B. LES RÈGLES APPLICABLES EN FRANCE EN MATIÈRE DE TEMPS DE TRAVAIL DANS LA MARINE MARCHANDE ET L'IMPACT DE LA CONVENTION
Les règles applicables en France en matière de durée du travail des gens de mer sont fixées par les articles 24 à 26-2 du code du travail maritime et par les décrets pris pour leur application.
Il s'agit des décrets n° 83-793, pris pour l'application de l'article 25 du code du travail maritime, n° 3-794, pris pour l'application de l'article 24 du code du travail maritime et n° 83-795 du 6 septembre 1983, pris pour l'application de l'article 26-1 du code du travail maritime.
Le code du travail maritime, renvoie pour partie au code du travail ou adapte ses dispositions pour tenir compte des particularités de la navigation maritime.
1. La définition du temps de travail effectif
Cette définition est donnée par l'article 5 du décret n° 83-793 du 6 septembre 1983 et concerne les navires autres que de pêche maritime, soit la navigation de commerce : « temps pendant lequel le personnel embarqué est, par suite d'un ordre donné, à la disposition du capitaine, hors des locaux qui lui servent d'habitation à bord ».
Le texte donne également, a contrario, la définition du temps de repos.
2. La durée quotidienne du travail
Celle-ci est fixée par l'article 24 du code du travail maritime qui renvoie à l'article L 212-1 du code du travail qui prévoit que la durée quotidienne de travail effectif ne peut excéder 10 heures sauf dérogation fixée par décret.
Le décret n° 83-793 fixe le principe d'une organisation du travail sur la base de huit heures par jour (article 5) mais prévoit des possibilités de dérogations à la durée maximale quotidienne de travail.
Actuellement, la possibilité est ouverte d'aller jusqu'à douze heures de travail quotidien à bord des navires armés au cabotage et à la navigation côtière, des remorqueurs et chalands qui ne sortent pas des ports et rades ou de la partie maritime des fleuves et rivières, des bâtiments et engins employés aux travaux maritimes et des bâtiments munis d'un permis de circulation (Article 1 er du Décret 83-794).
Cette possibilité de dérogation va être portée à 14 heures pour toutes les activités de navigations autre que de pêche maritime , compte tenu des modifications nécessitées par la transposition de la directive 1999/63/CE du 21 juin 1999 , soit à titre exceptionnel, sous l'autorité du capitaine (modification de l'article 1 er du décret n° 83-794), soit dans certaines situations, notamment dans les activités portuaires (modification de l'article 7 du décret n° 83-793).
Cependant ces possibilités ne sont ouvertes que sur le fondement d'un accord de branche ou d'une convention collective étendus, devant prévoir les mesures compensatoires adéquates.
Par ailleurs, en cas de travail organisé par cycles réguliers de six semaines maximum, la durée quotidienne du travail est décomptée en moyenne sur le cycle de travail.
Enfin, certaines circonstances précises permettent aussi le dépassement de la durée maximale quotidienne du travail. Elles concernent toutes les catégories de navigation maritime.
Il s'agit de l'article 3 du décret n° 83-793, pour les cas de sauvetage, de brume, échouage, incendie, ou tout autre circonstance intéressant la sécurité du navire, pour débarquement d'un marin ne pouvant être remplacé ou pour une exemption de service entraînant une insuffisance de personnel.
Cette liste sera complétée pour prendre en compte les opérations d'assistance aux autres navires ou aux personnes en détresse en mer .
Le dépassement est également possible, en application de l'article 4 du décret n° 83-793, à l'entrée et à la sortie des ports, fleuves et rivières, lorsque le personnel qui n'est pas de quart ou de veille est appelé à seconder la bordée en service pour l'appareillage
3. La notion d'astreinte
En application de l'article 24-2 du code du travail maritime, la période d'astreinte mentionnée à l'article L. 212-4 bis du même code a été rendue applicable aux marins salariés des entreprises d'armement maritime dans des conditions fixées par décret. Ce décret, devra prendre en compte les résultats des consultations en cours des partenaires sociaux.
