CHAPITRE II
L'ASSEMBLÉE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE

Article 102
Compétence de l'assemblée de la Polynésie française

Le présent article reprend les dispositions de l'article 60 du statut actuel selon lesquelles l'assemblée de la Polynésie française dispose d'une compétence de principe pour toutes les matières relevant de la compétence de la collectivité.

Il apporte deux précisions par rapport au droit en vigueur.

D'une part, il indique que l'assemblée règle par ses délibérations les affaires de la Polynésie française et précise qu'elle exerce ses compétences dans le domaine de la loi . Cette précision apparaît contradictoire avec la reconnaissance à l'assemblée d'une compétence de droit commun qui peut concerner aussi bien les matières relevant du domaine de la loi tel qu'il est déterminé par l'article 34 de la Constitution que du domaine du règlement. Elle introduit donc une restriction injustifiée que votre commission vous propose de lever par un amendement .

D'autre part, le présent article précise également que l'assemblée exerce une fonction de contrôle sur le président et le gouvernement de la Polynésie française. Il reconnaît ainsi l'importance de cette mission qui peut aller jusqu'à l'adoption d'une motion de censure (article 77 du statut en vigueur).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 102 ainsi modifié .

SECTION 1
Composition et formation

Les règles applicables aux élections à l'assemblée de la Polynésie française reposent d'une part sur les dispositions communes à toutes les élections -comme le principe de la parité posé par la loi n° 2000-612 du 4 juillet 2000- et, d'autre part, les dispositions propres à la Polynésie française contenues dans deux lois distinctes modifiées à de nombreuses reprises et dont plusieurs dispositions revêtent un caractère organique depuis la modification de l'article 74 de la Constitution du 25 juin 1992.

Article 103
Mode d'élection de l'assemblée

Le présent article reproduit les dispositions de l'article 44 du statut actuel et rappelle l'élection au suffrage universel direct de l'assemblée de la Polynésie française.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 103 sans modification .

Article 104
Composition de l'assemblée de la Polynésie française
et durée de son pouvoir

Le premier alinéa de cet article maintient le nombre des membres de l'assemblée à 49 membres, élus pour cinq ans et rééligibles comme le prévoit l'article premier de la loi du 21 octobre 1952.

Le second alinéa rappelle également le principe aujourd'hui en vigueur selon lequel les pouvoirs de l'assemblée expirent lors de la première réunion de l'assemblée nouvellement élue sauf dans l'hypothèse d'une dissolution.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 104 sans modification .

Article 105
Circonscriptions de la Polynésie française

Cet article maintient le nombre actuel des circonscriptions et la répartition des sièges entre elles. Il précise pour la première fois les communes composant chacune de ces circonscriptions en indiquant par ailleurs que les limites de ces communes résultent des dispositions en vigueur à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi organique.

La répartition actuelle procède de la loi organique n° 2001-40 du 15 janvier 2001 qui, sur la base du recensement de 1996, a corrigé l'écart de représentation entre les îles du Vent, les plus peuplées, et les autres archipels de la collectivité. En effet, avec près de 165.000 habitants soit 74 % de la population, la circonscription des îles du Vent ne disposait que de 22 sièges sur 41. La loi du 15 janvier 2001 a donc augmenté de 10 sièges la représentation des îles du Vent et retiré un siège à la circonscription des îles Sous-le-Vent et des îles Tuamotu-Gambier.

Le tableau suivant rend compte de l'évolution du nombre des sièges depuis 1946.

Circonscriptions

1946

1952

1957

1985

2000

Iles du Vent

10

12

16

22

32

Iles sous le Vent

5

6

6

8

7

Tuamotu-Gambier

2

4

4

5

4

Iles Marquises

2

2

2

3

3

Australes

1

2

2

3

3

TOTAL GENERAL

20

25

30

41

49

Selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le législateur doit réduire les écarts démographiques de représentation entre les différentes circonscriptions en vertu du principe selon lequel une assemblée élue au suffrage universel direct doit l'être sur des bases essentiellement démographiques. Toutefois, il admet la prise en compte, dans une mesure limitée, d' « impératifs d'intérêt général susceptibles d'atténuer la portée de cette règle fondamentale » 47 ( * ) . Le Conseil a reconnu en particulier un correctif en Polynésie française compte tenu « de l'impératif d'intérêt général qui s'attache à la représentation effective des archipels les moins peuplés et les plus éloignés » 48 ( * ) .

Le dernier recensement dont les résultats ont été publiés par le décret du 1 er août 2003 a confirmé les tendances précédentes sans modifier de manière significative les écarts démographiques entre les archipels. Les résultats des recensements précédents (1956, 1983, 1996), à l'exception de celui de 1988, avaient été pris en compte par le législateur pour ajuster la représentation politique aux évolutions démographiques.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 105 sans modification .

Article 106
Mode d'élection du représentant
à l'assemblée de la Polynésie française

Cet article maintient l'élection des représentants à l'assemblée de la Polynésie française, dans chaque circonscription, au scrutin de liste à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation. Ce mode de scrutin prévaut depuis la loi du 21 octobre 1952. Dans l'hypothèse où plusieurs listes ont obtenu la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, il prévoit l'attribution de celui-ci à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages et, en cas d'égalité des voix, au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus.

Le présent article porte de 5 % à 10 % des suffrages exprimés le seuil requis pour qu'une liste soit admise à la répartition des sièges . Le seuil de 5 % avait été introduit par la loi du 15 janvier 2001 afin d'éviter que la dispersion des voix sur un trop grand nombre de listes ne rende impossible la constitution d'une majorité au sein de l'assemblée. Le Conseil économique, social et culturel de la Polynésie française, saisi pour avis du projet de loi statutaire, a critiqué la hausse de 5 à 10 % des suffrages exprimés au motif qu'elle ne permettrait pas « d'assurer une représentation suffisante des différents courants de pensée au sein de l'hémicycle polynésien, sauf éventuellement à appliquer un système d'élection proportionnelle au plus fort reste au lieu d'un système proportionnel à la plus forte moyenne ». Le scrutin aux élections régionales prévoit un seuil de 5 % des suffrages exprimés pour la répartition des sièges (mais le seuil de 10 % des suffrages exprimés est nécessaire pour permettre à une liste de se maintenir au deuxième tour du scrutin).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 106 sans modification .

