CHAPITRE II
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Cancer et consommations à risque
Article 15
(art. L. 1415-2, L. 1415-3, L. 1415-4, L. 1415-5
et L. 1415-6
du code de la santé publique)
Création du groupement
d'intérêt public
« Institut national du
cancer »
Objet : Cet article crée un Institut national du cancer chargé de coordonner les actions de lutte contre le cancer.
I - Le dispositif proposé
Le présent article propose d'insérer un chapitre V-I dans la première partie du code de la santé publique consacré à des dispositions relatives à la « lutte contre le cancer ».
Ce chapitre contient en définitive les dispositions relatives à l'Institut national du cancer, prévus aux articles L. 1415-2, L. 1415-3, L. 1415-4, L. 1415-5 et L. 1415-6 nouveaux du code de la santé publique.
Cet article nouveau du code de la santé publique précise les missions et les moyens de l'INCa.
Les missions de cet institut furent annoncées dans le Plan Cancer dont il constitue, en quelque sorte, la traduction institutionnelle.
L'Institut national du cancer Tous les patients et les professionnels partagent ce constat d'un émiettement de l'information et des responsabilités dans le cancer. Le plan propose la création d'un Institut national du cancer, comme clé d'une meilleure coordination de l'ensemble des intervenants de la lutte contre le cancer. Cette institution emblématique sera un centre d'expertise et de ressources ainsi qu'un lieu de coordination. Ce nouvel institut aura des missions parfaitement articulées et complémentaires avec les différents organismes déjà présents. L'Institut national du cancer associera très étroitement à son fonctionnement les chercheurs, les professionnels de santé et les représentants des patients afin de faciliter la mise en oeuvre du plan cancer. Dans le domaine des soins, l'Institut portera la vision globale de la lutte contre le cancer, depuis l'épidémiologie et la surveillance des risques cancérigènes jusqu'aux réseaux et aux établissements de soins. L'Institut sera un acteur vigilant de la mise en oeuvre du plan cancer. Il impulsera et suivra la réalisation des dispositions concernant la qualité et la coordination des soins, ainsi que l'accès équitable des patients aux meilleurs soins, quel que soit leur lieu de prise en charge. Dans le domaine de la recherche, l'Institut national du Cancer n'a pas vocation à se substituer aux organismes de recherche (INSERM, CNRS, CCEA,...). L'Institut sera une agence d'objectifs et de moyens, définissant une stratégie globale de recherche et les programmes d'actions correspondants, dans les domaines de la recherche biologique et génomique, de la recherche clinique et de la recherche en sciences sociales. L'Institut national du cancer financera et pilotera des programmes thématiques. Il développera également des partenariats forts et transparents avec l'industrie. Placé sous la tutelle du ministère chargé de la santé et du ministère chargé de la recherche, cet Institut bénéficiera de financements publics. Il fera également appel à des financements privés, dans le cadre du mécénat ou des donations. Il nouera des partenariats externes et pourra valoriser ses activités. Des institutions conduisant des programmes de recherche comme l'ARC et la Ligue seront associées étroitement à l'Institut national du cancer, ainsi que les grands groupes coopérateurs comme notamment la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer et la Fédération nationale de cancérologie des CHU. A moyen terme, l'Institut national du cancer peut préfigurer une évolution de la recherche publique française autour d'agences d'objectifs et de moyens et de grands instituts thématiques.
Source : Plan cancer, une mobilisation
nationale
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Article L. 1415-2 du code de la santé
publique
Mission de l'INCa
Cet article décline les différents aspects de la mission de coordination de l'INCa qui sont au nombre de huit :
- l'observation et l'évaluation des dispositifs de lutte contre le cancer ;
- la définition de référentiels de bonnes pratiques et de critères d'agrément pour les établissements ;
- l'information des professionnels et du public sur des sujets touchant au cancer ;
- la participation aux politiques de formation des personnels médicaux et paramédicaux concernés ;
- l'action privilégiée en matière de recherche contre le cancer. L'Institut aurait vocation, à ce titre, à agir en collaboration avec les organismes de recherche, notamment l'INSERM, le CNRS, le CEA ou l'INRA, de même qu'avec les différents centres universitaires ;
- la coordination spécifique entre organismes publics et privés, notamment sur la prévention, l'épidémiologie, le dépistage, la recherche et l'enseignement ainsi que l'évaluation ;
- la participation aux actions européennes et internationales en matière de lutte contre le cancer ;
- la réalisation des études d'expertise sur les sujets tenant au cancer à la demande du Gouvernement.
En outre, l'Institut national du cancer établit un rapport annuel transmis au Gouvernement.
Article L. 1415-3 du code de la santé
publique
Statut juridique de l'Institut national du
cancer
Cet article prévoit le statut juridique de l'INCa, constitué sous la forme d'un groupement d'intérêt public. Ce statut souple facilite la conclusion d'un partenariat entre l'État, personnes publiques de droit public et personnes publiques de droit privé.
Les dispositions de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982 définissant les règles juridiques applicables aux groupements d'intérêt public (personnalité morale, autonomie financière, etc).
Article L. 1415-4 du code de la santé
publique
Nomination du directeur
général
Cet article précise l'autorité en charge de la nomination du directeur général de l'Institut. Ce dernier sera nommé non par le conseil d'administration du GIP, contrairement aux dispositions de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982 précitée, mais par un arrêté conjoint des ministres chargés de la recherche et de la santé.
En revanche, il n'est pas prévu de commissaire du Gouvernement dans cette structure, l'expression du contrôle de l'État pouvant en tout état de cause s'exprimer à travers les modalités de nomination du directeur général.
Article L. 1415-5 du code de la santé
publique
Ressources de l'Institut
Cet article précise les ressources de l'Institut, composées de dons et legs mais également du produit de quêtes ou de campagnes d'appel à la générosité publique. Une partie des ressources de l'INCa est inscrite en loi de finances pour 2004 (11 millions d'euros). D'autres partenaires, dont l'assurance maladie, sont appelés dans le futur à financer cet organisme par le biais de subventions.
Article L. 1415-6
Statut du
personnel de l'établissement
Cet article précise le statut dont peut ressortir le personnel de l'Institut national du cancer. Le personnel peut être constitué tout à la fois par des fonctionnaires détachés par voie statutaire, des agents contractuels de droit public et par des personnels régis par des contrats de travail de droit privé.
La large faculté de recrutement ouverte à l'Institut se justifie par l'éventail de compétences qui est nécessaire à ce GIP (personnel scientifique et administratif hautement qualifié).
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
A l'initiative de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements :
- un amendement rédactionnel simplifiant la rédaction du titre de ce chapitre nouveau du code de la sécurité sociale ;
- un amendement précisant que le rapport d'activité de l'Institut du cancer est transmis, outre au Gouvernement, au Parlement.
