Rapport n° 313 (2009-2010) de M. Bernard PIRAS , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 23 février 2010
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INTRODUCTION
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CONCLUSION
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EXAMEN EN COMMISSION
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ÉTUDE D'IMPACT
N° 313
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010
Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 février 2010 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République populaire de Chine sur l' encouragement et la protection réciproques des investissements ,
Par M. Bernard PIRAS,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca. |
Voir le(s) numéro(s) :
Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : |
1135 , 1430 et T.A. 412 |
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Sénat : |
274 et 314 (2009-2010) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République populaire de Chine sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, signé à Pékin le 27 novembre 2007.
Forte d'une population de plus de 1,3 milliard d'habitants, la Chine est en passe de devenir la deuxième puissance économique du monde, devant le Japon.
Malgré les effets de la crise économique internationale, la Chine devrait connaître une croissance économique supérieure à 9 % en 2009 et en 2010.
Dès lors, on mesure tous les enjeux du renforcement des relations économiques et de la présence des entreprises françaises dans ce pays.
Avant d'examiner le contenu de cet accord, assez classique, il a donc paru utile à votre Rapporteur de présenter brièvement l'état des relations économiques franco-chinoises.
I. MALGRÉ UNE FORTE PROGRESSION CES DERNIÈRES ANNÉES, LA PRÉSENCE ÉCONOMIQUE FRANCAISE EN CHINE DEMEURE ENCORE LIMITÉE
A. GÉANT ECONOMIQUE, LA CHINE A PLUTÔT BIEN RÉSISTÉ À LA CRISE ECONOMIQUE INTERNATIONALE
Avec une croissance à deux chiffres entre 2003 et 2007, et autour de 9 % en 2008 et en 2009, la Chine est en passe de devenir la deuxième puissance économique mondiale, après les Etats-Unis.
Le produit intérieur brut chinois a atteint près de 7 000 milliards de dollars en 2007, et pourrait bientôt dépasser celui du Japon.
Si la crise financière mondiale a entraîné un ralentissement de l'économie chinoise à la fin de l'année 2008 et au début de l'année 2009, elle n'a pas entamé les fondamentaux de cette économie.
Avec une croissance du PIB de l'ordre de 9 % en 2009, la Chine a été l'une des seules zones de croissance économique dans le monde.
Grâce à un important programme de relance monétaire et budgétaire, de l'ordre de 400 milliards d'euros, le vaste marché intérieur chinois a pu stimuler l'économie, en dépit d'un ralentissement des exportations, bien que le commerce extérieur demeure fortement excédentaire.
B. LES RELATIONS FRANCO-CHINOISES
Les relations franco-chinoises ont connu une certaine « éclipse », avec notamment le report par la Chine du Sommet avec l'Union européenne, qui devait se tenir sous présidence française, le 1 er décembre 2008.
Il s'agissait là d'un signe de protestation des autorités chinoises à l'égard de la rencontre du Président de la République et de plusieurs autres dirigeants européens avec le Dalaï-Lama, le 6 décembre à Gdansk.
Lors de sa visite à Pékin, du 20 au 22 décembre dernier, le Premier ministre François Fillon a publiquement souhaité « tourner la page des malentendus » . Il a d'ailleurs annoncé, à cette occasion, la venue du Président de la République à l'Exposition universelle de Shanghai, qui se tiendra du 1 er mai au 31 octobre de cette année. Le Président de la République populaire de Chine, M. Hu Jintao, devrait, quant à lui, effectuer une visite officielle en France à l'automne.
Au cours de cette visite officielle marquée par la signature de plusieurs grands contrats portant sur plus de 6 milliards d'euros - dont un contrat pour le projet de centrale nucléaire de Taishan - le Premier ministre a également évoqué prudemment la question des droits de l'homme.
C. ALORS QUE LA CHINE ATTIRE DE NOMBREUX INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS, LES INVESTISSEMENTS FRANÇAIS DEMEURENT LIMITÉS
En dépit de son attractivité, la Chine n'est encore qu'une destination marginale de l'investissement français.
Le stock cumulé des investissements français ne représente que 3 milliards d'euros, soit 0,5 % du stock total des investissements détenus à l'étranger et 0,8 % du total accueilli par la Chine.
Sous l'effet des politiques incitatives menées ces dernières décennies, la Chine a bénéficié d'une manne d'investissements directs étrangers de près de 70 milliards d'euros en 2005 et en 2006, d'après l'OCDE.
Le flux d'investissements français vers la Chine s'est élevé en 2006 à 318 millions d'euros, soit 0,3 % de nos flux totaux d'investissements à l'étranger. La Chine n'est que la trente-troisième destination de nos investissements à l'étranger.
La France se situe ainsi au quinzième rang des investisseurs étrangers en Chine et au quatrième rang parmi les Etats européens.