Article 107
Application du principe de parité -
Nombre de candidats de chaque liste

Le premier alinéa du présent article transcrit dans le statut de Polynésie française les règles de parité entre candidats de chaque sexe d'ores et déjà appliquées pour les élections dans la collectivité depuis la loi n°2000-612 du 4 juillet 2000.

Aux termes de l'article premier de cette loi, « sur chacune des listes, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe ».

En outre, cet article définit selon le nombre de sièges à pourvoir, le nombre de candidats que doit comporter chaque liste afin de prendre en compte l'éventualité de suppléances et de limiter les cas où il serait nécessaire de procéder à des élections partielles.

Votre commission vous propose un amendement de simplification tendant à prévoir que chaque liste comprend un nombre de candidats double de celui des sièges à pourvoir dans la limite de dix.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 107 ainsi modifié .

Article 108
Renouvellement intégral ou partiel
de l'assemblée de la Polynésie française

Le droit en vigueur pose le principe du renouvellement intégral de l'assemblée. Le paragraphe I du présent article apporte des précisions complémentaires relatives aux délais d'organisation des élections .

Il distingue deux hypothèses :

- quand le renouvellement résulte de l'expiration du mandat des membres sortants, l'élection de l'assemblée de la Polynésie française a lieu dans les deux mois ;

- quand le renouvellement résulte de l'annulation globale des opérations électorales, de la démission collective des membres de l'assemblée ou encore de la dissolution, l'élection de l'assemblée est organisée dans les trois mois (les seuls délais expressément prévus par le statut actuel concernent les élections organisées à la suite d'une annulation globale ou d'une dissolution : il est fixé à trois mois).

Dans les deux hypothèses, les électeurs sont convoqués par décret publié au Journal officiel de la Polynésie française quatre semaines avant la date du scrutin.

Le paragraphe II , reprenant pour partie le dispositif actuel, prévoit pour les vacances de siège deux cas de figure :

- soit la vacance peut être pourvue par le candidat venant immédiatement après le dernier élu sur la liste dont le membre sortant est issu ;

- soit la vacance ne peut être comblée par cette voie. Dans ce cas, le droit en vigueur prévoit deux hypothèses : soit il s'agit d'une vacance isolée et l'élection partielle au scrutin uninominal majoritaire à un tour a lieu dans les trois mois ; soit il s'agit de vacances simultanées et l'élection partielle a lieu au scrutin de liste à la représentation proportionnelle. Le projet de loi distingue une troisième hypothèse , celle où la vacance porterait sur deux sièges et où serait alors appliqué le scrutin de liste majoritaire à un tour.

Le projet de loi apporte en outre deux précisions complémentaires :

- les nouveaux représentants sont élus pour la durée du mandat restant à courir ;

- les électeurs sont convoqués par arrêté du haut-commissaire après consultation du président de la Polynésie française ; l'arrêté est publié quatre semaines au moins avant la date du scrutin.

Enfin, le présent article rappelle les dispositions statutaires en vigueur selon lesquelles aucune élection ne peut avoir lieu dans les six mois qui précèdent l'expiration normale du mandat des représentants à l'assemblée de la Polynésie française. Il convient de relever que ce délai est fixé à trois mois pour les élections cantonales (art. L. 221 du code électoral) comme pour les élections aux assemblées des provinces de Nouvelle-Calédonie.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 108 sans modification .

Article 109
Conditions d'éligibilité à l'assemblée
de la Polynésie française

Le présent article fixe les conditions d'éligibilité à l'assemblée de la Polynésie française. S'il rappelle les clauses classiques (personnes jouissant de leurs droits civils et politiques, n'étant dans aucun des cas d'incapacité prévus par la loi et inscrites sur une liste électorale en Polynésie française ou justifiant qu'elles remplissent les conditions pour y être inscrites au jour de l'élection) il modifie les conditions en vigueur sur deux points d'importance :

- la condition d'âge est abaissée de 21 ans à 18 ans ;

- la condition de résidence de deux années au moins avant l'élection, dans la collectivité est supprimée .

Cette condition, posée par la loi du 21 octobre 1952 afin d'éviter que ne se portent candidates des personnes ne présentant aucun lien avec la collectivité, avait produit des effets paradoxaux : ainsi une polynésienne partie faire ses études en métropole ne pouvait se faire élire dès son retour en Polynésie française 49 ( * ) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 109 ainsi modifié .

Article 110
Régime des inéligibilités

L'inéligibilité définit les différentes situations attachées à la personne d'un candidat qui l'empêchent de briguer un mandat électif ou, si elles sont connues après l'élection, font cesser le mandat.

Les inéligibilités comme les incompatibilités sont, pour la Polynésie française, définies par des dispositions anciennes contenues dans la loi du 6 février 1952 (art. 8, 9 et 10) relative à la formation des assemblées de groupe et des assemblées locales d'AOF (Afrique occidentale française) et du Togo, d'AEF (Afrique équatoriale française) et du Cameroun et de Madagascar dont l'applicabilité est prévue par l'article 6 de la loi du 21 octobre 1952.

La définition du régime des inéligibilités appelait en conséquence une présentation complète, actualisée et adaptée aux spécificités de la collectivité.

Cet article reprenant et complétant le droit actuel fixe deux séries d'inéligibilités.

Aux termes du I et du II, sont inéligibles :

1° le président et les membres de l'assemblée, les membres du gouvernement de la Polynésie française n'ayant pas respecté les obligations déclaratives qui leur sont imposées au titre de la transparence financière de la vie politique telles qu'elles résultent du titre 1 er de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988.

Cette inéligibilité vaut pendant un an à compter de la décision juridictionnelle la constatant ;

2° les personnes privées de leur droit d'éligibilité en application des lois autorisant cette privation : cette disposition s'inspire de l'article L. 130 du code électoral ;

3° les membres du corps préfectoral en poste en Polynésie française ou y ayant exercé depuis moins de trois ans. Le principe de cette inéligibilité, conforme aux dispositions de l'article L. 131 du code électoral, prévaut déjà dans le droit en vigueur ;

4° les personnes déclarées inéligibles sur le fondement de l'article L. 118-3 du code électoral (candidats déclarés inéligibles pour un an dont le compte de campagne fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales) ;

5° le médiateur de la République et le défenseur des enfants s'ils exerçaient le même mandat avant leur nomination. Cette disposition s'inspire de l'article LO. 130 du code électoral ;

6° ne peuvent pas ailleurs être élus membres de l'assemblée de la Polynésie française les personnes exerçant les fonctions suivantes : magistrats, membres du corps d'inspection et de contrôle de l'Etat, directeurs et chefs de service de l'Etat, hauts fonctionnaires de la collectivité ou de ses établissements publics.

