux : expérimentation de l'extension des missions des médiateurs de l'apprentissage ou encore, à mon initiative, possibilité pour les particuliers employeurs de conclure des contrats de professionnalisation pour renforcer la formation de leurs employés.
Notre collègue Jean-Claude Carle est à l'origine de plusieurs autres dispositions adoptées par le Sénat : la consolidation de la passerelle entre la préparation d'un baccalauréat professionnel et d'un certificat d'aptitude professionnelle (CAP), la réforme des périodes de professionnalisation et la transformation de la préparation opérationnelle à l'emploi en un véritable outil de remise à niveau des « décrocheurs », afin de leur permettre ensuite d'accéder, grâce à l'apprentissage, à une formation et à un métier stable.
Le Sénat a également adopté un amendement gouvernemental donnant le statut de stagiaire de la formation professionnelle aux jeunes qui suivent une formation en centre de formation d'apprentis (CFA) en attendant de trouver un contrat d'apprentissage. Cette solution a notamment pour avantage de les affilier à un régime de sécurité sociale.
Deuxièmement, pour ce qui concerne l'encadrement des stages, les modifications que le Sénat a apportées sont mineures. Il convient d'ailleurs de saluer l'avancée majeure que constitue, pour tous les étudiants en stage, l'accord national interprofessionnel du 7 juin 2011 transposé par l'article 6 nonies , car leur statut dans l'entreprise sera consacré et leur travail mieux valorisé.
Troisièmement, le Sénat a apporté trois modifications relatives aux groupements d'employeurs : afin de laisser se poursuivre la négociation collective sur ce sujet, nous avons différé l'entrée en vigueur des dispositions au 1 er novembre prochain, sauf accord des partenaires sociaux d'ici-là ; le Sénat a encadré l'activité des salariés des groupements d'employeurs auprès des collectivités territoriales en maintenant l'obligation selon laquelle le temps qu'y consacre chaque salarié ne peut excéder un mi-temps ; enfin, par souci de simplification, nous avons limité l'égalité de traitement entre salariés mis à disposition et salariés de l'entreprise utilisatrice à la question de la rémunération, les groupements d'employeurs offrant directement à leurs salariés de nombreux avantages en nature.
Enfin, le Sénat a peu modifié le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), dans le respect de l'accord national interprofessionnel du 31 mai 2011. Sur proposition du Gouvernement, il a adopté une disposition permettant à Pôle emploi de proposer un CSP aux licenciés économiques qui y sont éligibles si leur employeur ne l'a pas fait.
Par ailleurs, le Sénat a ajouté deux articles nouveaux. En premier lieu, il a souhaité organiser l'encadrement juridique du prêt de main d'oeuvre à but non lucratif. Cet article 10 ter reprend très largement l'accord national interprofessionnel du 8 juillet 2009 sur la gestion sociale des conséquences de la crise économique sur l'emploi et offre donc une protection renforcée pour les salariés afin d'éviter toute dérive. En second lieu, à l'initiative d'Isabelle Debré, le Sénat a autorisé explicitement les mineurs de seize ans et plus à constituer une association, afin d'encourager les jeunes à s'engager dans la vie associative.
A l'inverse, le Sénat a supprimé l'article 13 bis , que l'Assemblée nationale avait ajouté à la proposition de loi, qui permettait aux salariés à temps partiel d'augmenter temporairement, par un avenant au contrat de travail, leur nombre d'heures de travail. Ce faisant, les heures réalisées au-delà du temps de travail initial n'auraient pas été comptabilisées en tant qu'heures complémentaires et n'auraient donc pas donné lieu à une majoration de salaire de 25 %, comme le code du travail le prévoit actuellement. Alors que la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale vient de publier un rapport appelant à réduire le travail à temps partiel, « source de précarité pour les femmes et facteur aggravant des inégalités professionnelles », il n'a pas apparu opportun au Sénat d'adopter cet article car il aurait eu pour conséquence une baisse de la rémunération de nombreux salariés, en particulier des femmes. Les entreprises doivent plutôt essayer de faire en sorte d'offrir des emplois à temps plein à leurs salariés à temps partiel qui souhaitent augmenter leur temps de travail.
Au total, les différences entre les textes issus de l'Assemblée nationale et du Sénat ne sont pas insurmontables et je ne doute pas que nous parviendrons à établir un texte commun et équilibré qui reflétera fidèlement les travaux des deux assemblées.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Alors que nous approchons du terme de nos travaux sur ce texte, je ne m'étendrai pas longuement sur les mesures qu'il comporte, car il y faudrait beaucoup de temps puisqu'il compte désormais plus de quarante articles.
Je crois pouvoir dire que ce texte est le fruit d'une forme de coproduction législative exemplaire. Ce texte s'inscrit dans les grandes orientations définies par le Président de la République dans son discours à Bobigny, le 1 er mars dernier, mais aussi, lorsqu'il s'était engagé, lors de la campagne présidentielle, à généraliser le contrat de transition professionnelle. C'est de fait ce que nous allons réaliser avec cette proposition de loi.
Mais ce texte a également été enrichi par de nombreuses initiatives parlementaires et je voudrais notamment saluer l'engagement de M. Jean-Charles Taugourdeau pour les groupements d'employeurs et celui de M. Bernard Perrut pour l'emploi des jeunes.
Enfin, en lien avec le processus législatif, un riche dialogue social s'est instauré. Trois accords nationaux interprofessionnels auront ainsi été conclus en quelques mois pour aider les jeunes à mieux s'insérer dans la vie active, auxquels s'ajoute l'accord relatif au contrat de sécurisation professionnelle. Je suis heureux que nous ayons pu tenir compte de ces accords dans la rédaction du texte que nous étudions, notamment à travers l'adjonction de dispositions très importantes sur les stages.
