B. DE LA SURESTIMATION À LA SOUS-ESTIMATION
Sur le long terme, l'exécution du prélèvement sur recettes en 2003 marque néanmoins une rupture de tendance, puisque la surestimation des besoins des Communautés, et in fine du montant de la contribution française, a été chronique de 1989 à 2002 et s'est aggravée entre 1999 et 2002, comme l'illustre le tableau suivant :
Sur ou sous-estimation de la prévision en LFI
par rapport
à l'exécution du prélèvement sur
recettes depuis 1982
(en millions d'euros)
On constate clairement deux périodes : avant la mise en place de la ressource PNB, l'exécution dépasse systématiquement la prévision, reflétant le dynamisme des dépenses agricoles et l'insuffisance des recettes dont disposait alors la Communauté. Depuis 1989, la surestimation est en revanche davantage liée à la montée en puissance de la politique régionale et au surcalibrage de crédits de paiement dont elle fait l'objet, notamment en début de période de programmation (1989/1990, 1994/1995, 2000/2001). Ce décalage tient certes à des aléas qui rendent la prévision nécessairement imparfaite , mais également à de réelles lacunes en matière d'exécution de certains programmes communautaires - les fonds structurels et actions extérieures en particulier - qui se traduisent par l'accumulation d'excédents budgétaires 1 ( * ) . La sous-estimation du prélèvement constatée en 2003 vient malheureusement coïncider avec une forte dégradation de la conjoncture et des finances publiques de la France, qu'elle contribue à accentuer.
Il importe toutefois de rappeler que la majeure partie des sous-consommation de crédits et des erreurs de paiement est imputable à la « gestion partagée », c'est-à-dire au système de gestion des fonds communautaires (structurels notamment) appliqué par les Etats membres eux-mêmes , et dont les lacunes et manquements - notamment en France et en Italie s'agissant des paiements agricoles - ont été mainte fois soulignés par la Cour des comptes européenne. Le gouvernement s'est cependant attaché en cours d'année 2002 à améliorer la gestion et la consommation des fonds structurels, et a décidé un certain nombre de mesures de déconcentration et de simplification dont se félicite votre rapporteur. Il faut toutefois espérer que cette réforme, et l'expérimentation régionale (en Alsace) qu'elle inclut, n'adviennent pas trop tard pour assurer le taux de consommation minimal requis dans la perspective de la prochaine programmation des fonds structurels.
Cette question de l'amélioration de la gestion des fonds structurels constitue un important sujet de préoccupation pour le Sénat, et en particulier pour ses commissions des finances et des affaires économiques.
* 1 Lors de sa présentation du rapport annuel relatif à l'exercice 2001 (le rapport 2002 devrait être publié d'ici un mois), le 5 novembre 2002, le président de la Cour des comptes européenne a ainsi souligné :
« Pour la deuxième année consécutive, un excédent budgétaire élevé a été enregistré. Celui-ci a été supérieur à 15 milliards d'euros, soit 16 % du budget définitif . Cet excédent tient à l'annulation de crédits, qui résulte principalement de retards dans l'exécution des actions structurelles. (...) La gestion budgétaire se caractérise également par une faible utilisation des crédits de paiement dans certains domaines (...) La Commission doit faire preuve d'une plus grande rigueur, et se montrer plus réaliste dans ses prévisions budgétaires ».
En outre, l'introduction générale du rapport annuel précise :
« Il n'existe pas de raison valable de solliciter des ressources propres qui dépassent largement les besoins pour l'année.(...) La Commission repousse l'argument de la Cour selon lequel il aurait fallu faire usage du mécanisme du budget rectificatif et supplémentaire pour éviter des excédents budgétaires trop élevés. Toutefois, les raisons invoquées par la Commission ne sont pas suffisantes pour qu'elle puisse échapper à la critique selon laquelle sa gestion budgétaire manque de rigueur ».