A l'initiative du Gouvernement, elle a supprimé des ressources de l'Institut la référence faite aux produits des quêtes et des campagnes d'appel à la générosité publique, au motif que l'Institut aurait risqué d'entrer en concurrence avec des structures notamment associatives dont l'objet est de collecter des fonds en faveur de la lutte contre le cancer.
III - La position de votre commission
Votre commission approuve la totalité des dispositions proposées par le présent texte pour l'Institut national du cancer.
Elle rappelle, à ce titre, que cet article constitue la traduction législative éventuelle d'un plan de grande ampleur destiné à la lutte contre cette maladie, dont certains objectifs sont servis par le présent texte (lutte contre le tabagisme ou l'alcoolisme).
Votre commission s'interroge toutefois sur les délais nécessaires à la mise en oeuvre de ce plan. En effet, celui-ci prévoyait que le vote des dispositions législatives renforçant la lutte contre le tabac et créant l'Institut national du cancer serait réalisé dès 2003. L'agenda parlementaire n'a pas permis qu'il en soit ainsi. Il ne faudrait pourtant pas que le délai nécessaire à la navette ne retarde trop la mise en oeuvre de cet aspect du plan.
Votre commission attend donc du Gouvernement que celui-ci édicte rapidement, le moment venu, les mesures réglementaires nécessaires à l'application de ces dispositions afin que l'échéancier prévu dans le plan initial puisse être respecté.
Sous le bénéfice de ces informations, elle vous demande d'adopter cet article sans modification .
Article 15 bis (nouveau)
(art. L. 3512-4 du code de la santé
publique)
Autorité compétente pour constater et sanctionner
les infractions
à la législation sur la lutte contre le
tabagisme
Objet : Cet article établit la liste des agents compétents pour constater et réprimer le non-respect de l'interdiction de fumer dans les lieux publics.
I - Le dispositif proposé
A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté cet article additionnel qui précise quelle est l'autorité de contrôle et de sanction des infractions à l'interdiction de fumer dans les lieux publics, soit :
- les agents du ministère de la santé et des collectivités territoriales habilités et assermentés ;
- les médecins inspecteurs de la santé publique ;
- les ingénieurs du génie sanitaire.
De surcroît, demeurent compétents pour le contrôle de ces infractions, les agents et officiers de police judiciaire, du fait de leur compétence générale dans la constatation des contraventions.
Depuis la loi du 9 juillet 1976, l'application des dispositions prévues par l'article L. 3511-7 du code de la santé publique (interdiction de fumer dans certains lieux publics) est demeurée relative et contingente et les contraventions prévues à l'article R. 355-28-13 du code de la santé publique sont dressées de manière erratique en raison du manque d'agents en charge d'assurer leur respect.
Les lieux visés par cette interdiction sont : - tous les lieux fermés et couverts accueillant du public ou constituant un lieu de travail ; - les moyens de transport collectif ; - dans les écoles, collèges et lycées, les lieux non couverts fréquentés par les élèves pendant la durée de cette fréquentation. Les lieux mis à la disposition des fumeurs sont choisis par les responsables de ces derniers en fonction de leur volume, disposition, conditions d'utilisation, de ventilation et de la nécessité d'assurer la protection des non-fumeurs. Les locaux doivent respecter une norme de ventilation (7 litres/seconde et par occupant) et un volume minimal de 7 m 2 par occupant. Les locaux affectés à l'usage des fumeurs doivent être signalisés.
Les fumeurs contrevenant à ces dispositions sont
passibles d'une contravention de 3
e
classe. Le non-respect de ces
dispositions par les personnes en charge d'administrer un espace est passible
d'une contravention de 5
e
classe.
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II - La position de votre commission
Votre commission est favorable à l'extension des catégories d'agents compétents pour constater et réprimer les infractions aux dispositions de la loi du 9 juillet 1976, modifiée par la loi du 12 janvier 1991.
Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale demeure en effet raisonnable, les seuls agents et officiers de police judiciaire n'y pouvant à l'évidence suffire. En effet, bon nombre des infractions sont commises en des lieux sur lesquels ils n'ont guère l'occasion de se rendre, notamment les lieux de travail.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle votre commission s'interroge sur l'opportunité d'étendre cette compétence aux inspecteurs du travail. Bien que consciente qu'une telle extension peut entraîner des difficultés organisationnelles pour ledit corps des inspecteurs du travail, votre commission propose, néanmoins, dans l'attente d'une réflexion pouvant avoir lieu au cours des débats, une telle extension .
Elle vous demande d'adopter cet article ainsi modifié .
Article 15 ter (nouveau)
Comité national consultatif du
cancer
Objet : Cet article propose de créer un Comité national consultatif du cancer par la voie législative.
I - Le dispositif proposé
Sur proposition du rapporteur de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Jean-Marie Le Guen, l'Assemblée nationale a adopté le présent article additionnel qui prévoit la création d'un comité national consultatif du cancer, instance consultative composée de représentants des professionnels de santé et des associations de malades.
Le comité national serait en charge de promouvoir le débat et formuler des propositions touchant les grands enjeux de la politique de lutte contre le cancer.
II - La position de votre commission
Votre commission constate que cette création pose la question de l'avenir du comité national du cancer que le présent article propose, peu ou prou, d'élever au rang législatif.
En effet, il existait précédemment un Conseil national du cancer créé par un arrêté du ministre délégué à la santé en date du 14 avril 1995. Il était constitué de personnalités du monde de la cancérologie, dans ses quatre composantes principales : les centres de lutte contre le cancer (CLCC), les CHU, les centres hospitaliers non universitaires et les établissements privés. Ce conseil s'était réuni très régulièrement et s'était exprimé en publiant neuf avis portant sur les thèmes les plus variés. Toutefois, il n'apparaît pas que ses avis aient alors été suivis de beaucoup d'effets. Le mandat du conseil était arrivé à échéance et il n'avait pas été renouvelé par la précédente majorité.
Par un arrêté du 30 avril 2002, le présent Gouvernement a recréé ce Conseil sous la forme d'un Comité national du cancer en en élargissant la composition (49 membres) bien au-delà des seuls professionnels de santé qui constituaient sa première version.
En outre, ses missions ont été accrues et précisées.
Ce comité peut notamment : 1° - Être sollicité sur la définition des objectifs de la politique de lutte contre le cancer ; 2° - Faire des propositions pour le renforcement des actions de prévention, de dépistage, de prise en charge et de communication ; 3° - Analyser les rapports concernant l'organisation et l'évaluation des dépistages et du volet cancer des programmes régionaux de santé ; 4° - Donner son avis sur l'organisation des soins en matière de cancérologie ;
5° - Être sollicité pour
participer aux réunions d'experts internationaux concernant les
politiques de lutte contre le cancer.
