Article 15
Droit de communication des documents aux autorités administratives et judiciaires

Si votre commission souhaite que le dispositif juridique créant la fiducie qu'elle vous propose dans ses conclusions soit réellement attractif, elle est fermement opposée à ce qu'il puisse être utilisé à des fins illicites. Pour prévenir ce risque, elle vous propose, à l'article 15, d'instituer un droit de communication spécifique applicable à l'ensemble des documents relatifs aux contrats de fiducie conclus en application des dispositions du titre XIV du code civil.

Des droits de communication reposant sur des règles juridiques préexistantes s'appliqueront certes déjà dans le cadre d'une opération fiduciaire. Il en va ainsi :

- du droit de communication reconnu à TRACFIN 74 ( * ) , par l'article L. 563-4 du code monétaire et financier. Cette disposition impose aux organismes financiers et aux personnes soumises à la procédure de déclaration de soupçon de conserver, pendant cinq ans à compter de la clôture de leurs comptes ou de la cessation de leurs relations, les documents relatifs à l'identité de leurs clients habituels ou occasionnels, ainsi que les documents relatifs aux opérations faites par ceux-ci pendant cinq ans à compter de leur exécution.

Cependant, TRACFIN et l'autorité de contrôle ne peuvent demander communication de ces pièces que dans le seul but de reconstituer l'ensemble des transactions faites par une personne physique ou morale et liées à une opération ayant fait l'objet d'une déclaration, d'un examen particulier au sens de l'article L. 563-3 75 ( * ) ou d'une information mentionnée à l'article L. 563-5, ainsi que dans le but de renseigner les services des autres Etats exerçant des compétences analogues ;

- du droit de communication reconnu à l'administration fiscale dans les conditions du droit commun du livre des procédures fiscales 76 ( * ) .

Toutefois, au regard des exigences du Groupe d'action financière, le droit positif ne permettrait pas, semble-t-il, d'exercer un contrôle suffisamment efficace pour prévenir et, le cas échéant, sanctionner les montages juridiques qui, par le biais de la constitution d'une fiducie de droit français, n'auraient d'autre vocation que de blanchir des capitaux ou de faciliter le financement d'activités terroristes.

Ainsi, selon la recommandation n° 34 du GAFI , les Etats membres de cette organisation « devraient prendre des mesures pour empêcher l'utilisation illicite de constructions juridiques par les blanchisseurs de capitaux. Les pays devraient notamment s'assurer que des informations adéquates, pertinentes et à jour sur les trusts exprès, notamment des informations sur les personnes ayant constitué ces trusts exprès, les administrateurs et les bénéficiaires, peuvent être obtenues ou consultées en temps voulu par les autorités compétentes. Les pays pourraient envisager de prendre des mesures pour faciliter l'accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs et sur le contrôle des constructions juridiques, nécessaires aux institutions financières pour se conformer aux obligations découlant de la Recommandation 5 77 ( * ) . »

Votre commission vous propose de mettre en oeuvre cette recommandation dans le cadre du mécanisme fiduciaire qu'elle vous propose.

Ainsi, les documents relatifs au contrat de fiducie devront être transmis, à leur demande :

- à TRACFIN ;

- aux services des douanes et aux officiers de police judiciaire ;

- aux autorités de contrôle compétentes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux ;

- à l'administration fiscale ;

- au juge.

Contrairement aux dispositions actuelles du code monétaire et financier, cette demande n'aurait pas à s'inscrire dans une déclaration de soupçon préalablement faite ou à un examen particulier antérieur .

Ce droit de communication s'exercerait auprès du fiduciaire, du constituant ou du bénéficiaire de la fiducie ou, plus largement, auprès de toute personne physique ou morale exerçant, de quelque manière que ce soit, un pouvoir de décision direct ou indirect sur la fiducie.

Les participants à l'opération fiduciaire ne pourront, en tout état de cause, opposer le secret professionnel pour refuser une telle modification.

Les documents pourront être exigés pendant une durée de dix ans après la fin du contrat de fiducie.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 15 ainsi rédigé par ses conclusions.

* 74 Institué par l'article L. 562-4 du code monétaire et financier.

* 75 Cet examen particulier consiste, pour la personne qui y procède, « à se renseigner auprès du client sur l'origine et la destination [des sommes en cause] ainsi que sur l'objet de la transaction et l'identité de la personne qui en bénéficie. »

* 76 Voir, supra, le commentaire de l'article 10 des conclusions de votre commission.

* 77 Selon cette recommandation, les institutions financières ne doivent pas tenir de comptes anonymes, ni de comptes sous des noms manifestement fictifs, les institutions financières devant prendre des mesures de vigilance à l'égard de la clientèle, notamment en identifiant et en vérifiant l'identité de leurs clients.

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