III. TABLE RONDE
MM.
René BAGORSKI, Conseiller confédéral à la
CGT
Dominique de CALAN du MEDEF
Jean-Jacques BRIOUZE, Conseiller
confédéral pour la formation
professionnelle à la
CFE-CGC
Marcel BROUARD, Conseiller technique à la CFE-CGC
Lionel
DUBOIS, Secrétaire confédéral, chargé de la
formation à la CFTC
Jean-Claude QUENTIN, Secrétaire
confédéral de la CGT-FO
Mme Annie THOMAS, Secrétaire
nationale de la CFTC et
M. Jean-François VEYSSET,
Vice-Président de la CGPME
Rapporteur du projet de loi : Mme
Annick BOCANDÉ
(jeudi 22 janvier
2004)
M.
Nicolas ABOUT, président -
Mesdames et messieurs, mes chers
collègues, nous sommes aujourd'hui réunis pour une table ronde
autour des parties signataires de l'accord national interprofessionnel du
20 septembre 2003 relatif à « l'accès des
salariés à la formation tout au long de la vie
professionnelle »
23
(
*
)
. Cette table ronde faisant l'objet d'une diffusion
par notre chaîne
Public Sénat
, nous allons essayer de la
rendre la plus animée possible, en évitant qu'elle prenne la
forme d'une succession de monologues.
Mme Annick BOCANDÉ, rapporteur
- Monsieur le président,
cette table ronde est, en effet, consacrée au projet de loi sur la
formation professionnelle qui fait suite à l'accord du
20 septembre 2003, que beaucoup considèrent comme historique.
Il est historique tout d'abord sur le fond, puisqu'il ouvre un droit individuel
à la formation (DIF) permettant aux salariés de
bénéficier de vingt heures de formation par an, cumulable
sur six ans à leur initiative et avec l'accord de l'employeur. En
fonction d'accord de branche ou d'entreprise, certaines formations peuvent se
dérouler pendant le temps de travail, avec le maintien de la
rémunération, ou en dehors du temps de travail, avec une
allocation de formation supplémentaire. Ce dispositif nouveau
nécessitant des fonds supplémentaires, les entreprises ont
consenti un effort financier exceptionnel puisque la contribution légale
passera de 1,5 % à 1,6 % de la masse salariale pour les
entreprises de plus de dix salariés, et de 0,15 % à
0,40 %, puis à 0,55 % à partir de 2005, pour les
entreprises de moins de 10 salariés.
Cet accord est aussi historique sur la forme, puisque tous les partenaires qui
ont négocié cet accord l'ont signé. Nous ne pouvons qu'en
être satisfaits, car c'est la preuve que le dialogue social est vivant et
dynamique. Certains s'inquiètent toutefois du fait que cette
avancée de la démocratie sociale, que j'avais eu l'occasion
d'appeler de mes voeux, puisse amputer le rôle du Parlement. Je ne pense
pas que ce soit le cas, puisque le rôle du Parlement consiste à
examiner, comme nous le faisons à présent, la transposition de
cet accord dans une loi, tout en veillant aux grands équilibres.
Cinq thèmes seront abordés au cours de cette table ronde :
l'accord national interprofessionnel (ANI) ;
le droit individuel à la formation (DIF) ;
la révision du plan de formation de l'entreprise ;
les contrats et périodes de professionnalisation ;
l'articulation de ce projet de loi avec la décentralisation de la
formation professionnelle aux régions.
Je poserai tout d'abord aux invités la question préliminaire
suivante : En quelques mots, comment qualifieriez-vous l'accord national
interprofessionnel que chacun d'entre vous a signé le
20 septembre 2003 ? Au regard de ce qui s'est passé
depuis cette date, si c'était à refaire, signeriez-vous
aujourd'hui cet accord ?
Mme Annie THOMAS -
Monsieur le président, madame le rapporteur,
nous n'avons pas à regretter d'avoir signé l'accord, et s'il
s'agissait d'apposer dès ce soir la signature de la CFDT, je le ferai
sans hésiter. Lorsque nous avons négocié cet accord, nous
l'avons fait en pensant aux salariés, en pensant aux évolutions
qu'ils vivent dans leur emploi, aux problèmes de chômage qu'ils
peuvent être amenés à subir, aux ruptures de
carrières, aux changements et aux adaptations nécessaires. Dans
cet univers qui bouge, la formation apparaît à la CFDT comme une
force au service du salarié. C'est pour cela que nous avons
souhaité faire en sorte, au travers de cet accord, de rénover un
système viable qui a fait ses preuves, mais qui était
arrivé au bout de sa logique. Il fallait faire en sorte que la formation
soit désormais un passeport pour permettre aux salariés
d'évoluer dans leur vie professionnelle. Nous considérons par
ailleurs que la formation est un mode d'accomplissement personnel et collectif,
à l'heure où l'économie française réclame
tous les jours plus de qualification de la part des salariés. Les
partenaires sociaux devaient mettre en place un nouveau système par le
biais de la négociation, avant que le résultat de celle-ci soit
traduit par le Parlement dans la loi. Nous sommes donc extrêmement
satisfaits de ce résultat.
La méthode consistant à inciter les partenaires sociaux à
négocier, puis à passer le relais aux parlementaires, n'est pas
nouvelle puisque, depuis 30 ans, la négociation sociale a
très souvent précédé les lois relatives à la
formation professionnelle. La puissance publique a en effet toujours
estimé, dans sa grande sagesse, que les partenaires sociaux
étaient ceux qui connaissaient le mieux les besoins de l'entreprise et
par conséquent les plus à même d'y répondre. Aux
trois points novateurs mis en avant par Mme le rapporteur, j'ajouterai ce que
nous avons mis en place en termes de moyens d'accompagnement, autour de
l'entretien professionnel, du passeport formation et de l'accès à
la validation et au bilan de compétences, étant entendu qu'il ne
s'agit pas, selon la CFDT, de créer un dispositif, aussi beau soit-il,
sans se préoccuper que tous les salariés puissent y
accéder. Le bilan du précédent système fait en
effet état de très fortes inégalités d'accès
à la formation que nous entendons corriger.
M. le PRÉSIDENT -
Monsieur de Calan, estimez-vous toujours, que
l'accord du 20 septembre 2003 est historique ?
M. Dominique de CALAN
- Je le pense d'autant plus que l'accord du
20 septembre a été suivi et conforté par un nouvel
accord conclu le 5 décembre de la même année, au
travers duquel les partenaires sociaux ont décidé de revalider
tous les accords anciens. Je voudrais insister sur le fait que celui-ci a
été très longuement négocié. Il s'appuie
d'une part sur trente ans de mise en oeuvre de l'accord de 1970, qui a
été transcrit par la loi de 1971, et d'autre part sur
dix ans d'expérience en matière d'alternance (contrats de
qualification, d'adaptation et d'orientation). C'est au regard de cette longue
période d'innovation dans le domaine de la formation que nous avons
opéré une vraie révolution, et cela pour au moins quatre
raisons.
Nous affirmons ensemble que la formation des adultes doit s'appuyer sur
la codécision : on ne forme pas quelqu'un qui n'en a pas
envie ;
l'individualisation et la personnalisation sont indispensables, car on ne
peut pas parler d'adaptation à un monde qui bouge, sans personnaliser
les formations ;
nous proposons de professionnaliser la formation, comme l'indique la
notion de « contrat de professionnalisation », car il
s'agit d'être très réactif, dans un monde où l'on
changera trois ou quatre fois de métier;
il faut lever le conflit permanent entre l'obligation de présence
au poste de travail et la nécessité de partir en formation, en
permettant au salarié et à son employeur d'organiser la formation
pour partie pendant le temps de travail, pour partie en dehors du temps de
travail.
A ces quatre révolutions, il faut ajouter la révolution
financière, car les employeurs, pourtant si enclins à
dénoncer la lourdeur des charges, ont accepté une augmentation de
la dépense car ils estiment la formation professionnelle comme un
investissement, et non un coût.
M. Roland MUZEAU
- Il faudrait que nous rentrions rapidement dans le vif
du sujet, plutôt que de nous étendre sur le caractère
historique de cet accord. L'accord qui a été signé
étant évidemment un compromis, je souhaiterais que les
partenaires sociaux mettent en évidence les points qui se situent en
retrait de leurs ambitions, afin que nous puissions mesurer la marge de
manoeuvre que le législateur pourrait avoir à l'occasion du
débat parlementaire.
M. le PRÉSIDENT
- C'est le sens de la question posée.
Considérez-vous aussi, M. Jean-Jacques Briouze, que l'accord du
20 septembre est historique ? En êtes-vous pleinement
satisfait ?
M. Jean-Jacques BRIOUZE -
Comme l'a indiqué M. Roland Muzeau, il
s'agit d'un compromis. Néanmoins, nous avons été
suffisamment satisfaits pour y apposer notre signature. Au chapitre des
satisfactions, il faut noter, à la suite de M. de Calan, l'accord
précise que les salariés consacreront une partie de leur temps
personnel à la formation. Il y a trois ou quatre ans, ce point
était loin d'être évident. Il démontre la prise de
conscience des salariés de la nécessité pour eux de se
former. En ce sens, il nous paraît souhaitable que les employeurs
assument également leurs responsabilités en matière de
formation professionnelle.
Autre point de satisfaction : les salariés ont renoncé
à « la ligne Maginot », c'est-à-dire le
recours aux lois « défensives » par les
salariés qui veulent résister à certaines
évolutions des entreprises. Nous sommes ici dans une autre perspective,
une perspective dynamique, celle de l'anticipation de l'employabilité.
