ARTICLE 69
duodecies (nouveau)
Moyens de fonctionnement de la commission de
vérification
des fonds spéciaux
Commentaire : le présent article propose d'inscrire au budget des services généraux du Premier ministre les crédits nécessaires au fonctionnement de la commission de vérification des fonds spéciaux, et de prévoir des règles spécifiques en matière de dépense.
I. LE DROIT EXISTANT
Les fonds spéciaux, souvent appelés « fonds secrets », correspondent au chapitre 37-91 du budget des services généraux du Premier ministre. Leur régime a été profondément modifié par l'article 154 de la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002.
A. LE PÉRIMÈTRE DES FONDS SPÉCIAUX
1. La situation avant la réforme de 2002
Jusqu'à cette réforme, les fonds spéciaux concernaient en partie des dépenses non liées à la sécurité.
En effet, le chapitre 37-91 comprenait deux articles :
- l'article 10, relatif aux fonds spéciaux du gouvernement, n'ayant pas trait à la sécurité (7,3 millions d'euros en 2001) ;
- l'article 20, relatif aux fonds spéciaux à destination particulière (52,7 millions d'euros en 2001), correspondant essentiellement (à hauteur de 30,9 millions d'euros en 2001) aux fonds destinés à la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).
2. La réduction du périmètre des fonds spéciaux réalisée en 2002
Depuis la loi de finances initiale pour 2002, les fonds spéciaux concernent les seules actions liées à la sécurité.
Par un amendement du gouvernement au projet de loi de finances initiale pour 2002, la dotation du chapitre 37-91 « fonds spéciaux » a été réduite de 22,56 millions d'euros, montant présenté comme correspondant aux crédits qui n'étaient pas liés à des actions de sécurité. Les crédits des fonds spéciaux s'élèvent donc désormais à 37,47 millions d'euros (montant non modifié depuis).
L'article 14 de la loi n° 2002-1050 du 6 août 2002 de finances rectificative pour 2002 a en conséquence revalorisé les traitements et indemnités des membres du gouvernement pour tenir compte de la suppression des fonds spéciaux.
B. L'INSTAURATION D'UNE COMMISSION DE VÉRIFICATION DES FONDS SPÉCIAUX
1. La situation avant la réforme de 2002
Jusqu'à la réforme de 2002, les modalités du contrôle des fonds spéciaux obéissaient à une pratique ancienne formalisée au début de la IV e République et qui n'avait pas été modifiée depuis. Les textes applicables étaient la loi n° 46-854 du 27 avril 1946 portant ouvertures et annulations de crédits sur l'exercice 1946, et le décret n° 47-2234 du 19 novembre 1947.
Le décret précité du 19 novembre 1947 a instauré un dispositif de contrôle pour les seuls fonds spéciaux relevant de la sécurité extérieure . Il prévoyait l'instauration d'une commission spéciale de vérification qui, présidée par un président de chambre à la Cour des comptes , vérifiait l'utilisation des fonds, remettait au Premier ministre un rapport sur les conditions d'emploi des crédits, et établissait un procès-verbal permettant de constater que les dépenses étaient couvertes par des pièces justificatives pour un montant égal.
Ainsi, les fonds publics consacrés à des opérations légitimement couvertes par le « secret défense » étaient les seules à faire l'objet d'un contrôle externe, alors que ceux qui étaient, pour une grande partie au moins, dévolus au fonctionnement courant de l'appareil gouvernemental, échappaient à toute vérification a posteriori .
2. La commission de vérification des fonds spéciaux
L'article 154 de la loi de finances initiale pour 2002 a institué une « commission de vérification », chargée de vérifier chaque année que les crédits du chapitre 37-91 du budget des services généraux du Premier ministre sont utilisés conformément à la destination qui leur a été assignée par la loi de finances.
La commission de vérification est composée :
- de deux députés, dont le président de la commission, désignés par le président de l'Assemblée nationale pour la durée de leur mandat ;
- de deux sénateurs désignés par le président du Sénat après chaque renouvellement triennal ;
- de deux membres de la Cour des comptes , nommés pour cinq ans, par décret, sur proposition de son premier président.
Les membres de la commission de vérification sont astreints au respect du secret de la défense nationale protégé en application des articles 413-9 et suivants du code pénal pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance à raison de leur mandat. Les travaux de la commission sont secrets. Est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal le fait de divulguer ou publier, dans un délai de trente ans, une information relative aux travaux de la commission.
Les vérifications terminées, la commission de vérification établit un rapport sur les conditions d'emploi des crédits. Le rapport est remis par le président de la commission au Président de la République, au Premier ministre et aux présidents et rapporteurs généraux des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances.
La commission de vérification dresse en outre un procès-verbal dans lequel elle constate que les dépenses sont couvertes par des pièces justificatives pour un montant égal. Le procès-verbal est remis par le président de la commission au Premier ministre et au ministre chargé du budget, qui le transmet à la Cour des comptes.
3. La mise en place de la commission de vérification
La commission de vérification a tenu sa première réunion au mois de juillet 2003.
Elle est présidée par notre collègue député René Galy-Dejean. Le président de l'Assemblée nationale a également désigné notre collègue député le questeur Didier Migaud.
Dans le cas de notre assemblée, le président du Sénat a désigné, le 16 septembre 2002, nos collègues François Marc, rapporteur spécial des crédits des services généraux du Premier ministre, et Serge Vinçon, vice-président du Sénat et membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en qualité de membres de cette commission.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A l'initiative du gouvernement, l'Assemblée nationale a inséré le présent article, qui propose de compléter le VII de l'article 154 de la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001) par un VII bis selon lequel « les crédits nécessaires au fonctionnement de la commission sont inscrits au budget des services généraux du Premier ministre ».
A l'initiative de nos collègues députés les questeurs Henri Cuq, Claude Gaillard et Didier Migaud, un sous-amendement a été adopté, prévoyant que le président « est ordonnateur des dépenses de la commission » et « a autorité sur les agents de la commission ». Ce sous-amendement précise, par ailleurs, que les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative à l'organisation du contrôle des dépenses engagées ne sont pas applicables aux dépenses de la commission.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission des finances estime que le présent article permettra d'améliorer la confidentialité des travaux de la commission de vérification des fonds spéciaux. En effet, actuellement, l'ordonnateur des dépenses est le directeur des services administratifs et financiers du Premier ministre, ce qui pose un problème de confidentialité en ce qui concerne les déplacements effectués.
Les amendements déposés par votre commission des finances lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2003 n'avaient d'autre objet que de renforcer cette confidentialité, tout en reconnaissant l'existence d'un secrétariat administratif de la commission de vérification.
En particulier, votre commission des finances se réjouit de ce que l'existence d' « agents » de la commission de vérification soit enfin reconnue. On peut souligner à cet égard que le fonctionnaire assurant son secrétariat administratif a fait l'objet d'une habilitation « secret-défense », conformément au souhait de votre commission des finances.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.