Le Sénat a globalement respecté ce que l'Assemblée nationale avait décidé. Il a aussi apporté des mesures nouvelles très intéressantes, telles que l'instauration d'un cadre juridique clair et protecteur pour le prêt de main d'oeuvre, à l'initiative de Mme Sylvie Desmarescaux, ou l'encadrement des périodes de professionnalisation afin de dégager des moyens pour les contrats de professionnalisation, à l'initiative de M. Jean-Claude Carle et de Mme Catherine Procaccia. D'autres ajouts me paraissent sans doute devoir être discutés et aménagés et je regrette naturellement la suppression au Sénat de cinq articles adoptés à l'Assemblée. Mais nous allons en débattre point par point et je ne doute pas que nous trouverons un accord, car nos deux assemblées ont travaillé dans le même esprit sur ce texte.
M. Guy Fischer, sénateur . Le groupe CRC-SPG n'a pas voté ce texte, qui n'est que la traduction législative d'une volonté présidentielle. De plus, nous considérons que le développement de l'alternance ne doit pas apparaître comme la panacée du retour vers l'emploi. Nous nous interrogeons sur le contrat de sécurisation professionnelle qui se substituerait au licenciement économique. Nous y voyons un moyen de masquer les politiques de l'emploi des entreprises. Enfin, nous sommes opposés aux dispositions qui visent à dénaturer les groupements d'employeurs, aux dépens des salariés.
M. Jean-Patrick Gille, député . Je regrette l'examen précipité de cette proposition de loi. Le groupe SRC est favorable aux dispositions relatives au contrat de sécurisation professionnelle, qui transposent un accord national interprofessionnel. S'agissant des stages, il y a un consensus sur le principe qu'il ne doit pas y avoir de stage en dehors d'un cursus de formation, mais on finit toujours par permettre des contournements. Enfin, les modifications relatives aux groupements d'employeurs et au prêt de main d'oeuvre mettent en place une organisation du travail complètement nouvelle.
Nous sommes favorables au développement de l'alternance, dans lequel les régions s'impliquent beaucoup, mais surpris par les propositions qui visent à l'appliquer à toutes les formes d'emploi (saisonniers, intérimaires, etc .) et qui remettent en cause les efforts entrepris en faveur de la qualité des contrats. C'est aussi un moyen facile pour le Gouvernement d'annoncer 200 000 contrats d'alternance supplémentaires.
M. Bernard Perrut, député . Contrairement aux propos tenus précédemment, je considère ce texte comme une avancée significative. L'apprentissage n'est pas un choix par défaut, et l'appliquer aux emplois saisonniers est une bonne chose. Cela constitue une avancée qualitative, car nous avons la volonté partagée avec les chambres des métiers de faire accéder les jeunes à des métiers reconnus.
M. Ronan Kerdraon, sénateur . Cette proposition de loi est devenue un texte « fourre-tout ». Par ailleurs, dès lors qu'il est question d'alternance, on devrait forcément y parler des régions. Or, celles-ci sont les grandes absentes de ce texte, alors qu'elles ont rénové les centres de formation d'apprentis et développé des partenariats avec les organisations professionnelles et consulaires. L'État fixe des objectifs sans donner les moyens à ceux qui doivent les mettre en oeuvre. Enfin, l'article 13 bis est inacceptable, car il va à l'encontre de l'emploi féminin.
M. Jean-Claude Carle, sénateur . Je salue le travail des rapporteurs, qui ont enrichi un texte qui vient compléter la réforme de la formation professionnelle votée en 2009. Je pense, en particulier, au dispositif auquel on donne désormais le nom de M. Cherpion, qui permet d'adapter les règles de l'apprentissage au baccalauréat professionnel en trois ans, afin d'éviter une diminution des contrats d'apprentissage. Je pense également aux dispositions introduites par le Sénat au bénéfice des « décrocheurs ». Ce texte n'est pas pour autant un aboutissement. Il faudra tôt ou tard que le législateur s'intéresse au financement de l'apprentissage et mette au point un mécanisme efficace incitant à la formation tout au long de la vie.
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La commission mixte paritaire est ensuite passée à l'examen des articles restant en discussion.
TITRE IER - DÉVELOPPEMENT DE L'ALTERNANCE
Article 1
er
bis
A
Délivrance de la carte « Étudiant
des métiers » par les centres de formation
d'apprentis
La commission mixte paritaire adopte un amendement rédactionnel présenté par les deux rapporteurs, puis l'article 1 er bis A ainsi modifié.
Article 1
er
bis
Délivrance de la carte d'étudiant des
métiers aux jeunes en contrat de professionnalisation
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Mon amendement vise à rétablir l'article 1 er bis , supprimé par le Sénat, qui étend la carte d'étudiant des métiers aux bénéficiaires de contrats de professionnalisation qui répondent à deux critères : d'une part, être âgé de moins de vingt-six ans d'autre part, suivre une action de professionnalisation d'une durée minimale de douze mois. Ainsi, cette extension du bénéfice de la carte d'étudiant des métiers serait limitée aux jeunes qui se situent en quelque sorte dans la phase scolaire de leur formation. Il est logique que ces personnes aient les mêmes droits que les apprentis.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. Les bénéficiaires d'un contrat de professionnalisation ont ceci de particulier par rapport aux bénéficiaires d'un contrat d'apprentissage que les actions de qualification professionnelle qu'ils suivent peuvent intervenir après une interruption dans leur formation, alors que pour l'apprentissage on s'inscrit toujours dans la suite des études secondaires. Néanmoins, je comprends la logique de la proposition de Gérard Cherpion et on peut y adhérer.
