CHAPITRE II - ÉLECTION ET COMPOSITION DES CONSEILS COMMUNAUTAIRES
Article 2 (art. L. 5211-6, L. 5211-7, L. 5211-8, L. 5212-7, L. 5214-7, L. 5215-10, L. 5216-3 du code général des collectivités territoriales, et art. L. 46-1 du code électoral) Élection des délégués des communes-membres des EPCI à fiscalité propre au suffrage universel direct
Cet article institue une élection au suffrage universel direct des représentants des communes-membres au sein des EPCI à fiscalité propre (c'est-à-dire dans les métropoles, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les communautés de communes), selon un système de « fléchage » inspiré du mode de scrutin applicable à Paris, à Lyon et à Marseille.
Conformément à l'article 37 du présent texte, ces dispositions n'entreront en application qu'à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux, en mars 2014.
• Le texte adopté par le Sénat
Lors de l'examen du présent projet de loi en première lecture, votre commission avait opéré des clarifications rédactionnelles pour distinguer plus nettement la situation des communes appartenant à un EPCI à fiscalité propre, et celles qui font partie d'un syndicat de communes et qui continueront de désigner leurs délégués au suffrage universel indirect, ces derniers étant élus par le conseil municipal.
En séance publique, le Sénat avait ensuite adopté deux amendements visant à :
- préciser que l'élection des conseillers communautaires aurait lieu « dans le cadre de l'élection municipale » (amendement présenté par notre collègue Marie-Agnès Labarre) ;
- prévoir la désignation d'un délégué suppléant par les communes ne disposant que d'un seul délégué et lorsque ce dernier n'a pas donné procuration à un autre délégué (amendement présenté par notre ancien collègue Michel Charasse). Il s'agissait ainsi de garantir que les intérêts des petites communes seraient toujours représentés au sein du conseil communautaire. Cet amendement a été sous-amendé par notre collègue Pierre-Yves Collombat pour tenir compte de la situation particulière des communautés urbaines, ce système risquant alors de poser de nombreux problèmes pratiques au vu du nombre important de communes qui ne disposent que d'un délégué. La possibilité de désigner un délégué suppléant a donc été limitée aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération.
• Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
Outre des amendements rédactionnels et de cohérence, l'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements qui modifient, à la marge, le texte adopté par le Sénat.
Tout d'abord, au 1° du présent article, les députés ont adopté un amendement présenté par M. Bernard Derosier et plusieurs de ses collègues du groupe socialiste afin de préciser que le délégué suppléant désigné par les petites communes devrait être de sexe différent de celui du titulaire lorsque les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste . Cette restriction découle du fait que, comme le rappelait M. Dominique Perben, rapporteur, le système de délégué suppléant est réservé aux petites communes, si bien que l'obligation de désigner un délégué de sexe opposé à celui du titulaire pourrait poser problème dans les communes dont les conseillers sont élus sur des listes non paritaires et qui peuvent, en conséquence, avoir un conseil municipal exclusivement masculin.
Ensuite, l'Assemblée nationale a donné de nouvelles prérogatives aux communes associées des communes-membres des EPCI à fiscalité propre. Plus précisément :
- elle a précisé que les communes associées créées en application de la loi Marcellin de 1978 seraient représentées par un délégué ad hoc dès lors qu'elles représentent plus de la moitié de la population de la commune issue de la fusion et que cette dernière dispose de plus d'un siège au sein du conseil communautaire. Ce siège s'imputera sur le contingent de délégués attribué à la commune nouvelle, et sera attribué au maire délégué de la commune associée si sa population est inférieure à 500 habitants. Cette possibilité ne sera ouverte que dans les comités syndicaux -c'est-à-dire seulement dans les syndicats de communes, et non dans les EPCI à fiscalité propre (amendement de M. Emile Blessig) ;
- elle a adopté, en séance publique, un amendement présenté par M. Etienne Pinte et plusieurs de ses collègues, modifiant l'article L. 46-1 du code électoral pour y fixer le régime d'incompatibilités applicable aux élus siégeant dans les EPCI : ceux-ci ne pourraient pas cumuler ce mandat avec les fonctions à haute responsabilité (directeur général des services, directeur général des services adjoint, directeur ou chef de cabinet) au sein de l'EPCI.