Pour ces fonctions, votre commission vous propose un amendement tendant à réparer un oubli en précisant que l'incompatibilité avec le mandat de représentant de l'assemblée vaut pour celles qui s'exercent en Polynésie française ou ont cessé de s'exercer dans la collectivité depuis moins de six mois.

Le paragraphe III interdit l'éligibilité exclusivement dans la circonscription électorale où les personnes exercent ou ont exercé depuis moins de six mois les catégories de fonctions suivantes :

- officiers des trois armées et tous les personnels de la gendarmerie ;

- fonctionnaires des corps actifs de police ;

- chefs de circonscription administrative et agents et comptables de la Polynésie française (actuellement inéligibles dans toutes les circonscriptions électorales).

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 110 ainsi modifié .

Article 111
Droits des salariés pour la participation à la campagne électorale

Le présent article définit les droits d'absence des salariés pour participer à la campagne électorale. Il s'inspire des dispositions de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité codifiées à l'article 122-24-1 du code du travail.

Les employeurs sont tenus de laisser aux salariés candidats la possibilité de s'absenter dans la limite de 10 jours ouvrables (20 jours dans le droit commun).

Ces absences ne sont pas rémunérées sauf lorsque l'intéressé demande à en imputer la durée sur celle de ses congés payés.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 111 ainsi modifié .

Article 112
Régime des incompatibilités

L'incompatibilité oblige à choisir soit entre plusieurs mandats, soit entre la fonction exercée et le mandat obtenu. Le régime des incompatibilités en vigueur en Polynésie française repose, comme celui des inéligibilités, sur des dispositions anciennes qui méritent une actualisation. L'article 6-1 de la loi du 6 février 1952 dispose que « pour l'application de l'ensemble des dispositions instituant des incompatibilités entre certains mandats électoraux ou fonctions électives, le mandat de conseiller territorial de la Polynésie française est assimilé au mandat de conseiller général d'un département ». En outre, cette même loi prévoit l'incompatibilité du mandat de conseiller territorial avec certaines fonctions publiques.

Le paragraphe I de cet article reprend et complète le régime actuel des incompatibilités en s'inspirant des dispositions applicables aux membres des assemblées de province en Nouvelle-Calédonie. Sont incompatibles avec le mandat de membre de l'assemblée de la Polynésie française :

- la qualité de membre du gouvernement ou du conseil économique et social ;

- la qualité de membre d'une assemblée ou d'un exécutif d'une collectivité à statut particulier (départements et régions d'outre-mer), d'une collectivité se substituant à un département et une région d'outre-mer (comme prévu au dernier alinéa de l'article 73), d'une collectivité d'outre-mer (nouvelle dénomination des territoires d'outre-mer) ; celle de conseiller général, de conseiller régional, de conseiller de Paris ou de membre de l'assemblée de Corse. Cette disposition est la première à adapter le régime des incompatibilités aux nouvelles classifications juridiques des collectivités territoriales de l'outre-mer introduites par la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 ;

- les fonctions de militaire de carrière en activité ;

- les fonctions de magistrat administratif ou judiciaire et toutes les fonctions publiques non électives (formule plus simple et plus complète que la liste des fonctions visées à l'article L. 195 du code électoral) ;

- les fonctions rémunérées de directeur ou de président d'un établissement public.

Le paragraphe II prévoit l'incompatibilité entre le mandat de représentant à l'assemblée de la Polynésie française et plus d'un des mandats suivants : conseiller municipal, député ou sénateur, représentant au Parlement européen.

Le paragraphe III reprend le principe selon lequel nul ne peut représenter plus de deux circonscriptions électorales (principe rappelé, s'agissant des conseillers régionaux, à l'article L. 341 du code électoral). L'intéressé cesse de représenter la première circonscription dans laquelle il a été élu. Néanmoins, en cas de contestation de l'élection, la vacance du siège n'est proclamée qu'à compter de la décision statuant sur le recours. Pendant ce laps de temps, il peut participer aux travaux de l'assemblée au titre de son seul nouveau mandat. Des dispositions similaires sont prévues dans le statut de la Nouvelle-Calédonie.

Le paragraphe IV organise le régime d'option lorsqu'une incompatibilité est constatée au moment d'une vacance : le candidat appelé à pourvoir le siège vacant dispose d'un délai d'un mois à compter de la vacance pour faire cesser l'incompatibilité ou démissionner.

A défaut d'option dans le délai imparti, la démission est constatée par arrêté du haut-commissaire.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 112 sans modification .

Article 113
Conséquence de l'inéligibilité ou de l'incompatibilité

Le présent article s'inspire des dispositions de l'article 45 du statut en vigueur selon lesquelles le représentant à l'assemblée de la Polynésie française qui se trouve dans un des cas d'inéligibilités ou d'incompatibilités prévu par la loi organique ou un des cas d'incapacité lui faisant perdre la qualité d'électeur, est déclaré démissionnaire par le haut-commissaire, d'office ou à la demande de tout électeur.

Dans l'hypothèse d'une incompatibilité constatée au moment de l'élection ou postérieurement, l'intéressé dispose d'un délai d'un mois pour régulariser sa situation. Au terme de ce délai, et faute de régularisation, l'intéressé est mis en demeure de faire cesser l'incompatibilité. A défaut, le haut-commissaire le déclare démissionnaire d'office.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 113 sans modification.

Article 114
Situation des agents publics et des salariés
de droit privé élus à l'assemblée

Cet article aligne la situation des agents publics et des salariés de droit privé élus à l'assemblée sur celle prévue à l'article 70 du présent projet de loi organique pour les membres du gouvernement de la Polynésie française.

Le paragraphe I du présent article modifie ainsi les dispositions actuellement applicables en la matière. En effet, l'article 48 de la loi statutaire n° 84-820 du 6 septembre 1984, maintenu en vigueur par l'article 123 du statut actuel prévoit que contrairement aux membres du Gouvernement, le conseiller territorial qui a la qualité d'agent public n'est placé en dehors du cadre de l'administration ou du corps auquel il appartient que s'il le demande. Dans ce cas, « il est à l'expiration de son mandat, réintégré à sa demande, éventuellement en surnombre, dans le cadre ou le corps auquel il appartenait avant son élection. Il en est de même si, tout en étant régi par un statut de droit privé, il était employé par une entreprise ou une société appartenant au secteur public ».

