II. LE RECOURS À UN DISPOSITIF COERCITIF MÉCONNAIT LA RÉALITÉ LOCALE ET LES RESPONSABILITÉS DE L'ÉTAT
A. LES INSUFFISANCES DE LA LOI « SOLIDARITÉ ET RENOUVELLEMENT URBAINS »
1. Les dispositions de la loi SRU
La loi
« solidarité et renouvellement urbains » a
créé un dispositif de sanctions à l'égard des
communes ne disposant pas d'un nombre suffisant de logements sociaux. La loi
institue en effet, à compter du 1er janvier 2002, un
prélèvement sur les recettes des communes ayant moins de
20 % de logements sociaux. Le produit est versé à la
communauté urbaine, à la communauté d'agglomération
ou à une communauté de communes, à un établissement
public foncier ou, à défaut, à un fonds
d'aménagement urbain affecté aux communes pour des actions en
faveur du logement social
De fait, selon le gouvernement, les logements construits en 2002 devraient
l'être prioritairement dans les communes dont le parc de logements
locatifs sociaux ne satisfait pas aux objectifs de 20 % de logements sociaux
inscrits à l'article 55 de la loi SRU.
L'objectif de construction de
logements sociaux est également revu à la baisse, avec
55.000 mises en chantier annoncées comme objectif, au lieu de
70.000 l'an dernier.
2. Un dispositif inadapté
Votre
rapporteur rappelle qu'un dispositif coercitif n'est pas de nature à
régler de manière satisfaisante les problèmes structurels
de la construction sociale
, qu'il a déjà longuement
exposés dans ses rapports précédents : faiblesse de
la demande, déséquilibre des opérations, complexité
de la réglementation etc...
Il a expliqué à de nombreuses reprises qu'il convenait de
mener une politique de demande plutôt que d'offre
, ce que vient
confirmer encore une fois le récent rapport de la mission
d'évaluation et de contrôle de l'assemblée nationale sur le
logement social, mené par Jean-Louis Dumont, selon lequel «
il faut cesser de gérer le logement social comme au temps de la
pénurie, mais refonder la politique du logement sur la volonté de
répondre à une demande diversifiée
».
De fait, le parc social ne répond pas à la demande
. Les
ménages les plus pauvres sont davantage logés dans le parc
locatif privé que dans le parc HLM. En 1996, date de la dernière
enquête logement, les ménages du premier décile de revenus
étaient logés pour 21 % en locatif social et pour 31 % en locatif
privé.
Par ailleurs, la vacance a également tendance à s'accroître
dans le parc social même si elle est très concentrée (un
quart des logements vacants se trouve dans 1,5 % du parc).
Il faut donc reconnaître que la qualité du logement des
personnes à faible revenu ne dépend pas uniquement du nombre de
logements sociaux construits,
mais également des mesures en faveur
de leur accès au parc privé. A cet égard, on pourra se
référer à la volonté de l'ancien secrétariat
d'Etat au logement de créer un parc de logements locatifs
conventionnés (dispositif dit « Besson » en
remplacement du dispositif « Périssol »).
Enfin,
il faut rappeler que dans la plupart des pays la réalisation
de logements sociaux a tendance à diminuer
. Elle reste en tout
état de cause directement proportionnelle au stock, c'est à dire
que les pays ayant très peu de logement sociaux ne connaissent pas de
renversement de tendance. Par contre un pays comme le Royaume Uni qui disposait
d'un parc très important a fortement ralenti ses investissements dans ce
domaine.
La France se situe dans la moyenne des pays européens en ce qui concerne le parc de logements sociaux, mais elle connaît, comme l'ensemble de l'Union européenne, des difficultés pour la construction sociale nouvelle.