• La position de votre commission des lois
Votre commission des lois soutient ces innovations, qui sont de nature à renforcer la démocratie intercommunale et à favoriser la parité au sein des conseils communautaires.
Néanmoins :
- elle a adopté un amendement de notre collègue Dominique de Legge qui réécrit les dispositions relatives à la représentation des communes associées, en y supprimant la référence à un seuil de 500 habitants. Il convient en effet ne pas préjuger des choix du Parlement, qui sera amené à s'exprimer ultérieurement sur l'abaissement du seuil de passage au scrutin de liste pour les élections municipales ; or, la rédaction issue de l'amendement de M. Blessig semble tenir pour acquis que ce seuil sera fixé à 500 habitants . Il est donc nécessaire de la rectifier en privilégiant une rédaction plus ouverte :
- supprimer les dispositions relatives au régime d'incompatibilités des conseillers communautaires. En effet, celles-ci sont mal placées dans le code électoral (elles sont insérées dans l'article L. 46-1 du code, qui concerne les conseillers municipaux, les conseillers généraux et les députés, et qui fixe les incompatibilités « mandat-mandat », alors que l'amendement vise à mettre en place des incompatibilités « mandat-fonctions ») et ne sont pas rédigées de manière satisfaisante. En outre, elles relèvent du projet de loi n° 61 relatif au renforcement de la démocratie locale, plutôt que du présent texte ;
- améliorer la qualité rédactionnelle du texte.
Votre commission a adopté l'article 2 ainsi rédigé .
Article 3 (art. L. 5211-6-1 à L. 5211-6-3 nouveaux, L. 5211-5-1, L. 5211-10, L. 5211-20-1, L. 5211-41-1 à L. 5211-41-3, L. 5215-40-1 et L. 5216-10 du code général des collectivités territoriales) Fixation du nombre et de la répartition des sièges au sein des conseils communautaires
Cet article détermine le nombre et la répartition des sièges dans les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre (métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération et communautés de communes). L'article 37 du présent texte prévoit l'entrée en application de ce dispositif en mars 2014, au prochain renouvellement général des conseils municipaux, pour tous les EPCI créés antérieurement à la publication de ce projet de loi.
• Le dispositif adopté par le Sénat
En première lecture, le Sénat avait sensiblement modifié le dispositif figurant dans le projet de loi initialement déposé par le gouvernement.
Le texte initial du gouvernement prévoyait, afin que le poids respectif des communes-membres au sein du conseil communautaire reflète leur importance démographique, de fixer le nombre total de membres de l'organe délibérant par le biais d'un tableau, puis de procéder à une répartition des sièges strictement proportionnelle à la population , sous réserve que chaque commune dispose d'au moins un siège et qu'aucune commune ne se voie attribuer plus de la moitié des sièges. En d'autres termes, la composition des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre aurait été déterminée directement par la loi , privant les communautés de communes et d'agglomération de la capacité de conclure des accords locaux amiables, comme elles le font actuellement.
Votre commission avait alors considéré que ce système n'était pas conforme à l'esprit de négociation et de consensus qui caractérise le fait intercommunal et que le tableau créé par le gouvernement défavorisait les villes moyennes. Toutefois, elle ne disposait pas d'éléments suffisants pour amender ce mécanisme en profondeur. Dès lors, à l'initiative du rapporteur, elle s'était limitée à prévoir que les communes pourraient fixer librement le nombre et la répartition des sièges au sein des conseils communautaires, à condition d'atteindre un accord à la « super-majorité qualifiée » (deux tiers des communes représentant au moins deux tiers de la population) et de respecter certaines règles fondamentales ; elle avait, en outre, marqué son intention de modifier le système de répartition des sièges en séance publique.
