ARTICLE 5
(Art.
L. 613-20-1, L 613-20-5 [nouveau], L. 632-1 du
code
monétaire et financier)
Transposition du dispositif
européen d'échanges d'informations
entre régulateurs
bancaires
Commentaire : le présent article a pour objet de transposer en droit interne les dispositions de la directive 2009/111/CE du 16 septembre 2009 du Parlement européen et du Conseil relatives à l'échange d'informations entre les régulateurs de l'Union européenne.
I. LE DROIT EXISTANT
La directive 2006/48/CE du 14 juin 2006 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice comprend des dispositions relatives au contrôle interne et externe des établissements de crédit, notamment en matière de fonds propres et de suivi des risques (articles 123 à 143 de la directive). La directive institue, pour les groupes transfrontières, un « superviseur sur une base consolidée », c'est-à-dire le régulateur compétent pour contrôler la société-mère, qui opère une surveillance globale du groupe et de ses filiales.
Aux termes de son article 129, ce régulateur coordonne la collecte et la diffusion aux autorités des autres Etats membres des « informations pertinentes ou essentielles dans la marche normale des affaires comme dans les situations d'urgence ». Il planifie et coordonne les activités prudentielles en coopération avec les autres autorités compétentes concernées.
Par ailleurs, il prévoit que l'ensemble des autorités concernées travaillent en pleine concertation en vue de décider qu'une société mère et ses filiales peuvent recourir à un processus de notation interne de ses risques . La directive définit la procédure de concertation entre autorités de contrôle dans ce cas.
Son article 130 dispose que « lorsque survient, au sein d'un groupe bancaire, une situation d'urgence susceptible de menacer la stabilité du système financier dans un des Etats membres [...] l'autorité compétente chargée d'exercer la surveillance sur une base consolidée alerte » les banques centrales et les ministères de finances concernés .
Ces dispositions ont été transposées en droit interne par l'ordonnance n° 2007-571 du 19 avril 2007 relative aux établissements de crédit, aux entreprises d'investissement et aux sociétés de crédit foncier et codifiées à la section 1 (« Surveillance sur une base consolidée ») du chapitre III (« Dispositions spécifiques aux établissements de crédit, entreprises d'investissement et établissements de paiement ») du titre I er (« Les institutions compétentes en matière de réglementation et de contrôle ») du livre VI (« Les institutions en matière bancaire et financière ») du code monétaire et financier (CMF).
L'article L. 613-20-1 du CMF prévoit la compétence de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) pour exercer la surveillance d'un groupe sur une base consolidée lorsque l'entreprise mère de ce groupe dans l'Union européenne ou l'Espace économique européen (EEE) relève de son contrôle. Il dispose, conformément à l'article 129 de la directive, que l'ACP planifie et coordonne la collecte et la diffusion d'informations de même que les activités de surveillance prudentielle.
Aux termes de l'article L. 613-20-3 du CMF, la surveillance sur une base consolidée et l'échanges d'informations avec les autorités étrangères s'exercent conformément aux dispositions de l'ensemble du chapitre II (« Coopération et échanges d'informations avec l'étranger ») du titre III (« Coopération, échanges d'informations et surveillance complémentaire des conglomérats financiers ») du livre VI (« Les institutions en matière bancaire et financière ») du CMF 143 ( * ) .
Ainsi, l'article L. 632-1 dispose 144 ( * ) que l'ACP coopère « avec les autorités des autres Etats membres [...] exerçant des fonctions homologues [...] . Elles échangent notamment [...] les informations nécessaires à l'accomplissement de leurs missions respectives ». L'article L. 632-2 permet à l'ACP de recevoir des informations de la part des autorités homologues dans le cadre d'une activité de surveillance, d'un contrôle sur place ou d'une enquête.
Les informations couvertes par le secret professionnel ne peuvent être utilisées que pour l'accomplissement des missions de l'ACP (article L. 632-3). Elle peut également transmettre des informations couvertes par le secret professionnel aux banques centrales de l'Union européenne ou à la Banque centrale européenne (BCE) pour l'exercice de leurs missions (article L. 632-4).
Aux termes de l'article L. 632-5 du CMF, lorsque l'ACP est invitée à coopérer à une enquête, à un contrôle sur place ou à une activité de surveillance, « elle ne peut refuser de donner suite à une telle requête que lorsque la demande est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre public français ou lorsqu'une procédure pénale quelconque a déjà été engagée en France » ou lorsqu'une décision de justice passée en force de chose jugée a été rendue sur les faits qui motivent l'enquête.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Dans le cadre de la mise en oeuvre des recommandations du G 20, l'Union européenne a adopté une directive n° 2009/111/CE 145 ( * ) , dite « CRD 2 », qui remanie en particulier le droit applicable à la surveillance des établissements de crédit.
Son considérant 6 rappelle que « pour renforcer le cadre de gestion des crises de la Communauté européenne, il est essentiel que les autorités compétentes coordonnent efficacement leurs actions entre elles et, le cas échéant, avec les banques centrales ».
Elle modifie par conséquent le 1 de l'article 129 et le 1 de l'article 130 de la directive 2006/48/CE.
Les b et c du 1 de l'article 129 prévoient désormais que l'autorité compétente chargée de la surveillance sur une base consolidée planifie et coordonne les activités de surveillance entre autorités compétentes tant au niveau de la continuité d'exploitation qu'en situation d'urgence.
