B. AUDITION DE M. ROBERT BUGUET, PRÉSIDENT ET DE M. PIERRE BURBAN, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L'UNION PROFESSIONNELLE ARTISANALE (UPA)
La commission a procédé à l'audition de M. Robert Buguet, président, et de M. Pierre Burban, secrétaire général de l'Union professionnelle artisanale (UPA).
M. Robert Buguet a rappelé, en premier lieu, que si 78 % des salariés employés dans des entreprises de plus de 20 salariés étaient passés aux 35 heures, cette proportion diminuait nettement pour les entreprises de moins de 20 salariés puisque seuls 7 % de ces dernières avaient réduit la durée du travail, créant par là une véritable dichotomie au sein du secteur marchand.
Il a souligné que l'UPA jugeait impossible de réduire le temps de travail sans contrepartie en termes de flexibilité, notion qui, dans une petite entreprise, ne pouvait être aussi élastique que dans une grande.
Insistant sur la stricte neutralité politique qu'entend observer l'UPA, il s'est néanmoins réjoui que les revendications des artisans relatives au contingent d'heures supplémentaires aient en partie obtenu satisfaction. Il a, par ailleurs, constaté qu'un certain nombre d'accords signés et dont l'extension avait été refusée par Mme Elisabeth Guigou, pourraient trouver leur mise en oeuvre par le biais du présent projet de loi.
Il a ensuite exposé que les difficultés liées à la pénurie de main-d'oeuvre dans l'artisanat atteindraient des proportions préoccupantes dans les années à venir, du fait de la situation démographique. Il a ainsi constaté que, chaque année, 800.000 salariés qualifiés partiraient en retraite alors même que l'artisanat ne pourrait compter que sur 650.000 jeunes peu ou pas qualifiés.
Il a constaté, en outre, que la taille moyenne des entreprises artisanales augmentait au fil du temps et qu'aujourd'hui les artisans étaient devenus des employeurs à part entière. A ce titre, il a précisé que l'UPA prévoyait la création d'un million d'emplois supplémentaires dans les années futures alors que les grandes entreprises, pour leur part, en supprimeraient.
Il a ensuite réclamé des états-généraux de la formation professionnelle, constatant qu'1,5 million de chômeurs pourraient être remis au travail au bénéfice d'une formation adéquate. Il a enfin affirmé que l'activité économique artisanale était en décalage avec le cycle industriel lui-même, le niveau des commandes des artisans demeurant soutenu par la consommation des ménages. Il a précisé toutefois que cette situation ne présumait pas de l'avenir.
Analysant les mesures prises par les gouvernements Juppé et Jospin relatives à la baisse des charges sociales, il a affirmé que financer la protection sociale sur le seul produit du travail constituait aujourd'hui une erreur majeure puisque ce dernier ne représentait aujourd'hui plus que 68 % du PIB contre 97 % en 1947. Il a néanmoins admis que l'ensemble des rapports sur la politique de l'emploi avaient démontré que les baisses de charges sociales étaient plus productives d'emplois que la réduction du temps de travail.
M. Louis Souvet, rapporteur , a demandé à M. Robert Buguet si le taux de majoration des heures supplémentaires fixé à 10 % était suffisamment adapté à la situation des entreprises artisanales.
En réponse à M. Louis Souvet, rapporteur, M. Robert Buguet a déclaré que ce taux était raisonnable, la véritable difficulté rencontrée dans l'artisanat étant la pénurie de main-d'oeuvre générant d'elle-même une hausse des coûts salariaux. Il a, en outre, insisté sur le fait que l'UPA attendait de l'Etat qu'il laisse un champ de liberté permettant aux partenaires sociaux de négocier.
M. Guy Fischer a demandé si l'ACOSS, que préside M. Pierre Burban, avait pu distinguer dans l'augmentation de l'emploi celle ressortant de la croissance et celle liée à la baisse des charges sociales.
M. Gilbert Chabroux s'est interrogé sur l'effet positif, chiffré ou prévisionnel, du contrat-jeune voté par le Parlement au cours de la session extraordinaire, et a demandé à M. Robert Buguet si l'UPA ne craignait pas d'être pénalisée par les conditions de travail plus favorables offertes aux salariés dans les grandes entreprises.
Il a rappelé que le ministre se prévalait d'un accord général avec les partenaires sociaux au-delà de quelques critiques convenues. Il a souhaité savoir si l'UPA avait apporté son accord au projet de loi présenté.
M. Jean-Pierre Fourcade s'est, en premier lieu, enquis du pourcentage des salariés dans l'artisanat dont la rémunération se situe entre 1 et 1,7 SMIC.
Il a ensuite demandé à M. Robert Buguet si l'UPA et les chambres des métiers avaient apuré le conflit déjà ancien sur les centres de formation d'apprentis (CFA).
En réponse à M. Guy Fischer, M. Robert Buguet a insisté sur l'impact positif de la baisse des charges sociales sur l'emploi, tout en reconnaissant la nécessité de diversifier les ressources de la protection sociale afin de compenser cette perte.
En réponse à M. Gilbert Chabroux, il a réitéré les regrets de l'UPA concernant l'absence d'une obligation de formation dans le dispositif des contrats-jeunes. Il a néanmoins souligné que ces contrats avaient le mérite de mettre des jeunes en situation d'emploi par le biais de contrats à durée indéterminée.
Il a, en outre, précisé que la fracture salariale entre entreprises artisanales et grandes entreprises posait une vraie difficulté d'attractivité et avait suscité plusieurs campagnes publicitaires à destination des jeunes.
En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade, M. Robert Buguet a précisé qu'au moins 70 % des salariés d'entreprises artisanales disposaient d'une rémunération inférieure à 1,7 SMIC, la majeure partie d'entre eux se situant entre 1,4 et 1,8 SMIC.
Il a rappelé que la multiplication des SMIC rendait très complexe le calcul de la rémunération des apprentis dont la grille salariale, calée sur ce minimum, affiche désormais 60 références. Il a noté que cette évolution justifiait, en elle-même, une harmonisation des SMIC par le haut.
Il a, en outre, constaté que des progrès avaient été faits dans la gestion des CFA mais a regretté que ces derniers butent sur les mêmes difficultés que l'enseignement technique, à savoir le vieillissement des cadres enseignants, trop longtemps déconnectés des entreprises et donc moins au fait des nouvelles techniques.
Il a enfin demandé à la commission de réfléchir aux conséquences d'une jurisprudence tendant à assimiler le temps de trajet (siège-chantier dans le bâtiment) à un temps de travail effectif. Il a, pour sa part, souhaité que le soin soit laissé aux partenaires sociaux de clarifier ce point dans les conventions collectives.