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Votre commission rappellera en premier lieu que M. Lucien Neuwirth, rapporteur d'une mission d'information consacrée à ce sujet 16 ( * ) , avait souhaité que le Conseil national soit réactivé et élargi. Elle constate avec satisfaction, à l'occasion de ce projet de loi, que le décret du 30 avril 2002 a largement répondu à cette attente.
En deuxième lieu, elle s'interroge sur la portée de création législative d'une telle structure, création qui conduira immanquablement à modifier l'arrêté ressuscitant le Conseil national du cancer pour en faire, en quelque sorte, une norme réglementaire d'application du présent article. Cette création est-elle nécessaire puisqu'elle n'aboutit qu'à modifier le nom d'une structure dont l'instauration relève, à bien des égards, du pouvoir réglementaire ?
A regret, elle constate toutefois que le décret n° 2003-418 du 7 mai 2003, portant création d'une mission interministérielle pour la lutte contre le cancer, n'a pas donné lieu à consultation dudit Conseil. Dans le rapport susmentionné de votre commission, M. Lucien Neuwirth avait pourtant formulé le voeu que le Conseil puisse être consulté systématiquement sur tout projet de décret. Il serait donc hautement souhaitable que ce Comité soit à l'avenir consulté de manière systématique.
Sous le bénéfice de ces informations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 15 quater (nouveau)
(art. L. 3511-7 du code de la santé
publique)
Mesures favorisant le dépistage du cancer
au
bénéfice des personnes les moins favorisées
Objet : Cet article prévoit un programme destiné à favoriser le dépistage du cancer dans les populations les moins sensibles aux politiques de prévention.
I - Le dispositif proposé
L'Assemblée nationale a adopté le présent article additionnel qui vise à instaurer un programme spécifique de prévention en faveur des personnes les moins favorisées, à l'initiative du rapporteur de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Jean-Marie Le Guen qui évoquait les « personnes rétives à tout dépistage ou celles rétives, une fois la maladie dépistée, à se faire soigner » .
C'est la raison pour laquelle le présent article engage les mesures de dépistage du cancer à comporter un programme spécifique destiné aux publics les « moins sensibles aux politiques de prévention ».
II - La position de votre commission
Votre commission ne peut que souscrire à l'objectif final de ce texte : il est démontré que certaines populations n'ont guère ou pas accès à des politiques de prévention du cancer, alors même qu'elles y sont parfois particulièrement exposées (facteurs nutritionnels, comportements à risque, conditions de vie, etc.).
Elle s'interroge néanmoins sur le contenu concret de ce programme, qui trouve sa place parmi le volet santé des politiques publiques luttant contre l'exclusion. A ce titre, elle vous propose de substituer à la notion de « populations les moins sensibles aux politiques de prévention » , qui n'est pas plus précise que l'expression initialement utilisée, la référence aux populations « confrontées à l'exclusion » , mentionnée notamment à l'article 158 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
Article 16
(art. L. 3511-2, L. 3512-1, L. 3512-2 et L. 3512-3
du code de
la santé publique)
Lutte contre le tabagisme
Objet : Cet article présente diverses mesures destinées à lutter contre le tabagisme.
I - Le dispositif proposé
Le présent article propose trois séries de mesures destinées à renforcer la lutte contre le tabagisme, notamment en assurant un meilleur respect de la législation déjà existante.
Le paragraphe I prévoit de compléter l'article L. 3511-2 du code de la santé publique d'un alinéa prohibant la vente, la distribution ou le don de paquets contenant moins de 19 cigarettes. Cette disposition est identique à l'article premier de la « loi Joly » du 31 juillet 2003 visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes.
Le paragraphe II élargit la liste des personnes morales ayant qualité pour se porter partie civile en cas d'infraction à la législation prévoyant les mesures de lutte contre le tabagisme : fraude sur les produits issus du tabac, propagande ou publicité, non-respect des teneurs maximales en goudron ou défaut d'affichage de la composition des produits mis à la vente, interdiction de fumer dans les locaux à usage collectif.
Dans le droit en vigueur, cette faculté n'est ouverte qu'aux associations dont l'objet social est de lutter contre le tabac, régulièrement déclarées depuis cinq ans.
Le présent paragraphe propose en conséquence de l'élargir :
- aux associations de consommateurs dont le statut est prévu par le code de la consommation (article L. 421-1) ;
- aux associations familiales dont le statut figure dans le code de l'action sociale et des familles (articles L. 211-1 et L. 211-2).
Le paragraphe III précise la sanction applicable en cas de non-respect de l'article L. 3511-2 du code de la santé publique. Cet article (déjà mentionné) prévoit désormais deux prohibitions :
- l'interdiction de fabriquer, vendre, distribuer ou offrir des produits issus du tabac, destinés à l'usage oral, hormis à fumer et à chiquer ;
- l'interdiction de vendre des paquets de moins de 19 cigarettes.
Cette précision était au demeurant nécessaire puisque les infractions à cet article ne sont reprises ni par les dispositions pénales du présent titre qui concernent les infractions aux articles L. 3511-3 et L. 3511-6 (l'article L. 3512-2 prévoit 75.000 euros d'amende), ni par les contraventions applicables en cas d'infraction aux dispositions de l'article L. 3511-7 (cf. article 15 bis).
Désormais, le non-respect des dispositions de l'article L. 3511-2 sera puni des peines prévues à l'article L. 3512-2 susmentionné.
Le paragraphe IV introduit un nouvel article L. 3512-3 dans le code de la santé publique qui propose un élargissement de la responsabilité pénale des personnes morales aux infractions incriminées par l'article L. 3512-2.
Concernant les personnes morales, il s'agit essentiellement de réprimer les actions de propagande et de publicité directe ou indirecte qui, bien qu'interdites, n'ont pas totalement disparu.
Les sanctions proposées à l'endroit des personnes morales contrevenantes sont significatives puisqu'elles sont exercées notamment dans les conditions prévues par l'article 131-41 du code pénal (quintuplement de l'amende prévue pour les personnes physiques rendues coupables d'une même infraction).
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'article premier de la loi du 31 juillet 2003 précitée prévoyant déjà une disposition similaire, l'Assemblée nationale a supprimé le I de cet article.
III - La position de votre commission
A cet article, votre commission vous propose d'adopter un amendement qui vise à permettre aux associations de défense des droits des personnes malades et usagers du système de santé à ester en justice.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
Article 16 bis (nouveau)
(art. L. 3351-8 du code de la santé
publique)
Compétence des agents de la Direction
générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes (DGCCRF) pour le contrôle du respect de la
réglementation régissant la publicité sur les alcools
Objet : Cet article étend la compétence des agents de la DGCCRF au contrôle de la réglementation régissant la publicité sur les boissons alcoolisées.