Aux termes du 1 de l'article 130, « lorsque survient une situation d'urgence [...] susceptible de menacer la liquidité du marché et la stabilité du système financier dans un des Etats membres [...] le superviseur sur une base consolidée alerte dès que possible » les banques centrales de l'Union européenne ainsi que les ministères responsables du suivi des établissements du secteur financier et assurantiel et leur communique toutes les informations essentielles à la poursuite de leurs missions. Et inversement, si les banques centrales de l'Union européenne ont connaissance d'une telle situation, elles alertent le superviseur compétent.
Articles 129 et 130 de la directive 2006/48/CE modifiés par la directive 2009/111/CE ( les modifications apparaissent en italique ) Article 129 1. Outre les obligations qui lui incombent en vertu des dispositions de la présente directive, l'autorité compétente chargée de la surveillance sur une base consolidée des établissements de crédit mères dans l'Union et des établissements de crédit contrôlés par des compagnies financières holding mères dans l'Union exerce les fonctions suivantes : a) coordination de la collecte et de la diffusion des informations pertinentes ou essentielles dans la marche normale des affaires comme dans les situations d'urgence ; et b) planification et coordination des activités de surveillance en continuité d'exploitation, y compris en ce qui concerne les activités visées aux articles 123, 124 et 136, au chapitre V et à l'annexe V, en coopération avec les autorités compétentes concernées ; c) planification et coordination des activités de surveillance en coopération avec les autorités compétentes concernées et, au besoin, avec les banques centrales, en vue et au cours des situations d'urgence, y compris les évolutions négatives de la situation que connaissent les établissements de crédit ou les marchés financiers, en recourant, si possible, aux voies de communication existantes définies pour faciliter la gestion des crises. La planification et la coordination des activités de surveillance visées au point c) comprend les mesures exceptionnelles visées à l'article 132, paragraphe 3, point b), l'élaboration d'évaluations conjointes, la mise en oeuvre de plans d'urgence et la communication d'informations au public. [...] Article 130 1. Lorsque survient une situation d'urgence, notamment une évolution défavorable des marchés financiers, susceptible de menacer la liquidité du marché et la stabilité du système financier dans un des États membres dans lequel des entités d'un groupe ont été agréées ou dans lequel sont établies des succursales d'importance significative telles que visées à l'article 42 bis, le superviseur sur une base consolidée alerte dès que possible, sous réserve du chapitre I, section II, les autorités visées à l'article 49, quatrième alinéa, et à l'article 50 et il communique toutes les informations essentielles à la poursuite de leurs missions. Ces obligations s'appliquent à toutes les autorités compétentes au titre des articles 125 et 126 ainsi qu'à l'autorité compétente déterminée conformément à l'article 129, paragraphe 1. Si l'autorité visée à l'article 49, quatrième alinéa, a connaissance d'une situation décrite au premier alinéa du présent paragraphe, elle alerte dès que possible les autorités compétentes visées aux articles 125 et 126. Si possible, l'autorité compétente et l'autorité visée à l'article 49, quatrième alinéa, utilisent les voies de communication définies existantes. 2. Lorsqu'elle a besoin d'informations déjà communiquées à une autre autorité compétente, l'autorité compétente chargée de la surveillance sur une base consolidée contacte, si possible, cette autre autorité compétente en vue d'éviter la duplication des communications aux diverses autorités prenant part à la surveillance. |
Le présent article procède à la transposition en droit interne des modifications apportées par la directive 2009/111/CE.
L' alinéa 1 du présent article complète le 2 de l'article L. 613-20-1 et permet à l'ACP de planifier et coordonner les activités de surveillance prudentielle, « y compris avec les banques centrales », et de coopérer tant en situation d'urgence que lors de la marche normale des affaires. Il s'agit d'une précision rédactionnelle pour tenir compte de la nouvelle rédaction du 1 de l'article 129 de la directive.
Les alinéas 2 et 3 introduisent dans le code monétaire et financier un article L. 613-20-5 qui transpose le 1 de l'article 130 de la directive. Il dispose que, dans une situation d'urgence, l'ACP alerte les autorités homologues des Etats membres concernés et leur communique toutes les informations nécessaires à l'accomplissement de leurs missions « dans le respect des règles fixées par les articles L. 631-1 et L. 632-1 à L. 632-4 » du CMF. L'article L. 631-1 du CMF régit les transmissions entre l'ACP et l'AMF. Il est ici applicable afin de prévoir que les informations transmises à l'autorité étrangère sont couvertes par le secret professionnel .
Les alinéas 4 et 5 complètent l'article L. 632-1 du CMF afin que, dans la même situation d'urgence et sous les mêmes conditions, l'ACP puisse échanger toute information nécessaire avec les ministères en charge du secteur financier des Etats membres concernés.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Les plus grandes possibilités de coopération entre les autorités de régulation du secteur bancaire offertes par la directive 2009/111/CE apparaissent particulièrement utiles dans un contexte de renforcement des groupes bancaires transfrontières qui peuvent être la source de risques systémiques.
Le présent article répond à une obligation européenne et procède à une transposition quasi-littérale de la directive qui n'appelle pas de commentaire particulier.
Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.
* 143 Articles L. 632-1 à L. 632-17.
* 144 Par dérogation à la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968 relative à la communication des documents et renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères qui interdit ces échanges d'informations.
* 145 Directive 2009/111/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 modifiant les directives 2006/48/CE, 2006/49/CE et 2007/64/CE en ce qui concerne les banques affiliées à des institutions centrales, certains éléments de fonds propres, les grands risques, les dispositions en matière de surveillance et la gestion des crises.