c) L'autorisation de percevoir les recettes sociales
Cet objectif, qui vise à instaurer dans la pratique l'autonomie des finances sociales, revêt une portée symbolique essentielle.
Les articles 2 et 4 de l'ordonnance organique relative aux lois de finances de 1959 disposaient respectivement que « la loi de finances de l'année prévoit et autorise, pour chaque année civile, l'ensemble des ressources et des charges de l'État » et que « l'autorisation de percevoir les impôts est annuelle, le rendement des impôts dont le produit est affecté à l'État est évalué par la loi de finances » .
Qu'en était-il en pratique ? Pour la commission des finances du Sénat, la rédaction prévue par l'ordonnance organique « s'applique aux impôts, produits et revenus affectés à l'État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir » 5 ( * ) .
Le texte de 1959 ne pouvait à l'évidence prendre en compte l'existence des lois de financement créées en 1996. Mais le caractère restrictif de la compétence de la loi de finances sur l'autorisation de percevoir autorisait une coexistence pacifique avec la loi de financement malgré l'interprétation de la commission des finances.
Étrangement, la loi organique du 1 er août 2001 a méconnu l'existence des lois de financement. Disposant dans son article 34 que la loi de finances « autorise, pour l'année, la perception des ressources de l'État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l'État », elle introduit une sorte de schizophrénie paradoxale dans le champs des finances publiques : son application littérale conduit la loi de finances à autoriser la perception de recettes dont elle ne connaît ni l'assiette, ni le taux, ni le destinataire.
Elle donne finalement à la loi de finances une forme de pouvoir d' exequatur sur les mesures relatives aux recettes prises en lois de financement : celles-ci n'ont de force juridique que par l'intermédiaire d'une décision extérieure (article premier de la loi de finances). Aucun argument ne justifie une telle dichotomie, d'autant que le principal impôt français - la contribution sociale généralisée - est voté en loi de financement.
Il conviendra de réparer ce qu'elle interprète comme une coordination imparfaite entre les deux textes.
* 5 Commentaire de l'article premier de la loi de finances pour 1999 - Rapport général (n° 66), tome II.