II. LA MISE EN OEUVRE DE LA COOPÉRATION SANITAIRE DANS LA ZONE FRONTALIÈRE FRANCO-BELGE
Les acteurs du domaine sanitaire n'ont pas attendu l'accord-cadre du 30 septembre 2005 pour engager des coopérations concrètes dans un cadre transfrontalier. La frontière franco-belge concentre même le plus grand nombre d'actions et de projets transfrontaliers en matière de santé.
A. L'OBSERVATOIRE FRANCO-BELGE DE LA SANTÉ
Le développement de la mobilité à l'intérieur de l'espace frontalier franco-belge et l'intensification de l'intégration européenne ont conduit différentes institutions françaises et belges à se rapprocher dès le début des années 1990 pour étudier les possibilités de développer des complémentarités entre leurs systèmes de santé. Un premier projet prenait forme avec la conclusion d'une convention de coopération entre les centres hospitaliers de Tourcoing et de Mouscron.
La volonté de disposer d'une structure pérenne pour encadrer ces réflexions et ces projets a conduit à créer le 23 juin 1999 un Groupement européen d'intérêt économique (GEIE) : l'Observatoire franco-belge de la santé (OFBS).
Il est composé des principaux acteurs de l'assurance maladie (organismes de sécurité sociale et mutuelles) et de l'offre de soins (agences régionales d'hospitalisation, établissements hospitaliers, ordre des médecins), des observatoires de la santé, des médecins libéraux ainsi que des centres hospitaliers situés dans la zone frontalière franco-belge. Les ministères et organismes de tutelle concernés y sont également représentés. La structure compte aujourd'hui 55 membres. Son siège est établi en France, à Villeneuve d'Ascq, siège de la caisse régionale d'assurance-maladie Nord-Picardie.
L'Observatoire franco-belge de la santé se définit comme « un espace permanent de discussion, d'études prospectives et d'action dans le domaine sanitaire et de l'assurance-maladie ».
Il s'est fixé un ensemble de missions très larges : analyser les besoins de la population de part et d'autre de la frontière et la manière dont l'offre de soins existante y répond ; identifier les axes potentiels de coopération et de complémentarité ; assurer une veille juridique en droit national et européen ; jouer le rôle de catalyseur pour la coopération sanitaire transfrontalière et apporter une aide à la mise au point de projets concrets.
Les domaines d'action de l'OFBS touchent notamment : la création de zones organisées d'accès aux soins transfrontaliers ; la conclusion de conventions de coopération interhospitalière ; l'établissement de tableaux de bord de la santé et d'analyses sur la démographie médicale ; l'évaluation de la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées ; la prévention et la promotion de la santé ; le domaine des urgences transfrontalières.
L'objectif principal de l'OFBS est d'améliorer l'accès des populations frontalières aux systèmes de soins, avec pour corollaire la réduction des surcoûts générés par le principe de la territorialité des prestations, et la réalisation d'économies d'échelle par une utilisation plus rationnelle des infrastructures et des équipements. Plus largement, les travaux de l'OFBS tendent à créer les conditions de la mise en oeuvre d'une politique de santé véritablement transfrontalière, au regard notamment de la régulation de l'offre de soins.
Avec le soutien des fonds structurels européens spécifiquement dédiés aux actions transfrontalières (programme Interreg), l'OFBS a encouragé la mise en oeuvre de nombreux projets de coopération.
B. DE NOMBREUX PROJETS DE COOPÉRATION
Plusieurs conventions de coopération hospitalière entre établissements français et belges sont actuellement en vigueur ou en cours de conclusion. On peut citer la convention entre les centres hospitaliers de Mouscron et de Tourcoing, qui porte sur les domaines de l'insuffisance rénale chronique et des maladies infectieuses, de l'imagerie à résonance magnétique (IRM) et la scintigraphie, et de l'urologie. Deux autres conventions lient d'une part le centre hospitalier de Sambre Avesnois à Maubeuge et le centre hospitalier de Mons, et d'autre part les centres hospitaliers de Charleville Mézières et de Dinant. D'autres conventions sont en projet (Tournai et Valenciennes ; établissements psychiatriques de Lille et Menin). Des concertations interviennent également entre établissements hospitaliers pour coordonner l'acquisition d'équipements lourds, notamment en matière d'imagerie médicale.
Ont également été mis en place des projets visant à développer des zones organisées d'accès aux soins transfrontaliers , destinées à garantir la continuité des soins par le biais de la libre circulation et de la prise en charge des patients entre la France et la Belgique. Il s'agit de simplifier les modalités administratives et financières de prise en charge des patients dans les établissements hospitaliers de part et d'autre de la frontière. Ainsi, le projet Transcards a permis un accès simplifié aux soins hospitaliers grâce à la carte Vitale et à son équivalent belge pour la zone de la Thiérache comportant 150 000 habitants de part et d'autre de la frontière, à la limite des départements de l'Aisne et du Nord. Deux projets similaires sont en cours dans le nord des Ardennes, afin de permettre aux patients des cantons de Givet et de Fumay de recevoir des soins hospitaliers au Centre hospitalier de Dinant dans les mêmes conditions que sur le territoire français, et dans l'agglomération Roubaix-Tourcoing autour des centres hospitaliers de Roubaix, Tourcoing, Wattrelos et Mouscron.
Dans d'autres domaines, les projets sont parfois moins avancés, mais des coopérations ont été engagées pour mieux analyser les besoins et mettre en place des réponses communes ou coordonnées. C'est par exemple le cas en matière de prise en charge des personnes âgées dépendantes ou des personnes handicapées.
La prévention est un thème propice à des actions communes. Ainsi, il a été constaté que les politiques de dépistage du cancer n'étaient pas homogènes de part et d'autres de la frontière, que ce soit en raison des différences de protocoles ou des modalités de prise en charge des consultations ou examens. Les moyens de mieux coordonner la démarche de prévention en France et en Belgique est à l'étude, l'objectif plus général étant d'élaborer une politique commune de prévention et de promotion de la santé dans les zones transfrontalières.
Enfin, en matière de facilitation des prises en charge, il faut citer la création de guichets de soins , encouragée par l'OFBS. Il s'agit de permettre aux organismes de sécurité sociale d'apporter rapidement une réponse adéquate et uniforme aux questions et problèmes rencontrés par les populations résidant dans les zones frontalières. Concrètement, les personnes chargées de l'application des conventions internationales dans les organismes assureurs belges et français sont mises en relation afin de traiter plus efficacement les dossiers. Elles pourront s'appuyer sur un réseau transfrontalier d'intervenants capable d'apporter des réponses aux diverses questions des populations frontalières.