PRINCIPALES OBSERVATIONS
1. Production, conditionnement et stockage des pièces en euros répondent aux exigences drastiques de qualité et de sécurité
Il y a
lieu d'être pleinement satisfait de la manière dont la direction
des Monnaies et médailles s'acquitte depuis 1998 de missions nouvelles
et lourdes liées au basculement de notre pays dans une nouvelle
monnaie : frapper l'euro, organiser la préalimentation des futurs
utilisateurs, c'est-à-dire conditionner les pièces en
« kits » de manière à répondre aux
besoins tant des particuliers que des commerçants, en assurer le
stockage.
Afin de ne pas alourdir durablement le budget des Monnaies et médailles,
le conditionnement et le stockage des pièces, de caractère
naturellement ponctuel, ont été confiés à la
sous-traitance qui travaille sous le contrôle de la direction des
Monnaies et médailles et celui de la Banque de France. Courant 2001, la
presse s'est fait l'écho de perturbations dans la chaîne de
confection de sachets d'euros. Il s'est en fait agi d'un problème
très isolé, qui a donné lieu à la mise en examen
d'une personne employée par l'entreprise sous-traitante pour
« sabotage » et « abus de confiance ».
Mais rapidement détecté et corrigé, cet incident n'a, en
aucun cas, pu jeter le discrédit sur la parfaite qualité des
services rendus.
2. En 2001, une activité plus soutenue que prévu permet d'éviter le recours à la subvention de l'Etat
En loi
de finances initiale 2001 avait été votée un subvention de
l'Etat de 19 millions de francs.
Mais la Banque de France a demandé un complément de
561 millions de pièces et de 8,4 millions de sachets de
préalimentation. De plus, la Grèce a revu à la hausse ses
commandes de pièces d'euros et les monnaies de collection
françaises connaissent, avec la disparition du franc, un succès
inattendu.
Cette conjoncture plus favorable permet à l'administration des Monnaies
et médailles de mieux rentabiliser ses moyens de production et
d'augmenter ses recettes. L'équilibre budgétaire s'en trouve
assuré sans recours à la subvention de l'Etat.
3. Pour 2002, l'équilibre budgétaire affiché paraît bien fragile
Du fait
de l'inéluctable diminution du programme de frappe de l'euro, la
direction des Monnaies et médailles perçoit, de la direction du
Trésor, moins de recettes liées à la cession des
pièces.
Par ailleurs, les prévisions de recettes purement commerciales,
même si elles sont plus sincères que l'an dernier, paraissent
encore trop confiantes.
La direction des Monnaies et médailles a, en partie, effectué une
révision à la baisse de son objectif de chiffre d'affaires
réalisé en secteur concurrentiel, qui marque un retrait de 6,1 %
par rapport à la loi de finances 2001. Mais évaluées
à 4,24 millions d'euros (environ 303 millions de francs), ces recettes
seraient en progression de 39 % par rapport aux derniers résultats
connus de 2000. Certes, des actions ont été entreprises pour
dynamiser les ventes - restructuration des services commerciaux, partenariat
efficace avec les postes d'expansion économique, amélioration de
la qualité de service notamment - et le basculement dans une nouvelle
monnaie revêt un indéniable caractère porteur. Il semble
néanmoins à votre commission des finances que les
prévisions affichées pèchent par excès d'optimisme,
en particulier pour le secteur des « produits parisiens ».
En conséquence, il y a de sérieuses raisons de craindre que le
bénéfice d'exploitation nécessairement moindre que pourra
encore dégager l'établissement de Pessac ne puisse plus compenser
le déficit constant de l'établissement parisien.
4. Pour améliorer sa rentabilité, la Monnaie de Paris, s'éloigne de sa mission de service public
La
frappe des pièces métalliques courantes françaises, dont
la Monnaie de Paris a le monopole, ne peut suffire et les défis que
celle-ci doit relever sont ceux d'une entreprise commerciale : diversifier
son offre, améliorer sa qualité de service, diminuer ses
coûts, pour lutter au mieux contre une concurrence toujours plus
âpre et augmenter ainsi son chiffre d'affaires. C'est ainsi que la
production de monnaies courantes pour des Etats étrangers, de monnaies
de collection pour une clientèle de numismates assez stable, ou de
médailles et de décorations pour les
« institutionnels », tout en ne relevant pas directement
d'une mission de service public, demeurent dans la tradition de la Monnaie de
Paris.
En revanche, il y a lieu d'être plus sceptique sur l'intérêt
que peut présenter le développement, financé par le
contribuable, d'activités telles que la fabrication de bijoux ou de
fontes d'art, qui relèvent davantage de la sphère des entreprises
privées.