M. Jean-Patrick Gille, député. On pouvait se féliciter de la suppression de cet article par le Sénat. En effet, il convient de bien distinguer la formation en apprentissage, qui constitue une étape d'un parcours de formation linéaire, des contrats de professionnalisation, qui s'inscrivent dans une logique de formation professionnelle. On peut aussi s'interroger sur l'intérêt d'une extension de la carte d'étudiant des métiers, plutôt que de la carte d'étudiant.
M. Jean-Claude Carle, sénateur. Je suis favorable à cet amendement. La logique qui le sous-tend consiste à considérer d'abord la personne, avant son statut. L'apprenti ou le bénéficiaire d'un contrat de professionnalisation seront considérés d'abord en tant que jeunes de moins de vingt-six ans.
La commission mixte paritaire adopte l'amendement et l'article 1 er bis est ainsi rétabli.
Article 2 ter
Création d'un
label destiné aux entreprises soutenant la formation en
alternance
La commission mixte paritaire maintient la suppression de cet article.
Article 3
Possibilité de
souscrire un contrat d'apprentissage ou un contrat de professionnalisation avec
deux employeurs pour l'exercice d'activités
saisonnières
M. Jean-Patrick Gille, député. Je propose la suppression de cet article, qui étend le champ du contrat d'apprentissage et du contrat de professionnalisation à des emplois saisonniers, dans le but principal de faire du chiffre. Or, si une telle extension peut présenter un intérêt pour certains cas individuels, elle modifie profondément la logique du système.
En effet, cette mesure vise principalement à répondre à une demande du secteur de la restauration : on peut donc estimer que les jeunes concernés seront employés l'été dans les zones de bord de mer, et l'hiver en montagne. Ainsi, un même jeune pourrait alors avoir deux employeurs, deux périodes d'essai, deux lieux de formation, et relever de deux centres de formation d'apprentis, ce qui rendra l'organisation de la pédagogie encore plus compliquée qu'elle ne l'est aujourd'hui. Que se passera-t-il en cas de rupture du contrat par l'un des employeurs, mais pas par l'autre ? Présidant un centre de formation d'apprentis, je connais les difficultés que l'on a à envoyer des jeunes dans les lieux de formation, y compris de bonnes maisons, lorsqu'elles sont éloignées de leur domicile. Ces difficultés redoubleront avec le dispositif proposé.
Par ailleurs, on dit que 20 % des contrats d'alternance se concluent par une rupture. Or, ce taux atteint 40 % dans la restauration, qui sera concernée particulièrement par cet article, ce qui signifie qu'il est bien inférieur dans les autres secteurs d'activité. En somme, cet article constitue un signal très négatif adressé aux jeunes.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. M. Gille semble considérer que le dispositif proposé n'est destiné qu'aux jeunes qui apprendraient le même métier, pour l'exercer au bord de la mer pendant l'été et en montagne l'hiver.
Mais dans l'esprit des auteurs du texte, il concerne plutôt les jeunes qui apprendraient plusieurs métiers. Ainsi, il n'est pas rare en montagne que l'on travaille l'été dans l'agriculture ou dans le bâtiment, et l'hiver dans la restauration et le sport. Ce que l'on sait faire l'été ne sert alors à rien l'hiver, et vice-versa.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Apprendre deux métiers différents ouvre en effet des possibilités, enrichit la formation des jeunes et permet à nombre d'actifs d'avoir une vie équilibrée.
M. Bernard Perrut, député. On peut aussi exercer différentes activités dans un même territoire suivant les saisons. Prenons l'exemple du lac d'Annecy : les activités d'été n'y sont pas les mêmes que les activités d'hiver, et un même territoire peut ainsi offrir des activités complémentaires dans un cadre saisonnier.
Plus généralement, il ne faut pas être frileux : nos politiques de l'emploi doivent innover. On sait que les jeunes réussissent mieux dans l'apprentissage que dans les autres filières de formation : il faut donc miser sur l'apprentissage.
M. Ronan Kerdraon, sénateur. Le dispositif proposé repose sur une fausse bonne idée, qui sera difficile à mettre en oeuvre du fait de la confusion du texte, avec de véritables risques de dérive.
À l'instar de ce que l'on a fait avec la réforme du taux de la TVA dans la restauration, on cherche à satisfaire un secteur d'activité en particulier. Non que le secteur du tourisme ne mérite pas l'attention des pouvoirs publics, mais le dispositif proposé mériterait d'être mieux encadré. Il ne doit pas s'agir de fournir à un secteur une main d'oeuvre bon marché légale et subventionnée par l'État.
M. Jean-Claude Carle, sénateur. Des dispositifs comparables à la mesure proposée par cet article sont déjà mis en oeuvre pour la formation initiale et donnent pleinement satisfaction. C'est le cas par exemple d'une double formation aux métiers du bâtiment et aux métiers de la montagne, mise en place dans le cadre du plan régional de développement des formations de la région Rhône-Alpes.
M. Guy Fischer, sénateur. Cette mesure s'inscrit dans un mouvement long de déréglementation du travail. Bien entendu, le problème de la sous-qualification est essentiel, mais il nécessite une réflexion plus approfondie. De même, l'emploi saisonnier mériterait que l'on s'y penche avec attention. Or, le dispositif proposé a pour seul effet de fournir de la main d'oeuvre à coût réduit à un secteur que l'on entend favoriser encore une fois, pour des motifs que l'on devine aisément en cette période pré-électorale.
M. Jean-Charles Taugourdeau, député. Avec ce texte, on se place du point de vue de l'apprenti ou du stagiaire, du demandeur d'emploi ou du salarié précaire. Cela bouscule, c'est vrai, quelques habitudes.
Mme Patricia Schillinger, sénatrice. Pour des jeunes de quatorze ou quinze ans, l'entrée dans le monde de l'apprentissage peut parfois constituer un événement brutal. Ces jeunes ont besoin de temps de repos pour s'adapter à cette vie, ainsi que pour préparer les examens auxquels ils sont soumis. Or, s'ils travaillent tantôt à la mer et tantôt à la montagne, il sera extrêmement difficile de leur ménager les plages de congés nécessaires.
