B. LA RECHERCHE D'UN CADRE JURIDIQUE POUR LA COOPÉRATION FRANCO-NÉERLANDAISE SUR L'ÎLE DE SAINT-MARTIN
La France comme les Pays-Bas sont directement intéressés à la coopération douanière dans la région des Caraïbes : la France à travers les départements d'outre-mer de la Martinique et de la Guadeloupe et les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ; les Pays-Bas à travers les diverses îles des Antilles néerlandaises.
Cette coopération est encore plus nécessaire sur l' île de Saint-Martin , pour partie sous souveraineté française et pour partie sous souveraineté néerlandaise.
L'île de Saint-Martin Saint-Martin est une île du nord-est des Antilles, située à 250 kilomètres au nord de l'archipel de la Guadeloupe et 240 kilomètres à l'est de Porto-Rico. Le traité de Concordia, signé le 23 mars 1648 entre la France et les Pays-Bas, a entériné la partition de l'île. D'une superficie de 90 km², Saint-Martin est ainsi le plus petit territoire au monde à être partagé entre deux Etats. La partie française (56 km²) recouvre le nord de l'île et compte 36 000 habitants. Saint-Martin constituait une commune du département de la Guadeloupe, avant de devenir une collectivité d'outre-mer de la République à la suite de la réforme institutionnelle de 2007. La partie néerlandaise, Sint-Marteen (34 km²), est constituée du sud de l'île et compte 33 000 habitants. Elle faisait partie de l'Etat autonome des Antilles néerlandaises jusqu'à la dissolution de celui-ci, le 1 er juillet 2007. Sint-Marteen forme désormais un territoire autonome au sein du Royaume des Pays-Bas. L'aboutissement de ce changement de statut sera effectif à compter du 10 octobre 2010, à l'issue du transfert de l'ensemble des compétences au territoire, à l'exception des affaires étrangères et de la défense qui continueront de relever du Royaume. La partie néerlandaise possède le statut de zone franche. L'économie de l'île repose en grande partie sur le tourisme. C'est dans la partie néerlandaise que se situent l'aéroport international Princess Juliana, ainsi que le port de Philipsburg, qui a fortement développé son activité de croisières depuis sa mise en service en 2000. L'aérodrome régional de l'Espérance et le port de Marigot sont situés dans la partie française. |
La France et les Pays-Bas sont liés par un instrument européen de coopération douanière : la convention du 18 décembre 1997 relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre les administrations douanières, dite « convention Naples II ». Cette convention, qui a pris la suite de la convention « Naples I » de 1967, prévoit des échanges de données, soit sur demande, soit de manière spontanée. Elle a mis en place un système d'information des douanes (SID) permettant la diffusion rapide des informations et des renseignements. La convention « Naples II » fixe également le cadre des coopérations impliquant des actions transfrontalières en vue de la prévention, de la recherche et de la répression de certaines infractions tant à la législation nationale des Etats membres qu'aux réglementations douanières communautaires. Elle détaille notamment les modalités des cinq formes de coopération transfrontalière: la poursuite au-delà des frontières, l'observation transfrontalière, la livraison surveillée, les enquêtes discrètes et les équipes communes d'enquête spéciale.
Toutefois, la convention « Naples II » ne peut régir la coopération franco-néerlandaise sur l'île de Saint-Martin et dans la région des Caraïbes, en raison de la différence de statut communautaire entre les territoires sous souveraineté française et les territoires sous souveraineté néerlandaise . Les premiers, en tant que « régions ultrapériphériques », appartiennent au territoire douanier de l'Union européenne, contrairement aux seconds, qui relèvent des pays et territoires d'outre-mer (PTOM), dans lesquels le droit dérivé communautaire ne s'applique pas directement.
Les changements institutionnels récemment intervenus tant pour la partie française que pour la partie néerlandaise de l'île de Saint-Martin, sont sans incidence sur cette différence de statut au regard du droit communautaire.
En effet, à la suite de l'accession de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin , jusqu'alors rattachées au département de la Guadeloupe, au rang de collectivités d'outre-mer depuis la loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, le traité de Lisbonne les a expressément mentionnées (article 349) dans la liste des régions ultrapériphériques.
S'agissant des territoires néerlandais , ils connaissent eux-aussi une profonde évolution institutionnelle. En 1986, l'île d'Aruba a été détachée de la fédération des Antilles néerlandaises pour constituer un Etat autonome au sein du Royaume des Pays-Bas. Celui-ci était alors constitué de trois entités : les Pays-Bas eux-mêmes, Aruba et l'Etat autonome des Antilles néerlandaises, composé de cinq îles principales : Bonaire, Curaçao, Saba, Saint-Eustache et Sint-Marteen. Aruba et les Antilles néerlandaises sont des partenaires à part entière du Royaume et jouissent d'une totale autonomie en matière de politique intérieure, les affaires étrangères et la défense continuant de relever du Royaume.
Une nouvelle réforme institutionnelle mise en oeuvre à compter de 2007 doit aboutir, en octobre 2010, à la dissolution des Antilles néerlandaises en tant qu'Etat autonome. A l'issue de cette réforme, le Royaume des Pays-Bas se composera de quatre entités, ou « pays », autonomes : les Pays-Bas, Aruba, Curaçao et Sint-Marteen . Les îles de Bonaire, Saba et Saint-Eustache seront rattachées aux Pays-Bas en tant que territoires néerlandais des Caraïbes, sous un statut qui pourrait être comparé à celui de nos départements d'outre-mer.
Au terme du nouveau statut, Sint-Marteen continuera de constituer un « pays ou territoire d'outre-mer » au regard du droit communautaire.
Faute d'applicabilité de la convention « Naples II », la coopération entre services français et néerlandais sur l'île de Saint-Martin se limite à des interrogations ponctuelles sur des objectifs opérationnels, sous forme de demandes de transmission de fichiers ou de notoriété.
Pour lever cette difficulté, la France et les Pays-Bas ont signé à Philipsburg le 11 janvier 2002 la convention d'assistance mutuelle et de coopération dont la ratification, retardée pour des raisons d'ordre juridique, doit être autorisée par le présent projet de loi.