Aux termes du présent article, le représentant à l'assemblée de Polynésie française serait obligatoirement placé en dehors du cadre de son administration ou de son corps. Il bénéficie naturellement, à la fin de son mandat, de la réintégration dans son administration ou son corps d'origine.

Par coordination avec l'amendement proposé à l'article 79, votre commission des Lois vous soumet un amendement tendant à ouvrir une faculté comparable aux salariés de droit privé des entreprises publiques.

Une erreur matérielle s'est glissée dans la rédaction de cet alinéa que votre commission des Lois vous propose de rectifier par un amendement.

Le paragraphe II ouvre au salarié de droit privé élu à l'assemblée de la Polynésie française la possibilité d'obtenir une suspension de son contrat, qui est de droit s'il justifie d'une ancienneté minimale d'un an dans l'entreprise.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 114 ainsi modifié.

Article 115
Démission d'un représentant à l'assemblée

Le présent article prévoit, à l'exemple du second alinéa de l'article 46 du statut en vigueur, que la démission d'un représentant de l'assemblée de Polynésie française est adressée au président de cette assemblée qui en informe immédiatement le haut-commissaire et le président de la Polynésie française. Votre commission vous soumet un amendement de coordination rédactionnelle.

Il précise en outre que cette démission prend effet dès sa réception par le président de l'Assemblée.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 115 ainsi modifié.

Article 116
Assiduité des membres de l'assemblée de la Polynésie française

Comme le prévoit le premier alinéa de l'article 46 du statut de 1996, cet article ouvre à l'Assemblée la possibilité de déclarer démissionnaire d'office, lors de la dernière séance de la session, un représentant qui aura manqué à une session ordinaire sans excuse légitime.

Il introduit en outre une nouvelle disposition relative au représentant présumé absent au sens de l'article 112 du code civil. Il s'agit d'une personne qui « a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l'on en ait eu de nouvelles ». Dans cette hypothèse, l'intéressé, dès l'intervention du jugement constatant la présomption d'absence, est remplacé par le suivant de liste. Cette disposition est inédite dans notre droit électoral et tire les conséquences, dans ce domaine, du tragique accident d'avion du 23 mai 2003 qui a entraîné la disparition des principaux responsables de l'opposition non indépendantiste, membres du parti autonomiste Fetia Api.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 116 sans modification.

Article 117
Contentieux

Le présent article définit les conditions dans lesquelles les élections à l'Assemblée de la Polynésie française ou la proclamation d'un candidat devenu représentant à l'Assemblée à la suite d'une vacance peuvent être contestées.

Comme tel est déjà le cas, les recours sont portés devant le Conseil d'Etat , compétent en premier et dernier ressort.

Le délai de contestation est fixé à 15 jours (10 jours pour les élections régionales) suivant la proclamation du résultat. Le recours est ouvert à tout candidat ou tout électeur de la circonscription. Ce droit est également ouvert au haut-commissaire s'il estime que les conditions et les formes légalement prescrites n'ont pas été respectées.

L'article prévoit également la possibilité de contester dans un délai de quinze jours la proclamation du candidat devenu représentant à l'assemblée de la Polynésie française à la suite d'une vacance lorsqu'il est issu de la liste du membre sortant.

Il reprend enfin les dispositions du code électoral relatives au contentieux des élections régionales (art. L. 361 et L. 362) selon lesquelles d'une part, l'inéligibilité constatée par le Conseil d'Etat n'entraîne que l'annulation de l'élection du candidat déclaré inéligible (remplacé dès lors par le suivant de liste) et d'autre part, le représentant dont l'élection est contestée reste en fonction jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur la réclamation.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 117 sans modification .

Article 118
Contestation relative aux arrêtés et délibérations
affectant les représentants à l'assemblée

Le présent article ouvre la possibilité d'un recours devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux contre :

- l' arrêté du haut-commissaire déclarant démissionnaire d'office le représentant se trouvant dans un cas d'inéligibilité ou d'incompatibilité prévu par la loi organique ou dans l'un des cas d'incapacité qui font perdre la qualité d'électeur (art. 113) ;

- la délibération de l'assemblée déclarant démissionnaire d'office un représentant qui aurait manqué à une session ordinaire sans excuse légitime (art. 116).

Ces recours sont suspensifs sauf lorsque la démission d'office résulte d'une condamnation pénale définitive.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 118 sans modification .

SECTION 2
Règles de fonctionnement
Articles 119 à 130
Fonctionnement de l'assemblée de la Polynésie française

Les articles 119 à 130 traitent du fonctionnement de l'assemblée de la Polynésie française et reprennent pour l'essentiel le droit en vigueur.

Certaines des dispositions relatives au fonctionnement de l'assemblée ne sont plus mentionnées dans le projet de statut. Elles semblent en effet relever davantage du règlement intérieur de cette institution. Il convient de relever que le Conseil constitutionnel, en vertu du principe de libre administration des collectivités territoriales, invalide les dispositions législatives fixant les règles trop précises du fonctionnement des institutions locales dont la définition incombe à ces institutions elles-mêmes 50 ( * ) .

L' article 119 fixe le lieu du siège de l'assemblée au chef-lieu de la Polynésie française et ajoute par rapport au droit en vigueur -comme l'article 83 le prévoit également pour le gouvernement- que l'assemblée peut fixer un autre lieu de réunion pour certaines séances. Il indique en outre que l'assemblée se réunit le deuxième jeudi qui suit l'élection de ses membres en précisant que cette réunion est présidée par le doyen d'âge.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 119 sans modification.

L' article 120 rappelle que l'assemblée de Polynésie française tient chaque année deux sessions ordinaires mais alors que le régime de ces sessions est actuellement fixé dans le statut (session administrative de 60 jours ouverte le deuxième jeudi du mois d'avril, session budgétaire de 80 jours ouverte le troisième jeudi du mois de septembre), il laisse à l'assemblée le soin de fixer par une délibération au début du mandat, la date et la durée des sessions.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 120 sans modification.

L' article 121 fixe les conditions de réunion de l'assemblée de la Polynésie française en session extraordinaire. L'initiative appartient au président de la Polynésie française ou à la majorité absolue des membres de l'assemblée. Elle peut également revenir au haut-commissaire sans que la condition de « circonstances exceptionnelles » aujourd'hui requise dans ce cas, soit mentionnée.

