ARTICLE
47
Renforcement du contrôle de produits pétroliers
bénéficiant d'un régime fiscal privilégié
sous condition d'emploi
Commentaire : le présent article tend à renforcer le contrôle de la distribution conforme aux conditions d'emploi fixées par la loi, de produits pétroliers bénéficiaires d'un régime fiscal privilégié. A cet effet, les distributeurs devraient, à la première réquisition, communiquer les noms des utilisateurs et les volumes des produits cédés. Le défaut de justification de la destination de ces produits donnerait lieu à l'exigibilité du supplément de taxes applicables sur les quantités non justifiées, sans préjudice des pénalités encourues.
I. LA SITUATION ACTUELLE
La législation a prévu plusieurs régimes fiscaux privilégiés, en faveur de produits pétroliers sous la condition d'un emploi déterminé.
Ainsi, certains produits bénéficient d'un tarif réduit de TIPP , comme le gazole , taxé à 5,66 euros par hectolitre (au lieu de 41,69 euros par hectolitre), à la condition d'être utilisé comme carburant pour l'alimentation de certains moteurs ou comme combustible de chauffage . D'autres produits sont exonérés de TIPP sous condition d'emploi, comme les produits pétroliers utilisés autrement que comme carburant ou combustible de chauffage (pétrole lampant et white spirit principalement). Ces régimes sont à distinguer des systèmes mis en place pour certaines professions (transporteurs routiers de marchandises et de voyageurs, par exemple), consistant à leur accorder le bénéfice de remboursements sur justificatifs , pour lesquels le problème du contrôle ne se pose pas.
Il importe alors que l'utilisation conforme à l'emploi prévu puisse être contrôlée efficacement , d'autant que la dépense fiscale de ces régimes est particulièrement élevée (le régime applicable au fioul domestique coûte chaque année 1,2 milliard d'euros et celui concernant les produits pétroliers utilisés autrement que carburant ou combustible de chauffage est évalué à 1,7 milliard d'euros).
Or, le contrôle sur les produits pétroliers bénéficiant d'une fiscalité privilégiée sous condition d'emploi varie, selon les produits en cause , dans ses formes, ses modalités et son intensité, et ce sur la base de dispositions réglementaires. Ainsi, les produits destinés à l'avitaillement des bateaux et des avions sont stockés dans des dépôts spéciaux situés dans des ports et aéroports et contrôlés étroitement par l'administration des douanes. De même, les produits autoconsommés dans les raffineries et les produits utilisés dans des usines de cogénération font l'objet de contrôles douaniers adéquats. En revanche, les distributeurs et les utilisateurs de fioul domestique n'ont pas à être autorisés préalablement par l'administration. Il est donc possible d'acheter du fioul domestique avec un taux réduit de TIPP et de le détourner de son emploi, éventuellement avec la complicité du distributeur, qui n'est pas tenu de relever le nom du cessionnaire .
L'article 265 B du code des douanes, sanctionne par une taxation au taux plein, sans préjudice des pénalités encourues, la seule utilisation frauduleuse des produits, c'est à dire une utilisation pour « des usages ou dans des conditions n'ouvrant plus droit au régime privilégié dont ils ont bénéficié ». Ainsi, le fioul domestique ne peut être utilisé dans les véhicules routiers. Pour faciliter le contrôle, le fioul est mélangé à un colorant, ce qui permet aux agents des douanes de découvrir l'éventuel détournement d'emploi. En l'absence de dispositions particulières, le contrôle repose sur la preuve du détournement d'emploi, son efficacité étant de ce fait limitée aux utilisateurs et non aux distributeurs .
Or, la distribution frauduleuse de tels produits, qui n'est pas sanctionnée par les textes, peut donner lieu à fausse facturation ou, plus généralement, à absence de justification des destinations réellement données à ces produits détaxés ou faiblement taxés.
Selon les indications du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, 1 % des quantités seraient ainsi détournées de leur destination légale .
II. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES
Le présent article a essentiellement pour objet de renforcer le contrôle pesant sur les distributeurs de fioul domestique et de produits pétroliers à usage autre que carburant ou combustible, même si son insertion dans l'article 265 B du code des douanes lui donne une portée générale.
En premier lieu, les mesures de contrôle de la vente, de la détention, du transport et de l'utilisation des produits seraient prises par arrêté du ministre chargé du budget, au lieu d'être prescrites par le directeur général des douanes et des droits indirects.
De plus, à la première réquisition du service des douanes, les distributeurs devraient notamment pouvoir communiquer les noms de leurs acheteurs ainsi que les volumes de produits cédés.
L'absence de justification de la destination donnée à ces produits donnerait lieu à l'exigibilité du supplément des taxes applicables sur les quantités non justifiées, sans préjudice des pénalités encourues, comme cela est déjà le cas pour les utilisations frauduleuses de produits.
Ces dispositions entreraient en vigueur à compter du 1 er janvier 2005. Elles seraient, selon les indications du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, susceptibles de permettre à l'Etat de « récupérer » 29 millions d'euros 65 ( * ) .
III LA POSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel et le présent article ainsi modifié.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur général est très favorable à cette disposition de bonne gestion.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
* 65 La dépense fiscale du régime des produits utilisés autrement que comme carburant ou combustible est estimé à 1,7 milliard d'euros et celle liée au régime fiscal du fioul domestique à 1,2 milliard d'euros. Le ministère considère qu'environ 1 % des quantités sont détournées de leur destination légale et donc que la somme susceptible d'être recouvrée grâce aux dispositions proposées serait de l'ordre de 29 millions d'euros.