Les outils que nous avons mis en place dans le premier chapitre de l'accord, et
qui devront être affinés par la négociation au cours de ce
semestre, devraient permettre, si l'employeur, les représentants du
personnel et l'encadrement en sont convaincus, permettre au jour le jour le
développement des compétences et des qualifications dans
l'entreprise. Il s'agit bien là d'un travail au quotidien, car il ne
suffit pas, comme l'a montré l'accord de 1969 en matière
d'emploi, de mettre en place un beau système pour qu'il fonctionne.
Au chapitre des regrets, je voudrais souligner la nécessité de
rénover le congé individuel de formation pour en faire un nouveau
droit social ouvert à tous, y compris aux non-salariés.
C'est aux parlementaires de se prononcer sur ce projet, car celui-ci n'est pas
du ressort des partenaires sociaux. Nous ne sommes pas non plus très
satisfaits du droit individuel à la formation, dans la mesure où,
pour qu'il s'agisse réellement d'un droit, il faudrait que sa
transférabilité soit complète. Or sa mise en oeuvre est
soumise à l'accord préalable de l'employeur. Si cela peut
paraître normal, puisque ce dernier finance la formation, cela constitue
également une limitation de l'exercice du droit individuel à la
formation.
M. le PRÉSIDENT -
M. René Bagorski, pourquoi votre
organisation syndicale a-t-elle signé l'accord, bien qu'elle ne soit pas
très coutumière du fait ? N'avez-vous pas quelques
réserves à exprimer ?
M. René BAGORSKI -
Notre signature n'était ni attendue ni
souhaitée par certains, mais nous étions de ceux qui avaient
affiché dès le départ une volonté d'aboutir
à un accord. Nous avons en effet toujours considéré que le
dispositif mis en place en 1970 avait largement atteint ses limites, puisque
chaque année, seulement deux des sept millions de salariés
bénéficient d'une formation. Si nous avons signé cet
accord, c'est parce qu'il redéfinit l'ensemble du dispositif de
formation, et parce qu'il a un caractère normatif fort. Bien qu'il ne
soit qu'un compromis, nous avons construit tous ensemble le socle d'une
dynamique nouvelle. Je dis « dynamique » parce que l'accord
met un certain nombre d'outils à la disposition des salariés,
pour que, tout au long de leur vie professionnelle, ils aient les moyens, quels
que soient les aléas de la conjoncture, de préserver leur
employabilité et connaître une promotion sociale au sein de
l'entreprise.
Cet accord n'est cependant pas parfait, puisque, comme l'a dit Jean-Jacques
Briouze, il crée un droit individuel à la formation qui n'existe
que sur le papier puisque l'accord de l'entreprise est nécessaire pour
que ce droit soit effectif. Nous regrettons que le texte, qui a
été voté à l'Assemblée nationale, subordonne
le choix de l'action de formation aux priorités de branches. J'ajoute
que si nous avons accepté que ce droit à la formation s'exerce en
dehors du temps de travail, c'est bien parce qu'à nos yeux il doit
déboucher sur une reconnaissance et une certification. Il ne doit pas
s'agir simplement d'une formation visant une adaptabilité du
salarié à l'entreprise, mais d'un droit permettant au
salarié de progresser dans sa carrière en acquérant de
nouvelles qualifications.
Nous regrettons également que le DIF, qui est un droit exprimé en
nombre d'heures de formation, se transforme en un droit
monétarisé lorsque le salarié est licencié. Nous
souhaiterions que les heures de formation puissent être
capitalisées et utilisées dans la nouvelle entreprise du
salarié. On pourrait parler d'une vraie transférabilité si
nous avions obtenu cette avancée.
Il est également important aux yeux de la CGT que le plan de formation
soit véritablement négocié entre l'employeur et le
comité d'entreprise, notamment lorsque la formation des salariés
est effectuée en dehors des heures de travail effectif.
M. Gilbert CHABROUX
- Mme Annick Bocandé a demandé aux
partenaires sociaux si, aujourd'hui, ils seraient disposés à
signer à nouveau l'accord. Or j'aimerais que l'on parle aussi du texte
qui a été voté par l'Assemblée nationale, car
des modifications sont intervenues. La lettre adressée par les syndicats
relève un certain nombre de discordances entre le texte initial et le
projet de loi. J'aimerais donc connaître l'avis des partenaires sociaux
sur le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale.
M. le PRÉSIDENT
- Je vous rassure, M. Gilbert Chabroux, c'est
bien l'objet de cette table ronde. Il se trouve seulement qu'à votre
exemple, j'ai préféré faire un tour de table pour demander
aux partenaires s'ils sont d'accord avec le texte d'origine.
M. Guy FISCHER
- Un des points essentiels de l'accord porte sur la
formation pendant et en dehors du temps de travail. S'agit-il réellement
d'un point de blocage ou l'enjeu culturel était-il tel qu'il fallait
innover dans ce domaine ?
M. Lionel DUBOIS
- La CFTC a signé cet accord parce qu'elle
estimait qu'il allait dans le bon sens. Si c'était à refaire,
nous le resignerions parce qu'il met en place des outils importants en
matière de formation professionnelle. Malgré quelques
réticences, nous avons accepté le principe du co-investissement
parce que d'autres éléments positifs étaient mis en place.
Cet accord ne s'est pas fait en un jour, d'autant qu'exceptionnellement on ne
nous a pas soumis en matière de formation professionnelle un accord
déjà rédigé. Nous avons travaillé une bonne
année en commission, en collaboration avec le MEDEF qui a fait à
cette occasion la preuve d'une ouverture qu'il faut saluer. La
négociation finale fut longue et difficile, puisque qu'elle a
pratiquement duré vingt-quatre heures, mais nous sommes
arrivés à un accord au mot et à la virgule près.
Comme le Gouvernement nous avait donné mission de traiter de la
formation professionnelle, nous avions le sentiment que notre accord serait
repris dans son intégralité par l'Assemblée nationale et
par le Sénat. S'il est vrai que la lettre adressée par les
syndicats au ministre des affaires sociales, le 13 janvier dernier, fait
état de quelques divergences d'interprétation entre nous, elle
vise avant tout à préciser l'esprit de l'accord. Sur cette base,
la CFTC prend position en faveur de l'accord.
J'ajoute que l'accord ne met en place qu'une partie de la réforme de la
formation professionnelle tout au long de la vie. Il faudra envisager, et c'est
votre rôle en tant que parlementaires, de mettre en place des droits
complémentaires. A cet égard, nous avons été
déçus par les textes en préparation en ce qui concerne les
publics en difficulté, dans la mesure où ils ne prennent pas
comme base le nouveau contrat ou la période de professionnalisation pour
mettre en place de nouveaux dispositifs. Il serait préférable que
nous concevions en cohérence des outils pour les entreprises, ne
serait-ce que pour en faciliter la compréhension du système de
formation.
M. Jean-Claude QUENTIN
- Un bon accord, c'est un accord dans lequel les
uns ont le sentiment d'avoir trop donné et les autres ont le sentiment
de n'avoir pas assez obtenu. La logique de la négociation collective
implique qu'un accord n'est pas éternel. Il faut sans cesse remettre
l'ouvrage sur le métier. Quand on négocie un accord, il faut
toujours penser à la négociation suivante. La stabilité
d'un accord, fût-il interprofessionnel, n'est pas assurée,
même s'il faut tenir compte du compromis qu'il entérine.
Nous devions répondre à deux enjeux majeurs. Le premier but de
l'accord était de corriger les inégalités d'accès
à la formation continue. Je rappelle à ce sujet que lorsque vous
êtes une femme non qualifiée dans une entreprise de moins de
dix salariés, vous avez statistiquement vingt-cinq fois moins de
chance d'aller en formation qu'un homme ingénieur dans une entreprise de
plus de 500 salariés. La réponse proposée pour
répondre à ce premier enjeu consiste à donner à
chaque salarié un droit d'accès à la formation.
Le deuxième enjeu majeur de la négociation c'est de mettre les
entreprises en capacité de faire face à l'inversion de la
pyramide des âges qui nous attend dans les prochaines années, avec
son corollaire : les pénuries de qualification. En effet, les 50-60
ans vont devenir dans les prochaines années plus nombreux que les
20-30 ans. C'est à ce problème que répondent le DIF,
ainsi que la restructuration du plan de formation.
Avons-nous répondu complètement à ces deux enjeux ?
Probablement non, mais nous avons enclenché un mouvement, en
déclenchant un choc psychologique, qui doit amener les entreprises
à se préoccuper de leur capacité à se procurer les
qualifications dont elles ont besoin, tout en permettant à tous les
salariés d'accéder à la formation professionnelle.
Le question de savoir si les formations se dérouleront pendant ou en
dehors du temps de travail est importante. L'objectif dans ce domaine
était de faire comprendre au salarié qu'il était l'acteur
de sa propre formation. Jusqu'alors en effet, le salarié était
passif, y compris dans le cadre du congé individuel de formation. Or le
temps de formation en dehors du temps de travail appelle nécessairement
une logique de coïnvestissement. Le salarié est obligatoirement un
peu plus concerné par la valeur de sa formation si celle-ci à
lieu en dehors du temps de travail, d'autant qu'il est investi alors d'un
pouvoir de négociation, puisque nous parlons de codécision avec
l'employeur.
Trois entités sont concernées par cet accord :
le salarié, auquel on donne un pouvoir d'initiative ;
l'entreprise, qui cherche à se doter des compétences dont
elle a besoin ;
les organismes de formation, car le DIF n'existera que s'il correspond
réellement à une offre de formation.
Ce dernier point est préoccupant, car un calcul simple montre que si
seulement 30 % des 15 millions de salariés utilisaient le DIF,
il faudrait dispenser pas moins de 100 millions d'heures de formation...
La compétence de la région en matière de structuration de
l'offre de formation apparaît cruciale sur ce plan.
