Rapport n° 443 (2002-2003) de M. Robert del PICCHIA , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 24 septembre 2003

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N° 443

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2002-2003

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 24 juillet 2003

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 septembre 2003

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à une coopération sur l' observation de la Terre ,

Par M. Robert DEL PICCHIA,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Robert Del Picchia, Jean-Marie Poirier, Guy Penne, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Ernest Cartigny, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, Philippe François, Jean François-Poncet, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean Puech, Yves Rispat, Roger Romani, Henri Torre, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (12 ème législ.) : 556 , 942 et T.A. 159

Sénat : 373 (2002-2003)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, a pour objet d'autoriser l'approbation de l'accord franco-italien relatif à une coopération sur l'observation de la Terre, signé à Turin le 29 janvier 2001.

Cet accord constitue un pas important en direction du développement par l'Europe de capacités d'observation par satellites. Face aux besoins actuels, tant pour les applications civiles que dans le domaine militaire, les moyens dont disposent les pays européens sont limités, même si la France est l'un de ceux ayant accompli les efforts les plus importants, avec les satellites Spot et Hélios.

L'accès plus rapide et plus fréquent à des images de très haute résolution, la possibilité de combiner différents modes de prises de vues -optique ou radar- et la mise en oeuvre de systèmes d'exploitation adaptés nécessitent des investissements importants qu'aucune nation européenne ne peut réaliser seule. La voie de la coopération s'impose donc.

L'accord franco-italien du 29 janvier 2001 présente de ce point de vue un caractère exemplaire en fédérant deux programmes nationaux, chaque pays disposant d'un droit d'accès aux capacités fournies par l'autre partie. L'Italie bénéficiera ainsi de données fournies par le système optique français Pléiades, composé de deux satellites à haute résolution, ainsi que par le satellite militaire Hélios II. La France accèdera, pour sa part, aux images fournies par quatre satellites radar développés par l'Italie dans le cadre du programme Cosmo-Skymed. L'accord présente également un caractère dual car il concerne tout autant les utilisateurs civils que militaires.

Votre rapporteur présentera le dispositif de l'accord avant d'en souligner les enjeux, notamment au regard de l'affirmation d'une Europe spatiale.

I. L'ACCORD DE TURIN DU 29 JANVIER 2001 : UN NOUVEAU TYPE DE COOPÉRATION EN MATIÈRE DE SATELLITES D'OBSERVATION

L'accord de coopération signé à Turin par la France et l'Italie le 29 janvier 2001 représente une forme originale et prometteuse de coopération. Cette coopération ne vise pas à réaliser en commun un équipement, mais permet de mettre en synergie les moyens nationaux de chaque Etat en vue d'une utilisation commune et optimisée.

Au milieu de la précédente décennie, l'Agence spatiale italienne comme le Centre national d'études spatiales avaient mis à l'étude des projets de constellations de satellites d'observation combinant des capteurs optiques et des détecteurs radar. Ces deux démarches parallèles, en France et en Italie, étaient fondées sur le constat de l'accroissement et de la diversification des besoins en matière d'imagerie spatiale, pour des utilisations commerciales ou gouvernementales, y compris militaires. Un rapprochement s'est opéré, afin d'éviter des duplications inutiles et coûteuses, de s'accorder sur une certaine spécialisation des tâches et de définir des modalités d'utilisation commune. Il s'est formalisé par l'accord du 29 janvier 2001.

A. LES PRINCIPES DE LA COOPÉRATION SPATIALE FRANCO-ITALIENNE : UN SYSTÈME DUAL D'OBSERVATION ET DES ÉCHANGES DE DONNÉES

La philosophie de l'accord franco-italien est bien résumée dans son préambule dont un paragraphe précise que les deux pays souhaitent « augmenter leurs capacités respectives d'observation de la Terre et économiser leurs ressources nationales, grâce à une coopération pour le développement d'un système opérationnel dual européen d'observation de la Terre, utilisant des capteurs optiques et radars à hautes performances ».

Le développement en commun d'un système d'observation dual, à vocation civile et militaire, constitue le coeur de l'accord qui prévoit toutefois d'autres formes de coopération, tel que l'échange de données provenant de systèmes déjà en service ou en développement.

1. Le développement en commun d'un système dual d'observation

Par l'accord, la France et l'Italie formalisent leur intention de développer un système à usage dual utilisant des petits satellites optiques et radar , ainsi que le segment terrestre associé.

