LES
CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
Après avoir entendu, le mardi 11 décembre 2001,
MM. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, et Jean-Pierre
Raffarin, président de l'Association des régions de France, puis,
le mercredi 12 décembre 2001, MM. Jean Puech, président de
l'Assemblée des départements de France, Jean-Paul Delevoye,
président de l'Association des maires de France, Heinrich Hoffschulte,
président de la section allemande du conseil des communes et
régions d'Europe, Eric Kerrouche, chargé de recherche au CNRS,
Bertrand Delanoë, maire de Paris, Gérard Collomb,
sénateur-maire de Lyon, et Jean-Claude Gaudin, sénateur-maire de
Marseille, la commission des Lois s'est réunie le
mercredi 19 décembre 2001 sous la présidence de M.
René Garrec, président, afin d'examiner en première
lecture, sur le rapport de M. Daniel Hoeffel, le projet de loi relatif
à la
démocratie de proximité
.
A titre liminaire, le rapporteur a déploré qu'en
raison du choix du Gouvernement de déclarer l'urgence sur ce texte,
l'éventuelle commission mixte paritaire soit contrainte d'effectuer un
travail de deuxième lecture.
Il a indiqué qu'après son examen par
l'Assemblée nationale, le projet de loi comportait désormais 124
articles, au lieu de soixante, et traitait moins de la démocratie de
proximité qu'il ne constituait un texte portant diverses dispositions
relatives aux collectivités locales.
La commission a ensuite adopté 148 amendements sur
chacun des grands volets du projet de loi, afin de garantir la libre
administration des collectivités territoriales, d'affirmer la
primauté de la démocratie élective et d'introduire
davantage de souplesse.
1. Participation des habitants à la vie
locale
La commission a adopté des amendements tendant
à :
- abaisser de 50.000 à 20.000 habitants le
seuil à partir duquel la loi traite des conseils de quartier tout en
préservant la liberté des
expériences en cours
; elle a en effet
laissé aux conseils municipaux
le soin
d'
apprécier l'opportunité de créer
ou
non
des conseils de quartier
et de déterminer leur
composition, leurs modalités de désignation, ainsi que les
crédits nécessaires à leur fonctionnement
(
article premier
)
;
-
supprimer
des dispositions rendant
obligatoires partout certains dispositifs dont les communes doivent garder la
liberté d'apprécier l'utilité et le coût, tels que
les
débats sur la vie des quartiers
(
articles 2
et 3
), les
adjoints
et
mairies de
quartiers
(
articles 4 et 5
) ou les
bureaux
des temps
(
article 7
bis
) ;
- ne
rendre obligatoire
la
création de
commissions consultatives des services publics
locaux
que dans les communes de
10.000 habitants et
plus
et dans les établissements publics de coopération
intercommunale et les syndicats mixtes comprenant au moins une commune de plus
de 10.000 habitants, mais
étendre la compétence
de ces commissions aux
régies dotées de l'autonomie
financière mais non de la personnalité morale
(
article 6
) ;
- maintenir la nécessité d'être
électeur pour participer aux
consultations
locales
(
article 6
ter
).
Afin de préserver la place des communes, cellules par
excellence de la démocratie de proximité, la commission propose,
dans le cas d'une
élection au suffrage universel direct des
membres des organes délibérants des structures intercommunales
à fiscalité propre, que ce scrutin intervienne le même jour
que les élections municipales, que chaque commune constitue la
circonscription électorale pour l'élection d'au moins un
délégué, et que tous les délégués
soient aussi membres du conseil municipal de la commune qu'ils
représentent
(
article 7
ter
).
2. Droits des élus au sein des
assemblées locales
La commission a adopté plusieurs amendements tendant
à
supprimer les contraintes excessives
, imposées
par le projet de loi au mépris de la souplesse et du pragmatisme, et
à permettre d'adapter les modalités de fonctionnement des
assemblées locales aux particularités et aux budgets
locaux : séance annuelle réservée à
l'opposition dans les assemblées délibérantes des
collectivités locales, mission d'information et d'évaluation,
contenu obligatoire des procès verbaux des réunions du conseil
municipal, espace réservé à l'opposition dans les
bulletins d'informations générales des collectivités,
prêt d'un local aux élus minoritaires d'un établissement
public de coopération intercommunale (
articles 8 à
11
).
Elle a en revanche étendu aux établissements
publics de coopération intercommunale l'assouplissement des
règles relatives aux délégations de fonction
(
article additionnel après l'article 11
bis
).