I - Le dispositif proposé
A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a introduit le présent article qui donne compétence aux agents de la DGCCRF pour veiller au respect des dispositions de l'article L. 3323-2 du code de la santé publique.
Cet article précise les conditions dans lesquelles sont autorisées les publicités en faveur des boissons alcoolisées.
Le présent article propose de renforcer l'application de ces dispositions par le truchement d'une meilleure efficacité des procédures de contrôle ; à cette fin, il prévoit de confier aux agents de la répression des fraudes le soin de procéder aux enquêtes nécessaires et constater les infractions, en disposant, pour ce faire, des pouvoirs d'enquête et de contrôle qui leur sont dévolus.
II - La position de votre commission
A cet article, votre commission vous propose un amendement de coordination.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 17
(art. L. 3555-1 et L. 3323-4 du code de la santé
publique)
Lutte contre l'alcoolisme
Objet : Cet article étend la liste des associations compétentes pour veiller au respect des dispositions législatives destinées à lutter contre l'alcoolisme.
I - Le dispositif proposé
Le présent article propose d'étendre la liste des associations compétentes pour veiller au respect des dispositions du titre V du livre III du code de la santé publique consacré à la lutte contre l'alcoolisme.
En l'état du droit en vigueur, seule l'association nationale de prévention de lutte contre l'alcoolisme remplit les critères posés pour disposer de cette compétence et notamment la faculté d'ester en justice : être une association dont l'objet statutaire comporte la lutte contre l'alcoolisme et être régulièrement déclarée depuis cinq années.
Parallèlement aux dispositions prises en faveur de la lutte contre le tabagisme à l'article 16, le présent article étend cette compétence :
- aux associations de consommateurs pour les infractions relatives à la réglementation de la publicité, mais également le non-respect des impositions régissant la vente de boissons alcoolisées (vente ambulante, vente au moyen d'appareils automatiques, etc.) ;
- aux associations familiales pour les infractions relatives à la répression de l'ivresse publique et à la protection des mineurs.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement remplaçant l'avertissement figurant sur certaines publicités en faveur de boissons alcoolisées. La mention désormais classique du fait que « l'abus d'alcool est dangereux pour la santé » serait remplacée par un message informatif dont les conditions seraient « fixées par arrêtés des ministres en charge de la santé et de l'agriculture » . Devant l'Assemblée nationale, M. Jean-François Mattei a justifié l'amendement par le fait que « les connaissances scientifiques sur la nocivité de l'alcool ont largement progressé ces dernières années. Les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé et de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale invitent à communiquer les termes de consommation faible et non plus d'abus, tel que le prévoit le texte actuel. La disposition proposée permettra d'améliorer l'information du consommateur et de faire évoluer le contenu des messages en fonction de l'évolution des connaissances. L'arrêté sera cosigné par le ministre chargé de la santé et le ministre chargé de l'agriculture. ».
III - La position de votre commission
Votre commission ne peut que s'associer à l'objectif final de cet article que constitue la lutte contre l'alcoolisme et approuver de ce fait l'allongement de la liste, à l'évidence trop restrictive, des associations compétentes pour participer au respect de la législation en vigueur.
Elle s'interroge en revanche sur la portée de l'amendement introduit à l'initiative du Gouvernement et notamment sur l'intervention du ministre en charge de l'agriculture dans l'édiction par arrêté d'un message de santé publique accompagnant la publicité en faveur de boissons alcoolisées. Cette intervention pourrait laisser supposer, sans doute à tort, que des paramètres étrangers aux seules questions de santé publique sont susceptibles d'être pris en compte. En outre, votre commission ne souhaiterait pas que puissent être différenciés les avertissements en fonction du type de boisson alcoolisée. Aussi, propose-t-elle de maintenir la rédaction aujourd'hui en vigueur de l'article L. 3324-4 du code de la santé publique.
Aussi, votre commission vous propose-t-elle de revenir aux dispositions prévues par la loi Evin pour les messages sanitaires relatifs aux boissons alcoolisées.
Elle vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
Article 18
(art. L. 5121-12, L. 5126-2 et L. 5126-3 du code de la
santé publique)
Modification de la législation relative aux
médicaments
Objet : Cet article modifie la législation relative aux médicaments, pour la délivrance des médicaments et la réalisation de préparations entre une pharmacie à usage intérieur et une autre pharmacie à usage intérieur ou un professionnel de santé exerçant une activité libérale.
I - Le dispositif proposé
Le paragraphe I de l'article modifie la rédaction des deux derniers alinéas de l'article L. 5121-2 du code de la santé publique afin de préciser le régime des autorisations temporaires d'utilisation (ATU). Les ATU permettent un accès précoce des patients à de nouveaux traitements lorsqu'il y a un réel besoin de santé publique, c'est-à-dire pour des patients atteints de pathologies graves.
Afin d'assurer un meilleur suivi de ces autorisations délivrées à des médicaments, notamment des médicaments anticancéreux, il s'avère nécessaire de préciser les informations qui seront demandées au titulaire des droits d'exploitation. Ces informations permettront de mieux connaître les conditions réelles d'utilisation de ces médicaments, la population qui en bénéficie et le coût pour l'assurance maladie de ces traitements.
Le texte prévoit que les dispositions de l'article L. 5121-8 du code de la santé publique (obligation de disposer d'une autorisation de mise sur le marché) ne font pas obstacle à l'utilisation, à titre exceptionnel, de certains médicaments destinés à traiter des maladies graves ou rares lorsqu'il n'existe pas de traitement approprié. Les conditions sont les suivantes : soit l'efficacité et la sécurité de ces médicaments sont fortement présumées au vu des résultats d'essais thérapeutiques auxquels il a été procédé en vue d'une demande d'autorisation de mise sur le marché (la demande a été faite ou va être déposée), soit ces médicaments sont prescrits à des malades nommément désignés sous la responsabilité de leur médecin traitant, dès lors que leur efficacité et leur sécurité sont présumées en l'état des connaissances scientifiques et qu'ils sont susceptibles de présenter un bénéfice réel. L'utilisation de ces médicaments est autorisée, pour une durée limitée, par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS).
Cet article propose de modifier les conditions de délivrance de cette autorisation lorsqu'elle concerne des médicaments dont la procédure d'octroi d'autorisation de mise sur le marché (AMM) est déjà déclenchée. Le texte en vigueur précise que l'autorisation « peut être subordonnée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à la condition qu'elle soit sollicitée dans le cadre d'un protocole d'utilisation thérapeutique et de recueil d'informations, établi avec le titulaire des droits d'exploitation ».