En ce qui concerne la transcription de l'accord du 20 septembre 2003
dans la loi, il me semble que si la légitimité du
législateur est sans conteste supérieure à la
légitimité des négociateurs, il ne faut pas que le
législateur décourage le négociateur.
M. le PRÉSIDENT -
Telle est notre préoccupation
aujourd'hui. M. Quentin ayant évoqué les petites
entreprises, je me tourne vers M. Veysset. Comment réagissez-vous
à cet accord ?
M. Jean-Claude VEYSSET -
Pour la CGPME, cet accord constitue un
véritable pacte sociétal. Il va falloir maintenant le mettre en
oeuvre. Il était temps que car, si nous pouvions nous féliciter
d'un certain nombre de bonnes pratiques, nous étions également
convaincus que l'échec partiel du précédent accord, repris
pour partie dans la loi quinquennale, s'expliquait en raison de l'absence
d'articulation entre la politique de l'emploi et de la formation
professionnelle. Le point le plus important de l'accord du 20 septembre
réside, à mon sens, dans le fait que nous mettons la formation
professionnelle au service de l'évolution des emplois.
Je peux témoigner de ce que nous n'avons pas attendu l'accord du
20 septembre pour organiser dans les petites entreprises des
périodes de formation en dehors du temps de travail, ne serait-ce
qu'à la marge. Nous étions en effet conscient du fait qu'il nous
fallait nous approprier l'investissement qu'est la formation de nos
collaborateurs. N'oublions pas qu'il n'y aurait pas d'entreprises sans les
salariés, de même qu'il ne peut y avoir de salariat sans
entreprenariat.
S'il est vrai que les entreprises vont devoir répondre au défi
démographique, elles devront aussi répondre au défi
posé par leur géographie, y compris pour les départements
d'outre-mer. Nous devons travailler à rapprocher le plus possibles nos
concitoyens des gisements d'emplois, c'est-à-dire là où,
si je puis dire, il n'a pas encore été délocalisé.
Mme Annick BOCANDÉ, rapporteur -
Dans la notion de
« droit individuel à la formation », il y a deux
mots très importants : le mot « droit », qui
porte reconnaissance d'un droit à la formation, même si ce droit
pourrait être amélioré ; le mot
« individuel », qui met l'accent sur la
nécessité d'individualiser les formations pour les adapter aux
besoins des entreprises et aux évolutions de carrière des
salariés.
Je voudrais connaître votre avis sur le dispositif qui est applicable aux
salariés à temps partiel ou sous contrat à durée
déterminée.
Mme Annie THOMAS
- La CFDT estime que l'accord comporte un certain
nombre de faiblesses, de sorte que le dossier ne nous apparaît pas
bouclé. Nous avons encore à construire la formation tout au long
de la vie pour tout le monde. Outre le problème de la
transférabilité du DIF, nous mettons en avant celui de la prise
en compte du territoire. Nous nous sommes battus, avec une seule autre
organisation, pour obtenir gain de cause sur ce point, en utilisant toutes les
entrées possibles (financement, structures, etc.), mais en vain.
L'accord du 20 septembre reste très structuré sur une
logique de branche, bien que celle-ci ne soit pas le principal niveau
d'approche des questions de formation. Aujourd'hui, les enjeux de la formation
et de l'emploi se situent sur les territoires. Nous n'avons pas
été très bons à Valenciennes, qui est un
rendez-vous manqué, mais il faudra revenir sur cette question.
Nous pensons en outre que l'ambition de mettre en place la formation tout au
long de la vie suppose qu'on la construise pour tout le monde. Je me tourne
vers les parlementaires : pourquoi l'État ne reprendrait-il pas
certains dispositifs prévus par l'accord pour les adapter aux
chômeurs dont il a responsabilité ? Chaque année, plus
de 60 000 jeunes sortent de l'école sans qualification :
c'est là l'un des grands échecs de notre système scolaire.
La Nation a une responsabilité vis-à-vis de ces jeunes. Les
partenaires sociaux ont mentionné dans l'accord qu'ils étaient
prêts à jouer leur rôle à leur égard.
Pourtant, nous ne pouvons le faire seuls. Si principe d'une formation
qualifiante différée pour ces jeunes est inscrit dans le projet
de loi, une déclaration de principe ne suffit pas. J'ose espérer
que le projet de loi sur l'emploi ou le projet de loi sur l'école
aborderont particulièrement la formation des jeunes sortis du
système scolaire sans qualification.
Dernier point, la CFDT a demandé, avec d'autres, l'extension de l'accord
aux fonctionnaires. L'enjeu de la formation est aussi important pour eux que
pour les salariés du privé.
Pour répondre à la question de Mme le rapporteur, je dirai que le
DIF est un droit inachevé, aussi bien au niveau de la
transférabilité qu'en ce qui concerne les salariés les
plus en difficulté que sont les salariés à temps partiel
et en CDD. Il y a là le résultat d'un compromis, puisqu'au
départ le patronat ne voulait pas que le DIF soit ouvert aux
salariés qui ne travaillaient pas à temps complet dans les
entreprises. Notre discours ces dernières semaines a consisté
à réclamer que le DIF soit étendu à toutes les
catégories de salariés, et cela même si les
modalités retenues à cette fin sont certainement insuffisantes,
notamment pour les salariés en CDD. Cette question a été
examinée il y a quinze jours lors d'une réunion paritaire des
partenaires sociaux. Nous avons réfléchi sur les modalités
de mise en oeuvre et de financement de l'extension du DIF aux salariés
en CDD. Que faire lorsqu'ils ont plusieurs employeurs ? La solution
retenue étant le résultat d'un compromis, la CFDT souhaite que
les partenaires sociaux se ressaisissent de ce dossier, avec l'aide des
pouvoirs publics et des parlementaires.
M. Roland MUZEAU -
Mme Annie Thomas vient de parler de
l'élargissement de l'accord aux fonctionnaires. J'aimerais savoir si les
cinq centrales syndicales ont eu des contacts avec l'État employeur dans
cette perspective ? Si oui, quels en sont les premiers
résultats ? Dans la lettre que vous avez adressée à
M. Fillon, vous pointez une inquiétude forte sur le DIF, qui donne
à penser que vous ne signeriez pas le texte qui vient de sortir de
l'Assemblée nationale.
M. Dominique de CALAN
- Le MEDEF n'est pas représentatif pour les
fonctionnaires, mais il est concerné par le sort de tous les
contractuels qui ont vocation à rentrer dans le secteur privé.
Bien évidemment, nous serions favorables à ce qu'un esprit de
médiation et de codécision se mette en place.
M. Quentin l'a indiqué tout à l'heure, le DIF va
nécessiter, au bas mot, la dispensation de 100 millions d'heures de
formation par an. Le seul coût de la formation que nous avons
accepté de prendre en charge est quant à lui estimé
à entre 1,5 milliard et 2 milliards d'euros. Et je ne parle
pas de la couverture du risque comptable, qui risque de nous amener par les
lois de la comptabilité, compte tenu d'un risque potentiel pouvant
atteindre 100 %, à provisionner de 4,5 à 6 milliards
d'euros. J'invite donc les partenaires sociaux et les parlementaires à
procéder avec prudence : le projet de mise en place du DIF doit
être réaliste, progressif et partagé. Il est vrai que nous
portons solidairement cet accord, comme l'a dit M. Lionel Dubois, car si vous
détruisez son équilibre au point d'inquiéter les patrons
de PME-PMI, qui trouvent déjà que nous avons pris en leur nom des
engagements coûteux, nous n'aurons pas le temps de rassurer, de persuader
et de mettre en place. Il faut comprendre que jusqu'à ce jour un certain
nombre de salariés ont été écartés de la
formation professionnelle, parce que les salariés et les entrepreneurs
n'en voyaient pas l'intérêt à court terme. Le droit
individuel est un engagement extrêmement fort qu'il serait
déraisonnable de déséquilibrer.
M. René Bagorski regrette que les heures capitalisées au titre du
DIF par le salarié licencié ne puissent être
transférées vers une autre entreprise et fassent l'objet d'une
compensation financière. La raison en est simple : un avantage
horaire ne peut pas être pris en compte par la comptabilité,
puisque l'on ne peut pas en fixer le coût. Nous avons collé au
terrain pour rendre la transférabilité opérationnelle.
Nous ne pouvons pas traîner pendant des années une dette que l'on
est incapable de chiffrer. Ce mode de fonctionnement a le mérite de
faire primer le réalisme sur les effets d'annonce.
Mme Annie Thomas a dit regretter pour sa part que l'on ait prévu un
régime différent pour les salariés en CDD et les
salariés à temps partiels. C'est aussi mon cas, mais il faut
considérer la complexité du système que nous aurions mis
en place, lorsque l'on sait qu'un même salarié peut avoir
plusieurs employeurs. Lequel de ces derniers devra ouvrir le droit à la
formation ? Un salarié ayant dix employeurs aurait-il eu droit
à 400 heures de formation ? Là encore nous avons mis en
place un système réaliste, qui présente l'avantage
essentiel de maintenir un lien entre son coût et la masse salariale. Je
voudrais par ailleurs demander que l'on nous laisse un espace de
liberté, de sorte que nous puissions éventuellement corriger les
imperfections de la solution retenue. Nous le ferons parce que nous sommes
très attachés à la formation. Pour ma part, j'ai
été le premier en France à ouvrir un droit à la
formation pour les contrats à durée déterminée.
M. le PRÉSIDENT
- Vous secrétez tellement d'envie de vous
répondre que je vais devoir vous interrompre !