3. Paris, Marseille et Lyon
La commission a
approuvé
la plupart
des modifications proposées, soulignant qu'elles répondaient aux
pratiques constatées : renforcement du pouvoir consultatif des
conseils d'arrondissement (
articles 15
bis
à
15
quater
et articles 15
septies
à
15
nonies
), création d'une section
d'investissement dans la dotation des arrondissements (
article
15
undecies
), pouvoirs de police du maire de Paris
(
articles 15
quaterdecies
et
15
quindecies
), suppression de la questure de la ville
de Paris (
article 15
sexdecies
), assouplissement
des règles de recrutement des personnels (
article
15
septdecies
).
Elle a proposé des modifications tendant à
affirmer le pouvoir des maires
, notamment dans la
définition des équipements de proximité, sans que le
préfet puisse désormais intervenir en cas de désaccord
(
articles 15
quinquies
, 15
sexies
et
15
septdecies
).
Enfin, elle a
supprimé
le
référendum d'arrondissement
qui met en péril
l'unité communale (
article 15
decies
).
4. Publication des sondages
électoraux
Comme l'avait déjà fait le Sénat à
travers une proposition de loi adoptée le 17 mai 2001 et en
instance à l'Assemblée nationale pour tenir compte de
l'évolution des moyens de communication et afin de tirer les
conséquences de la récente jurisprudence de la Cour de cassation,
la commission a proposé de
circonscrire à la veille et
au jour du scrutin l'interdiction de publier ou de diffuser des sondages
d'opinion de caractère électoral
et de renforcer les
conditions de contrôle des sondages publiés dans les 15 jours
précédant un scrutin (
article additionnel après
l'article 15
septvicies
).
5. Les conditions d'exercice des mandats
locaux
Afin de favoriser l'égalité des citoyens devant
le mandat et d'assurer une meilleure respiration entre société
civile et société publique, condition indispensable au
développement de la démocratie locale, la commission propose un
ensemble de dispositions qui, pour la plupart, figuraient déjà
dans les propositions de loi adoptées par le Sénat lors de la
dernière session.
En conséquence, la commission a adopté des
amendements tendant à :
- créer un
congé pour campagne
électorale
de dix jours pour les candidats aux élections
locales, améliorer le barème de
crédit
d'heures
et étendre aux non salariés la
compensation de pertes de revenus
liées à
l'exercice d'un mandat pour les élus non indemnisés
(
articles 16 à 18
) ;
- instituer une
allocation différentielle de
fin de mandat
d'une durée au plus égale à six
mois, financée par les catégories d'élus susceptibles d'en
bénéficier (
articles 20 et 21
) ;
- porter de six à dix-huit jours les droits des
élus en matière de
formation
(
articles 23 et 24
) ;
- fixer, dans les communes de moins de 1.000 habitants,
l'
indemnité
du maire à son montant maximum, sauf
délibération contraire du conseil municipal, majorer les
indemnités des adjoints, clarifier les conditions d'indemnisation des
conseils municipaux et moduler celle des élus départementaux et
régionaux en fonction de leur participation aux réunions
(
articles 26 à article additionnel après
l'article 30
) ;
- renforcer le régime de remboursement des
dépenses liées à l'exercice d'un mandat
,
en particulier en intégrant les frais d'
assistance aux
personnes
(
articles 31 à 33
) ;
- instituer une indemnité différentielle pour
les élus ayant réduit leur activité professionnelle et
dont les droits à l'assurance maladie se trouvent minorés en
conséquence, et ouvrir un droit aux prestations en espèces
d'assurance maladie pour les élus ayant cessé d'exercer leur
activité professionnelle, les cotisations étant supportées
par les élus et par les collectivités concernées
(
articles 34 à 36
).
6. Les compétences des
collectivités territoriales
La commission propose de prévoir le
transfert
des services et parties de services des
directions départementales de l'équipement
aux
départements ayant opéré la partition des services avec
ouverture du droit d'option aux personnels (
article additionnel
après l'article 15
octodecies
).