Baptisé ORFEO ( Optical and Radar Federated Earth Observation ), ce système comprend :

- une composante optique comprenant deux satellites développés par la France dans le cadre du programme Pléiades du CNES,

- une composante radar comprenant quatre satellites développés par l'Italie dans le cadre du programme Cosmo/Skymed de l'Agence spatiale italienne,

- une composante sol développée en commun par les deux parties.

Le mode optique permet de recueillir des images par temps clair, le cas échéant de nuit s'il dispose de la capacité infrarouge. Le coût de la composante optique est évalué à 440 millions d'euros . Elle est constituée de 2 petits satellites (1 tonne) de haute résolution (résolution métrique sur un champ de 20 kilomètres). Ce programme sera principalement à la charge de la France , mais la Suède, la Belgique, l'Espagne et l'Autriche doivent également y participer.

Le mode radar permet de recueillir des données sous couvert nuageux ou en cas de brouillards ou de fumées. Le coût de la composante radar est évalué à 570 millions d'euros , à charge de l'Italie . Est prévue la construction de 4 satellites de 1,5 tonne dont les capteurs radar offrent une résolution submétrique sur un champ de 10 kilomètres.

La composante sol pour l'exploitation des images est développée en commun par les deux pays.

En l'état actuel des prévisions, le lancement des quatre satellites radars Cosmo-Skymed devrait s'échelonner entre la mi-2005 et la mi-2007. Le premier satellite Pléiades devrait quant à lui être lancé en 2008. L'accord franco-italien précise que la phase d'utilisation du système dual débutera à partir de la fin de la recette en vol du premier satellite.

L'accord assigne au système ORFEO l'obligation d'assurer :

- la protection des intérêts de défense , en terme de sécurité et de priorité des demandes de mission,

- la satisfaction des besoins des utilisateurs civils ou commerciaux , en termes de capacité opérationnelle générale, d'accès rapide aux données, de disponibilité et de qualité des images, ainsi que de compétitivité des services fournis,

Le système ORFEO sera ouvert à plusieurs catégories d'utilisateurs : publics, institutionnels, privés et commerciaux. La fourniture de services aux ministères de la défense impose des contraintes particulières :

- les demandes de mission émises par les ministères de la défense seront traitées en priorité ; toutefois, dans des situations de crise, les requêtes exprimées par les deux gouvernements ou l'un d'entre eux seront considérées comme des cas très urgents et le système ORFEO devra pouvoir reprogrammer la mission jusqu'à satisfaction de la demande, ainsi que traiter les données émises par les satellites dans les plus brefs délais, avant toute autre requête, y compris celles provenant des ministères de la défense ;

- les utilisateurs militaires auront libre accès aux données brutes des archives civiles ; les données acquises par ces utilisateurs militaires seront classifiées mais pourront éventuellement être communiquées à des utilisateurs commerciaux ou privés, après application d'une procédure de dégradation et de déclassification.

La dualité du système impose également des lignes de communication sécurisées.

Une clause sur le contrôle gouvernemental permet à chaque Etat d'exercer un droit de veto sur les demandes de mission et la diffusion des données d'archive, à l'exception des demandes provenant des ministères de la défense ; les gouvernements ont accès aux demandes de mission des autres utilisateurs de système.

2. Les autres volets de la coopération

L'accord mentionne également deux autres volets de la coopération franco-italienne :

- l'utilisation en commun , selon des règles à définir, des systèmes militaires et civils actuellement en service ou en cours de développement , ce qui vise les satellites civils SPOT et les satellites militaires Hélios,

- le développement en commun d'autres capteurs , notamment des capteurs à champ optique large.

L'accord précise que le développement d'une capacité optique à champ large est considéré comme un prolongement de la mission SPOT 5, satellite dont la fin de vie est prévue à l'horizon 2007.

B. LE FONCTIONNEMENT DE LA COOPÉRATION

1. Les organes de la coopération

L'accord institue un comité directeur composé de représentants de chacune des deux parties, dans la limite de cinq membres par pays, dont un représentant du ministère de la défense et un représentant du ministère de la recherche.

Le comité directeur assure la gestion générale de la coopération, propose des projets d'accords ou d'arrangements particuliers destinés à répondre aux besoins militaires et civils des deux parties, se prononce sur les aspects financiers de la coopération et la répartition des coûts entre les parties et veille au respect des aspects de sécurité de la coopération.

