IV. UN « ACTIVISME » LEGISLATIF QUI PEINE PARFOIS A RECEVOIR UNE TRADUCTION CONCRÈTE
A. LE NOUVEAU DISPOSITIF D'AIDE FISCALE À L'INVESTISSEMENT EN ATTENTE DE DÉCRETS D'APPLICATION
L'article 19 de la loi de finances pour 2001 a mis fin au
dispositif
dit de la « loi Pons » et l'a remplacé par un
crédit d'impôt sur le revenu et une réduction du
bénéfice imposable au titre de l'impôt sur les
sociétés.
Le dispositif de crédit d'impôt sur le revenu créé
à cette occasion semble avoir particulièrement séduit le
gouvernement puisque le crédit d'impôt proposé dans le
cadre du projet de loi sur la Corse en est un décalque.
Malheureusement, près d'un an après le vote de la loi, le nouveau
dispositif d'aide fiscale à l'investissement n'est toujours pas
entré en vigueur, faute d'accord des autorités communautaires.
En 2001, le coût de la « défiscalisation » a
légèrement diminué, de 571 millions d'euros à
518 millions d'euros, car aucun projet nouveau n'a pu être pris en
compte.
Le projet de loi de finances pour 2002 anticipe un succès prochain des
négociations avec la Commission européenne puisqu'il
prévoit une forte augmentation du coût de la
« défiscalisation » des investissements outre-mer.
Celui-ci passerait de 518 millions d'euros à 723 millions
d'euros.
On notera que le nouveau dispositif est considéré par le
gouvernement comme susceptible d'avoir un coût supérieur de
25 % à celui de l'ancien.
B. LES RATÉS DES TRANSFERTS DE COMPÉTENCE EN NOUVELLE CALÉDONIE
La mise
en oeuvre des dispositions du nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie
semble se dérouler de façon paisible sur le plan politique mais
se heurter à des difficultés techniques.
Fin 2001, les crédits ouverts depuis 2000 au titre de la dotation de
compensation des transferts de charges n'ont toujours pas été
dépensés.
De plus, il apparaît que les clefs de répartition des
crédits de la dotation de construction et d'équipement des
collèges sont inadaptés à la réalité de
l'évolution de la population scolarisée dans les trois provinces
calédoniennes. Cette dotation est répartie, selon des
modalités fixées par le décret n° 2000-578 du 22 juin
2000, en fonction de la population scolarisable, de la superficie des
établissements scolaires et des effectifs scolarisés.
Toutefois, la pondération accordée à ce dernier
critères est faible, ce qui se traduit par un manque à gagner
pour la province sud, dans laquelle sont scolarisés des enfants
résidant dans d'autres provinces. La province sud doit donc consentir un
effort financier sans rapport avec les crédits qu'elle reçoit de
l'Etat. Il serait souhaitable de désamorcer le plus tôt possible
cette source potentielle de conflit entre les provinces, afin que la mise en
oeuvre du nouveau statut soit réalisé dans le meilleur climat
possible.
C. LE RECOURS ABUSIF À LA PROCÉDURE DES ORDONNANCES
Peu
après son arrivée au pouvoir, le gouvernement a demandé au
Parlement de l'habiliter à modifier par ordonnance le droit applicable
outre-mer dans un grand nombre de domaines.
Une première loi d'habilitation est intervenue et a été
suivie par le dépôt de projets de loi de ratification, qui ont
été examinés et adoptés par les deux
assemblées dans des conditions qui auguraient bien de l'avenir.
Malheureusement, les habilitations intervenues par la suite n'ont plus jamais
été suivies de l'examen par le Parlement des projets de loi de
ratification. Dix-huit ordonnances sont en instance de ratification. Treize
nouvelles devraient intervenir en 2002.