M. Jean-Patrick Gille, député. On aurait pu trouver une autre manière de développer l'apprentissage. Des secteurs tels que le tourisme et la restauration ne manqueront pas de s'engager dans la voie ouverte par le présent article. L'encadrement de ce dispositif, qui ajoute pourtant deux pages au code du travail, devrait donc être renforcé. En outre, il est déjà possible à un apprenti de travailler dans une autre entreprise pour peu qu'une convention ait été conclue entre les deux entreprises.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement, puis adopte l'article 3 dans la rédaction du Sénat .
Article 5
Simplification des
formalités et renforcement du contrôle en matière
d'apprentissage
M. Jean-Patrick Gille, député. Mon amendement vise à rétablir le contrôle de validité de l'enregistrement du contrat d'apprentissage par les directions des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), que l'on souhaite supprimer pour des motifs tenant simplement à la révision générale des politiques publiques. En outre, les chambres consulaires, même si la ministre a refusé à juste raison que leur soit confiée l'inspection pédagogique, peuvent se trouver ici en situation de conflit d'intérêts.
M. Pierre Méhaignerie, député, président. C'est avant tout une mesure de simplification ! Il faut la soutenir, car nous sommes trop souvent amenés à déplorer l'empilement des structures et la longueur des délais administratifs.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Je suis d'accord avec le président. Il s'agit d'éviter de perdre trois semaines pour un simple coup de tampon sur un dossier. Les Direccte ne s'estiment d'ailleurs pas privées ainsi d'une compétence centrale.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. Je partage l'avis du rapporteur pour l'Assemblée nationale.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement et adopte l'article 5 dans la rédaction du Sénat .
Article 5 bis
Extension, à
titre expérimental, de la mission des médiateurs de
l'apprentissage
La commission mixte paritaire adopte deux amendements de précision présentés par les deux rapporteurs, puis l'article 5 bis ainsi modifié .
Article 6 bis A
Validation des acquis
de l'expérience dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans
l'emploi
Mme Cécile Dumoulin, députée. Mon amendement vise à revenir au texte de l'Assemblée nationale. L'employeur doit pouvoir apporter son appui aux bénéficiaires de contrats aidés dans leur démarche de validation des acquis de l'expérience, afin que ceux-ci puissent disposer de meilleures chances de trouver ensuite un emploi. Il faut encourager cette démarche de validation des acquis de l'expérience tout au long du contrat.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. Les dispositions du code du travail satisfont déjà cette préoccupation.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Effectivement, la loi de 2009 a déjà ouvert cette possibilité, de telle sorte que l'amendement est partiellement redondant avec le code du travail.
Mme Cécile Dumoulin, députée. La loi de 2009 se limite au moment de la signature du contrat, alors que la démarche doit être encouragée tout au long de celui-ci.
M. Pierre Méhaignerie, député, président . L'intention de l'amendement est assurément bonne. Compte tenu des réserves, certes compréhensibles, qui s'expriment encore trop souvent à l'égard de l'apprentissage, il faudrait même que l'accès à l'enseignement supérieur puisse être ouvert. C'est au futur apprenti lui-même d'être tenté par cette voie, mais il est vrai qu'il est difficile de s'y engager lorsqu'on a par exemple vingt-sept ans et un enfant à charge. Les cours du soir et la formation par Internet sont notoirement insuffisants et il faudrait développer les activités du Conservatoire national des arts et métiers et renforcer la validation des acquis de l'expérience.
L'amendement est retiré .
La commission mixte paritaire maintient la suppression de l'article 6 bis A .
Article 6 bis B
Remise d'un rapport sur
le financement des formations en apprentissage dans le secteur
public
Mme Cécile Dumoulin, députée. Il s'agit également de revenir au texte adopté par l'Assemblée. Les administrations de l'État, les collectivités territoriales et les établissements publics doivent aussi apporter leur contribution au développement de l'apprentissage.
M. Jean-Claude Carle, sénateur. J'ai pour habitude de lutter avec détermination contre les demandes de rapport, mais celle-ci me paraît pleinement justifiée.
M. Jean-Patrick Gille, député. Je suis également favorable à cet amendement.
Sur l'avis favorable des rapporteurs, la commission mixte paritaire adopte l'amendement et l'article 6 bis B est rétabli dans la rédaction de l'Assemblée nationale .
Article 6 bis
Création de
périodes d'observation en entreprise à destination des
collégiens et lycéens pendant les vacances scolaires
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 bis dans la rédaction du Sénat .
Article 6 ter A
Insertion des
périodes d'observation dans la liste des exceptions à
l'interdiction d'employer des travailleurs de moins de seize ans
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 ter A dans la rédaction du Sénat .
Article 6 ter
Parcours de
découverte approfondie des métiers et des formations en classe de
quatrième et de troisième
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. L'amendement que je présente avec Gérard Cherpion vise à rétablir le texte de l'Assemblée nationale et à ne pas réserver d'emblée à certains élèves les éventuels stages en centre de formation d'apprentis.
La commission mixte paritaire adopte l'amendement, puis l'article 6 ter ainsi modifié.