La Haute Assemblée avait finalement prévu, après avoir modifié le texte de votre commission en adoptant les amendements de nos collègues, Gérard Collomb, Pierre Hérisson, Pierre Jarlier et de l'ancien sénateur Michel Charasse :
- que la répartition des sièges entre les communes au sein des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre devrait « assurer la représentation des territoires sur une base démographique et territoriale » ;
- que, dans les communautés de communes et d'agglomération , les sièges pourraient être librement répartis entre les communes-membres dès lors que ces dernières atteignaient un accord à la majorité qualifiée (deux tiers des communes représentant au moins la moitié de la population, ou la moitié des communes représentant au moins les deux tiers de la population totale de l'EPCI) ; la répartition des sièges issue de cet accord devrait, en tout état de cause, tenir compte de la démographie. Chaque commune devrait disposer d'au moins un siège et aucune commune ne devait se voir attribuer plus de la moitié des sièges. La commission des lois de l'Assemblée nationale a qualifié cette procédure de « procédure négociée » ;
- à défaut d'accord ou dans les métropoles et les communautés urbaines , que le nombre total de sièges serait fixé par un tableau. La répartition des sièges entre les communes-membres était ensuite effectuée à la représentation proportionnelle selon la règle de la plus forte moyenne. Dans un troisième temps, les petites communes (c'est-à-dire celles dont la population est inférieure au quotient démographique de l'EPCI et qui n'avaient, de ce fait, obtenu aucun siège en application du système de répartition proportionnelle) se voyaient attribuer un siège au-delà de l'effectif total fixé par le tableau. En outre, des règles spécifiques étaient instituées pour éviter qu'une commune ne dispose de plus de la moitié des sièges ou d'un nombre de sièges supérieur au nombre de ses conseillers municipaux. Enfin, un nombre de sièges égal, au maximum, à 10 % de l'effectif total du conseil communautaire pouvait être créé et librement réparti à la majorité qualifiée et avec l'accord de la ville-centre. La répartition de ces 10 % de sièges supplémentaires peut conduire à attribuer plus de 50 % des sièges à une commune-membre dans les métropoles et les communautés de communes.
Il s'agit alors, pour reprendre l'expression de M. Dominique Perben, d'une « procédure organisée ».
Le présent article fixait ensuite les modalités de répartition des sièges en cas de création d'un nouvel EPCI à fiscalité propre ou d'extension de l'EPCI, en cas de retrait d'une ou plusieurs communes-membres, et en cas de création d'une commune nouvelle en lieu et place de plusieurs communes-membres.
En outre, adoptant un amendement de notre collègue Nathalie Goulet contre l'avis de votre commission et du gouvernement, le Sénat a prévu la constitution d'un collège spécifique dans tous les EPCI comprenant des communes de montagne au sens de la loi du 9 janvier 1985, pour assurer la représentation desdites communes ; ce collège aurait donné son accord, à la majorité qualifiée, préalablement à toute prise de décision ayant un impact sur la vie des populations de montagne.
Enfin, le Sénat avait modifié les dispositions relatives au nombre de vice-présidents pour chaque conseil communautaire : alors que le texte du gouvernement prévoyait deux plafonds cumulatifs (20 % de l'effectif total de l'organe délibérant ou 15 vice-présidents 14 ( * ) ), la Haute Assemblée avait souhaité se limiter à un seul maximum, exprimé en valeur absolue (15 vice-présidents, quelle que soit la taille de l'organe délibérant).
• Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
Tout en maintenant les grandes lignes du dispositif voté par le Sénat, les députés y ont apporté des modifications importantes.
Tout d'abord, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté quelques amendements rédactionnels et de coordination.