Le haut-commissaire conserve par ailleurs ses prérogatives : il peut convoquer l'assemblée si celle-ci ne s'est pas réunie au jour fixé par la demande de session extraordinaire ; de même les conditions de durée (un mois maximum pour chaque session extraordinaire sans que la durée cumulée entre deux sessions dépasse deux mois) ne sont pas opposables aux demandes dont il a l'initiative.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 121 sans modification.

L' article 122 prévoit l'élection annuelle du président et du bureau de l'assemblée de la Polynésie française mais ne reprend plus les dispositions relatives à la formation du bureau provisoire.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 122 sans modification.

L' article 123 reproduit les conditions de quorum exigées pour la validité des délibérations ainsi que le régime applicable au vote par procuration.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 123 sans modification.

L' article 124 prévoit que l'assemblée établit son règlement intérieur. Celui-ci, contrairement au droit en vigueur, ne serait plus soumis pour avis au tribunal administratif de Papeete 51 ( * ) mais ferait en revanche l'objet d'une publication au journal officiel de la collectivité. Le règlement intérieur de l'assemblée de Polynésie française a été considéré par le juge administratif comme un acte administratif décisoire qui doit respecter les normes supérieures, notamment celles figurant dans la loi statutaire 52 ( * ) . Votre commission vous propose un amendement tendant à soumettre le règlement intérieur de l'assemblée au contrôle du Conseil d'Etat.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 124 ainsi modifié.

L' article 125 comporte une disposition nouvelle prévoyant que les règles relatives à la constitution des groupes et à leurs moyens sont déterminées par le règlement intérieur. Actuellement, la loi statutaire ne fait qu'une mention incidente des groupes à propos de l'élection de la commission permanente : « l'assemblée de la Polynésie française élit chaque année, en son sein et à la représentation proportionnelle des groupes, selon le système de la plus forte moyenne, la commission permanente ... » (article 56).

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 125 sans modification.

L' article 126 reproduit les règles relatives à la fixation de l'ordre du jour dont l'initiative appartient à l'assemblée elle-même sous réserve, toutefois, des prérogatives dévolues au conseil des ministres et au gouvernement par l'article 152.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 126 sans modification.

L' article 127 fixe le régime applicable à l'indemnité perçue par les membres de l'assemblée ainsi que les règles de cumul avec l'indemnité parlementaire.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 127 sans modification.

L' article 128 regroupe les règles relatives à la commission permanente actuellement présentées dans trois articles distincts (56, 57 et 71). Il rappelle d'abord que cette commission est élue à la représentation proportionnelle des groupes à la plus forte moyenne.

Les dispositions relatives à la composition de cette instance, au régime de ses séances et à son mode de décision ne sont plus mentionnées. Elles relèvent en effet du règlement de l'assemblée. Le présent article maintient les trois principales missions confiées à la commission permanente dans l'intervalle des sessions : délibérer les affaires qui lui sont renvoyées par l'assemblée de la Polynésie française ou qui lui sont directement transmises par le gouvernement de la Polynésie française en cas d'urgence ; émettre des avis sur les textes soumis à la consultation obligatoire de l'assemblée ; adopter les résolutions -qui se substituent aux voeux touchant notamment les dispositions législatives et réglementaires applicables à la collectivité. Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel tendant à coordonner la rédaction de cet article sur ce point avec l'article 134 auquel il renvoie.

Aux délibérations pour lesquelles la commission permanente n'est actuellement pas compétente (vote du budget, du compte administratif, de la motion de censure) l'article 128 a ajouté les lois du pays afin de tenir compte de cette nouvelle catégorie d'acte ressortissant de la compétence de l'assemblée de la Polynésie française.

Enfin, cet article reprend la disposition selon laquelle la commission permanente ne peut procéder à des virements de crédit d'un chapitre à l'autre que si ces virements interviennent à l'intérieur d'une même section du budget et que s'ils ne dépassent pas le quart de la dotation des chapitres concernés. Il ajoute néanmoins qu'elle peut ouvrir, au-delà de cette limite, des crédits correspondants à des ressources affectées.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 128 ainsi modifié.

L' article 129 rappelle que les séances de l'assemblée sont publiques sauf si l'assemblée en décide autrement à la majorité absolue des membres présents. Il introduit deux nouvelles dispositions destinées à assurer une plus grande publicité aux débats de l'assemblée : d'une part, le président de l'assemblée peut décider la retransmission télévisée d'une séance ; d'autre part, alors que le droit en vigueur prévoit l'établissement d'un procès-verbal de chaque séance, ces séances feraient l'objet d'un compte rendu intégral publié au journal officiel de la Polynésie française.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 129 sans modification.

L' article 130 reproduit pour l'essentiel les dispositions relatives à l'autonomie financière de l'assemblée. Son président, ordonnateur principal, peut déléguer à un questeur ses pouvoirs, à l'exception de celui de réquisition. Les propositions de crédits nécessaires au budget de l'assemblée sont préparées par une commission dont les membres sont désignés par l'assemblée. Il n'est plus prévu en revanche que cette commission soit présidée par le président de la chambre territoriale des comptes.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 129 sans modification.

SECTION 3
Attributions de l'assemblée
Article 131
Droit à l'information du représentant

Le présent article ouvre expressément un droit d'information de tout représentant à l'assemblée de la Polynésie française sur les projets ou propositions de lois du pays ou d'autres délibérations.

Il transpose un droit reconnu aux membres du congrès de la Nouvelle-Calédonie et s'inspire des dispositions comparables du code général des collectivités territoriales (art. L. 2121-13 pour les conseillers municipaux ; art. L. 3121-18 pour les conseillers généraux ; art. L. 4132-17 pour les conseillers régionaux).

Cet article, qui semble affirmer une évidence, n'est cependant pas sans valeur juridique dans la mesure où le juge administratif annule des délibérations adoptées sans que les élus aient pu disposer des éléments d'information nécessaires dans un délai suffisant.

En l'espèce, ce droit d'information se traduit pas la communication d'un rapport sur les questions à l'ordre du jour dans un délai de huit jours au moins avant la séance pour un projet ou une proposition de loi du pays et un délai de 48 heures au moins avant la séance pour un projet ou une proposition d'autre délibération.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 131 sans modification .

Article 132
Commissions d'enquête

Cet article rappelle la faculté pour l'assemblée de la Polynésie française de créer des commissions d'enquête composées à la représentation proportionnelle des groupes politiques de l'assemblée.

