ARTICLE 6
(Art.
L. 613-20-2 et L. 613-20-4 du code monétaire et
financier)
Transposition du dispositif européen créant des
collèges de superviseurs
Commentaire : le présent article a pour objet de créer les collèges de superviseurs rassemblant les régulateurs du secteur bancaire amenés à contrôler un même établissement et à se prononcer sur le niveau adéquat de ses fonds propres.
I. LE DROIT EXISTANT
L'article L. 613-20-2 du code monétaire et financier (CMF) prévoit que, afin de faciliter l'exercice du contrôle des groupes bancaires sur une base consolidée 146 ( * ) , l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) peut conclure avec les autorités compétentes des Etats membres de l'Union européenne (UE) ou de l'Espace économique européen (EEE) des accords « définissant les modalités spécifiques de prise de décision et de coopération, qui peuvent comprendre l'exercice » par les autorités homologues de certaines tâches relevant de [l'ACP] et réciproquement . Il s'agit de la transposition en droit français de l'article 131 de la directive 2006/48/CE du 14 juin 2006 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice.
De même, le 2 de l'article 129 de la même directive est transposé par l'article L. 613-20-4 du CMF qui régit les conditions dans lesquelles l'ACP, en tant que superviseur sur une base consolidée, se concerte avec les autorités homologues d'autres pays, lorsqu'un établissement lui demande l'autorisation d'utiliser une approche interne d'évaluation des risques, pour aboutir à une décision commune. La demande doit être faite pour le compte de plusieurs établissements de crédit ou entreprises d'investissement appartenant à un même groupe et établis dans au moins deux Etats membres de l'UE ou de l'EEE.
Lorsque l'ACP est consultée, pour la même raison, par un superviseur sur une base consolidée d'un autre pays, elle coopère en vue d'obtenir un décision commune. Si toutefois un accord ne peut être trouvé, la décision de l'autorité étrangère est applicable en France dès sa communication à l'ACP.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A. UNE CONCERTATION ENTRE AUTORITÉS EUROPÉENNES SUR LE NIVEAU DE FONDS PROPRES REQUIS DANS UN GROUPE BANCAIRE
Le présent article s'inscrit dans la continuité de l'article 5 sur le renforcement de la coopération européenne en matière de régulation du secteur bancaire. Il transpose également les modifications apportées par la directive 2009/111/CE, dite « CRD 2 », à la directive 2006/48/CE.
Le 3 de l'article 129 prévoit désormais que le « superviseur sur une base consolidée et les autorités compétentes [...] chargées de la surveillance des filiales d'un établissement de crédit mère dans l'Union [européenne] [...] font tout ce qui est en leur pouvoir pour parvenir à une décision commune [...] afin de déterminer le caractère adéquat du niveau consolidé des fonds propres détenus par le groupe au regard de sa situation financière et de son profil de risque ». La décision doit particulièrement prendre en compte la situation de chacune des filiales. Elle est mise à jour tous les ans. L'article fixe également la procédure en cas de désaccord entre les autorités de supervision. En particulier, il est possible de recourir à la médiation du Comité européen des contrôleurs bancaires (CECB) 147 ( * ) .
Ces dispositions doivent permettre aux régulateurs de mieux appréhender la situation des conglomérats financiers, particulièrement lorsqu'ils ont une structure transfrontière.
Le texte du 3 de l'article 129 de la directive 2006/48/CE 3. Le superviseur sur une base consolidée et les autorités compétentes, dans un État membre, chargées de la surveillance des filiales d'un établissement de crédit mère dans l'Union ou d'une compagnie financière holding mère dans l'Union font tout ce qui est en leur pouvoir pour parvenir à une décision commune sur l'application des articles 123 et 124 afin de déterminer le caractère adéquat du niveau consolidé des fonds propres détenus par le groupe au regard de sa situation financière et de son profil de risque et le niveau requis des fonds propres en vue de l'application de l'article 136, paragraphe 2, à chaque entité au sein du groupe bancaire et sur une base consolidée. La décision commune est dégagée dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle le superviseur sur une base consolidée remet aux autres autorités compétentes concernées un rapport contenant l'évaluation du risque du groupe conformément aux articles 123 et 124. En outre, la décision commune prend dûment en considération l'évaluation du risque des filiales, réalisée par les autorités compétentes concernées conformément aux articles 123 et 124. La décision commune figure dans un document contenant la décision, dûment motivée, qui est communiquée par le superviseur sur une base consolidée à l'établissement de crédit mère dans l'Union. En cas de désaccord, le superviseur