M. Dominique de CALAN
- S'agissant du dilemme entre branche et
territoire, nous avons tenu à rappeler que la meilleure garantie de
mobilité professionnelle dans notre pays était la
mobilité. Une chose est sûre : lorsque je possède bien
un métier, je n'ai pas peur du changement. L'articulation entre branche
est territoire doit mettre en regard l'évolution du métier et sa
mise en oeuvre, qui sera nécessairement territorialisée.
M. Serge FRANCHIS
- Mme Annie Thomas interpelle l'État et les
parlementaires au sujet de la formation en général à juste
titre, même si ce n'est pas l'objet de la présente table ronde,
car c'est une préoccupation que nous devons avoir pour l'avenir.
M. Dominique de Calan nous a parlé, à propos de l'accord, d'une
révolution. Il est légitime que nous nous interrogions sur la
manière de mettre l'offre de formation en adéquation avec des
besoins. Les structures de formation vont vraisemblablement devoir
évoluer parce que leur degré de performance et leur nombre sont
très variables selon les branches. La mise en place de nouveaux moyens
est indispensable si nous ne voulons pas décevoir les entreprises ou les
salariés.
M. Jean-Jacques BRIOUZE
- Je voudrais apporter un éclairage sur
la question du rapport entre le temps de travail et le temps personnel, ainsi
que sur la question du coïnvestissement. Cette dernière n'est pas
nouvelle, puisque l'accord national interprofessionnel de 1991 avait
déjà mis en avant le coïnvestissement afin de poser une
règle sur quelque chose qui existait déjà, notamment au
niveau de l'encadrement. Quatre organisations confédérales
avaient signé cet accord à l'époque, mais ce dispositif a
été très peu utilisé. Le sujet est réapparu
à l'occasion de la deuxième loi Aubry, à l'article
L. 932-2 du code du travail. Ce coïnvestissement visait à
limiter les formations effectuées en dehors du temps de travail.
Autrement dit, le législateur, prenant en compte la jurisprudence de la
Cour de cassation en la matière, a indiqué que l'adaptation
était du ressort obligatoire de l'employeur et devait être
effectuée pendant le temps de travail effectif, mais qu'en revanche les
formations permettant d'accroître les compétences pouvaient
être à la charge de l'employeur et du salarié.
Dans la première partie de la négociation qui s'est
achevée en 2001, nous avons travaillé avec le patronat sur
l'idée du plan de développement concerté,
c'est-à-dire d'un coïnvestissement reposant sur un
intérêt commun pour l'employeur et le salarié et pris en
charge par les deux. Le salarié donnait de son temps et l'employeur
prenait en charge le financement de la formation et une partie de
l'indemnisation que nous avions établie à l'époque
à 50 %.
La dernière négociation sur le coïnvestissement s'est
achevée le 20 septembre à 4 heures du matin, le
patronat postulant que l'employeur pouvait disposer de façon
discrétionnaire d'une partie du temps personnel du salarié. Nous
ne pouvions bien sûr pas accepter un plan de formation de l'entreprise.
L'adaptation au poste de travail relève toujours de l'obligation et du
temps effectif, alors que les formations visant à l'adaptation à
l'évolution de l'emploi peuvent avoir lieu pendant le temps personnel,
avec l'accord du salarié ou un accord d'entreprise, et cela à
hauteur de 50 heures par an. J'ajoute que dans la lettre que nous avons
adressée à M. François Fillon, nous avons
indiqué que nous ne sommes pas d'accord avec l'amendement de
M. Jean Euberschlag adopté à l'Assemblée nationale et
qui remet en cause cette obligation.
M. Jean-Claude QUENTIN
- Les questions posées par les
parlementaires sont tout à fait intéressantes. J'ai dit tout
à l'heure qu'il ne fallait pas que le législateur
décourage le négociateur, et j'ajouterai qu'il peut aussi
l'encourager. Pour ma part, j'estime que les trois points importants
sont :
le régime du DIF en faveur des salariés en CDD ;
le régime du DIF en faveur des salariés à temps
partiel ;
l'obligation de formation des salariés assignée à
l'entreprise.
Notre accord ne traite pas complètement la question des salariés
en CDD et des salariés à temps partiel, puisque les employeurs
n'ont pas voulu répondre pendant la négociation au
problème que nous leur posions sur ce sujet. S'agissant des
salariés en CDD, le
code du travail
dit que les salariés
en CDD doivent bénéficier des mêmes dispositions
conventionnelles et législatives que les salariés en CDI. A vous
d'en tirer les conséquences au travers de l'amendement que nous vous
avons soumis sur ce projet. Sur le plan technique, il suffirait pour
régler le problème du DIF-CDI de le faire financer par le
FONGECIF.
S'agissant des salariés à temps partiel, il me semble important
de se souvenir tout d'abord que lorsqu'un employeur embauche un salarié
à temps partiel, il ne lui demande pas une demie qualification, mais une
qualification entière. Le DIF des salariés à temps partiel
doit donc être le même que celui des salariés à temps
plein. Pour résoudre la difficulté posée par le cas du
salarié à employeurs multiples, il suffirait d'imposer une
règle de déclaration sur l'honneur du salarié selon
laquelle il reconnaît travailler dans plusieurs endroits. J'ajoute que
plus de 80 % des salariés à temps partiel étant des
femmes, le dispositif entretient une forme d'inégalité. Je laisse
le législateur juge de la valeur de ces deux arguments.
Nous avons écrit, dans la lettre que nous avons adressée à
M. Fillon, qu'au travers des dispositions concernant le DIF on subordonne le
choix de l'employeur et du salarié aux priorités définies
par les branches professionnelles, lorsqu'un accord de branche existe, ce qui
sera fort probable compte tenu de l'architecture du dispositif de formation
continue. Or, notre but est bien de centrer le DIF sur l'entreprise, dans le
cadre d'une personnalisation. Je rappelle que, dans l'accord que nous avions
prévu, le choix de l'employeur et du salarié s'opèrerait
en tenant compte
éventuellement
des priorités de branche.
J'aimerais que ce mot « éventuellement » soit repris
dans la loi.
Notre lettre pose aussi la question relative à la responsabilité
de l'entreprise en matière de formation. La jurisprudence qui existait
dans la loi précédente consistait à dire que l'employeur a
l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à
l'évolution de leur poste de travail. Il est clair par ailleurs que la
rédaction de l'article L. 932-2 pouvait provoquer une
ambiguïté juridique.
M. René BAGORSKI
- S'agissant du DIF, notre souhait était
que tous des salariés bénéficient du même droit.
Aucun salarié n'a vocation à être toute sa vie en contrat
à durée déterminée. La solution consistant à
se donner six ans pour atteindre les 120 heures de formation, revient
selon nous à se donner bonne conscience. A propos de la notion de
transférabilité, je ne pense pas, dans la mesure où nous
traitons d'un droit attaché à la personne, que la logique de
financement qu'a exposée brillamment M. de Calan doit primer
sur la prise en compte du nombre d'heure de formation opposable par le
salarié à son employeur, quelle que soit l'entreprise dans
laquelle il se trouve. Il faudra donc continuer à faire évoluer
le DIF pour en affirmer le caractère individuel. Un salarié peut
en effet avoir besoin d'une formation pour faire aboutir un projet
professionnel, ce qu'empêche la monétarisation de son droit.
En ce qui concerne la fonction publique, il est évident que nous sommes
sur la même longueur d'onde que la CFDT. Sachant qu'il aura fallu
attendre 1982 pour que les fonctionnaires disposent d'un droit à la
formation, il paraît aberrant que l'on doive attendre encore dix ans pour
les faire bénéficier des mêmes dispositions que celles qui
sont prévues dans l'accord pour les salariés. A la CGT, nous
revendiquons, pour l'ensemble des salariés de notre pays, les
mêmes droits en matière de formation professionnelle.
M. Roland MUZEAU
- Avez-vous rencontré l'État
employeur ?
M. René BAGORSKI
- Nous ne l'avons pas encore fait. La CGT a
accepté le principe du coïnvestissement, car l'acceptation d'une
formation en dehors du temps de travail était liée à
reconnaissance de celle-ci, que ce soit au plan des classifications ou au plan
salarial. C'est pourquoi nous préconisons qu'avant même que
commence sa formation, le salarié sache quel en serait le retour sur
investissement pour lui. Or il me semble que l'article 8 du projet de loi
donne pratiquement à penser que tout ce qui relève du
développement des compétences pourrait se faire en dehors du
temps de travail sans qu'il y ait reconnaissance, ce en quoi il ne correspond
pas à l'accord que nous avons signé.
Le DIF correspond tout à la fois aux besoins d'un territoire, d'une
entreprise et d'un individu. Or il me semble que l'on oublie que l'offre de
formation relève aussi du secteur public, en suggérant que celle
qui devra être proposée pour rendre applicable le DIF ne sera
satisfaite que par des organismes privés. Nous ne pouvons pas admettre
cette conception.
M. Lionel DUBOIS
- Le DIF a été construit sur une logique
d'épargne. Il apparaît de prime abord concevable que les
salariés en CDI puissent épargner de temps de formation que les
autres, mais il se trouve que le droit individuel étant souvent
exercé en dehors du temps de travail, l'essentiel de son
intérêt réside dans la prise en charge par l'entreprise des
frais pédagogiques. C'est cette prise en charge dont vont être
privés les salariés en CDD.
S'agissant des fonctionnaires, nous avons entamé une concertation pour
faire en sorte qu'ils puissent bénéficier de certaines
dispositions de formation. La principale difficulté réside dans
le fait que les métiers des fonctionnaires ne sont pas normés.
Les salariés de la Banque de France et du ministère des finances
peuvent effectuer les mêmes tâches sans que leur métier
réponde à la même conception. La transposition de l'accord
à la fonction publique supposerait donc que l'on répertorie les
métiers et les qualifications des fonctionnaires.