Sur le fond, elle a :
- supprimé l'accord de la ville-centre (i.e. de la commune la plus peuplée, représentant au moins le quart de la population totale de l'EPCI) pour la création et la répartition des 10 % de sièges supplémentaires prévus par le IV du nouvel article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales (amendements de MM. Michel Piron et Bernard Derosier) ;
- marqué son accord avec la « clause de rendez-vous » que votre commission avait mise en place pour actualiser le nombre et la répartition des sièges avant chaque renouvellement général des conseils municipaux dans les EPCI ayant eu recours aux II et III du nouvel article L. 5211-6-1 (c'est-à-dire n'ayant pas réussi à conclure un accord à la majorité qualifiée) : dès lors, elle a adopté un amendement de MM. Pierre Morel-A-L'Huissier et Michel Piron afin d'étendre ce mécanisme à l'ensemble des EPCI à fiscalité propre ;
- supprimé les dispositions tendant à instaurer une représentation spécifique des communes de montagne (amendement du rapporteur) ;
- rétabli le texte du gouvernement concernant le nombre de vice-présidents dans les conseils communautaires.
Le présent article a connu de nouvelles modifications en séance publique :
- le nombre total de sièges pouvant être créé par les EPCI régis par un accord entre les communes-membres a été plafonné , afin de garantir qu'il ne dépasse pas le nombre de sièges qui aurait résulté de l'application de la « procédure organisée » ;
- afin que le principe de représentation des territoires ne prenne pas le pas, de manière excessive, sur la nécessité d'assurer le respect de l'égalité démographique entre les citoyens de chaque commune-membre, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de Mme Cécile Dumoulin prévoyant que si, dans les communautés de communes et les communautés d'agglomération, le nombre de sièges attribué aux communes dont la population est inférieure au quotient démographique de l'EPCI dépasse 30 % du nombre total des sièges du conseil communautaire, 10 % de sièges supplémentaires seraient créés et répartis à la représentation proportionnelle entre les communes-membres. Le rapporteur de la commission des lois a sous-amendé cet amendement afin de préciser que, dans ce cas, l'EPCI ne pourrait plus faire usage de la faculté prévue au IV, qui l'autorise à créer et à répartir librement 10 % de sièges.
• La position de votre commission des lois
Votre commission a estimé que les modifications apportées par l'Assemblée nationale constituaient de réelles avancées et respectaient l'esprit du texte adopté par le Sénat, dont tous les éléments fondamentaux ont été conservés et approfondis.
Dès lors, elle a adopté l'article 3 sans modification .
Article 3 bis Parité dans les organes délibérants des EPCI
En séance publique, le Sénat a examiné un amendement de notre collègue Bernadette Bourzai portant article additionnel après l'article 3 et prévoyant que « la composition des organes délibérants des EPCI favorise la parité ». Malgré l'avis défavorable du rapporteur et du gouvernement qui considéraient qu'un tel débat devait être mené lors de l'examen du projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale et qu'il était satisfait par la mise en place d'une élection des conseillers communautaires « par fléchage », cet amendement a été adopté.
Cet article a été supprimé par la commission des lois de l'Assemblée nationale.
Conformément à sa position initiale, votre commission considère que cet article est inutile et dénué de portée normative . En conséquence, elle a maintenu sa suppression .
Article 4 (art. L. 4241-1 du code général des collectivités territoriales) Prérogatives du conseil économique, social et environnemental régional
Le présent article visait à renforcer les compétences des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER) en prévoyant leur consultation obligatoire par le président du conseil régional sur les « orientations générales dans le domaine de l'environnement ».
L'Assemblée nationale a supprimé cet article, en soulignant qu'il était sans lien réel avec le présent projet de loi et que, en outre, il était satisfait par l'article 100 du projet de loi « Grenelle II ».
Constatant que les députés avaient effectivement repris, mot pour mot, le dispositif adopté par le Sénat dans le projet de loi portant engagement national pour l'environnement (nouveau paragraphe IV de l'article 100), votre commission a maintenu cette suppression .
* 14 Pour limiter la brutalité de ce système, le texte du Gouvernement prévoyait également que tout organe délibérant, quelle que soit sa taille, pourrait disposer de quatre vice-présidents.