VII. LES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION

A. L'INTÉGRATION AU BUDGET DE L'ETAT DU FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION DE LA TAXE PROFESSIONNELLE ET DU FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION

Le présent projet de loi de finances propose de supprimer le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et le fonds national de péréquation (FNP), et d'intégrer les sommes correspondantes au budget de l'Etat 9 ( * ) .

1. Le dispositif actuel

a) Le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP)

Le FNPTP a été créé par la loi n° 80-10 du 10 janvier 1980.

Ses ressources et ses charges sont fixées respectivement par les articles 1648 A bis et 1648 B du code général des impôts. S'élevant en 2003 à 870,8 millions d'euros, elles sont le fruit d'un empilement législatif peu cohérent , comme l'indique le graphique ci-après.

Les ressources et les charges du Fonds national de péréquation
de la taxe professionnelle (FNPTP) en 2003

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

b) Le fonds national de péréquation (FNP)

Le FNP a été créé par l'article 70 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995.

Son régime est fixé par l'article 1648 B bis du code général des impôts, qui fixe ses ressources et les modalités de répartition de ses attributions. En 2003, il dispose de 579 millions d'euros.

Il est essentiellement financé par le « solde » du FNPTP. Le graphique ci-après synthétise ses ressources, et les grandes masses de ses charges. Comme on peut le constater, cette « tuyauterie » est passablement (sans doute trop) complexe.

Ressources et charges du Fonds national de péréquation (FNP) en 2003

Le FNPTP et la « 1 re ressource » du FNP

La « seconde ressource » du FNP

Abondement exceptionnel (18 millions d'euros)

432,3

« Première ressource » du FNP (solde du FNPTP)

 
 

Le Fonds national de péréquation (FNP) : 579 millions d'euros

432,3

Source : commission des finances du Sénat

2. Le dispositif proposé par le présent projet de loi de finances

Dans ses articles 32 à 35, le présent projet de loi de finances propose d'intégrer respectivement le FNPTP et le FNP au budget de l'Etat.

a) La suppression du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle

Dans le cas du FNPTP, l'ancien et le nouveau dispositif sont synthétisés par les graphiques ci-après.

L'intégration au budget de l'Etat des ressources du FNPTP

(2003, en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

L'intégration au budget de l'Etat des charges du FNPTP

(2003, en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

b) Le cas du fonds national de péréquation

Le présent projet de loi propose d'intégrer le FNP dans la dotation globale de fonctionnement (DGF). Le FNP serait en conséquence dénommé dotation nationale de péréquation (DNP).

Le mode de répartition de la DNP serait identique à celui de l'actuel FNP.

Son montant en 2004 serait en outre égal au montant actuel du FNP, si l'on excepte la non-reconduction de la « deuxième part » de la deuxième fraction du FNPTP (dite « part majoration »), s'élevant à 22,9 millions d'euros en 2003.

La nouvelle « dotation nationale de péréquation » s'insérerait dans le dispositif actuel sans en bouleverser l'architecture, comme l'indique le schéma ci-après.

La répartition de la dotation d'aménagement
(article L. 2334-14-1 du code général des collectivités territoriales)

Répartition actuelle

Répartition proposée

 
 
 
 
 

Dotation d'intercommunalité

 

Dotation d'intercommunalité

 

Quote-part destinée aux communes d'outre-mer

 

Quote-part destinée aux communes d'outre-mer

DSU*

DSR*

 

DSU**

DSR**

Dotation nationale de péréquation (DNP)

 

* L'augmentation annuelle du solde de la dotation d'aménagement est actuellement répartie par le CFL entre la DSU et la DSR de manière à ce que chacune reçoive 55 % au moins et 45 % au plus de cette augmentation.

** Le 2° du I du présent article propose que l'augmentation annuelle du solde de la dotation d'aménagement sera librement répartie par le CFL entre la dotation nationale de péréquation, la DSU et la DSR.

c) La position de votre rapporteur spécial

Votre rapporteur spécial se félicite de la disparition du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP), dont les ressources et les charges, résultant d'un empilement législatif peu cohérent, avaient fini par devenir quasiment illisibles.

