Art. 412 du code civil : Responsabilité pour faute
des organes tutélaires et de l'État

Cet article prévoit les conditions de mise en jeu de la responsabilité des organes tutélaires et de l'État pour les actes accomplis dans l'organisation et le fonctionnement de la tutelle.

Alors que les dispositions actuelles du code civil détaillent ces conditions dans la section 2 du chapitre II du titre X du livre premier du code civil, concernant la tutelle des mineurs, le projet de loi, dans sa rédaction initiale, inversait cette logique en procédant, au sein de ce nouvel article 412, à un renvoi aux dispositions énoncées aux articles 421 et 422, qui portent sur la tutelle des majeurs. Ce renvoi avait en outre pour conséquence d'inclure, pour les mineurs protégés, certaines dispositions spécifiques aux majeurs protégés, notamment s'agissant du régime de faute aggravée des curateurs.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a entièrement réécrit les dispositions proposées afin d'expliciter le régime de la responsabilité des organes tutélaires des mineurs .

Le premier alinéa du texte adopté par les députés dispose ainsi que tous les organes de la tutelle sont responsables du dommage résultant d'une faute quelconque qu'ils commettent dans l'exercice de leur fonction .

Le second alinéa ajoute que lorsque la faute à l'origine du dommage a été commise dans l'organisation et le fonctionnement de la tutelle par le juge des tutelles, le greffier en chef du tribunal d'instance ou le greffier, l'action en responsabilité est dirigée contre l'État qui dispose d'une action récursoire contre le magistrat ou le fonctionnaire mis en cause, dès lors que celui-ci aurait commis une faute personnelle détachable de l'exercice normal de ses fonctions mais ayant un lien avec son service.

Ces dispositions sont favorables aux personnes concernées dans la mesure où la solvabilité de l'Etat est assurée.

Les magistrats et fonctionnaires ne peuvent ainsi être mis en cause personnellement, depuis l'abandon en 1964 des anciennes règles de la prise à parti, sauf à commettre une faute détachable de l'exercice du service -c'est-à-dire dénuée de tout lien avec lui. La procédure doit être dirigée contre l'Etat et, contrairement au droit commun de la responsabilité de ce dernier pour fonctionnement défectueux du service de la justice 33 ( * ) , la faute n'a pas besoin d'être lourde ou constitutive d'un déni de justice .

La logique du régime de faute simple instauré en matière de tutelle résulte de la nécessité d'une responsabilité étendue à l'égard des personnes protégées pour toute faute survenue dans l'accomplissement de la mesure de protection, laquelle est également privative de droits. Toutefois, il convient de souligner que l'appréciation de la faute lourde a été assouplie depuis un arrêt d'assemblée plénière de la Cour de cassation du 23 février 2001 selon lequel : « constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi. »

A titre d'exemple, le juge des tutelles commet une faute engageant la responsabilité de l'Etat, lorsque, en sa qualité de président du conseil de famille chargé d'autoriser l'acceptation pure et simple d'une succession échue au mineur, à condition que l'actif dépasse manifestement le passif, il omet de vérifier que cette condition était remplie 34 ( * ) . De même, commet une faute engageant la responsabilité de l'État le juge des tutelles qui n'a pas contrôlé l'emploi des fonds versés pour le compte du mineur et qui n'a pas exigé du tuteur le dépôt des comptes annuels et définitifs de fin de tutelle.

Pour qu'une action en responsabilité puise être engagée contre l'Etat, trois conditions doivent être réunies : le demandeur doit d'abord prouver qu'il a subi un dommage ; il doit ensuite démontrer que ce dommage résulte d'une faute quelconque commise par le juge des tutelles ; enfin, il doit établir que cette faute a été commise dans le fonctionnement de la tutelle.

Cette action doit être portée devant le tribunal de grande instance, en vertu du principe de la séparation des pouvoirs. La règle, qui figure actuellement à l'article 473, n'est pas reprise par le projet de loi au motif qu'elle serait d'ordre réglementaire.

L'exercice par l'Etat d'une action récursoire contre le magistrat ou le fonctionnaire suppose que ce dernier ait commis une faute personnelle. Elle est engagée conformément aux statuts respectifs des agents concernés : statut de la fonction publique pour les greffiers, statut de la magistrature 35 ( * ) pour les juges des tutelles. S'agissant des magistrats, l'action doit être portée devant la Cour de cassation. Apparemment, une telle situation ne s'est encore jamais présentée.

* 33 Article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire.

* 34 Cass. 1 ère civ, 26 juin 1979.

* 35 Article 11-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

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