Article 6 sexies
Possibilité
pour un jeune souhaitant se former en apprentissage
mais n'ayant pas
trouvé d'employeurs de suivre sa formation en CFA pendant un an au
maximum
M. Jean-Patrick Gille, député. Mon amendement vise à supprimer l'article 6 sexies . Celui-ci revient, en effet, à instituer l'apprentissage sans maître d'apprentissage. Deux expérimentations ont certes déjà été successivement introduites, d'abord lorsque la rupture intervient quelques mois avant l'examen de l'apprenti, puis à l'entrée, pendant les trois premiers mois dans l'apprentissage. Mais la durée d'un an est trop longue et le dispositif ne comporte pas d'engagement. Il revient également à dire que les régions doivent supporter le coût de l'ensemble de la rémunération et c'est pourquoi je présente un sous- amendement à l'amendement de nos rapporteurs, visant à l'autoriser pour peu qu'il soit explicitement placé sous la responsabilité directe du président du conseil régional.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Certaines régions recourent déjà à un tel dispositif, qui a l'avantage de faire entrer en formation des jeunes qui seraient restés sur le bord du chemin. Avec Mme Dini, je présente un amendement de rédaction globale de l'article 6 sexies , tendant à y apporter un certain nombre de précisions.
M. Jean-Patrick Gille, député. Je retire mon premier amendement . Certaines régions recourent déjà au dispositif mis en place par le présent article, mais il faut encadrer et clarifier ce recours en en confiant la responsabilité aux présidents des conseils régionaux.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Mentionnant les « capacités d'accueil », notre amendement indique que le dispositif doit s'inscrire dans le cadre des places disponibles, relevant du président du conseil régional : on est clairement dans le cadre des responsabilités de la région. Et la rédaction du sous-amendement laisse à penser que chaque jeune devra s'adresser individuellement au président du conseil régional.
M. Ronan Kerdraon, sénateur. Le sous-amendement complète opportunément l'amendement.
M. Alain Rousset, député. Comment un directeur des ressources humaines serait-il incité à recruter des apprentis, qu'ils aient ou non plus de seize ans, si l'on bouleverse sans cesse les règles ? Si l'on veut parvenir à quelque chose, il faut essayer de faire vivre l'apprentissage en concertation avec les régions. Or, en ce moment, les préfets sont chargés de négocier avec les présidents de conseils régionaux pour ouvrir un maximum de places, mais on ne se soucie pas du nombre d'apprentis. Pourtant, les régions, qui payent et contrôlent, s'attachent à moraliser l'apprentissage et à en améliorer la qualité. L'exemple du secteur de la restauration, où le taux d'échec s'élève à 40 %, montre bien que beaucoup de jeunes occupent en réalité de faux emplois. En outre, quand on interroge l'ensemble des professions, on voit bien qu'on est loin de pouvoir espérer doubler le nombre des apprentis. Trois régions - Aquitaine, puis Rhône-Alpes et Île-de-France - ont déjà mis en place un dispositif analogue à celui proposé pour l'article 6 sexies . Pourquoi l'inscrire dans la loi ? En tout cas, il convient de faire référence explicitement au principal financeur de l'apprentissage.
La commission mixte paritaire rejette le sous-amendement, adopte l'amendement présenté par les rapporteurs, puis l'article 6 sexies ainsi rédigé.
Article 6 septies A
Ouverture du
contrat de professionnalisation aux particuliers employeurs
M. Jean-Patrick Gille, député . Nous refusons l'extension du contrat de professionnalisation aux particuliers employeurs. Les conditions ne sont pas remplies pour que le tutorat puisse se mettre en place. Nous sommes ouverts à la réflexion sur le développement de l'alternance, mais pas sous cette forme, qui est le comble de la dérive.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat . Comme j'ai eu l'occasion de m'en expliquer devant le Sénat, cette disposition répond à une demande dans le secteur des services à domicile. Aujourd'hui, les professionnels de ce secteur sont formés et pourraient donc parfaitement devenir tuteurs, dans le cadre d'un accord de branche. Le tuteur serait ainsi soit le particulier employeur, soit quelqu'un qu'il emploie et qui l'aide déjà.
M. Jean-Patrick Gille, député . Si nous pouvons être d'accord sur le recours au contrat de professionnalisation par des associations et sur la nécessité de développer l'apprentissage dans le secteur de l'aide à domicile, reconnaissez que le particulier employeur seul n'est pas dans une situation qui lui permet de mener à bien sa mission de tuteur.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat . Je connais des exemples concrets de personnes âgées dépendantes gardées par plusieurs intervenants formés qui pourraient parfaitement prendre quelqu'un en stage auprès d'eux. La demande existe. Qui plus est, dans les entreprises, il est fréquent que ce ne soit pas l'employeur qui assure lui-même le tutorat mais un des salariés expérimentés.
M. Pierre Méhaignerie, député, président . Autant on voit bien ce que pourrait donner un tel dispositif dans le cadre d'associations d'aide à domicile, où il se trouvera toujours une personne qualifiée pour le tutorat, autant il est vrai que son application au particulier employeur pose question. Un encadrement pourrait être nécessaire. C'est d'ailleurs ce que propose M. Gérard Cherpion.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Effectivement, l'inscription de ces dispositions dans un cadre expérimental, pour une durée de trois ans, me paraît nécessaire. C'est le sens de l'amendement que je propose avec Mme Dini.
Mme Cécile Dumoulin, députée . La mise en oeuvre de ce dispositif signifie-t-elle que le particulier employeur est considéré comme maître d'apprentissage et qu'il faudra financer sa formation ?
M. Pierre Méhaignerie, député, président . Il conviendra d'être très vigilant sur les risques de dérive possibles, même s'il est vrai que la demande existe et que ce dispositif offrira de nouveaux débouchés.
Après avoir rejeté l'amendement de suppression de M. Jean-Patrick Gille, la commission mixte paritaire adopte l'amendement proposé par les deux rapporteurs, puis l'article 6 septies A ainsi rédigé.
Article 6 septies B
Extension de la
préparation opérationnelle à l'emploi
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Le Sénat a souhaité étendre la préparation opérationnelle à l'emploi à l'amont d'un contrat d'apprentissage. Par parallélisme des formes, il conviendrait de l'étendre à l'amont d'un contrat de professionnalisation à durée déterminée d'au moins un an.