Le présent projet vise à ajouter que le protocole établi avec le titulaire des droits d'exploitation concerne :
- les conditions réelles d'utilisation ;
- les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament ainsi autorisé ;
- le coût de cette autorisation pour l'assurance maladie.
La modification proposée conduit à mieux encadrer le pouvoir d'appréciation de l'AFSSAPS s'agissant de la délivrance d'une ATU. Celle-ci devra veiller à ce que le protocole contienne ces indications très importantes, notamment l'évaluation des dépenses supplémentaires des régimes de l'assurance maladie occasionnées par la délivrance de l'ATU. Cette nouvelle mission, pour être menée efficacement, devra s'accompagner d'un renforcement des moyens d'expertise médico-économique de l'Agence.
Le paragraphe II de l'article concerne les pharmacies à usage intérieur, dont le régime juridique est fixé par le chapitre VI du titre II du livre premier de la cinquième partie du code de la santé publique.
Cette disposition vise à permettre aux structures ne disposant pas de moyens techniques pour réaliser des préparations magistrales ou hospitalières dans des conditions de sécurité satisfaisantes de s'approvisionner auprès des pharmacies à usage intérieur (PUI).
Les structures identifiées aujourd'hui sont l'hospitalisation à domicile privée et il paraît utile d'étendre également cette possibilité aux réseaux. Les catégories de préparations décrites pourraient être celles réalisées dans le traitement du cancer et administrées par voie injectable mais il semble utile de prévoir cette possibilité de manière large afin d'y inclure, le cas échéant, d'autres préparations.
La nouvelle rédaction du dernier alinéa de l'article L. 5126-2 du code de la santé publique autorise des pharmacies intérieures à délivrer des préparations à d'autres établissements et à des professionnels de santé libéraux participant à un réseau de santé. Les établissements concernés sont nombreux : établissements de santé, médico-sociaux, syndicats interhospitaliers ainsi que les organismes pouvant disposer d'une pharmacie intérieure.
Les produits concernés sont les « préparations magistrales » et les « préparations hospitalières », dont les régimes juridiques sont fixés par l'article L. 5121-1 du code de la santé publique. La liste est définie par un arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l'AFSSAPS. L'arrêté fixe également les modalités de facturation. L'étude d'impact annexée au présent projet de loi indique que cette disposition facilitera l'approvisionnement en médicaments anticancéreux, notamment ceux administrés par voie injectable.
En outre, il est apparu nécessaire de prévoir que les pharmacies à usage intérieur puissent effectuer des opérations de stérilisation non seulement pour d'autres établissements, mais également pour des médecins libéraux ou pour des laboratoires de biologie médicale en dehors des établissements.
Ces trois nouvelles activités des pharmacies à usage intérieur nécessitent une autorisation du préfet, délivrée au vu d'une convention fixant les engagements des parties contractantes.
Le paragraphe III de l'article propose une nouvelle rédaction de l'article L. 5126-3 du code de la santé publique.
le texte actuellement en vigueur précise que le représentant de l'État dans le département peut, « pour des raisons de santé publique », autoriser, pour une durée déterminée, une pharmacie à usage intérieur d'un établissement de santé ou d'un syndicat interhospitalier à assurer tout ou partie de la stérilisation de dispositifs médicaux pour le compte d'un autre établissement. L'autorisation est accordée après avis de l'inspection compétente et au vu du projet de convention qui fixe les engagements des deux établissements.
La rédaction proposée regroupe dans un régime commun la délivrance par les pharmacies intérieures de préparations à d'autres organismes et les opérations de stérilisation effectuées par ces pharmacies pour le compte de tiers. Ces trois nouvelles activités des pharmacies à usage intérieur nécessitent une autorisation du préfet, délivrée au vu d'une convention fixant les engagements des parties contractantes.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
Sur proposition du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté quatre amendements à cet article :
- le premier propose de retirer des attributions de l'AFSSAPS, sa mission d'évaluation des coûts des produits. Cette modification s'inscrit dans la logique d'autres rédactions adoptées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, qui a recentré les missions de l'AFSSAPS sur les impératifs de sécurité sanitaire ;
- le deuxième vise à développer l'évaluation des produits après la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché ;
- le troisième prévoit que les hôpitaux des armées peuvent disposer d'une pharmacie à usage intérieur ;
- le quatrième souhaite que les créations, transferts ou suppressions des pharmacies à usage intérieur sises dans les hôpitaux militaires fassent l'objet d'une autorisation du ministre de la défense après avis du ministre chargé de la santé.
III - La position de votre commission
A cet article, votre commission vous propose deux amendements .
Le premier vise à inclure les spécialités reconstituées dans le champ des produits que peuvent délivrer les pharmacies à usage intérieur à d'autres pharmacies à usage intérieur ainsi qu'à des professionnels de santé libéraux. Le second est un amendement de cohérence.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 18 bis
(art. L. 312-16 du code de
l'éducation)
Apprentissage des premiers gestes de secours au
lycée et au collège
Objet : Cet article vise à introduire, dans les programmes d'enseignement des lycées et des collèges, un cours d'apprentissage des gestes élémentaires du secourisme.
Cet article a été introduit en première lecture à l'Assemblée nationale, à l'initiative de de M. Jean-Pierre Door, en dépit de l'opposition de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale et du Gouvernement qui doutaient de la nature législative de son contenu.
Cette disposition vise à compléter l'article L. 312-16 du code de l'éducation qui constitue, à lui seul, la section 9 consacrée à « l'éducation à la santé et à la sexualité » du chapitre II « Dispositions propres à certaines matières d'enseignement » du titre premier du livre III dudit code.
Elle tend à créer, dans les programmes d'enseignement du collège et du lycée, un cours d'apprentissage des premiers gestes de secours, dont la nature sera définie par décret.
M. Jean-Pierre Door a justifié le dépôt de cet amendement en ces termes : « De nombreuses morts subites pourraient être évitées chaque année. Mais la population n'est pas éduquée aux gestes d'urgence face à des accidents qui peuvent survenir dans les familles, sur les terrains de sport, dans des vestiaires. C'est pourquoi je propose (...) d'introduire dans le code de l'éducation, l'obligation d'un cours d'apprentissage aux premiers secours pour les élèves des collèges et lycées. »
Sensible à cet argument, votre commission approuve cette disposition nouvelle qui vient utilement compléter le code de l'éducation et la formation des lycéens et des collégiens.
Il convient, en effet, de souligner que, ni le code de la sécurité sociale, ni le code de l'action sociale et des familles, ni le code de la santé publique, à l'exception, de façon incidente, de l'article R. 1222-18, ni jusqu'ici le code de l'éducation, ne font référence aux gestes de premiers secours.
Votre commission vous propose donc d'adopter cet article sans modification.