Il estime néanmoins que la lisibilité du dispositif proposé pourrait être améliorée en déplaçant les dispositions relatives à la DDR et à la DNP du code général des impôts vers le code général des collectivités territoriales.

Il est en outre nécessaire de souligner que c'est moins de la moitié de la cotisation de péréquation qui sert actuellement à financer la péréquation 10 ( * ) . Il serait souhaitable qu'à l'avenir, la totalité des augmentations du taux de la cotisation de péréquation serve à financer la péréquation , conformément à l'esprit de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République.

En ce qui concerne la DNP , il convient de faire plusieurs remarques.

Tout d'abord, la « deuxième part » de la deuxième fraction du FNPTP, servant à la compensation des baisses de DCTP et s'élevant à 22,9 millions d'euros , ne serait pas reconduite en 2004 au sein de la DNP.

Ensuite, à moyen terme, les dotations de solidarité (DSR, DSU et nouvelle DNP) doivent être réformées :

- dans un souci de simplification, la DNP pourrait être ventilée entre la DSU et la DSR ;

- la DSU, la DSR et la DNP pourraient être davantage concentrées, afin d'éviter un phénomène de « saupoudrage ».

B. L'ÉVOLUTION DES DOTATIONS DE PÉRÉQUATION POUR 2004

Au sein des dotations de l'Etat, la part des crédits ayant une vocation principalement péréquatrice représente environ 15 % du total, illustrant ainsi à la fois les défauts du système actuel et sa complexité .

La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 garantit l'autonomie financière des collectivités locales et consacre le principe de péréquation : son article 72-2 dispose en effet dans son troisième alinéa que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions dans lesquelles cette règle est mise en oeuvre ». Par ailleurs, le dernier alinéa de l'article précité dispose que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».

Le projet de loi de finances pour 2004 propose une réforme de l'architecture des dotations dont l'un des objectifs essentiels est le renforcement de la péréquation en prévoyant la globalisation dans la DGF des multiples dotations existant aujourd'hui et l'organisation au sein de la DGF, et pour chaque niveau de collectivité, d'un mécanisme assurant une alimentation pérenne et renforcée de la péréquation.

Toutefois, les dispositions du projet de loi de finances pour 2004 ne constituent qu'une première étape, un projet de loi réformant les règles de répartition interne des dotations, et donc, les critères pris en compte, devant être présenté au Parlement au cours du premier semestre de l'année 2004.

Le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales indique en effet que « la révision de l'ensemble des critères, et en particulier des critères de péréquation (élèves, logement social...), est indispensable de même que leur pondération respective (formule du CIF, son poids...). Mais cette partie de la réforme requérant une large concertation préalable et des simulations approfondies, aucune modification des critères de répartition n'est prévue dans le projet de loi de finances pour 2004 ».

Le principal concours de l'Etat à vocation péréquatrice est la dotation d'intercommunalité, dont 85 % du montant est réparti en tenant compte du potentiel fiscal.

Evolution des dotations de péréquation au sein de la DGF entre 1997 et 2003

(en millions d'euros)

 

1997

(%)

1998


(%)

1999


(%)

2000


(%)

2001


(%)

2002


(%)

2003


(%)

DGF totale

15.989

1,3

16.210,4

1,4

16.661,1

2,8

16.797,7

0,8

17.372,9

3,4

18 079,8

4,07

18 812,2

2,29

Dotation de solidarité urbaine

330

2,1

346,8

5,1

502,7

44,9

574,8

14,3

575,3

0,1

592,7

3,04

614,9

3,74

Dotation de solidarité rurale

250,1

4,8

269,9

7,9

336,1

24,5

356,7

6,2

376,95

5,7

400,1

6,14

407,2

1,78

DGF des groupements

765,1

7,7

806,0

5,3

849,6

5,4

1.062,8

25,1

1.358,5

29,4

1 651,6

21,6

1 824

10,44

Dotation de fonctionnement minimale totale

108

7,2

117,6

9,1

133,5

13,5

136,6

2,3

144,7

5,9

153,3

5,94

160,7

4,9

TOTAL

1.453

5,9

1.540,2

6

1.822,0

18,3

2.137,4

4,4

2.455,5

14,9

2 797,7

13,9

3006,8

7,5

% de péréquation

9,08

 