M. Jean-Patrick Gille, député . Nous n'avons pas disposé du temps nécessaire pour expertiser les dispositions relatives à la préparation opérationnelle à l'emploi, mais il eût été intéressant de recueillir l'avis des partenaires sociaux.
La commission mixte paritaire adopte l'amendement présenté par les deux rapporteurs, ainsi qu'un amendement rédactionnel et un amendement de précision des mêmes auteurs.
Elle adopte l'article 6 septies B ainsi modifié.
Article
6
septies
C
Réforme des périodes de
professionnalisation
M. Jean Patrick Gille, député . En adoptant cet article, le Sénat a modifié les dispositions actuellement applicables relatives à la durée minimale de formation dans le cadre d'un contrat de professionnalisation, qui est selon un décret de 2010 de quatre-vingt heures. C'est pourquoi nous proposons de réintroduire cette durée.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Cette proposition me semble relever d'une erreur d'interprétation sur le sens des dispositions prévues au présent article, car la durée minimale de quatre-vingt heures qui est mentionnée ne concerne actuellement que les périodes de professionnalisation des bénéficiaires d'un contrat unique d'insertion, alors que le présent article fixe des durées minimales pour toutes les périodes de professionnalisation.
Après avoir rejeté l'amendement de M. Jean-Patrick Gille, la commission mixte paritaire adopte deux amendements de précision des deux rapporteurs, puis l'article 6 septies C ainsi modifié.
Article 6 septies
Faculté de
réorienter en cours d'exécution un contrat d'apprentissage conclu
en vue de l'obtention d'un baccalauréat professionnel
La commission mixte paritaire adopte un amendement rédactionnel des deux rapporteurs, puis l'article 6 septies ainsi modifié.
TITRE IER BIS - ENCADREMENT DES STAGES
Article 6 nonies
Établissement
d'un cadre législatif visant à limiter les abus auxquels peuvent
donner lieu les stages en entreprise et à consacrer les droits des
stagiaires
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Le Sénat a atténué la portée de la limitation à six mois par an de la durée des stages voulue par les partenaires sociaux dans leur accord national interprofessionnel du 7 juin dernier en prévoyant une dérogation générale pour les stages de longue durée intégrés dans le cursus des formations de l'enseignement supérieur. Ces dispositions risquent d'occasionner des dérives et d'être utilisées pour imposer des stages plus longs. Je propose donc, avec Mme Dini, d'encadrer cette dérogation en prévoyant qu'elle ne s'applique qu'aux stages obligatoires dans le cadre de cursus pluriannuels. On limitera ainsi cette possibilité de déroger à la règle générale.
Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente . La notion de stage obligatoire dans le cursus figurait déjà dans la loi relative à la formation professionnelle et a posé de très nombreuses difficultés en raison des interprétations diverses dont elle a fait l'objet selon les universités. Certains stages figurent, en effet, sur les plaquettes de présentation des universités, d'autres non mais n'en sont pas moins exigés par certains professeurs. Certains étudiants ont ainsi perdu une année entière. Je suis donc défavorable à titre personnel à cet amendement.
M. Jean-Patrick Gille, député . L'amendement de Gérard Cherpion est habile, mais il ne supprime pas la disposition votée au Sénat, il ne fait que la déplacer. Or, dans l'esprit de accord national interprofessionnel du 7 juin, il ne doit pas y avoir de stage de plus de six mois. D'une interdiction, on va passer à une dérogation, puis on finira, par décret, par revenir complètement sur ces dispositions. Ce que nous proposons, c'est la suppression pure et simple de la possibilité de dérogation introduite par le Sénat. Il faut avoir le courage d'affirmer que les stages de plus de six mois sont interdits.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . La rédaction que je propose est différente de celle du Sénat et j'ai consulté les partenaires sociaux : ils n'y sont pas opposés.
Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente . Je reste défavorable à tout renvoi à la notion de stage obligatoire. J'ai travaillé de longs mois sur cette question, notamment avec le collectif « Touche pas à mon stage ».
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Peut-être pourrions-nous trouver une autre formulation et parler de « stages inscrits dans le cadre d'un cursus pluriannuel » ?
Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente . Cela ne change rien au fond du problème. Je n'y suis pas favorable.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement présenté par les deux rapporteurs.
M. Jean-Patrick Gille, député . Nous tenons à l'interdiction pure et simple des stages de plus de six mois et nous proposons de supprimer l'alinéa ajouté par le Sénat.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Avis défavorable.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement de M. Jean-Patrick Gille, puis elle adopte un amendement rédactionnel des deux rapporteurs.
Elle adopte l'article 6 nonies ainsi modifié.
Article 6 decies
Condition de prise en
compte de la durée de stage dans la période d'essai en cas
d'embauche ultérieure
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 decies dans la rédaction du Sénat.
TITRE II - DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI DANS LES GROUPEMENTS D'EMPLOYEURS
Article 7 AA
Entrée en vigueur
différée des dispositions du présent titre
La commission mixte paritaire adopte un amendement rédactionnel présenté les deux rapporteurs, puis l'article 7 AA ainsi modifié.
Article 7 A
Garantie
d'égalité de traitement au bénéfice des
salariés des groupements d'employeurs
M. Jean-Charles Taugourdeau, député. Mon amendement vise à mentionner explicitement l'intéressement, la participation et l'épargne salariale dans cet article, faute de quoi l'égalité de traitement en matière de rémunération serait vidée de sens. Les salariés des groupements d'employeurs ont vocation à bénéficier de l'intéressement, de la participation et de l'épargne salariale.
Suivant l'avis favorable des rapporteurs, la commission mixte paritaire adopte l'amendement, puis l'article 7 A ainsi modifié.
