b) Un dispositif procédural efficace
La loi du 9 septembre 1986 a également posé le principe de la centralisation à Paris des affaires de terrorisme . Ce dispositif est complété par des règles de procédure spécifiques modifiées notamment par les lois du 22 juillet 1996 et du 30 décembre 1996 en matière de perquisitions et de saisies et par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
La centralisation des affaires terroristes à Paris
Aux termes de l'article 706-17 du code de procédure pénale, le procureur de la République, le juge d'instruction et les juridictions de jugement de Paris disposent d'une compétence concurrente de celle résultant des règles de droit commun.
Ainsi, en cas d'infraction terroriste, le procureur de la République d'un tribunal autre que celui de Paris invitera le juge d'instruction à le dessaisir au profit du juge parisien. Après avoir avisé les parties et les avoir invitées à fournir leurs observations, le juge d'instruction prendra sa décision dans un délai compris entre huit jours et un mois. L'ordonnance par laquelle un juge d'instruction statue sur son dessaisissement peut faire l'objet d'un recours dans un délai de cinq jours devant la Cour de cassation. Dans les huit jours suivant la réception du dossier, celle-ci désignera le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information (article 706-22 du code de procédure pénale). Les actes et formalités accomplis avant le dessaisissement demeurent valables.
Des règles procédurales désormais communes à la grande criminalité mais présentant certaines spécificités
Le régime procédural applicable au terrorisme, dont certaines dispositions s'inspirent du régime particulier institué, plus tôt encore, en matière de trafic de stupéfiants, se distingue sur quatre points :
- La garde à vue peut être prolongée au-delà de la durée maximale de quarante-huit heures pour une nouvelle période de 48 heures. Cette prolongation est autorisée soit à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d'instruction. L'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à compter de la 72 ème heure (article 706-88 du code de procédure pénale).
- Les perquisitions peuvent être conduites en enquête préliminaire sur décision du juge des libertés et de la détention sans l'assentiment de la personne ; les perquisitions de nuit peuvent également être autorisées par le juge des libertés et de la détention en enquête préliminaire et en enquête de flagrance et par le juge d'instruction au cours d'une instruction (articles 706-89 et suivants du code de procédure pénale).
- Les actes criminels peuvent être jugés par une cour d'assises composée uniquement de magistrats professionnels (un président et six assesseurs ou, en appel, huit assesseurs) ; saisi d'un recours sur la formation de cette cour, le Conseil constitutionnel a estimé que cette composition dérogatoire présentait un caractère limité et que la différence de traitement ne procédait pas d'une discrimination injustifiée mais tendait à déjouer l'effet des pressions ou des menaces susceptibles d'altérer la sérénité de la juridiction de jugement 11 ( * ) (articles 706-25 et 706-27 du code de procédure pénale).
- La prescription de l'action publique s'élève à vingt ans pour les délits et à trente ans pour les crimes , au lieu de trois et dix ans comme dans le droit commun (article 63-4, article 706-25-1 et article 706-31 du code de procédure pénale).
L'introduction de la notion de criminalité organisée dans notre procédure pénale à la suite de la loi du 9 mars 2004 a conduit à étendre à la criminalité et à la délinquance organisées, sous certaines réserves, le régime de garde à vue et de perquisition applicable au terrorisme.
Si la lutte contre le terrorisme a inspiré certaines des dispositions de la loi « Perben 2 », elle disposera également de nouveaux moyens juridiques communs à l'ensemble de la criminalité organisée : opérations de surveillance et d'infiltration (articles 706-80 à 706-87 du code de procédure pénale), mesures conservatoires permettant au juge des libertés et de la détention d'ordonner le gel des avoirs de la personne suspecte (article 706-103 du code de procédure pénale), écoutes téléphoniques au cours de l'enquête et opérations de sonorisation au cours de l'instruction (articles 706-89 à 706-102 du code de procédure pénale).
* 11 Conseil constitutionnel, décision n° 86-213, DC 3 septembre 1986.