ARTICLE 2 bis (nouveau) - Elargissement des possibilités d'adhésion à un centre de gestion agréé
Commentaire : le présent article procède à un élargissement des possibilité d'adhésion à un centre de gestion agréé aux contribuables qui disposent de revenus non professionnels imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux
I. LE DROIT EXISTANT
A. UN AVANTAGE COMPARATIF POUR LES ADHÉRENTS À UN ORGANISME DE GESTION AGRÉÉ
La réforme du barème de l'impôt sur le revenu, à compter de 2006, a eu pour effet de supprimer l'abattement de 20 % dont bénéficiaient certains revenus, notamment ceux des professionnels adhérents à un organisme de gestion agréé (OGA). Toutefois, pour assurer la neutralité de la réforme, depuis la loi de finances pour 2006, un coefficient de majoration de 1,25 est appliqué aux revenus des professionnels qui ne sont pas adhérents à un organisme agréé.
Ainsi, la situation relative des professionnels adhérents ou non adhérents à un Centre de gestion agréé n'a pas évolué. En contrepartie, les adhérents imposés à l'impôt sur le revenu selon un régime réel d'imposition bénéficient des avantages fiscaux suivants :
• non application d'une majoration de 25 % du bénéfice imposable
A compter de l'imposition des revenus de 2006, le bénéfice imposable des professionnels qui n'adhèrent pas à un CGA est majoré de 25 % avant d'être soumis au nouveau barème progressif par tranches de l'impôt sur le revenu. Les professionnels qui adhèrent à un CGA ne subissent pas cette majoration de leur bénéfice imposable.
• possibilité de déduire le salaire du conjoint
Pour les non adhérents mariés sous le régime de la communauté, la limite générale de déduction est de 13.800 euros par an. Pour les adhérents, aucune limite n'est fixée.
• réduction d'impôt pour frais de comptabilité et d'adhésion
Les adhérents ont droit à une réduction d'impôt égale aux frais engagés pour la tenue de leur comptabilité et leur adhésion au CGA. Cette réduction est plafonnée à 915 euros par an.
Pour en bénéficier, les adhérents doivent :
- réaliser un chiffre d'affaires qui ne dépasse pas les limites du régime fiscal de la micro-entreprise ,
- être imposés sur option à un régime réel .
Les dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt, ne sont pas admises dans les charges déductibles.
B. LA PORTÉE DU DISPOSITIF
600 organismes de gestion agréés emploient 15.000 salariés et regroupent 1,5 million de professionnels adhérents. Les secteurs d'activités qui représentent les bataillons d'adhérents les plus importants recouvrent 90 % des exploitants agricoles, 75 % des professionnels libéraux et 50 % des commerçants et artisans.
Les OGA ont pour mission centrale la prévention fiscale auprès de leurs adhérents, dont le but est d'assurer la promotion du civisme fiscal et la sincérité des déclarations des revenus professionnels. En outre, les OGA apportent une aide à la gestion, une analyse de la situation économique et financière de l'entreprise. A cet égard, la réforme de la profession comptable prévoit que d'ici le 1 er janvier 2009, les missions fiscales et d'aide à la gestion, d'une part, et de tenue de la comptabilité, d'autre part, devront s'exercer au sein de structures distinctes afin qu'une séparation claire soit faite entre les OGA et les membres de l'ordre des experts-comptables qui, à partir de cette date, exerceront des missions distinctes et complémentaires pour les très petites entreprises.
Par ailleurs, les adhérents s'engagent à respecter les règles comptables et fiscales. Ainsi, les entreprises adhérentes déclarent un résultat fiscal près de deux fois supérieur à celui des entreprises non adhérentes (43.400 euros en moyenne contre 23.300 en 2005). Au final, il peut être considéré que le rôle des OGA contribue à la réduction du nombre de déclarations fiscales présentant des anomalies, engendrant ainsi des économies pour l'Etat en raison de contrôles moins fréquents et d'un recours plus systématique au dépôt matérialisé des déclarations fiscales.
C. LES CONDITIONS D'ADHÉSION
Conformément aux dispositions des articles 1649 quater C et 1649 quater F, les OGA s'adressent à deux catégories de contribuables :
• toutes les entreprises (individuelles ou personnes morales) industrielles, commerciales, artisanales et agricoles, qu'elles relèvent de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés et quel que soit leur régime d'imposition. Toutefois, les avantages fiscaux sont réservé aux adhérents relevant de l'impôt sur le revenu et soumis à un régime de bénéfice réel (Art. 1649 quater C) ;
• les personnes qui exercent à titre habituel et constant une activité professionnelle dont les résultats sont soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.