4. La durée hebdomadaire de travail
L'article 24 du code du travail maritime renvoie à l'article L.212-1 du code du travail. La durée légale du travail effectif est donc fixée à 35 heures hebdomadaires .
Notons que la pêche maritime bénéficie de la possibilité prévue par l'article 25-1 du code du travail maritime de fixer la durée du travail en nombre de jours de mer .
Le décret n° 83-793 a cette particularité qu'il est en premier lieu un texte d'organisation de la durée du travail à bord des navires ; il précise ensuite les limitations de la durée du travail hebdomadaire, en instaurant une limitation de la durée du travail au cours de deux semaines consécutives à cent vingt-cinq heures ou cent cinquante heures sur les navires armés à deux bordées de navigation .
Ce dispositif va être complété lors de la modification du décret par l'introduction d'une limitation à la durée de travail sur sept jours de soixante-douze heures pour être rendu conforme aux dispositions de la directive 1999/63/CE et de la convention n° 180 du BIT.
5. La durée maximale annuelle du travail
Les dispositions de l'article L.212-6 du code du travail en matière de contingent d'heures supplémentaires ne sont pas applicables dans le secteur maritime. Un autre contingent annuel de nature différente est prévu pour le travail maritime par l'article 26-1 alinéa 2 du code du travail maritime. Or, ce contingent détermine au seuil annuel de déclenchement de repos compensateur annuel.
L'article 6 du décret n° 83-793 pose le principe d'une limitation de la durée annuelle du travail pour les navires autres que de pêche . Ces limites peuvent être actuellement considérées comme obsolètes, compte tenu de la nouvelle durée légale du travail de trente-cinq heures et devraient pouvoir être revues prochainement après consultation en cour des partenaires sociaux.
Pour information elles sont encore de 2.240 heures dans l'année sur les navires armés au long cours, au pilotage et à la plaisance, les bateaux et engins employés aux travaux maritimes, enfin sur les navires de remorquage portuaire, quel que soit le type de navigation qu'ils pratiquent et de 2.500 heures sur les navires armés au cabotage et à la navigation côtière.
6. Les temps de repos
Le repos journalier se détermine essentiellement de l'application des diverses règles d'organisation du travail et de limitation de la durée quotidienne du travail. Toutefois, l'article 5 du décret n° 83-793 sera modifié de façon à prendre en compte les dispositions de la directive n° 99/63 en prévoyant de limiter à quatorze heures l'intervalle minimum entre deux repos et l'interdiction de scinder le repos en plus de eux périodes dont l'une de six heures consécutives minimum.
Repos hebdomadaire : en application de l'article 10 du décret n° 83-793, le repos hebdomadaire, repos complet d'une journée par semaine, peut être pris de manière différée à terre . Le code du travail maritime prévoit que ses modalités sont déterminées par voie de conventions collectives, ce qui est le cas pour la marine marchande et par un décret en Conseil d'État qui est à prendre.
7. Les congés
L'article 92-1 du code du travail maritime dispose que les marins embarqués pour servir à bord d'un navire ont droit à un congé payé à la charge de l'armateur, calculé à raison de trois jours par mois de service.
Pour tenir compte des dispositions de la directive n° 99/63, ainsi d'ailleurs que de la directive n° 2000-34 (pour la pêche maritime), une modification législative de l'article 92-1 sera prochainement proposée afin de préciser l'obligation de prendre les congés.
8. Le contrôle du temps de travail
Le code du travail maritime prévoyait déjà la tenue d'un tableau réglant l'organisation du travail à bord du navire et d'un registre des heures quotidiennes de travail et de repos des marins.
Afin d'assurer la transposition de la directive n° 99/63 ces documents seront conforme à un modèle défini par arrêté et conforme à celui annexé à la convention n° 180 de l'OIT.
Ces documents sont tenus à la disposition de l'inspecteur du travail maritime et, pour le tableau d'organisation du travail, visé régulièrement par ce dernier.