La présence française en Chine comprend aujourd'hui près de 850 entreprises, à travers 1 800 implantations, notamment dans les domaines de l'énergie, de l'assainissement (eau, gaz, électricité), de la finance, de la distribution et de l'automobile.
Enfin, 7 200 entreprises françaises, dont 4 500 PME, exportent en Chine.
Les exportations françaises vers la Chine ont atteint 9,1 milliards d'euros en 2008 - 11,4 milliards d'euros en incluant Hong-Kong - et représentent 2,3 % du total des exportations françaises.
Nos échanges avec la Chine expliquent la moitié de notre déficit commercial.
Pour sa part, la Chine aurait investi 383 millions d'euros en France en 2007, ce qui la classe au 19 ème rang parmi les investisseurs étrangers, d'après la Banque de France. Son stock d'investissements était évalué à 167 millions d'euros en 2006.
Une cinquantaine d'entreprises chinoises sont présentes en France, par exemple dans le secteur des télécommunications.
II. L'ACCORD ENTRE LA FRANCE ET LA CHINE SUR L'ENCOURAGEMENT ET LA PROTECTION RÉCIPROQUES DES INVESTISSEMENTS
En dehors des Etats appartenant à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les investisseurs français ne bénéficient d'aucune protection juridique contre les risques de nature politique qu'ils encourent résultant de la situation locale ou de décisions politiques arbitraires de l'Etat d'accueil.
La France a par conséquent été amenée à conclure de nombreux accords bilatéraux avec des pays tiers en matière de promotion et de protection des investissements. Près d'une centaine d'accords bilatéraux ont ainsi été signés par la France et plusieurs autres sont en cours de négociations.
C'est dans ce cadre que s'inscrit le présent accord avec la République populaire de Chine, signé à Pékin, le 26 novembre 2007.
Certes, la France et la Chine avaient déjà signé un accord sur la protection des investissements le 30 mai 1984. Toutefois, cet accord, qui date de plus de vingt-cinq ans, n'offrait qu'une protection limitée aux investisseurs français.
La Chine s'est longtemps montrée fermée à ouvrir son marché aux investissements étrangers et à modifier ses engagements en la matière. Depuis quelques années, elle s'avère disposée à mettre ses traités en conformité avec les normes généralement admises en la matière. La Chine est ainsi devenue membre de l'Organisation Mondiale du Commerce en 2001.
La France avait donc tout intérêt à renégocier un accord plus protecteur pour ses propres investisseurs, les plaçant sur un pied d'égalité avec ceux d'autres États bénéficiant d'une protection élargie (comme l'Allemagne ou les Pays-Bas). En outre, l'accord de 1984 n'était plus conforme aux dispositions du droit communautaire relatives au libre transfert des capitaux.
Le nouvel accord reprend les clauses classiques du droit international en matière de protection des investissements étrangers. Il offrira ainsi aux investisseurs français en Chine une protection contre le risque politique.
A. UN PRINCIPE GÉNÉRAL DE PROMOTION DES INVESTISSEMENTS
L'accord de protection des investissements signé entre la France et la République populaire de Chine est de facture classique. Il est conforme au modèle développé en bilatéral pour pallier l'absence de cadre multilatéral de protection des investissements en dehors de la zone OCDE.
Le préambule de l'accord souligne la volonté des deux pays de renforcer la coopération économique bilatérale et de créer des conditions favorables à l'accueil des investissements.
L' article 1 er définit les principaux termes utilisés dans l'accord, notamment les « investissements » et les « investisseurs », les « revenus » et les « zones maritimes ». La définition retenue pour les investissements est suffisamment large pour permettre d'étendre le champ d'application de l'accord à tous les investissements réalisés par les nationaux ou sociétés de chaque Partie. Elle comprend notamment « les concessions accordées par la loi ou en vertu d'un contrat, notamment les concessions relatives à la prospection, la culture, l'extraction ou l'exploitation de richesses naturelles, y compris celles qui se situent dans la zone maritime des Parties contractantes . ». Les droits de la propriété intellectuelle sont également visés à l'article 1 er .
L' article 2 prévoit l'encouragement et l'admission des investissements sur le territoire et dans la zone maritime des Parties contractantes.
Conformément à l' article 3 , chaque Partie contractante accorde aux investissements de l'autre Partie un traitement juste et équitable, conforme aux principes du droit international. Cet article prévoit également que chaque Partie examinera de façon bienveillante dans le cadre de sa législation, l'entrée sur son territoire, en lien avec des investissements, de nationaux de l'autre Partie.
B. LES GARANTIES OFFERTES
L' article 4 expose les clauses classiques de traitement des investissements. Ainsi, les investisseurs de l'autre Partie ne seront pas traités moins favorablement que les investisseurs nationaux, et, en vertu du traitement de la Nation la plus favorisée, recevront également un traitement au moins aussi favorable que celui accordé aux investisseurs étrangers les plus favorisés. Des exceptions sont prévues pour les avantages résultant d'accords économiques régionaux, tels que l'Union européenne pour la France, ainsi que pour les questions fiscales. L'accord n'empêche pas les Parties de prendre des mesures en faveur de la diversité culturelle et linguistique.