En revanche, il renvoie à une délibération de l'assemblée les règles fixant le rôle, le fonctionnement des commissions d'enquête et la durée de leur mission.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 132 sans modification .

Articles 133 et 134
Résolutions de l'assemblée de Polynésie française

L' article 133 confère à l'assemblée la possibilité d'adopter des « résolutions », terme qui se substitue aux « voeux » prévus à l'article 70 du statut en vigueur et dont l'expression est réservée au gouvernement (art. 98), sans que le champ d'application de cette compétence et son régime juridique ne soient en rien modifiés.

L'assemblée peut exprimer, par ces résolutions, son souhait de voir abroger, modifier ou compléter les dispositions législatives et réglementaires applicables à la collectivité.

Ces résolutions n'ont pas davantage que les voeux de caractère normatif. Selon la jurisprudence administrative, le droit de saisir le juge administratif de ces résolutions est ouvert au seul représentant de l'Etat mais non aux justiciables 53 ( * ) .

Ces résolutions sont adressées selon les cas au président de la Polynésie française ou au haut-commissaire - qui les transmet au ministre chargé de l'outre-mer.

Le présent article prévoit -contrairement au statut actuel- la publication de ces résolutions au journal officiel de la Polynésie française.

L' article 134 prévoit la consultation de l'assemblée sur les propositions d'actes communautaires relatifs à l'association des pays d'outre-mer à la communauté européenne et non la simple transmission de ces propositions comme actuellement. En revanche, le champ d'application de la consultation apparaît plus large que celui de la transmission car il vise l'ensemble de ces propositions sans les limiter aux seules matières relevant de la compétence de la collectivité.

L'assemblée peut également adopter des résolutions sur ces propositions d'actes communautaires qui sont adressées par le président de l'assemblée au président du gouvernement et au haut-commissaire. La faculté d'adopter des résolutions, justifiée s'il s'agit d'une transmission, paraît en revanche redondante avec l'avis qu'appelle nécessairement la procédure de consultation.

Il semble opportun de conserver la faculté de l'assemblée de se prononcer par des résolutions, selon une procédure inspirée de celle qui permet au Parlement dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution de présenter des résolutions sur des propositions d'acte communautaire. Votre commission vous soumet en conséquence un amendement tendant à substituer une procédure de transmission à une procédure de consultation. Elle vous propose en outre un amendement de cohérence rédactionnelle.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 134 ainsi modifié .

SECTION 4
Attributions du président de l'assemblée
de la Polynésie française
Articles 135 à 137
Missions du président de l'assemblée de la Polynésie française

Ces articles reprennent pour l'essentiel les dispositions en vigueur relatives aux attributions du président de l'assemblée de la Polynésie française.

? L' article 135 rappelle la responsabilité du président pour exercer « seul » la police de l'assemblée dans son enceinte.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 135 sans modification.

? L' article 136 confirme la compétence reconnue au président de l'assemblée pour nommer les agents des services de l'assemblée.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 136 sans modification.

? L' article 137 reproduit les dispositions de l'article 82 du statut en vigueur habilitant le président de l'assemblée à déléguer sa signature aux vice-présidents et aux responsables des services administratifs.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 137 sans modification.

SECTION 5
« Lois du pays » et délibérations

Cette section regroupe les dispositions relatives aux « lois du pays » et aux délibérations de la Polynésie française. La notion de « lois du pays » représente l'un des apports déterminants du projet de statut. Le caractère novateur des « lois du pays » leur vient moins de leur champ d'application -car il est admis depuis longtemps que les organes délibérants des collectivités d'outre-mer peuvent intervenir dans le domaine de la loi- que de leur appellation (qui n'a d'autre exemple que les lois du pays de Nouvelle-Calédonie) et surtout, des modalités particulières de leur contrôle juridictionnel qui seront examinées dans le cadre du titre VI du présent projet de loi.

Article 138
Délibérations de l'assemblée

Le présent article consacre expressément la dénomination des actes normatifs pris par l'assemblée comme des « délibérations ».

Ces délibérations peuvent intervenir, comme le prévoit explicitement cet article, dans le domaine de la loi. Le présent article confirme ainsi que quelque soit leur champ d'application -domaine de la loi ou domaine du règlement- les actes de l'assemblée de la Polynésie française appartiennent à une même catégorie juridique -la « délibération »- même si, et c'est là l'une des principales innovations du présent projet de statut, la délibération intervenant dans le domaine de la loi prend également le nom de « loi du pays » et est régie à un contrôle juridictionnel particulier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 138 sans modification .

Article 139
« Lois du pays »

Le présent article institue les « lois du pays ». La possibilité de désigner du terme de « loi », réservé en principe aux seuls actes adoptés par le Parlement de la République, d'autres types d'actes n'a qu'un seul précédent : la « loi du pays » reconnue par le statut de la Nouvelle-Calédonie.

Si la dénomination de « lois du pays » présente incontestablement une avancée symbolique remarquable pour la Polynésie française, la possibilité pour la collectivité d'intervenir dans le domaine de la loi représente l'un des éléments constitutifs de la spécificité des territoires d'outre-mer 54 ( * ) . Sur le fondement de l'organisation particulière de ces collectivités, le Conseil constitutionnel 55 ( * ) a estimé que la répartition des compétences entre la loi et le règlement dans les territoire d'outre-mer pouvait différer de celle prévue en métropole.

Si ces délibérations sont législatives rationae materiae , elles demeurent formellement des actes administratifs et sont, comme telles, soumises au contrôle du juge de l'excès de pouvoir.

Outre la désignation nouvelle de « lois du pays », le présent article modifie également le droit en vigueur en élargissant le champ d'application du domaine législatif dans lequel l'assemblée pourrait intervenir : d'une part, en effet, de nouvelles compétences sont transférées à la Polynésie française qui relèvent du domaine de la loi ; d'autre part, s'agissant de certaines compétences à caractère législatif qui demeurent du ressort de l'Etat, l'assemblée peut y participer sous le contrôle de l'Etat, dans les conditions prévues à l'article 31.

Ainsi, cet article définit les « lois du pays » comme les actes relevant du domaine de loi soit qui ressortissent à la compétence de la Polynésie française, soit qui sont pris au titre de la participation de la Polynésie française aux compétences de l'Etat.