9,50

 

10,95

 

12,72

 

14,13

 

15,47

 

15,98

 

Source : ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

Effort financier de l'Etat en faveur de la péréquation en 2003

(en millions d'euros)

Dotation de solidarité urbaine

614,9

Dotation de solidarité rurale

407,2

Dotation de fonctionnement minimale totale

160,7

Part « potentiel fiscal » de la dotation de péréquation de la DGF des départements

597,3

FNP

568,6

DGF des groupements

1.824

Dispositif de compensation des pertes de DCTP

188

TOTAL

4.360,7

Source : ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

Les dotations de péréquation (DSU, DSR et DNP) ne connaîtront pas une progression comparable à celle des années précédentes en 2004. En fonction des choix que sera amené à effectuer le comité des finances locales quant à la progression de la dotation forfaitaire, les dotations de péréquation pourraient même voir leur montant diminuer en 2004.

Comparaison des abondements et des montants consacrés à la péréquation au profit des communes entre 2003 et 2004, à structure constante

(en millions d'euros)

 

DGF 2003

DGF 2004 (avec une dotation forfaitaire indexée à hauteur de 45 % du taux de progression de la DGF)

DGF 2004 (avec une dotation forfaitaire indexée à hauteur de 55 % du taux de progression de la DGF)

Total DGF communes et EPCI

20.098,53

20.463,12

20.463,12

Abondements externes

196,90

96,00

96,00

Péréquation au profit des communes :
DSU
DSR
DNP (ex. FNP) 11 ( * )

1.590,94

614,92
407,22
568,60

1.582,95 (+ 22,87 ?)

614,92 - 629,80
407,22 - 422,10
545,73 (+ 22,87 ?)

1.550,20 (+ 22,87 ?)

597,05 - 614,92
389,35 - 407,22
545,73 (+ 22,87 ?)

Hypothèses pour les estimations de la DSU et de la DSR en 2004

On notera que les données pour 2004 utilisées dans le tableau ci-dessus incluent les hypothèses suivantes :

- une majoration de 15 millions d'euros de la dotation forfaitaire est prise en compte en prévision des recensements complémentaires de la population ;

- le montant des dotations d'intercommunalité pour 2004 repose sur une hypothèse de croissance de 150 millions d'euros.

Par ailleurs, on notera que les mentions « (+ 22,87 ?) » inscrites dans ce tableau se rapportent au fonds national de péréquation (FNP), que le présent projet de loi de finances intègre à la DGF et transforme en dotation (DNP). Votre commission des finances a en effet adopté un amendement visant à reconduire l'abondement de 22,87 millions d'euros de la DNP pour 2004, reconduit chaque année depuis 1999, et qui ne figure pas dans le présent projet de loi de finances. Enfin, on notera que la présentation des crédits de la DSU et de la DSR est effectuée sous la forme d'une fourchette, ce qui n'est pas le cas de la DNP. Or, le 2° du I de l'article 33 du présent projet de loi de finances dispose que « à compter de 2004, l'augmentation annuelle du solde de la dotation d'aménagement est répartie par le comité des finances locales entre la dotation nationale de péréquation, la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale, ainsi qu'entre les différentes parts ou fractions de ces dotations, quand elles existent ». Par conséquent, le comité des finances locales pourra répartir librement l'augmentation du solde de la dotation d'aménagement entre les trois dotations, alors qu'auparavant, « l'augmentation annuelle de ce solde [était] répartie par le comité des finances locales entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale de manière à ce que chacune en reçoive 45 p. 100 au moins et 55 p. 100 au plus ».