II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'assemblée nationale a adopté à l'unanimité, à l'initiative de notre collègue député Jérôme Cahuzac et des membres du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche et avec l'avis favorable de la commission et du gouvernement , un amendement tendant à ouvrir la possibilité d'adhérer à un OGA à deux nouvelles catégories de contribuables :
• les titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC) non professionnels, soumis au régime de la déclaration contrôlée de droit ou sur option, et qui auront souscrit un engagement d'amélioration de la connaissance des revenus;
• les titulaires de bénéfices industriels et commerciaux (BIC) non professionnels, soumis aux régimes d'imposition selon le bénéfice réel.
A ce jour, ces catégories subissaient l'application du coefficient de majoration de 25 % en vertu de l'article 158-7 1° du code général des impôts, sans avoir la possibilité d'adhérer à un OGA.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Afin de compenser la baisse des taux de 20 % dans le barème 2006, votre commission des finances a donné un avis favorable à la majoration de 25 % les revenus déclarés par les professionnels n'adhérant pas à un CGA ou à une association agréés, prévu par la loi de finances pour 2006.
Avant la réforme de l'impôt sur le revenu, parmi les professionnels non adhérents soumis à un régime réel, quelque 200.000 contribuables déclaraient des BNC (professions libérales) et 507.000 contribuables déclaraient des BIC, procurant 203 millions d'euros de rentrées fiscales liées à leur exclusion du bénéfice de l'abattement de 20 %.
Cette majoration aboutit à neutraliser l'intégration de l'abattement dans le barème 2006 , mais elle n'est pas sans susciter des interrogations quant à son esprit -car l'application du coefficient multiplicateur de 1,25 apparaît plus « pénalisante » que l'absence d'un abattement de 20 %- sinon quant à sa constitutionnalité au regard de principes tels que l'égalité devant les charges publiques ou la présomption d'innocence, qui seraient alors entendus dans une acception particulièrement rigoureuse.
S'il faut rappeler que le Conseil constitutionnel a déjà validé la différence de traitement entre adhérents et non adhérents à un centre de gestion agréé, il apparaît toutefois que ce mécanisme de majoration de 1,25, est perçu soit comme une injustice, soit comme une présomption de fraude par les contribuables non adhérents .
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, après l'avis défavorable de la commission et du gouvernement, notre collègue Jean Arthuis avait retiré un amendement proposant cependant de supprimer progressivement le coefficient de majoration appliqué pour non adhésion à un centre de gestion ou à une association agréée. Il considérait que la décision d'adhérer ne devait pas être motivée par un avantage fiscal, mais par la qualité des services rendus par les organismes agréés et que l'application du coefficient de majoration revient à présumer la fraude. En outre, l'application d'une majoration uniforme de 25 % aboutirait à une correction excessive pour la part des revenus excédant le plafond de 120.100 euros qui, dans le présent état du droit, ne bénéficie jamais de l'abattement. Au delà de ce seuil, il s'ensuivrait donc un « désavantage comparatif » nouveau pour les contribuables non-adhérents. La recherche d'une équivalence de traitement par rapport à la situation actuelle aboutirait ainsi à plafonner la majoration de 25 % au quart du plafond actuel de l'abattement, soit 30.025 euros. Toutefois, la mise en place d'un « plafond fantôme » lié à la disparition de l'abattement de 20 % pourrait ne pas apparaître satisfaisante au regard de l'esprit de simplification qui doit aussi animer la présente réforme.
Tout en soulignant que le dispositif relevait non pas d'une présomption de fraude à l'égard des 5 % de contribuables concernés qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion agréé, mais d'une présomption de bonne foi envers les 95 % d'entre eux qui sont adhérents, le gouvernement avait toutefois proposé d'engager une réflexion globale et de réaliser un audit sur la question 3 ( * ) .
Deux ans après, il convient toutefois de souligner que cette étude n'a toujours pas été menée ou rendue publique , contrairement à l'engagement du gouvernement.
Les modifications apportées par l'Assemblée nationale viennent renforcer un dispositif sur lequel il conviendrait au contraire d'entamer une réflexion générale.
Votre rapporteur général est par principe favorable au dispositif actuel qui permet d'encourager le civisme fiscal, de réduire la fraude et les coûts liés aux contrôles. Il doit être rappelé que le faible taux de recouvrement des redressements et sanctions fiscales doit inciter à renforcer la prévention à la fraude fiscale auprès d'une catégorie plus large de contribuables.
Décision de la commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 3 Sénat, compte rendu intégral de la séance du 11 décembre 2005.