sur une base consolidée consulte le comité européen des contrôleurs bancaires à la demande de toute autre autorité compétente. Le superviseur sur une base consolidée peut consulter le comité européen des contrôleurs bancaires de sa propre initiative. En l'absence d'une telle décision commune des autorités compétentes dans un délai de quatre mois, une décision sur l'application des articles 123 et 124 et de l'article 136, paragraphe 2, est prise, sur une base consolidée, par le superviseur sur une base consolidée après un examen approprié de l'évaluation du risque des filiales réalisée par les autorités compétentes concernées. La décision sur l'application des articles 123 et 124 et de l'article 136, paragraphe 2, est prise par les autorités compétentes respectives chargées de la surveillance des filiales d'un établissement de crédit mère dans l'Union ou d'une compagnie financière holding mère dans l'Union, sur une base individuelle ou sous-consolidée, après un examen approprié des avis et des réserves exprimés par le superviseur sur une base consolidée. Les décisions figurent dans un document contenant les décisions dûment motivées et elles tiennent compte de l'évaluation du risque et des avis et réserves des autres autorités compétentes, communiquées pendant cette période de quatre mois. Le superviseur sur une base consolidée communique le document à toutes les autorités compétentes concernées et à l'établissement de crédit mère dans l'Union. Toutes les autorités compétentes tiennent compte de l'avis du comité européen des contrôleurs bancaires lorsque celui-ci a été consulté et elles expliquent, le cas échéant, les raisons pour lesquelles elles s'en écartent sensiblement. La décision commune visée au premier alinéa et les décisions prises par les autorités compétentes en l'absence d'une décision commune sont reconnues comme étant déterminantes et sont appliquées par les autorités compétentes dans les États membres concernés. La décision commune visée au premier alinéa et les décisions prises en l'absence d'une décision commune conformément aux quatrième et cinquième alinéas sont mises à jour tous les ans et, dans des cas exceptionnels, lorsqu'une autorité compétente chargée de la surveillance de filiales d'un établissement de crédit mère dans l'Union ou d'une compagnie financière holding mère dans l'Union présente au superviseur sur une base consolidée une demande écrite et rigoureusement motivée visant à mettre à jour la décision relative à l'application de l'article 136, paragraphe 2. Dans ce dernier cas, la mise à jour peut faire l'objet d'un examen bilatéral par le superviseur sur une base consolidée et l'autorité compétente à l'origine de la demande. Le comité européen des contrôleurs bancaires élabore des lignes directrices en vue de la convergence des pratiques de surveillance en ce qui concerne le processus de décision commune visé au présent paragraphe et l'application des articles 123 et 124 et de l'article 136, paragraphe 2, dans le but de faciliter les décisions communes. |
Les alinéas 10 et 11 complètent l'article L. 613-20-4 du CMF en vue de transposer les nouvelles dispositions du 3 de l'article 129 susmentionné.
L'alinéa 11 dispose que l'ACP, en tant que superviseur sur une base consolidée, se concerte avec les autorités des Etats membres de l'UE ou de l'EEE en vue d'aboutir « à une décision commune sur le niveau requis des fonds propres pour chaque entité au sein [d'un] groupe bancaire et sur une base consolidée ». En cas de désaccord, l'ACP consulte le CECB 148 ( * ) . Enfin, si le désaccord persiste, l'ACP « détermine [...] le caractère adéquat du niveau consolidé des fonds propres détenus par le groupe au regard de sa situation financière et de son profil de risque ».
B. LA CONSTITUTION DE COLLÈGES DE SUPERVISEURS
La directive de 2009 a introduit un nouvel article 131 bis dans la directive de 2006. Il dispose que « le superviseur sur une base consolidée établit des collèges des autorités de surveillance en vue de faciliter l'accomplissement des missions visés à l'article 129 et à l'article 130 149 ( * ) [...] en conformité avec les exigences de confidentialité ».
Les autorités compétentes concernées par la supervision d'un groupe bancaire et de ses filiales sont membres du collège mais elles n'assistent aux réunions que sur convocation du superviseur sur une base consolidée. Les collèges sont fondés par des accords écrits et peuvent être ouverts à des banques centrales et des autorités compétentes de pays tiers.
A travers un collège, le superviseur sur une base consolidée peut échanger des informations, confier des tâches et déléguer des compétences, définir des programmes de contrôle prudentiel, appliquer les exigences prudentielles de manière cohérente pour l'ensemble des entités d'un groupe bancaire et, si nécessaire, mieux coordonner l'action des régulateurs dans une situation d'urgence .