1. Le domaine des lois du pays au titre des compétences de la Polynésie française

Il convient de rappeler que l'assemblée de la Polynésie française dispose de la compétence de principe pour exercer les compétences de la Polynésie française (voir article 102). En d'autres termes, toutes les matières qui n'ont pas été explicitement dévolues au conseil des ministres ou au président de la Polynésie française, sont de son ressort. Ce principe traditionnel n'a pas exclu la définition dans le statut actuel, de certaines attributions spécifiques au bénéfice de l'assemblée : vote du budget, détermination des sanctions pénales et administratives aux infractions à la réglementation, règles relatives au droit de transaction et aux jeux de hasard.

L'assemblée ne peut déléguer ses compétences à aucun autre organe à l'exception -et sous certaines conditions- de la commission permanente, émanation de l'organe délibérant. Le juge administratif veille à l'exercice plein et entier des compétences par l'assemblée ; il censure les cas d'« incompétence négative », c'est-à-dire les hypothèses où l'assemblée est restée en deçà de ses compétences 56 ( * ) . Inversement, l'assemblée doit respecter les attributions du conseil des ministres chargé de prendre les mesures d'application des délibérations : « l'assemblée territoriale ne peut prendre elle-même les mesures individuelles nécessaires à l'application de sa réglementation, sauf à méconnaître la répartition des compétences instituée par [la loi statutaire] » (Tribunal administratif de Papeete, avis n° 93-02 du 24 mars 1993).

Pour la première fois, le projet de statut explicite la partie des compétences de l'assemblée qui relève du domaine de la loi. L'énumération n'épuise donc pas le champ des attributions de l'assemblée, mais il convient de considérer toutes les autres questions sur lesquelles pourrait intervenir l'organe délibérant comme du domaine du règlement.

Le tableau suivant met en évidence les nouvelles compétences exercées par l'assemblée de la Polynésie française.

Compétences actuelles

Compétences supplémentaires

Assiette, taux et modalités de recouvrement des impositions de toute nature.

Droit civil, à l'exception de la nationalité, de l'état et de la capacité des personnes, de l'autorité parentale, des régimes matrimoniaux et des successions et libéralités.

Droit de la santé publique.

Droit du travail, droit syndical et de la sécurité sociale, y compris l'accès au travail des étrangers.

Garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires de la Polynésie française.

Règles relatives à l'emploi local, en application de l'article 18.

Droit de l'aménagement et de l'urbanisme.

Règles relatives à la déclaration des transferts entre vifs des propriétés foncières situées en Polynésie française et à l'exercice du droit de préemption par la Polynésie française, en application de l'article 19.

Droit de l'environnement.

Relations entre la Polynésie française et les communes prévues à la section 6 du chapitre Ier du titre III.

Droit domanial de la Polynésie française.

Accords conclus en application de l'article 39, lorsqu'ils interviennent dans le domaine de compétence défini par le présent article.

Droit minier.

Règles relatives à la publication des actes des institutions de la Polynésie française.

Cette énumération omet de mentionner les principes fondamentaux des obligations commerciales qui ne relèvent pourtant plus des compétences de l'Etat telles qu'elles sont définies à l'article 14.

En conséquence, votre commission vous propose, par un amendement , d'ajouter cette matière dans le champ des « lois du pays »au titre des compétences de la Polynésie française.

Par ailleurs, par coordination avec l'amendement proposé à l'article 31, votre commission vous soumet un amendement tendant à supprimer la référence aux exceptions à la compétence nouvelle reconnue à l'assemblée de la Polynésie française en matière d'état civil (nationalité, état et capacité des personnes, autorité parentale, régimes matrimoniaux, successions et libéralités). En effet, cette référence est redondante avec les dispositions de l'article 31 du présent projet de loi organique qui réserve déjà ces aspects du droit civil à l'Etat. Par ailleurs, le 15° du présent article vise explicitement l'article 31 au titre des compétences régaliennes auxquelles la Polynésie française pourrait participer sous le contrôle de l'Etat. Dans ce cadre, l'assemblée de la Polynésie française pourrait adopter des délibérations relatives à ces volets du droit civil qui demeurent du ressort de l'Etat.

2. Le domaine des « lois du pays » au titre de la participation de la Polynésie française aux compétences de l'Etat

1° Droit civil ;

2° Recherche et constatation des infractions ; dispositions de droit pénal en matière de jeux de hasard ;

3° Entrée et séjour des étrangers, à l'exception de l'exercice du droit d'asile, de l'éloignement des étrangers et de la circulation des citoyens de l'Union européenne ;

4° Communication audiovisuelle ;

5° Services financiers des établissements postaux.

Le champ de compétence des lois du pays de la Nouvelle-Calédonie présente certaines similitudes avec celui de la Polynésie française (assiette et recouvrement des impôts, droit du travail, accès au travail des étrangers, produits miniers, droit domanial).

Il comprend également, au titre des compétences propres de la Nouvelle-Calédonie, les aspects du droit civil (état et capacité des personnes, régimes matrimoniaux et des successions) que la « loi du pays » de la Polynésie française ne pourrait traiter que dans le cadre de la participation aux compétences régaliennes.

Les lois du pays de la Nouvelle-Calédonie s'inscrivent néanmoins dans un cadre évolutif lié aux transferts progressifs de compétence de l'Etat vers la collectivité.

Aussi la comparaison des domaines respectifs des lois du pays de deux collectivités présente-t-elle des limites évidentes.

Le dernier alinéa de cet article précise que les « lois du pays » ont le caractère d'acte administratif . En conséquence et conformément à l'article X de la Constitution, ces actes sont soumis au contrôle du Conseil d'Etat, juge de la légalité des actes administratifs et non au Conseil constitutionnel, juge de la constitutionnalité des lois. A ce titre, les « lois du pays » doivent être conformes aux principes généraux du droit, comme le prévoit d'ailleurs l'article 176 du projet de loi organique. Cependant les « lois du pays » pourraient déroger sur un point au principe de non rétroactivité des actes administratifs -qui a valeur de principe général du droit- : en effet elle pourraient être applicables aux contrats en cours. Encore cette dérogation est elle subordonnée aux nécessités liées à l'« intérêt général ».

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 139 ainsi modifié .

Article 140
Initiative des délibérations -
Avis du haut conseil de la Polynésie française sur les lois du pays

L'initiative des délibérations est actuellement partagée entre le gouvernement (projet d'acte) et les représentants à l'assemblée (proposition d'acte). Ce principe est étendu par le présent article aux « lois du pays ».