M. le PRÉSIDENT
- M. Quentin a souligné le fait que le
choix du salarié et de l'entreprise était contraint par les
priorités de la branche. Pensez-vous qu'il faut introduire le mot
« éventuellement » dans le texte de loi ?
M. Jean-Claude VEYSSET
- Il faut être très pragmatique face
à cette problématique. La branche dont je suis issu,
l'hôtellerie restauration, a déterminé un certain nombre de
formations prioritaires. Il reste que ces priorités varient
considérablement d'une région à une autre. Si on se trouve
confronté à une nécessité vitale de
pluriactivité, et donc de pluriformation, il faut que l'on puisse
décliner, notamment au travers des territoires, des stratégies
adaptées. Autrement dit, nous sommes prêts à
négocier les conditions d'application de la loi au niveau des branches
et des territoires.
M. Dominique de CALAN
- Les branches et les métiers où les
entreprises à effectif limité (réparation automobile,
restauration hôtellerie) nous demandent de les aider à mutualiser
les moyens financiers de la formation, sans quoi le DIF ne fonctionnera pas.
Cette recherche de priorités doit tenir compte de la capacité
financière des entreprises concernées. Il est évident
qu'une formation montée de toutes pièces pour une seule personne
va revenir à 200 euros de l'heure, alors que le coût
acceptable avoisine les 15 à 20 euros de l'heure.
M. Alain GOURNAC
- Nous sommes d'accord pour constater que, face aux
fermetures d'entreprises, il faut préparer les salariés à
changer de métier, alors que certains d'entre eux ont parfois fait toute
leur vie la même chose. Il est très bien que l'on puisse suivre
une formation pour être à l'aise dans son poste et évoluer,
mais il faut que l'on puisse aussi envisager qu'une personne puisse retrouver
un emploi. S'agissant des formations organisées par le secteur public,
j'ai le regret de dire qu'un grand nombre d'entre elles ne sont pas tout
à fait satisfaisantes. Il faudra prendre garde à ce que l'appel
d'air créé par le DIF ne conduise à une multiplication du
nombre d'organismes de formation, si ceux-ci n'ont pas une réelle
utilité.
M. Guy FISCHER
- Certains aspects de l'accord du 20 septembre
sont-ils transposables à la fonction publique ?
M. Lionel DUBOIS
- Nous allons essayer de négocier la
transposition dans la fonction publique de l'équivalent du plan de
formation de l'entreprise, avec la possibilité pour les fonctionnaires
de consacrer une partie de leur temps libre à des formations
personnelles ou en rapport avec les besoins des collectivités qui les
emploient. Pour cela, il faudrait peut-être commencer par
décloisonner leurs métiers.
M. le PRÉSIDENT
- Je pense que nous devrions nous recentrer sur
le cas des salariés du privé, car nous sommes en train d'aborder
une question qui ne manquera certainement pas de se poser prochainement.
Mme Annick BOCANDÉ, rapporteur
- Plusieurs d'entre vous ont fait
allusion à la lettre que vous avez envoyée à M.
François Fillon. Vous y exprimez, entre autres, votre opposition
à ce qu'il est convenu d'appeler l'amendement
« Ueberschlag » portant sur l'obligation de formation des
salariés par l'employeur. Comment cette problématique se
situe-t-elle par rapport aux propositions de l'ANI ?
M. Jean-Claude QUENTIN
- Il est à noter que l'amendement auquel
vous faites référence a été présenté
et adopté en dernière minute, sans que nous en soyons avertis.
M. le PRÉSIDENT
- C'est ainsi que fonctionne la démocratie
parlementaire...
M. Jean-Claude QUENTIN
- Vous avez raison, et loin de moi l'idée
de remettre en cause la légitimité du législateur. Il se
trouve cependant que nous avons signé un accord sur la base d'un code du
travail existant, dont l'article L. 932-2 stipule que
«
l'employeur a la responsabilité d'assurer l'adaptation
des salariés à l'évolution à l'évolution de
leurs emplois
». Vous comprendrez que nous soyons surpris de
constater que l'on supprime l'article L. 932-2, et que l'on introduit
l'amendement dans le projet de loi qui était supposée reprendre
notre accord. C'est grave, car il s'agit là d'un principe essentiel, qui
reprend d'ailleurs la jurisprudence « Expovit », rendu par
la Cour de cassation il y a dix ans. Notre démarche consiste donc
à dire :
« messieurs les parlementaires, nous vous
prions de rétablir les textes tels qu'ils étaient au moment
où nous avons signé l'accord
». C'est sur cette
base que nous avons écrit dans notre accord que « lorsque
l'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à
leur poste de travail, cela doit ce faire sur le temps de travail
effectif », étant entendu que deux autres cas sont
prévus : l'évolution des emplois et le maintien dans
l'emploi. Dans ces deux cas l'accord stipule que les formations doivent
toujours être rémunérées comme du temps de travail,
bien qu'elles puissent se dérouler en dehors du temps de travail. Je
précise que l'on parle bien de l'évolution des emplois et non pas
de l'évolution de l'emploi, et du maintien dans l'emploi et non du
maintien dans le poste de travail.
Le troisième cas prévu par l'accord pour le plan de formation est
le développement des compétences. Dans ce cas, il est convenu que
la formation puisse avoir lieu en dehors du temps de travail, et que, le cas
échéant, elle doit être rémunérée
à 50 % du salaire net, à condition que l'entreprise s'engage
vis-à-vis sur les conséquences de l'action de formation au retour
du salarié. L'objet de notre lettre vise donc à clarifier les
trois cas prévus : l'obligation de l'employeur d'assurer
l'adaptation du salarié à l'évolution du poste de
travail ; l'évolution des emplois et le maintien dans l'emploi, y
compris en dehors de l'entreprise ; le développement des
compétences.
Mme Annie THOMAS
- Il faut que les parlementaires aient bien conscience
du fait que cet amendement déséquilibre l'esprit du texte, mais
aussi, et c'est plus grave, l'esprit de la négociation.
Jean-Jacques Briouze a rappelé à juste titre la longueur et
la difficulté de nos travaux de négociation. Nous avons
débattu pendant trois ans de ces questions. Nous sommes arrivés
à un équilibre tenant sur une poutre maîtresse consistant
à dire que l'employeur continue d'avoir l'obligation d'adaptation,
étant entendu que nous avons accepté que l'on puisse former en
dehors du temps de travail et que l'on prévoie des modalités
particulières. L'obligation d'adaptation du salarié à
l'évolution de son poste se retrouve d'ailleurs dans le contrat de
travail de celui-ci, puisqu'il ne peut refuser les formations qui lui sont
proposées à ce titre. Autrement dit l'atteinte à cette
poutre maîtresse que j'évoquais touche au contrat de travail,
à la relation entre le salarié et l'entreprise et à la
qualification du temps de formation. Toute formation visant l'adaptation au
poste de travail doit se dérouler pendant le temps de travail effectif.
La proposition d'amendement que nous avons faite tient compte du fait qu'il
fallait changer les textes, puisque c'est nécessaire, mais dans le
respect de l'esprit de notre accord.
M. Jean-Jacques BRIOUZE
- Notre accord n'a jamais supprimé
l'obligation incombant à l'employeur de faire en sorte que ses
salariés soient les mieux qualifiés, afin que l'entreprise
développe au mieux son projet industriel. Ce n'est pas parce que nous
avons accepté qu'une partie de notre temps personnel puisse être
utilisé pour de la formation que cette obligation, qui résulte
d'un article du
code civil
, a été supprimée. Cette
obligation perdure, y compris si un employeur veut envoyer un salarié en
formation pour développer ses compétences. Le fait que nous
ayons, au travers du plan de formation, la possibilité de
répartir en trois catégories les formations (adaptation à
l'emploi, adaptation à l'évolution des emplois,
développement des compétences) ne signifie pas que l'employeur ne
peut pas envoyer un salarié, de sa propre initiative, faire une
formation de développement des compétences Cette
responsabilité existe toujours, et c'est pourquoi nous ne voulions pas
faire disparaître la notion d'obligation d'adaptation au poste de travail
du code du travail. En effet, si un salarié ne veut pas
développer son adaptation à l'évolution des emplois, il le
peut, puisqu'il faut son accord pour que l'on puisse l'envoyer en formation
dans ce cadre-là. Si un salarié est licencié parce qu'il
est jugé incompétent, qui va supporter la responsabilité
de l'incompétence ? Si on supprime l'obligation de l'employeur, ce
sera le salarié seul. Lorsque nous avons signé, à quatre
heures du matin, cette séparation au niveau de l'adaptation nous l'avons
fait avec l'idée que l'employeur avait toujours une
responsabilité comme chef d'entreprise et comme organisateur du travail.
M. Dominique de CALAN
- Nous sommes là au coeur du dossier. Les
partenaires sociaux ont demandé, par le biais de l'article 28 de
l'accord, de modifier le code du travail pour le rendre applicable, en adaptant
notamment l'article L. 932-2, puisque le plan de formation est
désormais structuré de manière ternaire. Je comprends
l'inquiétude que suscite cette suppression pure et simple et
comprendrais donc que votre assemblée puisse sans doute aller,
au-delà de la suppression dudit article, vers une solution
d'aménagement de l'article L. 930-2 comme c'est
proposé. En revanche, il me semble que le texte proposé par les
partenaires joue un peu trop sur des obligations, de sorte qu'il appartiendra
à votre assemblée de trouver le bon équilibre pour assurer
le respect de la trilogie que nous avons indiquée, avec la distinction
essentielle entre l'adaptation au poste et l'adaptation à
l'évolution de l'emploi.
