2. Une coordination intensifiée
La particularité de cette organisation est de combiner les activités de renseignement et de police judiciaire de manière très étroite. Cette imbrication se retrouve tout d'abord avec la cohabitation de services dédiés au renseignement, comme les renseignements généraux qui ne disposent pas d'officier de police judiciaire, avec des services exclusivement de police judiciaire comme la DNAT. La DST reste néanmoins l'illustration la plus aboutie de ce modèle puisque ce service est mixte.
L'intérêt de cette organisation est de rapprocher la prévention et la répression. En effet, en matière de terrorisme, une répression efficace est insuffisante puisque la commission d'un seul attentat constitue déjà un échec majeur, en particulier lorsqu'il s'agit de terrorisme islamiste.
En outre, comme l'a indiqué M. Michel Gaudin, directeur général de la police nationale, les liens entre terrorisme et criminalité organisée se multiplient, notamment pour financer les actions terroristes. En tirant les conséquences, la loi dite Perben II a rapproché la procédure pénale applicable à ces deux types de criminalité.
A titre d'exemple, un réseau d'islamistes radicaux impliqués dans le financement du terrorisme islamique international au moyen d'actes de délinquance de droit commun a été démantelé en région parisienne par la DST en novembre 2004. L'enquête a notamment permis d'établir que les personnes interpellées étaient les auteurs d'un vol à main armée en mars 2004 au préjudice de la Brink's, pour un montant de plus d'un million d'euros. Des liens étroits ont pu être démontrés entre des membres de ce réseau et le groupe dit des « filières tchétchènes » démantelé par la DST en décembre 2002, qui avait le projet de commettre plusieurs attentats à Paris.
Pour que ce système fonctionne, il est impératif que l'information circule entre tiers de confiance.
Elle doit circuler tout d'abord entre les juges et les policiers. Les différentes auditions auxquelles a procédé votre rapporteur ont signalé les excellentes relations entre ces deux parties. La spécialisation des juges d'une part et celle des policiers ou gendarmes en charge de ces dossiers, d'autre part, permettent de tisser des relations de travail solides qui n'ont pas le temps de se forger habituellement avec d'autres types de criminalité. Les juges rencontrés ont salué le professionnalisme des policiers et gendarmes, et réciproquement.
L'information doit ensuite pouvoir circuler entre services spécialisés. Plusieurs réformes sont venues renforcer cette coopération.
En 1984 a été créé au sein du ministère de l'intérieur, auprès du directeur général de la police nationale, l'Unité de Coordination de la Lutte Anti-Terroriste (UCLAT), structure permanente regroupant des représentants de toutes les directions actives de la police nationale. L'UCLAT, qui n'est pas un service opérationnel, a vu ses effectifs renforcés de quatre personnes depuis 2003. En outre, participe à ses réunions le bureau de lutte antiterroriste de la gendarmerie nationale (BLAT).
Par ailleurs, a été créé à la fin de l'année 2004, une cellule permanente regroupant les principaux services de renseignements français (DGSE, DST, RG) et composée de six personnes.
Mais surtout, la DST, les RG et la DNAT devraient être prochainement regroupés sur un même site à Levallois-Perret dans le courant de l'année 2006. Sans aller jusqu'à la fusion, des moyens devraient être mutualisés. Ainsi, en matière de formation initiale et continue, des sessions communes ont été programmées en 2005.
De la même manière que la centralisation des affaires de terrorisme au TGI de Paris facilite la coopération internationale, la spécialisation et la relative concentration des services de sécurité intérieure en charge de la lutte antiterroriste est un puissant vecteur de la coopération policière internationale ou bilatérale.
Enfin, ce rapprochement des services apparaît indispensable pour faire face à un terrorisme islamiste en pleine évolution qui brouille toujours plus les frontières classiques entre terrorisme d'origine interne et terrorisme d'origine externe.