L' article 5 pose le principe de la protection des investissements effectués par les investisseurs de chaque Partie sur le territoire de l'autre Partie. Les mesures d'expropriation, de nationalisation ou de dépossession sont interdites. Dans l'éventualité d'une dépossession motivée par l'utilité publique et non discriminatoire, l'accord établit le droit au versement d'une indemnité prompte et adéquate dont il fixe en détail les modalités de calcul. L'indemnité est effectivement réalisable et librement transférable. Enfin, en cas de sinistre ou de dommages provoqués par les événements politiques (guerre, conflit armé, révolution...), il est prévu que les investisseurs de chacune des deux Parties devront pouvoir bénéficier d'un traitement non moins favorable que celui qu'applique l'autre Partie à ses propres investisseurs ou à ceux de la Nation la plus favorisée.
Le libre transfert des diverses formes de revenus que peut engendrer l'investissement est prévu à l' article 6 , sous réserve de déséquilibres exceptionnels de la balance des paiements d'une des Parties ou de respect de leurs obligations internationales.
C. LE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS
L' article 7 stipule les modalités de règlement des différends selon les modalités en usage pour ce type d'accord. Si le différend n'a pu être réglé à l'amiable dans un délai de neuf mois, il est soumis, à la demande de l'investisseur, au tribunal compétent du pays d'accueil de l'investissement, à l'arbitrage du CIRDI (Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements, du Groupe de la Banque mondiale) ou à l'arbitrage d'un tribunal arbitral ad hoc constitué selon les règles d'arbitrage de la CNUDCI (Commission des Nations unies pour le droit commercial international).
La subrogation des États ayant garanti des investissements, dans les droits et actions des investisseurs, est prévue à l' article 8 .
L' article 9 prévoit, sans préjudice de l'accord, que les investissements des nationaux de l'autre Partie peuvent faire l'objet d'un engagement particulier plus favorable de la part d'une des Parties.
Suivant des principes classiques en la matière, la procédure de règlement des différends pouvant survenir entre les Parties contractantes pour l'interprétation et l'application de l'accord s'effectue par la voie diplomatique ou, à défaut, par le recours à un tribunal d'arbitrage, si la voie diplomatique est restée infructueuse pendant au moins six mois ( article 10 ).
En vertu de l' article 11 , le présent accord abroge et remplace le précédent accord signé à Paris le 30 mai 1984. Le nouvel accord couvre les investissements réalisés après l'entrée en vigueur et les investissements déjà existants, mais pas les différends survenus avant l'entrée en vigueur de l'accord.
Les dispositions finales de l' article 12 précisent l'entrée en vigueur, la dénonciation et la durée de validité de l'accord. Le délai d'entrée en vigueur est fixé à un mois après le dépôt du second instrument d'approbation. L'accord est conclu pour une durée de dix ans et demeurera en vigueur après ce terme, sauf dénonciation avec préavis d'un an. A l'expiration de la période de validité, les investissements réalisés précédemment bénéficient d'une garantie de vingt ans.
CONCLUSION
L'accord entre la France et la République de Chine reprend les clauses classiques du droit international en matière de protection des investissements étrangers.
Il offrira aux investisseurs français en Chine une protection contre le risque politique. Il permettra ainsi de renforcer la présence économique française en Chine et les relations économiques entre nos deux pays.
Votre rapporteur vous recommande donc son adoption.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 23 février 2010, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du présent projet de loi.
A la suite de l'exposé du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi et proposé qu'il fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance plénière.
ÉTUDE D'IMPACT1 ( * )
I - État du droit existant
Les entreprises qui investissent dans un pays étranger, outre les risques économiques encourus pour toute opération d'investissement (évolution du marché, évolution des changes, fluctuations des coûts de production...), s'exposent à des risques de nature spécifiquement politique : nationalisation, traitement discriminatoire, par exemple pour l'accès à des infrastructures ou à des matières premières, limitation à la possibilité de rapatrier en France les revenus retirés de l'investissement réalisé.
En l'absence d'un cadre multilatéral de protection des investissements internationaux, la protection juridique des investisseurs français à l'étranger repose généralement sur des accords bilatéraux de ce type. A cet effet, la France avait conclu un tel accord avec la Chine, signé le 30 mai 1984 et entré en vigueur le 19 mars 1985.
Cet accord apparaissait obsolète, non conforme avec le droit communautaire et méritait donc d'être actualisé. Le nouvel accord abroge et remplace le précédent. Son entrée en vigueur permettra de protéger plus efficacement les investissements français en Chine.
II - Modifications à apporter au droit existant
L'approbation de cet accord ne nécessitera pas de modifications en droit interne.
* 1 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires