CONCLUSION
Les actions de solidarité internationale doivent pouvoir compter sur un statut original, à mi-chemin entre le bénévolat et le salariat. L'objet du présent projet de loi est d'encadrer ce statut et de lui donner des garanties solides pour assurer sa place et la spécificité d'une démarche de générosité aux côtés d'autres formes d'engagement dans l'action des organisations de solidarité internationale.
Le succès du volontariat reposera en partie sur l'encouragement que l'Etat voudra bien lui apporter, sous la forme de concours budgétaires aux associations qui expatrient des volontaires.
Il repose également sur le respect, par tous les acteurs, de l'originalité de la démarche de volontariat.
Le projet de loi met en place un dispositif souple qu'il appartiendra aux organisations de solidarité internationale de faire évoluer dans le respect des règles posées par l'Etat et de se saisir de ce dossier sous tous ses aspects, y compris le devenir des volontaires qui ont quitté leurs rangs.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission a examiné le présent rapport lors de sa réunion du 31 mars 2004.
À la suite de l'exposé du rapporteur, Mme Monique Cerisier-ben Guiga a estimé que plusieurs points soulignés par le rapporteur rejoignaient ses propres préoccupations. Elle s'est notamment félicitée que le projet de loi vienne combler un vide juridique et dote le volontariat d'un statut plus solide que celui reposant actuellement sur un simple décret, tout en relevant que certaines garanties apportées par le texte répondaient davantage aux demandes des associations qu'à celles des volontaires eux-mêmes. Elle a cependant considéré que le statut de « bénévolat indemnisé » prévu pour le volontariat n'était pas pleinement satisfaisant, du fait notamment de son caractère intermédiaire entre le bénévolat et le salariat.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga a évoqué le risque de voir les associations de volontariat financièrement les plus fragiles se retrouver pénalisées si l'aide apportée par le budget de l'Etat reste inchangée, alors que le nombre de volontaires concernés par le nouveau statut est plus important. Elle a précisé, à ce propos, que les associations intervenant dans l'aide humanitaire d'urgence disposaient d'une capacité à lever des fonds beaucoup plus importante que les associations axées sur le développement, beaucoup plus dépendantes des fonds budgétaires alloués par l'Etat, ces derniers n'ayant au demeurant pas été revalorisés depuis plus de quinze ans.
Elle a également regretté que le projet de loi laisse subsister certaines lacunes. Ainsi, il apparaît que toutes les associations, et notamment les plus petites, n'ont pas les moyens d'apporter toute l'attention voulue à la sélection, à la formation, au suivi et à la réinsertion des volontaires.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga a par ailleurs estimé que les dispositions relatives à la durée du contrat de volontariat n'étaient pas satisfaisantes, la limite de 6 ans apparaissant trop longue pour une mission continue, mais aussi trop courte pour des missions discontinues. Il lui a paru nécessaire de ne pas autoriser des missions continues de plus de deux ans, afin d'éviter les difficultés de réinsertion que peut entraîner un trop long séjour à l'étranger tout comme certaines dérives, consistant à placer des volontaires sur des missions devant plutôt relever de personnels salariés.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga a enfin souligné le rôle très important de la commission du volontariat et souhaité que son existence soit prévue dans la loi, et non par un simple décret.
M. Xavier de Villepin a interrogé le rapporteur sur l'existence de formules de volontariat dans d'autres pays d'Europe. Il a évoqué le volontariat en entreprise et au sein des services de l'Etat à l'étranger. Enfin, il a souhaité savoir si certains pays exprimaient des réticences face à l'accueil de volontaires et à la délivrance de visas.
Mme Maryse Bergé-Lavigne a demandé si les associations étaient en mesure d'assurer un suivi et un soutien psychologique adapté lorsque certains de leurs volontaires étaient confrontés, dans leur pays d'envoi, à certaines situations particulièrement traumatisantes.
M. André Dulait, président , a souligné, à ce propos, l'intérêt, pour les associations et notamment les plus petites, de se regrouper pour mettre en place des actions communes en matière de soutien ou de réinsertion.
Mme Hélène Luc a soulevé les difficultés provenant de l'absence de distinction, dans le projet de loi, entre missions continues et discontinues. Elle s'est interrogée sur la prise en compte, par le texte, des personnes intervenant sur des missions très courtes, par exemple à la suite de catastrophes comme les tremblements de terre. Elle a regretté, plus globalement, que la France demeure parmi les pays accordant l'aide la plus faible aux organisations non gouvernementales. Elle a estimé que l'affiliation à l'assurance chômage serait un élément très positif pour donner des garanties aux jeunes souhaitant s'engager dans un volontariat. Elle a indiqué que le vote favorable du groupe communiste républicain et citoyen serait subordonné aux améliorations qui pourront être apportées au projet de loi.
M. Louis Moinard a demandé si le statut prévu par le projet de loi et l'aide de l'Etat qui y est associée ne concernaient que les volontaires envoyés par des associations ou pouvaient également bénéficier à des personnes agissant à titre individuel. Il a par ailleurs souhaité savoir si les associations rendaient compte des activités effectuées par les volontaires au cours de leurs missions.
Mme Paulette Brisepierre a souligné les difficultés qui pouvaient naître de l'envoi de volontaires par des associations trop petites qui ne sont pas toujours en mesure de garantir de bonnes conditions de réalisation de la mission.
M. André Dulait, président , a insisté sur l'importance de bilans périodiques sur les activités des organisations non gouvernementales, et notamment celles recevant une aide financière conséquente de l'Etat.
En réponse à ces différentes interventions, M. Jean-Marie Poirier, rapporteur , a ajouté les précisions suivantes :
- le volontariat constitue effectivement un statut mixte, intermédiaire entre le bénévolat et le salariat, qui semble propre à la France, puisqu'aucun autre pays européen n'a mis en place un statut équivalent ;
- il sera nécessaire d'attirer l'attention du gouvernement, lors de la discussion du projet de loi en séance publique, sur la nécessité de doter la ligne budgétaire consacrée au volontariat de montants permettant de faire face à l'augmentation prévisible du nombre de volontaires, faute de quoi certaines associations pourraient voir leur capacité réduite par rapport à la situation actuelle ;
- une expatriation trop longue au titre du volontariat peut créer des difficultés de réinsertion, notamment pour les volontaires les plus jeunes qui ne disposeraient d'aucune expérience professionnelle antérieure ; aussi bien un amendement sera-t-il proposé en vue de fixer une limite maximale de deux ans au contrat de volontariat, sans exclure un renouvellement à l'issue de cette période ;
- l'affiliation à l'assurance-chômage ne semble pas compatible avec la nature même du volontariat, qui se distingue du salariat et qui résulte d'une démarche personnelle de solidarité délibérément limitée dans le temps ;
- un amendement sera proposé pour faire figurer dans la loi la commission du volontariat, cette dernière étant appelée à jouer un rôle très important dans la gestion et le suivi du dispositif ;
- près de 80 % des volontaires sont envoyés par 5 associations seulement, ces associations apportant une attention particulière aux questions de formation, de soutien, de suivi ou de réinsertion des volontaires, y compris lorsqu'il s'agit d'apporter une aide psychologique au retour de missions difficiles ; il apparaît toutefois judicieux de promouvoir une certaine « mutualisation » de toutes ces activités de soutien aux volontaires, afin que les associations les plus petites puissent s'appuyer sur l'expérience des plus grandes en la matière ;
- certains pays, comme le Brésil, refusent d'accueillir des volontaires sur leur territoire ;
- le statut prévu par le projet de loi, notamment la couverture sociale, s'appliquera à tous les volontaires quelle que soit la durée de leur mission ; en revanche, l'aide de l'Etat n'est prévue que pour les missions effectuées dans les pays en développement au-delà d'une certaine durée qui sera précisée dans le décret ;
- une mission spécifiquement compétente pour la coopération non gouvernementale siège auprès du ministre de la coopération ; d'autre part, la Cour des Comptes prépare actuellement un rapport sur les financements dont bénéficient les organisations non gouvernementales.
La commission a ensuite procédé à l'examen des articles.
Elle a adopté sans modification l' article premier définissant le contrat de volontariat et ses principales caractéristiques.
A l' article 2 , elle a adopté un amendement visant à préciser que le volontariat est ouvert aux ressortissants étrangers titulaires d'une carte de résident ou d'un titre équivalent, de manière à éviter aux associations de devoir interpréter la notion de résidence habituelle.
A l' article 3 , elle a adopté un amendement disposant que les volontaires retrouvent leurs droits à l'assurance chômage acquis antérieurement à la signature d'un contrat d'au moins un an dans tous les cas de cessation anticipée de ce contrat, quelle qu'en soit la cause, et non exclusivement en cas d'interruption pour cas de force majeure ou de retrait de l'agrément.
La commission a ensuite examiné l' article 4 .
M. Jean-Marie Poirier, rapporteur , a proposé de limiter la durée maximale du contrat de volontariat à deux années, avec possibilité de renouvellement éventuel, afin de prendre en compte les difficultés de réinsertion consécutives à des durées d'expatriation trop longues. Il a précisé que sans remettre en cause la possibilité d'une mission continue supérieure à deux ans, cette solution instaurait une « clause de rendez-vous » après deux ans de volontariat, afin d'amener le volontaire comme l'association à pleinement évaluer les conséquences d'une éventuelle prolongation.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga a considéré que la proposition du rapporteur n'empêchait en rien d'enchaîner trois contrats d'une durée de deux ans, une telle durée étant excessive dans la perspective de la réinsertion du volontaire, alors que ce type de mission longue semble devoir relever du salariat, et non du volontariat. Elle a souhaité qu'une limite maximale de deux ans soit instaurée pour les missions continues. Elle a insisté sur les difficultés de réinsertion rencontrées par les jeunes dépourvus d'une expérience professionnelle antérieure lorsqu'ils retournent en métropole après une période d'expatriation prolongée.
Mme Hélène Luc a souligné que les dispositions relatives à la durée du contrat devaient s'attacher à maintenir un statut suffisamment attractif pour les jeunes qui envisagent un volontariat.
M. André Dulait, président , a relevé que si l'amendement proposé par le rapporteur n'exclut pas une mission supérieure à deux ans, après renouvellement du contrat, il fixe néanmoins une échéance de réexamen du contrat après deux ans de volontariat alors qu'en l'état actuel, le projet de loi laisse une totale liberté aux contractants dans la limite de six ans.
M. Jean-Marie Poirier, rapporteur , a reconnu que la question de la durée du contrat revêtait une importance certaine pour les jeunes qui s'engagent dans un volontariat sans posséder d'expérience professionnelle préalable. Il a cependant souligné que cette catégorie n'était pas numériquement la plus importante, puisque près de 60 % des volontaires ont plus de 28 ans. Il lui a paru nécessaire de maintenir des règles suffisamment souples pour demeurer pertinentes à l'égard de tous les types de situations rencontrées, y compris lorsque la prolongation du contrat de deux ans ne présente aucun inconvénient pour le volontaire ou l'association qui l'envoie. Il a donc estimé inopportun de limiter à deux ans au maximum la durée d'une mission accomplie de façon continue. Il a considéré que sa proposition d'amendement amenait l'association comme le volontaire à s'interroger sur l'opportunité de prolonger le contrat au-delà de deux ans.
A la suite de ce débat, la commission a adopté l'amendement proposé par le rapporteur limitant la durée du contrat à deux années, ce contrat pouvant toutefois être renouvelé.
La commission a également adopté trois autres amendements à l' article 4 :
- le premier visant à créer une obligation légale, pour les associations, d'apporter un appui à la réinsertion professionnelle des volontaires à leur retour ;
- le deuxième précisant que l'association assure le retour du volontaire dans tous les cas de rupture anticipée de contrat, et non exclusivement en cas de force majeure ou de retrait de l'agrément ;
- le troisième prévoyant que le décret d'application initialement mentionné au deuxième alinéa se rapporterait à l'ensemble des dispositions de l'article, en vue notamment de détailler les mentions qui devront figurer dans le contrat et les conditions dans lesquelles ce dernier peut être rompu à l'initiative de l'une ou l'autre partie.
La commission a ensuite adopté sans modification l' article 5 , relatif à la couverture sociale, l' article 6 , relatif aux congés et l' article 7 , portant sur l'indemnité et les exonérations fiscales dont elle bénéficie.
Après l'article 7 , la commission a adopté un article additionnel visant à mentionner dans la loi la commission du volontariat regroupant les représentants de l'Etat et ceux des associations de volontariat. Mme Monique Cerisier-ben Guiga a précisé que son groupe ne voterait pas cet amendement dans la mesure où il soutiendra un amendement décrivant de manière beaucoup plus détaillée la composition de la commission et ses attributions.
A l' article 8 , la commission a adopté un amendement précisant que la commission du volontariat émet un avis sur les demandes d'agrément.
Elle a adopté sans modification l' article 9 relatif à l'application de la loi dans les collectivités d'outre-mer.
La commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi amendé , les commissaires du groupe socialiste et du groupe communiste, républicain et citoyen s'abstenant.