Article 18 ter
(art. L. 312-17 nouveau du code de
l'éducation)
Information dans les lycées et les
collèges sur les toxicomanies
Objet : Cet article prévoit d'instituer dans les lycées et les collèges une information spécifique afin de prévenir les différentes toxicomanies.
I - Le dispositif proposé
Cet article additionnel résulte de l'adoption d'un amendement déposé conjointement par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et M. Bernard Accoyer.
Il prévoit de créer un nouvel article L. 312-17 au sein du code de l'éducation, constituant une nouvelle section 10 « prévention et information sur les toxicomanies » de son chapitre II du titre premier du livre III.
Les dispositions proposées prévoient qu'une information sera dispensée chaque année aux élèves des lycées et des collèges rassemblés par groupes d'âge homogènes portant sur « les conséquences de la consommation de drogues », en insistant « notamment » sur les « effets de la consommation de cannabis ». Ces séances pourront « associer les personnels contribuant à la mission de santé scolaire », c'est-à-dire les infirmières et les médecins scolaires, ainsi que « d'autres intervenants extérieurs », avec l'accord du chef d'établissement, dans la mesure où ce dernier assume la responsabilité en matière de respect de l'ordre public dans cette enceinte.
La loi du 31 décembre 1970, codifiée dans de nombreux articles du code pénal, constitue le cadre légal dans lequel s'inscrit la politique de lutte contre les drogues et vise à en réprimer l'usage et le trafic.
S'agissant de la prévention, depuis la mission d'étude sur l'ensemble des problèmes de drogue présidée par Mme Monique Pelletier en 1978, une longue série de rapports officiels en a abordé, de façon directe ou indirecte, la problématique, les enjeux, et formulé des constats.
Le rapport de la commission d'enquête du Sénat consacrée à la politique nationale de lutte contre les drogues illicites 17 ( * ) , présidée par notre collègue, Mme Nelly Olin et dont M. Bernard Plasait fut le rapporteur, avait ainsi émis en juin 2003 un constat très critique sur la politique de la prévention de la toxicomanie. Les principaux éléments de ce jugement négatif résidaient dans « le message ambigu et peu crédible » du dispositif interministériel, la « coordination défaillante » des structures compétentes et les « carences des acteurs naturels de la prévention », dont l'éducation nationale est d'ailleurs « la grande absente ».
II - La position de votre commission
Votre commission se réjouit de voir renforcée auprès des jeunes la politique de prévention et d'information sur les toxicomanies.
Lors de son audition, le 23 avril 2003, par la commission d'enquête du Sénat, M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, soulignait à juste titre que « la prévention primaire » restait « le maillon faible de notre système sanitaire, alors que plus de la moitié des jeunes de 18 ans expérimente le cannabis, plus du quart des garçons (29 %) et 14 % des filles ont une consommation régulière ou intensive », ce qui fait que « la France possède le record d'Europe de la consommation de cannabis chez les jeunes ».
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 18 quater
(art. L. 4111-7 du code de la santé
publique)
Prescription et mise en oeuvre des psychothérapies
Objet : Cet article vise à encadrer la pratique de la psychothérapie.
I - Le dispositif proposé
Sur proposition de M. Bernard Accoyer, la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a adopté un article additionnel visant à organiser la prescription et la mise en oeuvre des psychothérapies.
Cet article résulte d'un long travail de préparation. Il fait suite au dépôt, par M. Bernard Accoyer et plusieurs de ses collègues, de deux propositions de loi, l'une relative à l'usage du titre de psychothérapeute (n° 1844, enregistrée le 13 octobre 1999) l'autre relative à la prescription et à la conduite des psychothérapies (n° 2342, enregistrée le 26 avril 2000).
L'objet affiché de ces deux propositions, malgré des dispositifs juridiques différents, consiste à « développer la transparence et le droit à l'information des malades en ce qui concerne les « psychothérapies ». Composées d'un article unique, elles ont été formellement déposées après avoir été présentées initialement sous la forme d'amendements au projet de loi relatif à la couverture maladie universelle (séance du 4 mai 1999), puis au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (séance du 27 octobre 2000, pour insertion dans le rapport annexé).
Par deux fois, le rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale et le Gouvernement ont émis un avis défavorable, tout en reconnaissant l'importance de la question soulevée. En 1999, le secrétaire d'État à la santé et à l'action sociale avait même annoncé qu'un groupe de travail était chargé du dossier au sein du ministère et que des propositions seraient faites à l'issue d'une concertation préalable.
C'est un dispositif plus élaboré que les deux propositions initiales qui a finalement été adopté par l'Assemblée nationale à l'occasion de l'examen du présent texte.
Inspiré par le souhait de sécuriser la pratique des psychothérapies , son auteur le défendait ainsi :
« Les psychothérapies sont de natures diverses mais, surtout, elles peuvent aujourd'hui être conduites en France sans le moindre contrôle sur ceux qui se déclarent capables de les conduire. Aussi bizarre que cela puisse paraître, il y a donc un vide juridique, qui fait que n'importe qui peut visser sur la façade d'un immeuble sa plaque en s'arrogeant le titre de psychothérapeute.
« Les populations qui suivent des psychothérapies sont plus fragiles que d'autres puisqu'elles ont besoin d'une aide, d'un soutien psychologique. Or elles peuvent être l'objet d'erreurs de diagnostic, des traitements inadaptés peuvent leur être prescrits et les personnes à qui elles ont affaire sont susceptibles de ne pas identifier des affections plus graves déviant vers des maladies de type psychotique, ce qui présente des risques pour les malades eux-mêmes et pour leur entourage.
« Par ailleurs, des dérives commerciales ont été observées. La mission interministérielle de lutte contre les sectes a même identifié des dérives sectaires qui constituent autant de dangers.
« Il convient de préciser que les psychothérapies ne peuvent être mises en oeuvre que par des médecins psychiatres ou par des psychologues cliniciens formés préalablement.
« Mon amendement (...) prévoit précisément que les personnes qui conduisent des psychothérapies mais qui n'appartiennent pas à ces professions et qui n'ont pas les qualifications requises pourront poursuivre leur activité thérapeutique à la condition d'exercer depuis cinq ans et sous réserve de satisfaire, dans les trois années suivant la promulgation de la loi, à une évaluation de leurs connaissances et de leurs pratiques par un jury dont la composition serait fixée par arrêté.
« Ces dispositions sont l'aboutissement d'un très long travail, qui a commencé sous la précédente législature, avec le ministre de la santé de l'époque, M. Bernard Kouchner et son cabinet. Ce travail n'avait pu aboutir alors que nous n'étions pas loin du but. »
Ce sujet fait incontestablement l'objet d'une préoccupation réelle et partagée. Peu avant le vote de cet article, l'Académie de médecine adoptait, le mardi 1 er juillet 2003, un rapport sur la pratique de la psychothérapie, fruit de deux années de travail. Elle y soulignait combien « la question de la pratique et des critères d'habilitation à la pratique des psychothérapies se pose actuellement de façon aiguë en raison du développement incontrôlé de pratiques hétérogènes et non encadrées ».