5. La maîtrise des dépenses, et notamment des achats, est très attendue
Il est
un fait que la Monnaie de Paris subit la diminution du programme de frappe de
l'euro. Par ailleurs, une forte part du budget « Monnaies et
médailles » résulte de frais fixes ou faiblement
variables, notamment parce que les dépenses de personnel se
caractérisent par une certaine rigidité à la baisse.
Enfin, des missions telles que l'expertise des monnaies présumées
fausses, la gestion du musée de la Monnaie, l'entretien de l'Hôtel
des Monnaies, classé monument historique, entraînent des
coûts relativement incompressibles.
Mais votre commission des finances estime que les crédits
demandés constituent un maximum et espère que l'année 2002
sera mise à profit pour rechercher et trouver de nouvelles
économies.
Cette attente porte notamment sur les achats, poste de dépenses le plus
lourd, pour lequel la direction des Monnaies et médailles avait
demandé, en 2000, un audit externe. Cet audit a conclu à la
nécessité de remédier à des dysfonctionnements et
d'améliorer les performances. Un groupe de travail devrait proposer des
mesures pratiques en ce sens avant fin 2001. Il importe désormais que
ces bonnes intentions soient suivies d'effet, en termes de
régularité juridique, mais aussi d'efficacité
économique, laquelle s'impose dans un contexte de régression de
l'activité.
6. De nombreuses incertitudes planent sur l'avenir du site parisien
Le
déficit est structurel. La nécessaire adaptation de
l'établissement de Paris aux évolutions constatées - une
concurrence accrue, des marchés moins porteurs, etc. - suppose une
meilleure adéquation entre les activités et les métiers,
une plus grande polyvalence des fonctions exercées, qui font
actuellement l'objet de réflexions.
Il paraît évident que, sans remettre en cause les savoir-faire
technique et artistique des personnels, l'avenir de l'établissement
parisien dépendra essentiellement de sa capacité à
améliorer sa réactivité, sa productivité et sa
compétitivité.
7. La nécessaire rentabilisation des installations de l'établissement de Pessac suppose de nouveaux débouchés
L'établissement de Pessac s'est vu doter, pour les
besoins de
frappe de l'euro, d'un outil industriel moderne considéré comme
suffisant. Ainsi, après étude d'opportunité, a-t-il
été décidé de ne pas procéder à
l'investissement d'un laminoir-fonderie (24,4 millions d'euros ou 160 millions
de francs) pour une production totalement intégrée. En effet, les
coûts de production s'en seraient trouvés alourdis, les
débouchés potentiels ne permettant pas de rentabiliser un tel
investissement.
La forte baisse du programme de frappe de l'euro est une certitude, et une
éventuelle augmentation des besoins en 2003 ou 2004 pour aboutir
à une production totale de 12 milliards de pièces au lieu des 11
milliards pour l'instant annoncés n'y changera rien. C'est donc par des
efforts accrus de compétitivité que les Monnaies et
médailles rentabiliseront au mieux leurs capacités de production,
en remportant de nouveaux appels d'offre pour la frappe de monnaies courantes
étrangères, comme cela a été le cas avec la Banque
centrale de Grèce cette année.
8. La monnaie métallique circulera-t-elle beaucoup et longtemps ?
Il est
encore trop tôt pour répondre à la question de l'avenir de
l'euro fiduciaire, et donc de l'activité de frappe des pièces.
Certains facteurs pourraient favoriser le soutien de cette activité. La
valeur plus forte de l'unité d'euro entraînera probablement une
utilisation plus importante des petites coupures (1, 2 et 5 centimes d'euros).
De surcroît, ces petites coupures, orangées, sont en cuivre et
leur durée de vie s'annonce moins longue que celles des actuelles
« pièces jaunes ». Par ailleurs, l'utilité
d'une pièce de 5 euros n'est pas inconcevable.
A l'inverse, l'habituelle déperdition de pièces liée au
tourisme -qui nécessite de reconstituer régulièrement les
stocks- n'opèrera plus au sein de la zone euro.
Mais surtout, quel sera, à plus long terme, le comportement des
Français face à la monnaie métallique courante ?
Parce que le porte-monnaie électronique ne relève plus
aujourd'hui de la science-fiction, il faudra bien que la direction des Monnaies
et médailles, et le ministère de l'économie et des
finances dont elle dépend, anticipent les évolutions potentielles
afin de s'adapter, sans trop de douleur, à un contexte
profondément nouveau.