b) Les évolutions apportées par le Sénat
Tout en approuvant pleinement cette première reconnaissance législative de la pénibilité, qui permettra à ceux qui ont le plus souffert du fait de leur travail de prendre à l'âge de soixante ans une retraite à taux plein, le Sénat a estimé devoir compléter le dispositif proposé sur deux points : la définition de la pénibilité et le financement de l'expérimentation.
Il n'existe en droit aucune définition de la pénibilité, qui ne peut donc être appréhendée que par ses effets, c'est-à-dire les lésions causées aux corps des travailleurs. Cet état de fait est insatisfaisant en ce qu'il limite la prise en compte de la pénibilité aux cas de dommages physiques sans prendre en compte, par exemple, les effets des risques psychosociaux. Par ailleurs, seule la pénibilité à effet immédiat a été prise en compte à ce stade, alors que les conséquences de la vie professionnelle, peuvent se déclarer plus tard dans la vie, et même après l'âge de la retraite.
Le Gouvernement a justifié sa volonté de ne pas définir la pénibilité et de ne pas en prendre en compte les éventuels effets différés par l'insuffisance des connaissances scientifiques en la matière. Le Sénat a dès lors chargé un organisme spécifique, l'observatoire de la pénibilité, placé auprès du Coct (comité d'orientation des conditions de travail), de réunir les éléments permettant d'en dégager une définition juridique. Par ailleurs, le Sénat a souhaité disposer, avant le 1 er janvier 2014, des éléments permettant la prise en compte de la pénibilité différée. Ces éléments devraient permettre de compléter les avancées déjà contenues dans le projet de loi.
S'agissant du financement par un fonds dédié de l'expérimentation relative aux accords de prévention de la pénibilité dans les entreprises, le Sénat a également souhaité éviter que l'intégralité du financement ne repose sur la branche AT-MP. A cette fin, la pénalité de 1 % de la masse salariale prévue pour sanctionner les entreprises qui n'auraient pas engagé de négociations sur la prévention de la pénibilité a été affectée à la branche AT-MP plutôt qu'à la Cnam. Cette mesure est cependant appelée à rester symbolique et la pénalité prévue est destinée à être incitative : son niveau de contrainte est en effet faible (le simple engagement de négociation suffira à s'en exonérer) et son recouvrement serait difficile, du fait des recours contentieux qui ne manqueraient pas de lui être opposés. De manière plus pragmatique et afin d'éviter que ne se répète le précédent du Fcaata, le Sénat a souhaité que la dotation du fonds spécifique se fasse a égales proportions entre l'Etat et la branche.