Article 131 bis de la directive 2006/48/CE 1. Le superviseur sur une base consolidée établit des collèges des autorités de surveillance en vue de faciliter l'accomplissement des missions visées à l'article 129 et à l'article 130, paragraphe 1, et garantit, en conformité avec les exigences de confidentialité prévues au paragraphe 2 du présent article et avec le droit communautaire, une coordination et une coopération appropriées avec les autorités compétentes des pays tiers concernés, s'il y a lieu. Les collèges des autorités de surveillance fournissent un cadre permettant au superviseur sur une base consolidée et aux autres autorités compétentes concernées d'accomplir les tâches suivantes : a) échanger des informations ; b) convenir de confier des tâches et de déléguer des compétences, à titre volontaire, s'il y a lieu ; c) définir des programmes de contrôle prudentiel sur la base d'une évaluation du risque du groupe conformément à l'article 124 ; d) renforcer l'efficacité de la surveillance en évitant la duplication inutile des exigences en matière de surveillance, notamment en ce qui concerne les demandes d'informations visées à l'article 130, paragraphe 2, et à l'article 132, paragraphe 2 ; e) appliquer les exigences prudentielles prévues par la présente directive de manière cohérente dans l'ensemble des entités au sein d'un groupe bancaire, sans préjudice des options et facultés prévues par la législation communautaire ; f) appliquer l'article 129, paragraphe 1, point c), en tenant compte des travaux d'autres enceintes susceptibles d'être instituées dans ce domaine. Les autorités compétentes qui participent aux collèges des autorités de surveillance collaborent étroitement. Les exigences de confidentialité prévues au chapitre I, section II, n'empêchent pas les autorités compétentes d'échanger des informations confidentielles au sein des collèges des autorités de surveillance. La constitution et le fonctionnement des collèges des autorités de surveillance n'affectent pas les droits et responsabilités des autorités compétentes au titre de la présente directive. 2. La constitution et le fonctionnement des collèges sont fondés sur des accords écrits, visés à l'article 131, définis par le superviseur sur une base consolidée après consultation des autorités compétentes concernées. Le comité européen des contrôleurs bancaires élabore des lignes directrices concernant le fonctionnement opérationnel des collèges, y compris pour ce qui a trait à l'article 42 bis , paragraphe 3. Les autorités compétentes chargées de la surveillance des filiales d'un établissement de crédit mère dans l'Union ou d'une compagnie financière holding mère dans l'Union et les autorités compétentes d'un pays d'accueil dans lequel sont établies des succursales d'importance significative telles que visées à l'article 42 bis , les banques centrales, s'il y a lieu, ainsi que les autorités compétentes de pays tiers, s'il y a lieu et à condition que les exigences de confidentialité soient, de l'avis de toutes les autorités compétentes, équivalentes aux exigences prévues au chapitre I, section II, peuvent participer aux collèges des autorités de surveillance. Le superviseur sur une base consolidée préside les réunions du collège et décide quelles sont les autorités compétentes qui participent à une réunion ou à une activité du collège. Le superviseur sur une base consolidée informe pleinement, à l'avance, tous les membres du collège de l'organisation de ces réunions, des principales questions à aborder et des activités à examiner. Le superviseur sur une base consolidée informe également pleinement et en temps utile tous les membres du collège des mesures prises lors de ces réunions ou des actions menées. La décision du superviseur sur une base consolidée tient compte de la pertinence de l'activité de surveillance à planifier et à coordonner pour ces autorités, en particulier de l'impact potentiel sur la stabilité du système financier dans les États membres concernés, visé à l'article 40, paragraphe 3, et des obligations visées à l'article 42 bis , paragraphe 2. Sous réserve des exigences de confidentialité prévues au chapitre I, section II, le superviseur sur une base consolidée informe le comité européen des contrôleurs bancaires des activités du collège des autorités de surveillance, y compris dans les situations d'urgence, et communique à ce comité toutes les informations particulièrement pertinentes aux fins de la convergence en matière de surveillance. |
Les alinéas 1 à 9 transposent le nouvel article 131 bis de la directive 2006/48/CE dans le CMF. A cette fin, l'article L. 613-20-2 de ce code relatif aux accords entre autorités européennes est intégralement réécrit.
L' alinéa 2 prévoit que l'ACP institue et préside des collèges de superviseurs regroupant les autorités compétentes des Etats membres de l'UE ou de l'EEE. Elle assure « une coordination appropriée » avec les autorités des Etats non membres de l'EEE.
L'alinéa 3 rappelle que les collèges sont fondés sur des accords écrits. Ils permettent :
« - d'échanger des informations ( alinéa 4 ) ;
« - de convenir de se confier des tâches et de se déléguer des compétences, à titre volontaire, s'il y a lieu ( alinéa 5 ) ;
« - de planifier et de coordonner les activités de surveillance prudentielle sur la base d'une évaluation des risques du groupe ( alinéa 6 ) ;
« - de coordonner la collecte des informations ( alinéa 7 ) ;
« - d'appliquer les exigences prudentielles de manière cohérente dans l'ensemble des entités au sein du groupe ( alinéa 8 ) ;
« - de tenir compte des activités de contrôle prudentiel définies en cas d'urgence ( alinéa 9 ) ».
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, deux amendements rédactionnels ont été adoptés par la commission des finances et un amendement rédactionnel a été adopté en séance publique.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le présent article répond à une obligation européenne et procède à une transposition quasi-littérale de la directive qui n'appelle pas de commentaire particulier.
Votre commission a adopté un amendement rédactionnel.
Décision de la commission : votre commission a adopté cet article ainsi rédigé.
* 146 Dans un groupe bancaire composé d'une société mère et de filiales, le superviseur sur une base consolidée de l'ensemble du groupe est celui qui est compétent pour contrôler la société mère.
* 147 A compter de l'adoption du paquet « supervision », en cours d'examen par le Parlement européen et le Conseil, l'Autorité bancaire européenne (ABE) aura vocation à se substituer au CECB.
* 148 La rédaction de l'article ne mentionne pas le CECB mais le « comité qui regroupe les autorités de contrôle compétentes » afin de prévoir la future mise en place de l'ABE.
* 149 Pour les dispositions des articles 129 et 130, se reporter au commentaire de l'article 5 du présent projet de loi.