2. Les conditions d'échange de données : un partage équitable des ressources

L'article VII de l'accord précise que l'objectif des parties est de réaliser un partage équitable des ressources du système dual . Ce partage doit prendre en compte la configuration définitive du système dual une fois totalement déployé et la contribution financière de chaque partie.

On a vu que la mise au point des 4 satellites radar Cosmo/Skymed représente un coût notablement supérieur à celle des deux satellites optiques Pléiades. Toutefois, l'accord ouvre à l'Italie l'accès aux données fournies par le satellite civil SPOT 5 et le prochain satellite militaire Hélios II, au financement desquels elle n'a pas participé.

L'article VII dispose ainsi que l'Italie aura accès à un pourcentage des ressources de SPOT et Hélios II en échange de l'accès de la France à des ressources de la composante radar Cosmo/Skymed. Il précise que l'accès à l'ensemble des performances du satellite Hélios II est octroyé uniquement pour des besoins de défense, en échange de l'accès à l'ensemble des performances de la composante radar, notamment les capacités submétriques.

Cette disposition est particulièrement importante, dans la mesure où elle fixe les conditions d'accès, pour la défense française, à des données radar dont elle ne bénéficie pas actuellement.

II. LES ENJEUX DE L'ACCORD DE COOPÉRATION SPATIALE FRANCO-ITALIEN

Les applications spatiales dans le domaine de l'observation de la terre sont en constant développement. En fédérant deux programmes nationaux, l'accord franco-italien ouvre la voie à une présence européenne plus forte dans cette activité stratégique.

A. L'OBSERVATION DE LA TERRE PAR SATELLITES : DES BESOINS CROISSANTS, UNE PRÉSENCE EUROPÉENNE ENCORE MODESTE

1. Des besoins croissants

Les satellites d'observation trouvent aujourd'hui un nombre croissant d'applications : cartographie, surveillance des océans, des couverts végétaux et des cultures, suivi de la couche d'ozone, des ressources en eau et de l'état des sols, prospection géologique. L'utilisation des satellites d'observation se développe également dans le domaine militaire, pour l'appréciation des situations, la détection, la reconnaissance et l'identification de sites, d'unités ou de matériels, le recensement d'objectifs d'intérêt militaire ou l'évaluation des dommages.

Il s'agit donc de répondre à des besoins très variés dans les domaines de l'environnement, de l'agriculture, de la protection civile ou de la défense, au profit d' utilisateurs très divers : sociétés privées, organisations internationales, institutions publiques, gouvernements et autorités militaires.

Les utilisateurs attendent un accès plus rapide et plus fréquent à des images de qualité accrue . Il est pour cela nécessaire de combiner différents degrés de résolution des capteurs, ainsi que les différents modes de prise de vue : les capteurs optiques opérant dans le domaine visible qui offrent la meilleure qualité d'image mais ne fonctionnent que de jour et par temps clair ; les capteurs infrarouge, qui peuvent opérer de nuit et fournissent des données sur l'activité d'un site, en mettant en évidence les phénomènes thermiques ; les capteurs radar, qui ont une capacité tout temps, de jour et de nuit et fournissent des données non accessibles aux capteurs optiques.

L'évolution technologique conduit à des satellites de petite taille , mis en réseau dans le cadre de constellations et disposant d'une résolution toujours plus précise : de la résolution décamétrique, on est passé, pour la plupart des satellites civils, à une résolution métrique (entre 1 et 2 mètres), alors que les satellites militaires américains sont de résolution submétrique (moins de 1 mètre).

2. Une présence européenne modeste

Les Etats-Unis dominent très largement le domaine de l'observation par satellites, tant par leurs capacités strictement militaires (satellites optiques Key Hole et 8 X ; satellites radar Lacrosse) que par leurs satellites civils qui ont en réalité une vocation duale, puisqu'ils alimentent également l'agence militaire américaine ( National imagery mapping agency : NIMA ). Trois sociétés privées américaines, Space Imaging (satellites Landsat et Ikonos), Digital Globe (satellites Quickbird) et Orbimage (satellites Orbview) dominent l'offre commerciale des images satellites. La politique des autorités américaines va dans le sens d'une libéralisation croissante de l'offre commerciale , à des résolutions de plus en plus précises, afin de dissuader les pays tiers de développer des programmes nationaux d'observation en satisfaisant à moindre prix leurs besoins gouvernementaux.