M. Jean-Claude VEYSSET
- En Allemagne on forme dès le
départ pour l'entreprise, alors qu'en France on forme à des
métiers, en sachant qu'on ne les exercera pas dans la même
entreprise. En tant que chef d'entrepreneur de terrain, je suis parfaitement
conscient que nous avons une obligation d'adaptation à l'emploi et
à l'évolution du poste de travail correspondant à cet
emploi, avec l'investissement en temps et en salaire que cela suppose.
Lorsqu'il s'agit de se former pour évoluer dans sa carrière, il
faut que nous puissions entamer un dialogue salarié/chef d'entreprise
afin de concilier nos intérêts réciproques et mettre en
place une démarche basée sur le co-investissement. En tant que
chef d'entreprise, je sais qu'un salarié sera amené pour
évoluer à changer de plus en plus souvent d'entreprise.
M. René BAGORSKI
- L'envoi d'une lettre commune par les
organisations syndicales est extrêmement rare. Nous en avons pesé
chaque mot, de façon à ce que notre demande de respect de la
logique qui avait été la nôtre lors de la signature du
texte soit respectée. J'attire votre attention sur le fait que nous
rappelons dans le deuxième point de notre lettre, que l'employeur doit
veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper
un emploi. De même M. Veysset a-t-il évoqué le fait que
l'entreprise devait s'adapter au marché sur lequel elle opérait.
C'est donc aussi bien l'employabilité du salarié, que celle de
l'entreprise qui est visée. Cette approche explique la rédaction
que nous avons retenue pour notre lettre.
M. Jean-Claude QUENTIN
- M. de Calan m'a reproché d'avoir
renvoyé trop loin le balancier...
M. le PRÉSIDENT
- Il vous dépeignait comme un
stratège.
M. Dominique de CALAN
- Il l'est !
M. Jean-Claude QUENTIN
- Quoi qu'il en soit notre deuxième point
reprend mot pour mot le texte de l'article 11 de l'accord, qui porte sur
les périodes de professionnalisation : «
L'employeur doit
veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper
un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des
technologies et des organisations
». L'accord précise en
outre que la période de professionnalisation «
est ouverte
aux salariés dont la qualification est insuffisante au regard de
l'évolution des technologies et des organisations, conformément
aux priorités définies par la branche
professionnelle
». L'employeur, s'il n'a pas d'obligation de
formation par l'employeur au titre de ce deuxième point, doit indiquer,
par exemple au comité d'entreprise, que l'évolution de
l'entreprise va entraîner une évolution des emplois. Il devra
inciter les salariés à adhérer à des actions de
formation pour y faire face.
M. Dominique de CALAN
- L'esprit de l'accord consiste à ce que
l'adaptation à l'évolution des emplois fasse l'objet d'une
négociation entre l'employeur et son salarié. Il faut donc que le
point numéro deux mette davantage l'accent sur la
coresponsabilité que cela n'est proposé dans la lettre. Il faut
que nous travaillions ensemble pour convenir d'une rédaction.
Mme Annick BOCANDÉ, rapporteur
- Un des points importants du
texte concerne les contrats de professionnalisation qui découlent de la
fusion des contrats de qualification jeunes et adultes, ainsi que des contrats
d'adaptation et d'orientation. Il s'agit d'une nouveauté importante au
sujet de laquelle j'aimerais recueillir l'avis de nos invités. Quelles
sont les modalités d'application de ces contrats de
professionnalisation ? Quel est le temps réservé dans ce
cadre à la formation ? Quel est le nombre de contrats
prévus ? S'agissant du financement de cette mesure, le fait que les
fonds consacrés à l'apprentissage ne soient plus plafonnés
à 35 % des ressources des organismes collecteurs ne fait-il pas
craindre un manque de financement en faveur de l'alternance et de ce fait une
réduction du nombre de contrats en alternance ?
Mme Annie THOMAS
- La création du contrat de professionnalisation
nous a amenés à faire preuve d'efficacité, puisque nous
avons regroupé dans un seul contrat ce qui relevait auparavant de quatre
types de contrat, ce qui était source de complexité pour les
entreprises. Nous avons voulu créer un contrat unique qui corresponde de
l'effort de personnalisation qui en oeuvre dans notre accord. Sa durée
pourra varier de six à vingt-quatre mois en fonction des besoins du
jeune et de l'entreprise. La part du temps consacrée à la
formation pourra quant à elle varier de 15 à 25 % en
fonction des besoins du jeune. Les contrats seront rendus plus sûrs,
puisque le contrat de professionnalisation pourra être signé en
CDD ou en CDI, alors que le contrat de qualification, que l'on pare de toutes
les vertus, ne pouvait être signé qu'en CDD. Enfin, nous avons
amélioré la rémunération afférente aux
contrats, puisque celle-ci passera de 31 % du SMIC à 55 % du
SMIC.
La priorité absolue des partenaires sociaux, ce sont les jeunes qui sont
sortis sans qualification du système scolaire, sur lesquels nous allons
recentrer le dispositif. Pour mémoire, les contrats de formation en
alternance ont été créés en 1983 comme une voie
d'insertion dans l'emploi, et non pas comme une voie de formation initiale,
cette dernière relevant des missions de l'Education nationale. Ce point
nous vaut bien évidemment des critiques sur le thème
« vous allez mettre à la rue 20.000 jeunes de BTS que
l'on ne pourra plus prendre en charge ». A cela, je réponds
que la négociation de branche, dont M. Veysset a souligné
l'importance, va déterminer pour chaque branche :
les qualifications nécessaires ;
les diplômes requis ;
le public prioritaire et pour quel durée ;
l'utilité éventuelle de former des jeunes en BTS.
Il est normal que nous indiquions pour notre part nos priorités de
manière assez formelle.
La CFDT estime par ailleurs que la date d'entrée en application de la
loi au 1
er
octobre qui a été choisie par vos
collègues de l'Assemblée nationale laisse un délai
raisonnable pour que l'offre de formations puisse être adaptée. Je
soulignerai cependant le fait que nous débattons de cette question
depuis trois ans, et de manière plus précise depuis un an, alors
que d'autre part les dirigeants la fédération de la formation
faisaient partie de la délégation du MEDEF, si bien que personne
ne peut prétendre découvrir la question. Les centres de formation
étant positionnés dans l'économie de marché, ils
doivent faire preuve de la réactivité que celle-ci impose. Je
rappelle que ce sont les partenaires sociaux qui sont prescripteur et non pas
l'offre de formation. On ne peut pas nous dire aujourd'hui que l'on
découvre le problème. S'il est possible que l'on doive repenser
les filières d'accès aux BTS, cette question ne doit pas
faire l'objet d'un faux procès aux partenaires sociaux.
M. le PRÉSIDENT
- Si je comprends bien, il faut laisser la
formation initiale à l'Education nationale et l'insertion dans l'emploi
aux partenaires sociaux.
M. Lionel DUBOIS
- Le contrat de professionnalisation fait aussi
référence à une période de professionnalisation,
puisque nous les avons ouverts à tous les publics, y compris les
seniors, les créateurs d'entreprise ou les femmes ou des hommes revenant
sur le marché du travail après avoir élevé leurs
enfants. En ce qui concerne la capacité donnée aux branches
professionnelles d'affecter un certain pourcentage de leurs ressources à
l'apprentissage, il me semble que nous devrions reconsidérer la question
dans le cadre de la réforme de l'apprentissage. Il faut redéfinir
le rôle des acteurs en matière d'apprentissage.
M. Jean-Jacques BRIOUZE
- Le contrat de professionnalisation qu'Annick
Bocandé a décrit répond à la question de M. Gournac
sur l'existence dans l'entreprise d'un dispositif de prévention des
licenciements, puisqu'il définit une période de
professionnalisation.
Pour rassurer les organismes de formation qui assaillent les parlementaires
dans leur circonscription, je voudrais souligner le fait que nous n'avons pas
souhaité continuer à construire nos propositions en fonction de
l'offre de formation, mais en fonction des besoins des entreprises. C'est
fondamental, car si l'on se fonde sur l'offre de formation, on risque de couper
le lien qui existe grâce à l'alternance entre le monde de
l'entreprise et les formations que l'on met en place. Il faut que les besoins
soient exprimés par les entreprises pour qu'ils puissent
déboucher sur des emplois futurs. Autrement dit, nous disons aux
responsables de la formation : « revenez à votre place.
L'offre devra être ajustée à la demande des
entreprises ».
Nous avons équilibré, dans notre accord, les possibilités
de formation puisque nous avons spécifié que les personnes qui
ont reçu des formations importantes, mais qui ne correspondent plus aux
besoins de l'entreprise doivent aussi bénéficier du contrat de
professionnalisation. Celui-ci est ouvert à tous les niveaux. En
revanche, dans le cadre du compromis qui visait à prendre en compte
comme point de départ la notion d'insertion mise en avant en 1983,
laquelle insertion ne concerne pas seulement les plus bas niveaux. La meilleure
preuve en est que les partenaires sociaux ont signé en juin 1995 un
accord pour la formation des jeunes en grande difficulté.
Au plan du financement, on peut s'inquiéter du fait qu'en l'état
actuel et futur de la loi, une branche a la possibilité d'utiliser la
totalité du 0,5 % pour le financement du fonctionnement de ses
centres de formation d'apprentis, à l'exception du pourcentage compris
entre 5 % et 10 % destiné à assurer la
péréquation au niveau national. La limite des 35 % a
été supprimée. Bien que l'on fasse le pari que les
branches professionnelles sont dirigées par des personnes responsables,
il serait peut-être intéressant que la loi prévoit que dans
trois ans l'organisme de gestion des contrats de professionnalisation remette
un rapport au Parlement pour que l'on sache comment les aspects financiers ont
été gérés. Il incombera alors aux parlementaires de
rééquilibrer l'ensemble du système si d'aventure un
déséquilibre était constaté, étant entendu
que le financement a des incidences non seulement sur les partenaires sociaux,
sur les ressources des conseils régionaux et sur les CFA qui n'auraient
pas de branche professionnelle.