S'agissant des transferts de compétences aux
régions, la commission a décidé :
- de préciser explicitement que les régions
pourront accorder aux entreprises des
avances remboursables à
taux nul
; de leur permettre de souscrire des parts dans des
fonds communs de placement à risques
à vocation
régionale ou interrégionale ; de relever le seuil de leur
participation, seules ou conjointement, dans un fonds d'investissement ou un
fonds commun de placement à risques à
50 %
du montant total de ce fonds ; enfin, de leur permettre de
participer, par le versement de dotations, à la constitution d'un
fonds de garantie auprès d'un établissement de
crédit
ayant pour objet exclusif d'accorder des
concours financiers aux entreprises
(
article 43
A
) ;
- d'étendre les compétences des conseils
régionaux dans le domaine du
tourisme
(
article
additionnel après l'article 43 A
) ;
- de réécrire les articles relatifs au
transfert de
compétences en matière portuaire et
aéroportuaire
afin : de donner à
l'expérimentation une
durée
suffisante pour
dresser un bilan significatif, en prévoyant qu'elle ne sera close que le
31 décembre 2006 ; de marquer le
caractère
volontaire
de cette expérimentation et
d'
ouvrir
la possibilité d'y recourir à
l'ensemble des collectivités territoriales
, en particulier les
départements ; de permettre l'organisation
d'
audits
préalables aux transferts de
compétences, financés à parité par l'Etat et la
collectivité intéressée ; de prévoir la
prorogation
jusqu'au 1
er
juin 2007 des
concessions
qui arriveront à échéance
pendant la durée de l'expérimentation ; de
prévoir l'élaboration de rapports sur le
bilan
de cette expérimentation dans un délai de six mois avant sa
clôture
(
articles 43 B et 43 C
) ;
- de permettre aux régions d'arrêter
le programme des formations et le programme des opérations
d'équipement de l'Association nationale pour la formation
professionnelle des adultes sur leur territoire, et d'élargir la liste
des établissements et organismes consultés par la région
dans le cadre de l'élaboration du plan de développement des
formations professionnelles, en y incluant, comme c'est actuellement le cas,
les conseils économiques et sociaux régionaux et les organismes
consulaires (
article 43 F
).
7. Les services d'incendie et de
secours
Pour répondre au problème d'identification de la
collectivité responsable du service départemental d'incendie et
de secours (SDIS), il convient de
conférer au département
un rôle de collectivité pilote, sans pour autant écarter
les communes et les structures intercommunales.
En conséquence, la commission propose :
- de fixer, à partir de 2006, à 80 % la
part des contributions du département au budget du SDIS et à
20 % celle des communes et structures intercommunales. Les contributions
communales et intercommunales seraient gelées à leur niveau en
2001 dans les départements où elles sont inférieures
à 20 %. Parallèlement, la représentation des
départements au sein des conseils d'administration des SDIS serait
établie à 80 % des sièges et celle des communes
à 20 % (
articles 44 et 46
) ;
- de prévoir, à certaines conditions, une prise
en charge financière des interventions des SDIS par les SAMU
(
article 46
ter
) ;
- d'établir par convention les relations entre les
SDIS et les centres de première intervention communaux et
intercommunaux, qui seraient désormais compétents pour
gérer les biens nécessaires à leur fonctionnement
(
article 43
).
8. La participation du public à
l'élaboration des grands projets
Tout en considérant que la plupart des dispositions du
titre relatif à la
participation du public à
l'élaboration des grands projets
répondait à de
véritables besoins, la commission des Lois a estimé
nécessaire de les encadrer
, afin d'éviter une
paralysie des grands projets.
Par conséquent, elle a adopté des amendements
tendant à :
- définir plus rigoureusement les projets pouvant
faire l'objet d'une saisine de la Commission nationale du débat public,
en prévoyant que ces
projets doivent avoir un
intérêt national
(
article L. 121-1 du code
de l'environnement
) ;
-
encadrer les délais
afin
d'éviter d'allonger inconsidérément la procédure
;
-
distinguer le temps de la concertation et le
temps de la décision
, en précisant que le
public
est associé à l'élaboration, non des décisions,
mais des projets
(article 48),
qu'après la
clôture de l'enquête publique
, la Commission nationale du
débat public doit
simplement
veiller à la
bonne information
du public jusqu'à la mise en service
du projet (
article L. 121-8 du même code
) ;
-
restreindre les possibilités de
réouverture d'un débat public
dans le cas où
l'enquête publique n'aurait pas été ouverte dans les cinq
année suivant la clôture du débat public (
article
L. 121-11
) ;
- indiquer que la Commission nationale du débat
public
ne se
prononce pas sur le fond
(
article L. 121-1
) ;
- garantir
une Commission nationale du
débat public équilibrée
, en supprimant la limite
d'âgé fixée pour son président, en portant à
6 le nombre d'élus locaux membres (
article L.
121-3
) ;
- prévoir que la Commission nationale du
débat public peut être
saisie par une commune
territorialement intéressée (
article L.
121-7
) ;
-
supprimer la possibilité d'organiser un
débat public sur des questions générales
,
l'expérience du débat public relatif à un troisième
aéroport n'étant pas apparue pertinente (
article L.
121-9
).
9. Le recensement
Tout en approuvant le principe d'évaluations annuelles
et différenciées (selon la population des communes) s'appuyant
sur des sondages et des données issues de fichiers administratifs et
sociaux, la commission a jugé nécessaire de
fixer dans la
loi le seuil
(10.000 habitants) à partir duquel la population
des communes ne sera plus recensée de manière exhaustive
(
article 59
).
La commission a adopté le projet de loi ainsi
modifié.
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