La Russie , pour sa part, a largement perdu le bénéfice des investissements considérables réalisés durant la guerre froide. Une majorité de ses satellites ont dépassé leur durée de vie. En matière militaire, la réduction des ressources financières a conduit à espacer le lancement des satellites de la série Cosmos, quitte à altérer momentanément la continuité du service. Avec les satellites Ressource, la Russie contribue toujours à l'offre commerciale sur des produits de haute résolution.

L' Inde (satellites radar IRS), Israël (satellites militaires Ofeq et civils Eros), le Canada (satellites radar Radarsat), la Chine ou encore le Japon , mènent des programmes de satellites d'observation.

En Europe, c'est en France qu'est apparue la volonté la plus affirmée de développer des satellites d'observation, avec la filière civile SPOT et le programme militaire Hélios.

Le programme civil SPOT , conduit par le Centre national d'études spatiales, a permis le premier lancement d'un satellite optique en 1986 . Une coopération européenne limitée a été menée sur ce programme avec la Belgique et la Suède, respectivement engagées à hauteur de 4 %. Le dernier des satellites de la filière, SPOT 5 , a été mis sur orbite le 4 mai 2002. Il offre des images d'une résolution de 2,5 mètres et dispose d'un nouvel instrument à haute résolution stéréoscopique permettant l'obtention d'images en trois dimensions.

Le programme militaire Hélios a permis le lancement d'un premier satellite optique en 1995 (Hélios I A) et d'un second en 1999 (Hélios I B). Il a été mené en coopération avec l'Italie, engagée à hauteur de 14,1 %, et l'Espagne (7 %). Hélios II doit prendre en 2004 le relais d'Hélios I, avec une capacité de très haute résolution stéréoscopique, une cadence accrue de renouvellement des prises de vue, et des capteurs infrarouge pour l'observation de nuit. L'Italie n'a pas poursuivi la coopération engagée sur Hélios I. Seules participent à Hélios II l'Espagne et la Belgique, pour des pourcentages extrêmement faibles (2,5 % pour chacun des deux pays).

En dehors de ces coopérations européennes limitées aux programmes français SPOT et Hélios, aucun pays européen ne dispose actuellement de capacité d'observation par satellite. Des projets à brève échéance existent cependant en Allemagne (constellation SAR/Lupe), en Espagne (projet Ishtar), au Royaume-Uni (démonstrateur optique Topsat), ou encore en Italie. Dans ce dernier cas, le rapprochement entre le programme Cosmo/Skymed et les programmes français permettra une réelle synergie européenne.

B. L'ACCORD FRANCO-ITALIEN : UNE ÉBAUCHE PRAGMATIQUE D'UN FUTUR SYSTÈME EUROPÉEN D'OBSERVATION

L'accroissement et la diversification des besoins en matière d'imagerie par satellites, tant dans le domaine civil que dans le domaine militaire, exige le développement de systèmes associant différents types de capteurs, assurant une grande souplesse d'utilisation dans des délais brefs et garantissant une véritable continuité du service. Aucun pays européen n'est à lui seul en mesure de réaliser les investissements nécessaires au développement de tels systèmes. La voie de la coopération s'impose donc.

L'originalité de l'accord franco-italien est qu'à la différence d'une coopération industrielle sur un programme commun, avec toutes les difficultés que peut engendrer ce type de formule, il s'appuie sur deux programmes nationaux existants et les met en synergie de manière à éviter toute duplication coûteuse et inutile et à apporter à chacune des deux parties un meilleur bénéfice grâce à une exploitation en commun.

Mais au-delà de l'intérêt bien compris des deux pays, cet accord bilatéral présente une forte dimension européenne . Il s'agit en effet d'une illustration assez exemplaire de l'édification de moyens spatiaux européens autonomes.

Dans le domaine civil, le système franco-italien ORFEO sera un élément majeur parmi les moyens spatiaux mis au service de l'initiative européenne GMES ( Global monitoring environment and security ). Elle vise à offrir aux décideurs politiques européens des services d'information très performants et rapides en vue de la surveillance et de la protection de la planète. L'application des engagements internationaux, tels le protocole de Kyoto, la dégradation des ressources naturelles et la gestion des catastrophes environnementales sont les principaux volets du GMES. La contribution des satellites d'observation sera de ce point de vue essentielle.