M. Dominique de CALAN
- Je partage en totalité les propos de Mme
Annie Thomas. J'y apporterai toutefois deux précisions
complémentaires. Tout d'abord notre accord prévoit tous les
éléments nécessaires à la transition, compte tenu
du fait qu'il n'est pas anormal que l'on doive justifier de l'emploi de fonds
que l'on a reçus. En outre, s'il est vrai que notre accord est optimiste
parce que nous sommes convaincus par la réforme des sections
professionnelles de l'école et par l'implication croissante des
régions dans le domaine de l'apprentissage, nous restons convaincus que
la voie normale du diplômant est la formation initiale. Il ne faut pas
laisser primer un système de formation reposant avant tout sur une offre
privée, que personne ne contrôle. Attention donc à ne pas
encourager ceux qui dévient, étant entendu que nous avons
prévu d'accorder des financements et des dérogations à
tous ceux qui le justifieront, à commencer par les bas niveaux de
qualification.
S'agissant du financement, on ne peut pas dire tout et son contraire : si
l'on veut renforcer l'apprentissage, en pensant qu'il y aura moins de
diplômants dans ce domaine, il faudra y consacrer davantage de moyens.
Mais j'insiste : le compte commun qui est créé par la loi,
dont la valeur a été portée de 0,4 % à
0,5 %, constitue une réserve importante. Nous pensons par ailleurs
que le principe de précaution qui a incité vos collègues
de l'Assemblée nationale à retenir comme date de mise en
application de la nouvelle loi le 1
er
octobre 2004 est
à nos yeux un compromis acceptable. Cette date butoir aura le
mérite d'obliger les acteurs de la formation à entamer un
processus de changement.
M. Jean-Claude QUENTIN
- Il est clair que lorsque nous avons
écrit 1
er
juillet dans notre accord, nous avons fait une
bêtise. Pour ma part je conseille de la corriger en optant pour
1
er
janvier 2005, car cela permettrait aux organismes qui
gèrent leurs formations en fonction de l'année civile, comme les
OPCA, de s'organiser simplement. Si vous tenez à prévoir une
solution intermédiaire, indiquez que pendant six mois les deux
systèmes se superposeront. Cela me paraît être une solution
de bon sens, mais vous en ferez ce que vous voudrez.
Il faut se souvenir qu'au moment où nous avons signé l'accord
concernant l'apprentissage les 35 % dédiés selon la loi de
finances de 1985 étaient en vigueur, et que c'est dans ce contexte que
nous avons écrit que les financements de l'alternance pourront prendre
en compte le fonctionnement des CFA. A mon avis, Jean-Jacques Briouze a
commis une erreur tout à l'heure : il n'est pas prévu dans
l'accord de possibilité de déroger aux 35 %. En effet, je
vous rappelle que la lettre paritaire n'a jamais été
envoyée. D'ailleurs, elle n'est signée que par deux organisations
syndicales.
Mme Annie THOMAS
- Cela suffit !
M. Jean-Claude QUENTIN
- Notre proposition commune consiste à
dire que la grande loi sur l'apprentissage doit traiter tous les sujets
concernant ce sujet. C'est d'autant plus pertinent que l'on passe le
financement de l'alternance de 0,4 % à 0,5 % et que 35 %
de 0,5 %, c'est beaucoup mieux que 35 % de 0,4 %. Le passage
à 0,5 % se justifie parce que l'on va financer des dispositifs qui
n'existaient pas auparavant. Il faudra préserver les équilibres
financiers pour pouvoir financer les périodes de professionnalisation,
les dépenses des observatoires et les priorités liées au
DIF.
Pour finir, il est clair que la notion de décentralisation, que nous
n'aurons vraisemblablement pas le beaucoup le temps d'aborder, devrait nous
conduire à débattre de ces sujets au moins à trois,
c'est-à-dire avec les conseils régionaux.
M. René BAGORSKI
- Il était important que nous mettions en
place un contrat unique, pour clarifier le système, mais aussi que nous
mettions fin à un système où l'on faisait de la formation
initiale dans le cadre du contrat de qualification, avec des temps de
formation, pour un même diplôme, de 25 %, contre 50 %
pour l'apprentissage et 80 % pour le système scolaire. Le fait
qu'un nettoyage ait lieu est à nos yeux une satisfaction en soi.
Désormais, il existera trois voies de formation :
la formation traditionnelle de l'école ;
l'apprentissage ;
les contrats de qualification.
Chacune de ces voies à son public, mais celui-ci doit être
déterminé en fonction de politiques bâties sur les besoins
des branches et des territoires. Il en découle la responsabilité
qu'ont les élus et les acteurs sociaux dans les régions de
travailler ensemble sur les besoins d'aménagement du territoire et les
évolutions du tissu des entreprises. Une fois les besoins
définis, il faut donner des moyens aux systèmes de formation qui
leur correspondent. Il ne faut pas que l'offre de formation s'engage dans
toutes les brèches. Je trouve que les responsables de la formation
consacrent actuellement un temps à rédiger des argumentaires
qu'ils pourraient plus utilement consacrer à travailler sur l'offre de
formation, afin d'être prêts pour la date du
1
er
juillet, voire le 1
er
octobre. Il ne
faudrait pas que la transition soit trop longue, car on observe que depuis six
mois les organismes encouragent fortement la signature de contrats en
alternance de 24 mois dans le cadre d'une formation initiale, ce qui
pervertit complètement le dispositif que nous avons voulu mettre en
place.
M. Jean-Claude VEYSSET
- La problématique qui intéresse
les entreprises que nous représentons a trait à la certitude de
la validité du contrat et son enregistrement par les services des
directions départementales du travail. Sur cette base, si tous les
éléments sont prêts pour le 1
er
octobre,
afin que toutes les entreprises puissent s'approprier le contrat de
professionnalisation, ce sera un succès. Si nous ne sommes pas
prêts sur le plan matériel, il faudra peut-être envisager de
faire perdurer les anciens contrats jusqu'au 31 décembre 2004.
Ce problème touche davantage les services de la Direction des Relations
du Travail que nous.
Mme Annick BOCANDÉ, rapporteur
- Je pense que ce problème
de délai n'est pas uniquement celui des organismes de formation, car
j'ai cru comprendre qu'il pouvait être aussi celui de certaines
entreprises qui avaient peur de ne pas avoir le temps d'assurer la transition.
J'en viens maintenant à la question de la décentralisation. Comme
vous le savez, l'examen d'un projet de loi relatif aux responsabilités
locales est en cours d'examen au niveau du Parlement qui consacre un volet
très important à la formation professionnelle à
l'échelon régional. Les partenaires sociaux disposent-ils des
relais locaux suffisants pour mettre en oeuvre un dialogue avec les
régions ? La prise en compte des territoires me paraît
être une des modalités essentielles de la réussite de ce
projet. L'offre de formation sera-t-elle suffisante pour répondre aux
nouveaux besoins déterminés par ce texte.
M. Dominique de CALAN
- Je rejoins Mme le rapporteur pour dire que la
formation professionnelle a été transférée aux
régions dans le domaine de l'apprentissage et de la formation
professionnelle d'État, mais je constate que ce n'est pas le cas en ce
qui concerne la formation professionnelle d'entreprise. D'où l'exigence
des partenaires sociaux de mettre en place une véritable coordination
entre l'État décentralisé que représentent la
région et leurs représentations tant professionnelles
qu'interprofessionnelles au niveau territorial. Ceci nécessite sans
doute une réforme de l'ensemble des systèmes de concertation,
étant entendu que le comité de concertation est aujourd'hui
extrêmement déséquilibré, puisque les professionnels
en sont quasiment absents. Il faut créer les conditions de ce lien entre
la responsabilité donnée aux régions dans la formation
professionnelle relevant de la compétence publique et les acteurs
importants de la formation continue que sont les entreprises. Il faut donc
faire appel à des interlocuteurs paritaires, dans la mesure où
nous avons construit la formation professionnelle des salariés dans le
cadre du paritarisme. Selon le principe de réalisme, nous souhaitons que
cette concertation s'opère d'abord au niveau de la région, en
distinguant les branches, les métiers et l'interprofessionnel. Nous
souhaitons être des acteurs, pourvu que l'on revoie les conditions du
dialogue. On sait en
effet très bien qu'en matière de
formation, ce qui est obligatoire ne marche pas toujours.
`
S'agissant de l'offre de formation, je pense qu'il faut expliquer l'accord
à l'Ecole et au monde éducatif, et nous nous y sommes
déjà attelés avec les trois organisations patronales.
L'AFPA doit aussi s'approprier l'accord. Il faut une mobilisation des services
publics et de l'État déconcentré que sont les
régions pour dialoguer. J'ai d'ailleurs eu le plaisir d'aller hier dans
une région pour expliquer l'accord. D'où d'ailleurs l'importance
de la date d'entrée en vigueur de la loi, car quand on attend trop, il y
a toutes les raisons administratives pour que les choses ne se fassent pas. Je
précise que, selon moi, l'offre de formations existe largement. Notre
pays n'est pas sous dimensionné au plan de l'offre de formation.
Un bilan de compétence est prévu par l'accord pour les
salariés ayant plus de quarante-cinq ans, ou pour ceux qui ont plus
de vingt ans d'ancienneté : allons-nous coexister un bilan
AFPA, un bilan ANPE, un bilan UNEDIC sans aucune mise en réseau ?