La banalisation du recours aux ordonnances ne s'accompagnant pas d'une
ratification ultérieure par le Parlement est un phénomène
inquiétant. L'outre-mer n'a pas vocation à devenir le domaine
réservé du pouvoir exécutif, qui déciderait seul,
en dehors de tout contrôle parlementaire, du droit auquel sont soumis nos
compatriotes ultramarins.
Les ordonnances intervenues depuis 1999
Le
gouvernement a communiqué à votre rapporteur les
éléments suivants :
«
Ordonnances publiées
En application de la loi n°99-899 du 25 octobre 1999 portant
habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures
législatives nécessaires à l'actualisation et à
l'adaptation du droit applicable outre-mer, dix-huit ordonnances ont
été publiées :
- ordonnance n° 2000-27 du 13 janvier 2000 relative à la
contribution de l'Etat aux ressources des communes de la Polynésie
française ;
- ordonnance n° 2000-28 du 13 janvier 2000 relative à la
santé publique à Mayotte et portant modification des ordonnances
n° 92-1070 du 1er octobre 1992 et n° 96-1122 du
20 décembre 1996 modifiée,
- ordonnance n° 2000-29 du 13 janvier 2000 portant création d'une
agence de santé et extension ou adaptation de certaines dispositions du
code de la santé publique aux îles Wallis et Futuna,
- ordonnance n° 2000-99 du 3 février 2000 relative au statut des
agences d'insertion dans les départements d'outre-mer et modifiant la
loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au minimum d'insertion,
- ordonnance n° 2000-189 du 2 mars 2000 portant extension et adaptation du
titre Ier du livre IV du code de la santé publique relatif aux
professions de médecin, de chirurgien-dentiste et de sage-femme aux
départements d'outre-mer, aux collectivités territoriales de
Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte et aux territoires d'outre-mer des
îles Wallis et Futuna et des Terres australes et antarctiques
françaises,
- ordonnance n°2000-190 du 2 mars 2000 relative aux chambres de discipline
des ordres des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et
des pharmaciens de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie
française,
- ordonnance n° 2000-218 du 8 mars 2000 relative aux règles de
détermination des nom et prénoms des personnes de statut civil de
droit local applicable à Mayotte,
- ordonnance n° 2000-219 du 8 mars 2000 relative à l'état
civil à Mayotte,
- ordonnance n° 2000-285 du 30 mars 2000 portant actualisation et
adaptation du droit du travail de l'outre-mer,
- ordonnance n° 2000-347 du 19 avril 2000 modifiant l'ordonnance n°
59-74 du 7 janvier 1959 portant réforme du régime de
l'émission dans les départements de la Guadeloupe, la Guyane, la
Martinique et la Réunion ;
- ordonnance n° 2000-350 du 19 avril 2000 portant actualisation et
adaptation du droit électoral applicable outre-mer,
- ordonnance n° 2000-351 du 19 avril 2000 portant prolongation de la
scolarité obligatoire dans le territoire des îles Wallis et Futuna,
- ordonnance n° 2000-352 du 19 avril 2000 relative à
l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles dans les îles
Wallis et Futuna ;
- ordonnance n° 2000-370 du 26 avril 2000 relative au droit d'asile en
Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna,
à Mayotte et dans les Terres australes et antarctiques françaises,
- ordonnance n° 2000-371 du 26 avril 2000 relative aux conditions
d'entrée et de séjour des étrangers à Wallis et
Futuna,
- ordonnance n° 2000-372 du 26 avril 2000 relative aux conditions
d'entrée et de séjour des étrangers en Polynésie
française,
- ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions
d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte,
- ordonnance n° 2000-374 du 26 avril 2000 relative aux conditions
d'entrée et de séjour des étrangers dans les Terres
australes et antarctiques françaises.
Faisant suite à ces ordonnances prises en application de loi
n°99-899 du 25 octobre 1999, trois projets de loi de ratification des
ordonnances ont été déposés sur le bureau du
Sénat les 13 et 19 juillet 2000. Le Gouvernement ayant formulé le
voeu qu'ils soient examinés par les commissions compétentes du
Sénat dès le mois de mars, ils devraient être
débattus en première lecture début 2002.