Dans le domaine militaire , l'accord franco-italien jette les bases d'une coopération qui tardait à se concrétiser. A l'accord franco-italien du 29 janvier 2001 a en effet succédé un arrangement franco-allemand de même nature signé à Schwerin le 30 juillet 2002. Il s'agit ici encore de fédérer deux programmes nationaux. L'arrangement prévoit la fourniture par la France d'images d'Hélios II et de Pléiades en échange d'images radar de la constellation SAR/Lupe, formée de 5 satellites que l'Allemagne doit lancer entre mi-2005 et mi-2007. Plus précis que les satellites radar italiens Cosmo/Skymed, mais offrant une couverture géographique moins étendue, les satellites SAR/Lupe fourniront un complément appréciable en matière d'observation radar.

Alors que la France était restée depuis 1995 le seul pays européen à afficher une ambition claire dans le domaine de l'observation spatiale militaire, les accords conclus avec l'Italie et l'Allemagne, outre qu'ils garantissent à notre défense des capacités complémentaires indispensables, offrent à l'Europe un degré d'autonomie significatif dans un domaine clef pour la politique européenne de sécurité et de défense.

CONCLUSION

L'échec de la coopération franco-allemande sur le projet de satellite radar militaire Horus en 1998, puis le très faible niveau de coopération européenne sur le satellite Hélios II avaient sérieusement fait douter de l'existence en Europe d'une réelle volonté de disposer d'une véritable autonomie dans le domaine de l'observation spatiale.

L'accord franco-italien du 29 janvier 2001 fédérant les projets Cosmo/Skymed et Pléiades ouvre des perspectives plus positives, au travers d'un projet à vocation duale, ce qui souligne d'ailleurs l'étroitesse des liens entre enjeux militaires et civils en matière d'imagerie satellitaire. L'existence d'un accord de même esprit signé avec l'Allemagne en juillet 2002, pour une utilisation de la future constellation SAR/Lupe, confirme cette évolution positive.

Fondé sur une approche pragmatique, l'accord franco-italien permettra à notre pays, et notamment à sa défense, d'accéder aux capacités nouvelles offertes par l'imagerie radar. Souhaitant qu'il ouvre la voie à un engagement durable et plus affirmé de tous nos partenaires européens dans les programmes spatiaux, votre commission vous demande d'adopter le projet de loi autorisant son approbation.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du 24 septembre 2003.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin a demandé si les financements nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord étaient prévus par la loi de programmation militaire 2003-2008. Plus généralement, il s'est inquiété de la forte contrainte financière qui pesait sur les programmes spatiaux et qui conduisait trop souvent à en différer, voire à en abandonner la réalisation.

M. Christian de La Malène a partagé les observations de M. Xavier de Villepin sur les difficultés d'ordre financier rencontrées par les programmes spatiaux. Il a interrogé le rapporteur sur les conditions régissant l'utilisation de l'espace, compte tenu du nombre important de lancements de satellites.

M. André Dulait, président, a évoqué le centre satellitaire de Torrejon, en Espagne, créé sous l'égide de l'UEO. Il a abordé la coopération européenne engagée dans ce cadre et s'est interrogé sur son avenir, ainsi que sur son articulation avec les accords bilatéraux tels que celui conclu avec l'Italie.

En réponse à ces interventions, M. Robert Del Picchia, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- la loi de programmation militaire 2003-2008 inclut le financement du programme Hélios II, un premier satellite devant être lancé en 2004 ; le programme Pléiades, conduit par le Centre national d'études spatiales (C.N.E.S.), n'est pas directement financé par le budget de la défense ; s'agissant de l'Italie, le premier des quatre satellites radar Cosmo/Skymed doit être lancé en 2005 et a fait l'objet d'une première tranche de financement ;

- l'accord franco-italien, fondé sur un partage des tâches et un échange de capacités, constitue un bon exemple de coopération permettant de progresser en dépit des contraintes budgétaires de chaque pays ;

- tous les satellites font en principe l'objet d'une immatriculation auprès de la Commission pour la recherche spatiale de l'ONU, de sorte que les coordonnées de leur trajectoire soient connues ;

- le centre satellitaire de Torrejon, qui relève désormais de l'Union européenne, exploite des images fournies par des satellites gouvernementaux ou commerciaux ; il aura donc accès aux capacités fournies par les satellites Cosmo/Skymed et Pléiades.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a alors adopté le projet de loi.

PROJET DE LOI

(Texte adopté par l'Assemblée nationale)

Article unique 1 ( * )

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à une coopération sur l'observation de la terre, signé à Turin le 29 janvier 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi.

* 1 Voir le texte annexé au projet de loi n° 556 - Assemblée nationale, XIIè Législature.

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