Il faut que l'établissement d'un cahier des charges commun permette une
reconnaissance mutuelle de bilans effectués par les différents
organismes. Il ne s'agit pas de susciter une offre de formation nouvelle, mais
de mettre en réseau, de façon volontariste, c'est-à-dire
avec des calendriers et des cahiers des charges, l'offre de formation
existante. C'est là je crois le rôle fondamental des
régions, dans le cadre d'une coordination plus approfondie et respectant
la présence réelle des acteurs sur le terrain.
M. Lionel DUBOIS
- Le traitement de la décentralisation dans
l'accord est la grande faiblesse de l'accord. En effet, nous n'avons pas
vraiment réfléchi en fonction du besoin territorial et
privilégié plutôt, comme c'est assez normal pour les
partenaires sociaux, le cadre des branches. Je constate pourtant qu'en cas de
restructuration, c'est vraiment le cadre territorial qui est pertinent. On ne
peut pas toujours réintégrer des salariés licenciés
dans la même branche professionnelle. La mobilité
géographique étant faible dans notre pays, il nous faut trouver
des solutions dans le cadre du territoire. Il faudrait que l'État, les
régions et les partenaires sociaux se mettent autour d'une table pour
définir le rôle de chacun dans la politique territoriale.
M. Jean-Claude QUENTIN
- Je suis parfaitement d'accord au sujet de la
décentralisation avec M. de Calan. Je crois que le texte sur
les responsabilités locales fait une excellente chose en
renforçant tout le dispositif AIO (accueil, information, orientation).
Cette démarche suppose que l'on ait des informations à donner sur
les qualifications et l'avenir des métiers. Les observatoires de branche
que nous prévoyions dans notre accord devront offrir une vision
prospective sur l'évolution des métiers à moyen terme,
alors qu'aujourd'hui on se fie plutôt en matière de formation
à la technique du « doigt mouillé ».
Nous avons prévu des lieux, y compris au plan local, où nous
pouvons nous concerter. Il existe aussi des lieux où nous pouvons
concerter avec les collectivités locales et les pouvoirs publics locaux,
comme les CCREFP (comités de coordination régionaux de l'emploi
et de la formation professionnelle) ou les conseils économiques et
sociaux régionaux. Il faut toutefois distinguer les lieux de
concertation et les lieux de contractualisation. Or les lieux de
contractualisation entre les partenaires sociaux et les collectivités
territoriales sont les OPCA.
S'agissant de l'offre de formation, il est clair que la structuration de
l'offre de formation relève de la compétence régionale. La
préoccupation des conseils régionaux aujourd'hui étant la
fracture numérique, proposez-nous une offre de formation qui permette
à chaque citoyen de passer son permis de conduire informatique
grâce au DIF.
Mme Annie THOMAS
- Je ne partage pas, au nom de la CFDT, l'idée
de Jean-ClaudeQuentin selon laquelle les interlocuteurs des conseils
régionaux doivent être les OPCA, car ce sont des organismes de
gestion. Pour la CFDT, il faut revaloriser le rôle de la COPIRE
(commission paritaire interprofessionnelle régionale de l'emploi). Nous
n'acceptons pas que les conseils régionaux s'adressent directement aux
OPCA sans qu'une instance politique donne l'orientation.
Je ne suis pas non plus d'accord pour penser que tout ce fera naturellement
parce que nous avons prévu dans l'accord des observatoires de branche,
en affirmant le principe selon lequel des informations devaient être
communiquées aux COPIRE ou aux instances interprofessionnelles. Rien ne
se fait naturellement, tout doit être organisé. Nous sommes
désormais en présence d'un acteur qui est identifié comme
le pilote de la formation tout au long de la vie, même si, comme l'a
souligné Monsieur de CALAN, ce n'est pas le cas pour
l'entreprise. Cet acteur qu'est l'État déconcentré, qui
s'organise autour du préfet. Il nous faut en face mettre en place une
véritable organisation des partenaires sociaux. Nous devons nous
imposer, en tant que partenaires sociaux en charge de la formation
professionnelle, comme un acteur essentiel, et cela ne se fera pas
naturellement.
Il est question dans le projet de loi de la décentralisation de l'AFPA.
Or la CFDT ne souhaite pas que l'État se désintéresse de
ce qui relève de sa responsabilité dans le cadre du service
public de l'emploi et de la formation, car il doit donner des orientations.
Faut-il continuer à dire que 80 % d'une classe d'âge doit
arriver au niveau du baccalauréat ? Ce chiffre est à
débattre, et il le sera. L'État doit dire aussi quel niveau de
qualification il veut pour les salariés. Il est capable de le dire pour
les enfants, il doit être capable de le dire pour les salariés.
L'AFPA assumant au travers de sa formation un rôle qui n'est pas
assuré par les acteurs privés, parce que ce n'est pas rentable,
à savoir prendre en charge les publics en difficulté. De ce fait,
la relation entre les conseils régionaux et l'AFPA ne doit pas se situer
uniquement sur le mode marchand.
M. Jean-Jacques BRIOUZE
- Pour la CGC, tout transfert de
compétence nécessite le transfert du dialogue social. Il faut
donc que des acteurs soient présents au niveau de la région pour
y animer le dialogue social. Notre organisation est dotée à cet
effet d'unions régionales, qui ont compétence pour être
l'interlocuteur direct du conseil régional ou de l'État
décentralisé. Au niveau interprofessionnel, nous avons la COPIRE,
dont l'essentiel des missions, qui avaient trait à la formation des
jeunes, doivent être redéfinies.
En ce qui concerne la régionalisation, autant nous sommes d'accord pour
que la région la responsabilité de la formation, y compris pour
les adultes demandeurs d'emploi, autant nous préconisons que le partage
entre la responsabilité emploi et la responsabilité formation
soit bien précisé. La région voyant ses compétences
en matière d'aménagement du territoire et sur le plan
économique, elle apparaît de plus en plus comme l'instrument de la
structuration économique du territoire. Comment pourrait-elle être
responsable de la formation et de l'économie sans avoir aucune
responsabilité en matière d'emploi ? Il y a là un
hiatus qui se retrouve au sein de l'AFPA, où l'on transfère les
formations sans transférer l'orientation ou les bilans professionnels,
qui relèvent toujours de la responsabilité de l'État.
M. René BAGORSKI
- La région est selon nous un lieu pivot,
compte tenu de ses attributions en matière d'aménagement du
territoire, de formation, de développement de l'emploi et du tissu
industriel. Il faut donc que s'y organise une concertation forte de l'ensemble
des acteurs. Les lieux de concertation existant sont encore davantage des lieux
de consultation que de concertation. Les observatoires de branche sont des
outils destinés à permettre aux acteurs d'un territoire de
définir ensemble une politique qui répond aux besoins, mais cela
ne sera le cas que si l'on envisage la pérennité des territoires
au travers de celle des entreprises. Or la pérennité des
entreprises passe par la formation des hommes et des femmes qui y travaillent
La région doit pouvoir compter sur tous les acteurs de formation. A cet
égard, le plan régional de formation est un outil qui ne pourra
être construit de façon homogène sans une vraie
concertation sur les territoires.
Je partage l'avis de la CFDT au sujet de l'OPCA : il s'agit d'un outil au
service de politiques définies par ceux qui les ont mises en place, et
pas d'avantage. Je signale par ailleurs qu'une charrette de licenciements est
prévue au mois de juillet à l'AFPA. Quand on sait le rôle
qu'a joué l'AFPA pour mettre en place des formations dans le tissu
industriel régional, les parlementaires doivent réfléchir
sur la vocation de cet organisme et la place qu'il doit garder dans le tissu de
la formation en France.
M. Jean-Claude VEYSSET
- La région doit certainement être
l'actrice d'une meilleure gouvernance, mais à condition que ce soit dans
le but précis d'être un acteur de facilitation et un catalyseur
des fonds. Sur cette base, les partenaires sociaux sont incontournables, mais
insuffisants : il faudra tenir compte également de la
géographie de l'entreprenariat et de la réalité des
emplois. A partir de là, nous avons besoin de la présence des
grandes branches et de l'interprofession. C'est dans la
complémentarité que nous ferons avancer les choses.
M. le PRÉSIDENT
- Merci à vous tous qui avez
accepté de participer à cette table ronde.
Mme Annick BOCANDÉ, rapporteur
- Je vous remercie à mon
tour d'être venus ici et de vous être exprimé avec beaucoup
de franchise. Nous avons bien compris au travers de tout ce que vous nous avez
dit que ce texte devra encore subir des évolutions, ne serait-ce que
pour tenir compte de l'évolution de notre société et du
monde du travail. Je dois souligner pour nos collègues que certains
points de l'ANI ne sont pas repris dans le texte de loi parce qu'ils sont
encore en cour de discussion. Nous aurons donc certainement l'occasion de
reparler de ces sujets au travers d'un véhicule législatif ou
d'un autre.
Si vous avez demandé au Parlement de respecter l'équilibre de cet
accord, vous nous avez aussi fait comprendre que le texte de loi proposé
ne correspondait pas exactement à vos souhaits respectifs. La grande
difficulté pour les parlementaires que nous sommes sera de modifier les
choses sans aggraver encore le déséquilibre de l'accord. Vous
nous soumettez-là à un exercice délicat, mais nous allons
essayer de le mener à bien. Je pense en tout cas que nous avons fourni
à mes collègues ici présent un éclairage
indispensable sur un texte éminemment technique et compliqué,
mais au combien important pour l'avenir de notre pays, de ses entreprises et de
ses salariés.
M. le PRÉSIDENT
- Puisse le Parlement aboutir à un
meilleur texte, qui susciterait encore l'adhésion des partenaires
sociaux.
* 23 L'Union des professions artisanales, également signataire de l'accord s'est excusée pour son absence.