Le choix retenu par l'Assemblée nationale de réserver l'exercice de la psychothérapie à des professionnels diplômés de l'enseignement supérieur rejoint la conclusion des travaux de l'Académie de médecine sur la psychothérapie. Cette dernière s'est déclarée opposée à la création d'un statut légal de psychothérapeute, susceptible de promouvoir la multiplication de thérapies plus ou moins fantaisistes et qui ne relèveraient plus du domaine médical.
Le même choix a été opéré dans le rapport de la mission Clery Melin chargée de faire des propositions en vue d'établir une politique de santé mentale. Ce rapport, remis au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées le 2 octobre dernier, comprend plus de 140 propositions et s'inscrit dans une démarche de santé publique s'attachant à mieux définir les articulations entre la psychiatrie et la santé mentale. Trois axes majeurs se dégagent des propositions qu'il formule :
- s'atteler à la réorganisation de l'offre de soins de premier recours et réduire les disparités de répartition de l'offre sur le territoire ;
- renforcer l'encadrement des pratiques, notamment de la psychothérapie ;
- proposer une approche populationnelle de certaines prises en charge (enfants, personnes âgées, personnes détenues).
L'adoption de cet article par l'Assemblée nationale, bien qu'il s'agisse d'une proposition déjà débattue auparavant, partagée par l'Académie de médecine et proposée dans un rapport officiel remis au ministre de la santé, a provoqué une intense mobilisation de l'ensemble des professionnels exerçant la psychothérapie, les uns soutenant la nécessité d'organiser une profession insuffisamment contrôlée, les autres prônant la liberté d'exercice dans des conditions acceptables. Une réaction d'aussi grande ampleur est issue des usagers, se partageant entre ceux qui souhaitaient choisir librement leur psychothérapeute et ceux, victimes de pratiques contestables, favorables à une clarification des choses. Cette mobilisation a emprunté des voies médiatiques multiples (émissions de télévisions, tribunes dans la presse quotidienne ou hebdomadaire), et s'est également traduite par des prises de contact et demandes de rencontres avec les parlementaires, ainsi qu'auprès du ministre.
Les critiques opposées au présent texte portent sur deux points : la rédaction du premier alinéa de l'article L. 3231-1 du code de la santé publique qui dispose que les psychothérapies « constituent des outils thérapeutiques utilisés dans le traitement des troubles mentaux » d'une part, et surtout la fixation de règles d'accès à la profession prévue par les alinéas suivants, d'autre part.
Le premier aspect soulève une question complexe : celle de la définition des psychothérapies , pour laquelle votre rapporteur se reportera aux définitions proposées par le rapport de l'Académie de médecine. C'est la référence faite par la loi aux troubles mentaux qui est contestée par les représentants des psychothérapeutes, car elle aurait le défaut de « psychiatriser » la prise en charge du patient et de négliger la souffrance psychique accessible à d'autres méthodes non médicales, propres aux psychothérapies.
La délivrance d'un diplôme universitaire spécifique (médecins ou psychologues) est également une cause de mobilisation de la profession et sans aucun doute la plus puissante. Les représentants des professionnels arguent du fait que les diplômes mentionnés dans la loi ne sont pas une condition suffisante pour garantir la qualité du psychothérapeute et que la qualification universitaire ainsi exigée néglige l'existence de formations adaptées et performantes assurées par des établissements privés non reconnus par l'État.
Pierre Pichot et Jean-François Allilaire Définition de la psychothérapie C'est un médecin anglais, Tuke, qui créa, en 1872, le terme « psychothérapeutique » mais c'est un médecin français, Bernheim, chef de file de l'école hypnologique de Nancy, qui utilisa le premier le terme de « psychothérapie », toujours en usage aujourd'hui. A son origine, la psychothérapie se définissait « comme ce qui relève de l'influence de l'esprit sur le corps dans la pratique médicale ». Elle a aujourd'hui un sens plus restreint et la définition la plus couramment admise se contente d'affirmer que la psychothérapie est seulement « l'aide qu'un psychisme peut apporter à un autre psychisme ». Cette affirmation implique le recours à des moyens pour y parvenir et des buts pour en fixer les limites. Les moyens de la psychothérapie sont extrêmement diversifiés et vont de l'utilisation de la parole comme unique vecteur de la guérison jusqu'à l'adjonction de techniques diverses, comme la médiation corporelle, la musique, l'art, le dessin, l'expression théâtrale par exemple. La prescription d'une thérapeutique biologique associée à la psychothérapie peut aussi constituer l'essentiel du traitement, en particulier dans la prise en charge de malades atteints de troubles psychotiques. Mais, même dans ces cas, une bonne relation psychothérapique avec le patient s'avère indispensable. De façon générale, quelles que soient les techniques envisagées, toutes gardent en commun l'utilisation, à des fins thérapeutiques, de la relation interpersonnelle. Ce point étant admis, la grande variété des techniques psychothérapiques démontre à l'évidence qu'il n'y a pas une mais des psychothérapies et que chacune d'elles comporte des indications particulières. Quant aux buts recherchés, ils concernent essentiellement la disparition des symptômes et de la souffrance qu'ils entraînent ainsi que l'amélioration de la santé mentale au sens large. Au cours du vingtième siècle, la psychothérapie a été directement liée à l'essor de la psychanalyse, qui, dans notre pays, n'a réellement pénétré l'espace psychiatrique qu'à partir des années cinquante mais a représenté, jusqu'aux années quatre-vingt environ, la base conceptuelle prédominante de la plupart des psychothérapies. Ce phénomène s'est produit également aux USA et en Amérique latine. Les autres méthodes psychothérapiques qui se sont développées parallèlement relèvent de quatre courants principaux, les courants comportementaliste et cognitiviste, humaniste, systémique, et, plus récemment, « éclectique et intégratif ». Les différents courants psychothérapiques actuels La psychothérapie d'inspiration psychanalytique La psychothérapie d'inspiration psychanalytique est une pratique dérivée de la psychanalyse. Dans sa forme la plus commune, elle se pratique en face à face, selon un rythme de séances différent de celui de la cure type (en moyenne une séance par semaine au lieu de trois). Elle se réfère aux concepts de la théorie psychanalytique, et plus particulièrement aux notions d'inconscient, de transfert et d'interprétation dans le transfert. Les autres psychothérapies Elles se définissent tantôt par les interlocuteurs auxquels elles s'adressent : groupe, famille, couple, institution, tantôt par le procédé qu'elles utilisent : art-thérapie, musicothérapie, ergothérapie, tantôt par l'utilisation d'une médiation corporelle : relaxation, etc. Mais le critère de classification le