B. UN DISPOSITIF COMPLET DANS LE CADRE DU « PROCESSUS LAMFALUSSY »
1. Une des premières directives issues du « processus Lamfalussy »
Le dispositif communautaire relatif à l'abus de marché s'inscrit dans le cadre procédural spécifique du « processus Lamfalussy 10 ( * ) », initié le 5 février 2002 11 ( * ) et qui permet d'adopter des règlements ou directives mieux adaptés au terrain , dans la mesure où ils sont préparés après la consultation des acteurs concernés, et permettant une plus grande harmonisation , car la procédure prévoit davantage de coopération entre les régulateurs des différents Etats membres.
Cette architecture décisionnelle en quatre niveaux (détaillés dans l'encadré ci-après), que d'aucuns pourraient qualifier de « chef d'oeuvre de l'eurocratie », ne constitue pas réellement un facteur de simplification du processus législatif, mais permet d'aboutir à des textes plus opérationnels et novateurs, et d'atténuer ainsi certaines critiques formulées à l'encontre du contenu parfois « evanescent » de la législation européenne en matière financière. Cette démarche a, de fait, été étendue en novembre 2003 aux secteurs des banques, des assurances et des retraites professionnelles , et a fait l'objet d'une première évaluation, assortie de propositions d'amélioration, en novembre 2004.
La technicité des mesures envisagées suppose, en effet, d'associer pleinement les professionnels à l'élaboration de la législation, mais le développement de cette « comitologie » peut aussi être perçu comme un obstacle au fonctionnement démocratique des institutions . Ce risque de survalorisation de l'expertise, au détriment de l'examen et du vote de la loi par le Parlement européen, est particulièrement prégnant au niveau 2 du processus, où l'intervention des comités de régulateurs européens est susceptible d'aboutir à la mise en oeuvre de dispositions déterminantes pour le fonctionnement des marchés financiers européens, comme l'illustre avec une acuité particulière l'application de la directive sur les marchés d'instruments financiers (cf. infra ).
NIVEAU 2 : ELABORATION DES MESURES D'EXECUTION
L'approche à quatre niveaux du processus Lamfalussy
NIVEAU 1 : ELABORATION DE LA LEGISLATION
La Commission adopte une proposition formelle de directive ou de règlement après avoir procédé à toutes les consultations prévues, notamment celle du Comité européen des valeurs mobilières ( CEVM )
La Commission examine cet avis et présente une proposition au CEVM quand cela est prévu au niveau 1
Parlement européen
Conseil
CESR élabore des recommandations interprétatives communes, des lignes directrices cohérentes et des standards communs (dans les domaines qui ne sont pas couverts par des mesures de niveaux 2), organise des évaluations réciproques et compare les pratiques réglementaires en vue d'assurer une mise en oeuvre et une application cohérente des règles
NIVEAU 3 : COOPERATION DES REGULATEURS
La Commission peut entreprendre un recours contre tout Etat membre qui ne respecterait pas le droit communautaire
La Commission vérifie que les Etats membres sont en conformité avec la législation de l'UE
NIVEAU 4 : CONTRÔLE DU RESPECT DU DROIT
Le Parlement européen est tenu pleinement informé et peut adopter une résolution si les mesures excédent les pouvoirs d'exécution
Le CEVM vote sur la proposition dans un délai de 3 mois maximum
La commission, après avoir consulté le CEVM , sollicite l'avis, quand cela est prévu au niveau 1, du Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM) pour entamer la rédaction des mesures techniques d'exécution
Le CERVM prépare, en consultation avec les professionnels et les consommateurs, un avis qu'il soumet à la Commission
La Commission adopte la mesure
Accord sur des principes-cadres et définition de pouvoirs d'exécution dans la directive ou le règlement et désignation du CEVM comme comité de réglementation
* 10 Du nom du baron Alexandre Lamfalussy, président du Comité des sages qui a inventé cette méthode en 2001. La méthode fut, en premier lieu, destinée à réguler plus efficacement les valeurs mobilières sur le marché européen, puis a très vite été étendue à l'ensemble des services financiers.
* 11 Résolution du Parlement européen du 5 février 2002 sur la mise en oeuvre de la législation relative aux services financiers.