Cet article détermine également une procédure consultative propre aux lois du pays afin de marquer l'importance particulière de ces actes. Les lois du pays seraient ainsi soumises à l'avis d'une nouvelle instance, le haut conseil de la Polynésie française composé de personnalités qualifiées, dans les conditions fixées aux articles 163 et 164 du projet de loi organique. La procédure de consultation diffère s'il s'agit de projets ou de propositions d'actes : les premiers sont soumis pour avis avant leur adoption en conseil des ministres, les secondes le sont avant leur première lecture.

Le haut conseil n'est tenu à aucun délai pour rendre son avis. Son abstention pourrait valoir veto car il est précisé que le vote de l'assemblée de la Polynésie française ne pourrait pas intervenir avant que le haut conseil se soit prononcé.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à fixer au haut conseil un délai d' un mois pour rendre un avis lorsque l'urgence est invoquée par le président de la Polynésie française ou le président de l'assemblée de la Polynésie française.

Par ailleurs, le présent article rend obligatoire un exposé des motifs pour tout projet ou proposition d'acte.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 140 ainsi modifié .

Article 141
Procédure d'examen et d'adoption des lois du pays

Cet article définit la procédure d'examen et d'adoption des lois du pays.

Les conditions d'examen des lois du pays ne diffèrent pas en substance de celles qui, selon le règlement de l'assemblée, régissent actuellement les délibérations de l'assemblée. Mais leur inscription dans la loi organique leur confère une solennité particulière.

Aujourd'hui, sauf exceptionnelle urgence, toute proposition de délibération est renvoyée pour examen préalable à une commission spécialisée permanente qui désigne un rapporteur. Celui-ci peut conclure au rejet de la proposition mais l'assemblée pourra en décider autrement lors de son examen. Dans le cas de l'exceptionnelle urgence décidée à la majorité absolue de l'assemblée, la proposition peut être inscrite à l'ordre du jour en cours. En revanche, les projets du Gouvernement font nécessairement l'objet d'un examen par une des commissions spécialisées.

Le présent article prévoit la désignation d'un rapporteur par l'assemblée (et non pas par la seule commission compétente). Il exclut implicitement une inscription immédiate à l'ordre du jour puisqu'aucun projet ou proposition de loi ne peut être discutée sans avoir fait au préalable l'objet d'un rapport public. Enfin, les lois du pays doivent être adoptées au scrutin public à la majorité des membres de l'assemblée de la Polynésie française.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 141 sans modification .

Article 142
Transmission des délibérations au haut-commissaire et au président
de la Polynésie française - Seconde délibération

Le premier alinéa reprend les dispositions en vigueur sur la transmission des textes de l'assemblée de la Polynésie française -et de la commission permanente- au président de la Polynésie française et au haut-commissaire le deuxième jour ouvrable suivant leur adoption.

Les alinéas suivants fixent les conditions d'une nouvelle lecture de ces actes. Ces règles diffèrent selon qu'il s'agit d'une loi du pays ou d'une autre délibération.

Pour cette seconde catégorie, comme tel est aujourd'hui le cas, le conseil des ministres peut soumettre, dans un délai de huit jours, une délibération ou seulement certaines de ses dispositions à une nouvelle lecture. L'obligation de transmettre cette demande au haut-commissaire n'est plus mentionnée.

Les lois du pays, quant à elles, peuvent également, dans le même délai, faire l'objet d'une demande de nouvelle lecture ; l'initiative de cette demande appartient non seulement au conseil des ministres mais aussi au haut-commissaire de la République.

Contrairement au droit en vigueur, la nouvelle lecture, qu'il s'agisse des lois du pays ou des autres délibérations, ne peut être refusée . Le présent article précise que cette nouvelle délibération ne peut intervenir moins de huit jours après la demande. S'il ne fixe pas en revanche de délai maximum pour la tenue de la nouvelle délibération, il indique que l'assemblée est spécialement réunie pour la nouvelle délibération sans que soient opposables les règles relatives à la durée des sessions.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 142 sans modification .

Article 143
Le budget de la Polynésie française

Le présent article regroupe les dispositions relatives au budget de la Polynésie française figurant dans les articles 99 et 104 à 107 du statut en vigueur. Il reprend l'essentiel de leurs dispositions. Le paragraphe I fixe les conditions d'équilibre réel du budget. Le caractère obligatoire des dépenses doit être prévu par la loi organique et non par la loi simple comme le droit en vigueur le prévoit.

Le paragraphe II reproduit les dispositions actuelles sur le vote et le contrôle du budget selon la procédure prévue par le code des juridictions financières.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 143 sans modification .

Article 144
Conditions d'entrée en vigueur des actes de l'assemblée
relatifs aux contributions directes

Reprenant les dispositions en vigueur, cet article prévoit que, après l'adoption du budget de la Polynésie française, les actes de l'assemblée ou de la commission permanente relatifs aux contributions directes entrent en vigueur le 1 er janvier qui suit l'ouverture de la session budgétaire même s'ils n'ont pas été publiés avant cette date.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 144 sans modification .

Article 145
Nullité des délibérations adoptées en-dehors
des séances ou du lieu des séances

Cet article rappelle que toute délibération, sous peine de nullité, doit être prise pendant la période des sessions et dans le lieu où se tiennent les séances.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 145 sans modification .

* 47 Conseil constitutionnel, n° 86-208 DC des 1 er et 2 juillet 1986.

* 48 Conseil constitutionnel n° 2000-438 DC du 10 janvier 2001.

* 49 CE, 15 février 2002, élections à l'assemblée de la Polynésie français (circonscription des îles du Vent).

* 50 Conseil constitutionnel n° 98-407 DC du 14 janvier 1999)

* 51 Le tribunal administratif avait par exemple rendu un avis de trente pages sur une délibération de l'assemblée concernant son règlement intérieur (TA Papeete, avis n° 90-005, 16 octobre 1990).

* 52 TA Papeete, 8 décembre 1987, Braun-Orega/Territoire de la Polynésie française).

* 53 Conseil d'Etat, 15 avril 1996, syndicat CGT des hospitaliers de Bédarieux.

* 54 Le Conseil constitutionnel a censuré la possibilité reconnue à la Corse de disposer de compétences ressortissant du domaine de la loi.

* 55 CC, décision n° 65-34 L du 2 juillet 1965 relative à l'examen des articles 1 er , 5 et 6 de l'ordonnance n° 58-1383 du 31 décembre 1958 portant modification de certaines dispositions du régime de retraite des marins du commerce.

* 56 CE, 13 mai 1994, Président de l'Assemblée de la Polynésie française.

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