Afin de tenir pleinement compte des dispositions de l'article 33 du présent projet de loi de finances, il aurait été souhaitable d'indiquer une fourchette pour la DNP, de la même manière que pour la DSU et la DSR, la répartition de l'augmentation du solde de la dotation d'aménagement par le comité des finances locales étant, en vertu des dispositions de l'article 33 du présent projet de loi, libre entre les trois dotations. Pour des raisons de présentation, et afin de faire apparaître l'absence d'abondement exceptionnel de 22,87 millions d'euros du FNP, ce tableau fait donc « comme si » le comité des finances locales ne répartissait l'augmentation du solde de la dotation d'aménagement qu'entre la DSU et la DSR.

Pour l'année 2003, la progression des dotations de solidarité de la DGF avait été de + 3,74 % pour la DSU, + 4,17 % pour la fraction « bourgs centres » de la DSR, + 0,68 % pour sa fraction « péréquation » et de + 1,78 % pour l'ensemble de la DSR.

Pour l'année 2004, la répartition des abondements prévus par le présent article n'est pas connue, ceux-ci venant abonder le solde de la dotation d'aménagement de la DGF, qui est ensuite réparti entre les trois dotations (DSU, DSR et DNP) la composant désormais.

On relèvera cependant que, dans l'hypothèse où le comité des finances locales fixerait la croissance de la dotation forfaitaire à 45 % du taux de progression de la DGF, le solde de la dotation d'aménagement augmenterait d'environ 15 millions d'euros, hors prise en compte de l'abondement de 22,87 millions d'euros du fonds national de péréquation en 2003. En revanche, dans l'hypothèse où le comité des finances locales choisissait de porter à 55 % du taux de progression de la DGF, l'indexation de la dotation forfaitaire, le solde de la dotation d'aménagement serait réduit d'un peu plus de 17 millions d'euros, hors prise en compte de l'abondement de 22,87 millions d'euros du fonds national de péréquation en 2003. Par conséquent, la progression ou la diminution des dotations de solidarité communales de la DGF dépendra des choix que sera appelé à faire le comité des finances locales au début de l'année 2004. De manière sommaire, le solde de la dotation d'aménagement serait augmenté si le comité des finances locales retenait une indexation de la dotation forfaitaire inférieur à 50 % du taux de progression de la DGF, et réduit s'il retenait une indexation supérieure à 50 %.

S'il est tenu compte de l'abondement de 22,867 millions d'euros du Fonds national de péréquation en 2003, reconduit d'année en année depuis 1999 et prévu par l'article 51 de la loi de finances pour 2003, qui n'est en revanche pas prévu par le présent projet de loi de finances, les dotations de solidarité communales diminuent en 2004, quel que soit par ailleurs le taux d'indexation de la dotation forfaitaire retenu par le comité des finances locales.

A terme toutefois, les dotations de péréquation devraient progresser, la globalisation des dotations au sein de la DGF devant permettre de dégager chaque année des sommes supplémentaires en faveur des dotations de solidarité communales.

* 9 Votre rapporteur spécial n'indiquera ici que les grandes lignes du dispositif actuel et de la réforme proposée. Pour une présentation détaillée, le lecteur pourra utilement se reporter au commentaire des articles 33 et 34 qui figurent dans le tome II du rapport général sur le présent projet de loi de finances.

* 10 L'article 31 de la loi de finances pour 1989 a majoré les taux de la cotisation de péréquation, en précisant que le produit de la majoration était versé au budget de l'Etat. Ainsi, entre 1989 et 1998, près de 40 % du produit de la cotisation de péréquation n'a pas été affecté au FNPTP mais au budget général.

L'article 44 de la loi de finances pour 1999 a procédé à une nouvelle majoration des taux au profit du budget de l'Etat. Cette mesure était destinée à alléger le coût pour l'Etat de la compensation aux collectivités locales de la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle.

En 2001, dernière année au sujet de laquelle cette information a été transmise à votre rapporteur spécial, le produit de la cotisation de péréquation a bénéficié au budget de l'Etat à hauteur de 516 millions d'euros et au FNPTP pour 348 millions d'euros. Désormais, la cotisation de péréquation sera entièrement affectée à l'Etat en raison de la disparition du FNPTP.

* 11 On notera que la dotation du FNP pour l'année 2003 tient compte d'un abondement exceptionnel de 22,867 millions d'euros, qui n'est pas reconduit dans le présent projet de loi de finances.

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