Article 10
Assouplissement des
règles encadrant l'utilisation par une collectivité territoriale
des services d'un groupement d'employeurs
M. Jean-René Marsac, député . En supprimant cet article, cet amendement propose de maintenir dans sa rédaction actuelle l'article L. 1253-20 du code du travail, qui définit parfaitement l'obligation d'exercice exclusif dans le cadre d'un service public industriel et commercial, d'environnement ou d'entretien des espaces verts ou des espaces publics pour les tâches confiées aux salariés d'un groupement mis à disposition d'une collectivité territoriale.
M. Jean-Charles Taugourdeau, député . Les groupements d'employeurs ont besoin de tous les espaces où il y a du travail disponible. Les entités, comme un bureau de tourisme, peuvent permettre d'exercer un emploi pendant cinq mois dans une collectivité, suivis de six mois dans une entreprise. Ce qui est intéressant, c'est que la personne puisse accéder au final à un crédit à la consommation.
Suivant l'avis défavorable des rapporteurs, la commission mixte paritaire rejette l'amendement.
M. Jean-Charles Taugourdeau, député . Mon amendement propose que le respect de la règle, fixée par le Sénat, du mi-temps soit apprécié sur l'année.
M. Jean-René Marsac, député . En conséquence, on pourrait faire se succéder deux salariés sur un même poste de travail dans une même collectivité...
M. Jean-Charles Taugourdeau, député. C'est une certaine lecture du texte. Mais, si on a besoin d'un salarié pendant douze mois, on en embauche un pour toute la période, car un salarié de groupement coûte plus cher.
M. Jean-Patrick Gille, député . Je rappelle qu'on parle ici de groupements d'employeurs utilisés par les collectivités locales de manière ponctuelle, comme par exemple dans les espaces verts. La logique est de stabiliser les salariés dans l'emploi. L'amendement proposé entraîne un changement du statut des groupements, qui aboutit à un contournement complet des règles de la fonction publique.
M. Jean-Charles Taugourdeau, député . Ce n'est pas la collectivité territoriale qui a besoin des groupements, mais les groupements d'employeurs qui ont besoin de solliciter tous les endroits où le travail est disponible pour aboutir à la création d'un emploi à temps plein. 803 heures dans une collectivité territoriale et deux fois 400 heures dans des entreprises privées peuvent créer un emploi salarié à temps plein.
Mme Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente . Certains salariés ont peut-être envie de travailler parfois dans le privé, parfois dans le public, et pas exclusivement pour une collectivité !
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . En premier lieu, je ne comprends pas très bien cette mise en cause, car la rédaction du Sénat peut aussi conduire à l'emploi de deux personnes sur le même poste. En second lieu, une collectivité territoriale peut recourir à un contrat à durée déterminée ou un intérimaire pour une durée allant jusqu'à dix-huit mois. Pourquoi recourrait-elle pour la même durée à trois salariés de groupement d'employeurs successifs ?
M. Jean-René Marsac, député. À l'origine, les groupements visaient à compléter un temps partiel hebdomadaire, alors qu'ici, on réorganise les choses en annualisant le mi-temps : c'est une logique de saisonnalité.
M. Ronan Kerdraon, sénateur. On dénature ici la notion de groupement d'employeur. On est en pleine dérégulation. Je rappelle pourtant que le titre de la proposition de loi fait référence à la « sécurisation des parcours professionnels ».
Mme Patricia Schillinger, sénatrice. Je partage cette analyse. Connaissant ce sujet en tant que maire mais également à titre familial, je vous assure qu'aucune banque n'accordera un crédit aux salariés d'un groupement d'employeurs. On est de nouveau en train de mettre en place des emplois précaires.
M. Jean-Charles Taugourdeau, député. Un contrat à durée indéterminée dans un groupement n'est pas un emploi précaire !
Suivant l'avis favorable des rapporteurs, la commission mixte paritaire adopte l'amendement, puis l'article 10 ainsi modifié.
Article 10 ter
Modification du
régime juridique du prêt de main d'oeuvre
M. Jean-Patrick Gille, député . Nous demandons de supprimer le paragraphe I de cet article, qui remet en cause la définition du prêt illicite de main-d'oeuvre et la jurisprudence de la Cour de cassation. On ne prend que le point de vue du prêteur en oubliant l'utilisateur. Il s'agit non d'un contrat de travail mais d'une marchandisation du travail, donc d'un contournement total du droit du travail.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Ce paragraphe retranscrit l'accord national interprofessionnel auquel sont parvenus les partenaires sociaux en juillet 2009, qui encadre parfaitement le prêt de main-d'oeuvre. L'alinéa 7 de l'article, qui oblige à la conclusion d'un avenant au contrat de travail, est très clair à ce sujet et j'émets donc un avis défavorable à l'amendement.
M. Jean-Charles Taugourdeau, député . Le prêt de salariés peut éviter des licenciements en période de difficultés économiques.
M. Pierre Méhaignerie, député, président . Par expérience, je peux dire que les salariés sont aujourd'hui très favorables au prêt de main-d'oeuvre et que les organisations salariales s'y sont même progressivement ralliées car celui-ci évite des licenciements, en particulier dans le secteur des équipementiers.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement, puis adopte un amendement de précision présenté par les deux rapporteurs.
M. Jean-Patrick Gille, député . Mon second amendement est de repli et reprend l'esprit de l'arrêt du 20 mars 2007 de la chambre criminelle de la Cour de cassation, afin de préciser la notion du caractère « non lucratif » du prêt de main d'oeuvre, qui peut s'appliquer aussi bien vis-à-vis de l'entreprise prêteuse que de l'entreprise emprunteuse. Le président Méhaignerie a parfaitement raison, mais le vrai sujet est de savoir si l'entreprise emprunteuse n'en profite pas pour détourner la convention collective. Le but est d'encadrer mieux le prêt de main-d'oeuvre.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . J'émets un avis défavorable sur cet amendement. Je ne vois pas, en effet, l'intérêt qu'auraient les entreprises prêteuses à mettre à disposition des salariés à un prix inférieur à ce qu'ils leur coûtent. L'adoption de votre amendement obligerait à un calcul au centime prêt du coût de revient des salariés prêtés, avec des risques de contentieux.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement, puis elle adopte deux amendements rédactionnels présentés par les deux rapporteurs.