Ordonnances à publier
En application de l'art. 2 de la loi n°2001-503 du 12 juin 2001 portant
habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures
législatives nécessaires à l'actualisation et à
l'adaptation du droit applicable en outre-mer, un certain nombre d'ordonnances
devront être prises par le Gouvernement avant le 30 mars 2002
destinées notamment à répondre à l'urgence sociale
et respecter les engagements pris depuis 1997 afin de donner aux mahorais les
moyens d'un développement économique et social durable.
Dès l'automne, des ordonnances seront prises dans le domaine de l'emploi
et de la protection sociale :
Des mesures pour l'emploi. Un dispositif d'ensemble cohérent pour
stimuler la création et le développement d'activités
économiques et de services sera mis en place :
- le dispositif emploi-jeunes sera adapté à Mayotte et dès
cette année, 300 emplois-jeunes seront créés ;
- la mise en place d'un régime conventionnel d'indemnisation du
chômage en cas de licenciement économique sera encouragée
et le code du travail dans son ensemble sera complété pour mieux
assurer notamment l'hygiène et la sécurité du travail ;
- le statut des travailleurs indépendants, commerçants et
artisans et celui des exploitants agricoles et des pêcheurs, sera
consolidé.
Une protection sociale renforcée. La priorité portera sur
l'enfance, la famille et les plus démunis
- les allocations familiales, réservées actuellement aux
salariés, seront généralisées à toute les
familles en situation régulière.
- la revalorisation du niveau de ces allocations sera réalisée
par étape, et ce dès le 1er octobre prochain. (50% en un an pour
les familles de un ou deux enfants et de 33% pour les familles de trois
enfants).
- le montant minimal des allocations versées aux plus démunis
sera également augmenté, pour les personnes âgées ou
handicapées.
- enfin, pour accompagner l'effort de construction scolaire à Mayotte,
les familles bénéficieront d'un doublement de l'allocation de
rentrée scolaire : 300 francs dans le primaire et 700 francs dans le
secondaire (dont une partie sous forme d'achat de fournitures scolaires). Une
aide à la restauration scolaire sera également
créée et versée aux gestionnaires des
établissements.
Par ailleurs, cette même loi n°2001-503 du 12 juin
2001 porte
habilitation au Gouvernement à prendre des ordonnances [avant le 30 mars
2002] dans les autres domaines suivants :
Transports intérieurs dans les départements de la Guadeloupe, de
la Guyane et de la Martinique ;
Extension aux territoires de la Polynésie française et des
îles Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à
Mayotte de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux
modalités des privatisations ;
Extension aux territoires de la Polynésie française et des
îles Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à
Mayotte des dispositions législatives du code de l'aviation civile
relatives à la sûreté et à la
sécurité sur les aérodromes ;
Conditions d'entrée et de séjour des étrangers en
Nouvelle-Calédonie et leurs conséquences sur l'ensemble du
territoire de la République. ;
Armement des navires dans le territoire des Terres Australes et antarctiques
françaises ;
Enfin, l'art. 67 de la loi n°2001-616 du 11 juillet 2001 relative à
Mayotte qui dote l'île d'un nouveau statut de collectivité
départementale, prévoit que ordonnances doivent être prises
par le Gouvernement avant le 31 décembre 2002 dans les domaines suivants
:
Dispositions relatives aux personnes, à la propriété, aux
contrats, aux obligations, aux privilèges, à la prescription et
à la possession ;
Réforme de l'organisation judiciaire et statut des cadis ;
Modernisation du régime communal, coopération intercommunale et
conditions d'exercice des mandats locaux ;
Modernisation et développement du service public de
l'électricité ;
Protection, aménagement et mise en valeur de la zone « des
cinquante pas géométriques »
Développement de l'enseignement supérieur et de la recherche
scientifique.
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