plus pertinent reste la théorie psychologique à laquelle le thérapeute se réfère et les modèles conceptuels qu'il utilise pour comprendre la dynamique psychique de son action. A - Le courant comportementaliste et cognitiviste C'est le courant dominant actuellement et celui qui est le mieux validé dans ses résultats thérapeutiques. Il s'inspire de l'application de la psychologie expérimentale au champ de la clinique pour comprendre, évaluer et traiter les troubles mentaux et ceux du comportement. Il applique les données de l'apprentissage répondant, opérant, social et cognitif et cherche à modifier la clinique quotidienne au moyen des mécanismes mis à jour par la recherche expérimentale clinique. B - Le courant systémique Il repose sur des conceptions théoriques inspirées à la fois de l'anthropologie et de la théorie générale des systèmes. Elaborée à partir des années cinquante à Palo Alto par un psychologue américain, Gregory Bateson, la thérapie systémique est basée sur une théorie de la communication originale. Le patient y est considéré comme un des éléments du réseau de communications qui le relie à son groupe social et familial. La pathologie peut entrer en résonance avec l'environnement, ce qui amplifie ou atténue le processus psychopathologique. C - Le courant humaniste La psychothérapie humaniste se centre sur la personne (« client-centered psychotherapy ») et cherche à promouvoir l'autonomie de celle-ci mais elle a l'ambition de le faire en dehors de toute théorisation préalable. Elle préconise une relation d'aide basée sur une compréhension réciproque et sur l'empathie du thérapeute pour son patient. C'est un psychologue américain, Carl Rogers, qui a défini le premier les concepts de la psychothérapie humaniste et précisé sa technique. En dehors de l'empathie, celle-ci se fonde sur la notion de « congruence », c'est-à-dire sur la coïncidence intuitive des sentiments du thérapeute avec ceux du patient. D - Le courant « éclectique et intégratif » Il se base sur la constatation de la multiplicité des techniques, le manque de cohérence et la pauvreté de certaines théorisations, le dogmatisme, l'ostracisme de nombreuses écoles divisées et opposées en « chapelles » rivales. Il propose d'introduire plus de rigueur dans ce domaine, sur la base d'études scientifiques. Ces études ont montré, par exemple, que toutes les théories et les techniques sans exception mettent en jeu, dans des proportions et avec des accents différents, les mêmes facteurs dits pour cette raison « communs », tels que l'alliance thérapeutique, la motivation du patient, celle du thérapeute, le désir de changement, la régulation des affects, l'articulation entre affects et cognitions etc. Ces facteurs communs pourraient rendre compte jusqu'à 30 % des résultats thérapeutiques observés.
Source : Rapport de l'Académie de
médecine, Juillet 2003
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II - La position de votre commission
Ce contexte passionné a marqué les conditions dans lesquelles votre commission a examiné le présent projet de loi, dont le seul article consacré à l'usage des psychothérapies a mobilisé une grande partie de son attention et requis l'organisation de nombreuses auditions des représentants des psychothérapeutes, ouvertes à l'ensemble des sénateurs.
Environ 13.000 psychiatres et 15.000 psychothérapeutes exercent aujourd'hui la psychothérapie en France. Sur ces 15.000 psychothérapeutes, une forte majorité ne disposerait pas des diplômes exigés par le dispositif adopté par l'Assemblée nationale, c'est-à-dire qu'ils exercent librement leur art, parfois avec une extrême compétence, parfois au moyen de pratiques confinant au charlatanisme. L'enseignement est délivré par près de cinq cents écoles différentes et qui associent en général, travail sur soi, travail en supervision et confrontation des expériences entre pairs.
Au total, entre trois et cinq millions de personnes recouraient chaque année à ces pratiques, le plus souvent de leur propre initiative et sans bénéficier d'une prise en charge par la sécurité sociale.
Aucun des interlocuteurs entendus pour la préparation du présent rapport n'a exprimé la moindre opposition au principe d'une réglementation de la profession de psychothérapeute. Tous ont déclaré soutenir une démarche qui vise à rendre la psychothérapie plus lisible aux patients, ou aux usagers, suivant les deux terminologies utilisées en l'espèce. Tous ont considéré que certaines capacités étaient indispensables à l'exercice de la psychothérapie.
Comment les principaux pays européens ont-ils réglementé la psychothérapie ? Dans son rapport, l'Académie de médecine distingue deux méthodes opposées : « l'abord allemand et autrichien est à la fois autoritaire et contraignant avec des directives très précises sur les indications, le nombre de séances, la qualification et l'affiliation des praticiens ». (...) « l'abord britannique est à l'opposé puisque le respect de la liberté de chacun va même jusqu'à ne pas contraindre les praticiens à s'affilier aux associations qui sont regroupées dans le UK Council for Psychotherapy ».
Enfin, votre rapporteur a interrogé le ministre de la santé sur cette question à l'occasion de son audition le 17 décembre dernier, qui a considéré : « que le souci de protection des patients était légitime mais il a estimé que la réglementation de la profession se heurtait à plusieurs difficultés liées au caractère fluctuant de la frontière entre difficultés psychologiques et affections pathologiques qui devaient continuer à relever de la psychiatrie, à la répartition des compétences entre les différentes disciplines et à la définition de critères de qualité pour la formation des psychothérapeutes ». Il a par ailleurs indiqué que les associations de victimes demandaient surtout à pouvoir se retourner contre le professionnel en cas de dommage et qu'il réfléchissait en conséquence à une possibilité de déclaration du psychothérapeute pour matérialiser son engagement à prendre en charge la personne et donner à cette dernière un moyen de preuve en cas de dommage.
A l'issue de ces consultations, votre commission a considéré qu'il lui appartenait de poursuivre dans la voie ouverte par l'Assemblée nationale et de déterminer les conditions dans lesquelles pouvait être établi un dispositif protecteur des personnes et ouvrant la possibilité d'une labellisation de certains professionnels sur des critères non uniquement universitaires.
Il est donc proposé de subordonner l'usage professionnel du titre de psychothérapeute à l'inscription sur un Registre national des psychothérapeutes, effectuée au niveau départemental. Les médecins et psychologues diplômés de l'Université bénéficieront, s'ils le souhaitent, d'une inscription de droit, les modalités d'application de l'ensemble de ces dispositions étant définies par voie réglementaire.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
* 16 La volonté de vaincre le cancer, rapport d'information du Sénat n° 419 de la commission des Affaires sociales (2000-2001).
* 17 Rapport d'information n° 321 - Mme Nelly Olin - Tomes I et II (2002-2003).