N° 152
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 29 janvier 2003 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'accord de stabilisation et d' association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l' ancienne République yougoslave de Macédoine , d'autre part (ensemble sept annexes et cinq protocoles),
Par M. André BOYER,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Robert Del Picchia, Jean-Marie Poirier, Guy Penne, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Ernest Cartigny, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, André Ferrand, Philippe François, Jean François-Poncet, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean Puech, Yves Rispat, Roger Romani, Henri Torre, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 252 , 373 et T.A. 70
Sénat : 134 (2002-2003)
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Adopté par l'Assemblée nationale le 16 janvier 2003, le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'ancienne République yougoslave de Macédoine, d'autre part, doit être approuvé par les quinze Etats membres de l'Union européenne pour entrer en vigueur.
L'accord de stabilisation et d'association a été signé le 9 avril 2001 à Luxembourg, aux termes de négociations engagées en mars 2000. Il est le premier accord issu du processus, lancé par l'Union européenne, de stabilisation et d'association qui concerne les pays d'Europe du Sud-Est 1 ( * ) et vise, à terme, leur intégration dans l'Union européenne.
La Macédoine est un état à l'équilibre fragile, traversé par de nombreuses lignes de fractures. Le pays a du faire face durant l'année 2001 à une crise politique grave qui confinait à la guerre civile. Cette crise a mobilisé les efforts et l'attention de la communauté internationale et tout particulièrement de l'Union européenne, dont l'implication a permis de déboucher sur une issue politique de façon relativement rapide.
Cette crise, qui a été porteuse de changements politiques importants, a gravement détérioré une situation économique déjà profondément affectée par les contrecoups du conflit yougoslave.
Le processus de stabilisation et d'association s'inscrit dans une perspective de long terme pour accompagner de façon progressive les réformes nécessaires à un rapprochement entre la Macédoine et l'Union, pour parvenir, à terme, à une véritable association.
Après avoir rappelé les principaux
éléments de la situation politique économique et sociale
de la Macédoine, votre rapporteur reviendra sur les modalités du
processus de stabilisation et d'association prévues par l'accord.
I. UN PAYS EN SORTIE DE CRISE
A. UNE SITUATION POLITIQUE A CONSOLIDER
1. L'accord-cadre d'Ohrid et la révision constitutionnelle
La concomitance entre l'émergence d'un mouvement nationaliste albanais dans la région et le mécontentement croissant des Albanais de Macédoine, alliée au déclencheur qu'a constitué la crise kosovare, a abouti au déclenchement d'une crise très grave en février 2001. Les affrontements ont conduit à l'occupation d'une partie du pays par l'UCK-M.
Suite au cessez-le-feu, négocié en juillet 2001 par l'OTAN, un représentant spécial de l'Union européenne a été nommé pour engager des négociations qui ont abouti, le 13 août 2001 à la signature de l'accord-cadre d'Ohrid. Cet accord prévoit des réformes institutionnelles de décentralisation et de protection des minorités.
Sur la base de l'accord d'Ohrid, une première mission de l'OTAN (« Moisson essentielle »), visait à la collecte des armes remises volontairement par l'UCK-M. Elle a été relayée par l'opération « Amber fox » dont la mission était de contribuer à la protection des observateurs civils de l'Union européenne et de l'OSCE. La relève de cette mission constitue le premier déploiement opérationnel effectué dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, sur lequel votre rapporteur reviendra plus loin.
Le volet politique de l'accord d'Ohrid est mis en oeuvre progressivement : le Parlement a révisé la constitution, voté les lois de décentralisation 2 ( * ) et d'amnistie et des élections législatives se sont tenues en septembre 2002, qui ont vu l'entrée au Parlement d'anciens combattants de l'UCK-M et la formation d'un gouvernement de coalition SDSM (socio-démocrates, ancien parti au pouvoir) et DUI (parti albanais), l'opposition étant principalement représentée par le VRMO (nationalistes macédoniens, parti du président Boris Trajkovski).
Des chantiers politiques importants demeurent qui touchent notamment à la déclinaison de la loi de décentralisation, à la réforme de la police et au renforcement de la transparence et de la lutte contre la corruption.
2. La question des minorités et des réfugiés
La Constitution garantit des droits égaux pour toutes les minorités ethniques.
Suite à la révision constitutionnelle intervenue en novembre 2001, l'albanais est devenue langue officielle dans les zones où elle est parlée par plus de 20 % de la population. La représentation équitable des communautés ethniques a été garantie. La liberté de religion, le renforcement des droits des minorités dans le champ de la culture de la langue et de l'éducation ont été introduits, répondant en cela aux aspirations principales des Albanais.
Les relations interethniques restent cependant un sujet majeur et le recensement de la population a fait l'objet de plusieurs reports. D'après le recensement de 1994, les minorités représentent 34 % de la population : 23 % d'Albanais et 11 % répartis entre Turcs, Roms, Valaques et Serbes.
D'après le Haut Commissariat aux Réfugiés, 4 570 réfugiés du Kosovo étaient présents sur le territoire macédonien en 2001 tandis que 80 % des 170 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays étaient rentrées chez elles.
La question des minorités ne peut être considérée comme entièrement réglée mais le cadre législatif nécessaire a été mis en place pour lancer un processus qui doit encore être poursuivi.
3. La Macédoine dans son environnement régional
La Macédoine a globalement de bonnes relations avec les pays de la région avec lesquels elle a signé des accords de libre-échange. C'est notamment le cas de la Slovénie (juillet 1996), de la Yougoslavie (octobre 1996), de la Croatie (mai 1997), de la Turquie (septembre 1999), de la Bulgarie (octobre 1999), de l'Albanie et de la Bosnie-Herzégovine (juillet 2002). Un mémorandum d'accord a en outre été signé en juin 2001, avec l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, la Croatie, la Roumanie et la Yougoslavie pour libéraliser le commerce et baisser les tarifs douaniers.
Les relations bilatérales avec la Bulgarie, la Grèce et l'Albanie sont plus complexes pour des raisons qui tiennent à l'historique de l'indépendance du pays et à la question albanaise.
La Macédoine a des relations étroites avec la Serbie en matière culturelle, politique et économique.
Sur le plan multilatéral, la Macédoine participe à toutes les initiatives de coopération régionale : le pacte de stabilité, l'initiative centre-europénne.
Elle est membre du conseil de l'Europe depuis 1995 et de l'organisation mondiale du commerce depuis 2002.
* 1 Albanie, Macédoine, Bosnie-Herzégovine, Croatie et Serbie-Monténégro
* 2 Le texte prévoit le transfert aux municipalités de pouvoirs dans le domaine des services publics, de la culture, de l'éducation, de la protection sociale, de la santé, de l'environnement, de l'urbanisme, du développement économique et des finances locales.