Elle adopte l'article 10 ter ainsi modifié.
TITRE III - CONTRAT DE SÉCURISATION PROFESSIONNELLE
Article 11
Création et
encadrement juridique du contrat de sécurisation
professionnelle
M. Jean-Patrick Gille, député . Cet amendement vise à maintenir une contribution égale à trois mois du salaire brut moyen, en cas de non-respect par l'employeur de l'obligation de proposer le bénéfice d'un contrat de sécurisation professionnelle à chaque salarié dont il envisage de prononcer le licenciement pour motif économique, comme l'a voté l'Assemblée nationale. La modulation à deux mois de cette contribution introduite par amendement du Gouvernement au Sénat reprend une exigence du Medef déjà incluse dans le cadre de la convention de reclassement professionnel. Nous évitons de complexifier le dispositif et répondons ainsi aux souhaits du président Méhaignerie.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale. J'émets un avis défavorable sur cet amendement, car la modulation à deux ou trois mois de cette contribution, selon les cas, correspond à la transcription exacte de l'accord national interprofessionnel.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite sept amendements rédactionnels et de précision présentés par les deux rapporteurs.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Notre dernier amendement commun vise à prévoir que l'indemnité de préavis mutualisée pour le financement du contrat de sécurisation professionnelle doit comprendre l'ensemble des charges patronales.
La commission mixte paritaire adopte l'amendement, puis l'article 11 ainsi modifié.
Article 12
Coordination et mesures
transitoires
La commission mixte paritaire adopte deux amendements de coordination et un amendement rédactionnel présentés par les deux rapporteurs.
M. Jean-Patrick Gille, député. Mon amendement vise à rappeler qu'en cas de non respect de la proposition du contrat de transition professionnelle, une contribution devra être versée par l'employeur à l'Unédic.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Avis défavorable, car nous avons d'ores et déjà prévu la création d'une pénalité à l'article 11 de la proposition de loi.
La commission mixte paritaire rejette l'amendement et adopte l'article 12 ainsi modifié.
Article 12 bis
Droit de créer
une association pour les mineurs de seize ans révolus
La commission mixte paritaire adopte cet article dans la rédaction du Sénat.
Article 12 ter
Consultation du Conseil
national de l'emploi par voie écrite ou électronique
La commission mixte paritaire adopte un amendement rédactionnel présenté par les deux rapporteurs.
M. Jean-Patrick Gille, député. Mon amendement prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'allocation équivalent retraite. En effet, le Gouvernement a supprimé toute entrée dans ce dispositif depuis le 1 er janvier 2011, malgré l'engagement du Premier ministre, lors du débat relatif aux retraites, de résoudre le problème des quelques 30 000 personnes potentiellement bénéficiaires de cette allocation. Nous voulons donc nous assurer qu'il tiendra ses promesses.
M. Gérard Cherpion, rapporteur pour l'Assemblée nationale . Je partage votre préoccupation, mais il s'agit là d'un joli « cavalier » qui a peu à voir avec l'objet de cette proposition de loi et qu'il n'est donc pas possible d'adopter en commission mixte paritaire. De plus, M. Xavier Bertrand, que nous avons auditionné ce matin sur le rapport d'application de la loi relative à la réforme des retraites, nous a assuré qu'il travaillait sur le sujet.
M. Ronan Kerdraon, sénateur. Je souscris au propos de notre collègue Jean-Patrick Gille. C'est un sujet important. Pourquoi ne pas introduire cette demande de rapport dans le texte ?
M. Jean-Patrick Gille, député. J'ajoute que les partenaires sociaux nous ont alerté sur la gravité de ce problème.
M. Pierre Méhaignerie, député, président. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est claire. Nous ne pouvons mettre aux voix cet amendement.
La commission mixte paritaire adopte l'article 12 ter ainsi modifié.
Article 13 bis
Assouplissement des
modalités d'augmentation temporaire des horaires contractuels des
salariés à temps partiel
Mme Marie-Jo Zimmerman, députée . Je souhaite remercier le Sénat d'avoir bien voulu entendre mes arguments contre l'article 13 bis et d'en avoir tiré les conséquences en le supprimant.
La suppression de cet article, qui renforçait la précarité des femmes travaillant à temps partiel, est le fruit d'un travail d'équipe. Je souhaite également remercier le Gouvernement de ne pas avoir souhaité revenir sur cette suppression.
M. Pierre Méhaignerie, député, président . Je souhaite simplement que notre décision ne se retourne pas contre les employeurs qui souhaiteraient augmenter temporairement la durée du travail d'une personne en contrat à temps partiel. Nous ne devons pas tomber dans la caricature des « méchants » employeurs.
Mme Marie-Jo Zimmermann, députée . Je vous rejoins tout à fait. Mais tel qu'il était écrit, l'article 13 bis ne résolvait pas le problème et aggravait la précarité des employés à temps partiel.
M. Pierre Méhaignerie, député, président . Sur ce sujet, je pense que nous devons laisser les partenaires sociaux négocier.
Mme Muguette Dini, rapporteure pour le Sénat. J'étais à titre personnel opposée à l'adoption de cet article. Je vous rappelle d'ailleurs que le travail à temps partiel concerne à 80 % des femmes.
La commission mixte paritaire maintient la suppression de cet article.
*
La commission mixte paritaire adopte , ainsi rédigées, les dispositions restant en discussion de la proposition de loi pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels.