II. LE CONTENU DES PROJETS DE LOI : DEUX COLLECTIVITÉS UNIQUES DIFFÉRENTES
La collectivité unique se situe dans le cadre fixé par l'article 73 de la Constitution, c'est-à-dire l'identité législative avec la France métropolitaine, l'application du droit commun de la République, avec des adaptations rendues nécessaires par les caractéristiques et contraintes particulières, auxquelles peuvent s'ajouter des habilitations soit pour adapter directement soit pour fixer les règles applicables dans un nombre limité de matières, à l'exception de certaines relevant de la souveraineté nationale.
Ainsi, si certains élus peuvent souhaiter explorer le plus loin possible les confins de l'article 73, c'est toujours au sein de l'article 73. L'exploitation de toutes les potentialités de l'article 73, adaptations et habilitations, ne saurait conduire de facto à exercer les compétences et à bénéficier de l'autonomie d'une collectivité relevant de l'article 74, régie par le principe de spécialité législative, où l'État n'exercerait plus que des compétences limitées.
De même, le législateur ne saurait s'éloigner du droit commun que pour s'adapter aux caractéristiques et contraintes particulières des collectivités concernées. Les dispositions institutionnelles relatives aux collectivités de l'article 73 de la Constitution relèvent de la compétence du législateur ordinaire, à la différence du statut d'une collectivité d'outre-mer de l'article 74 de la Constitution, qui relève de la compétence du législateur organique.
A. UN CHOIX DE CODIFICATION PERFECTIBLE
Alors que la loi relative au Département de Mayotte avait inséré dans chaque partie du code général des collectivités territoriales des dispositions de nature à la rendre applicable à Mayotte, en particulier dans la troisième partie sur le département où prirent place, pour des raisons symboliques, les dispositions institutionnelles relatives au Département de Mayotte, le projet de loi relatif aux collectivités de Guyane et de Martinique fait le choix de créer dans le code une septième partie relative aux « autres collectivités régies par l'article 73 de la Constitution ».
Votre commission déplore, sans voir d'autre solution simple à mettre en oeuvre, le fait que cette septième partie prenne place après la sixième partie sur les collectivités d'outre-mer de l'article 74 16 ( * ) . Ce positionnement, s'il n'a aucune portée juridique, s'avère gênant d'un point de vue symbolique car les nouvelles collectivités uniques de Guyane et de Martinique relèvent bien de l'article 73, ainsi que l'ont souhaité les électeurs guyanais et martiniquais lors des consultations des 10 et 24 janvier 2010.
Sans doute faudra-t-il à terme, à l'occasion d'une révision globale du code général des collectivités territoriales et dans un souci de cohérence de ce code, avancer cette nouvelle septième partie avant l'actuelle sixième partie et y intégrer Mayotte.
En outre, le projet de loi se limite à rédiger une partie des dispositions institutionnelles propres aux deux nouvelles collectivités, renvoyant pour le reste aux dispositions applicables aux régions, ainsi qu'à celles applicables aux départements et aux régions en matière de compétences. Alors que l'on institue de nouvelles collectivités à statut particulier, on ne garantit pas de cette manière la lisibilité des dispositions qui s'appliqueront à elles. Ce choix de codification crée un phénomène de dispersion et de manque de cohérence, alors même que le principe de la codification est de renforcer l'intelligibilité du droit et de faciliter l'accès au droit.
* 16 Au demeurant, depuis le passage de Mayotte vers l'article 73 de la Constitution, ne figurent dans cette partie du code général des collectivités territoriales que les dispositions organiques constituant les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Les statuts de la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna n'y figurent pas.