C. LES TRANSFERTS DE RECETTES ET DE DÉPENSES ENTRE LES DEUX TEXTES
Les deux projets de loi pour 2002 contiennent plusieurs dispositions communes ou étroitement liées, sous forme de transferts de recettes et de dépenses.
1. Les transferts de recettes de l'État vers le champ de la loi de financement de la Sécurité sociale
a) L'équilibrage du FOREC
Pour les
besoins de l'équilibrage du fonds de réforme des cotisations
sociales patronales (FOREC), c'est-à-dire du financement des 35 heures,
le gouvernement souhaite transférer à nouveau à ce fonds
des recettes fiscales, à hauteur de 765 millions d'euros
(4.959 millions de francs) au titre de la taxe sur les conventions
d'assurance
39(
*
)
.
Il convient de rappeler que le projet de loi de financement de la
Sécurité sociale pour 2002 prévoit, au titre de 2001, des
transferts de ressources fiscales à hauteur de 457 millions d'euros
(2.997 millions de francs) en provenance de la même taxe sur les
conventions d'assurance
40(
*
)
.
b) Des licences UMTS au fonds de réserve pour les retraites
(a) Les projets de loi initiaux
Lors de
leur présentation, les projets de loi de finances et de financement de
la Sécurité sociale pour 2002 prévoyaient
41(
*
)
l'affectation au Fonds de
réserves pour les retraites (FRR) de 2,47 milliards d'euros
(16,20 milliards de francs) provenant de la cession par l'Etat des
licences de téléphonie mobile de 3
ème
génération, dites licences UMTS.
La décision du gouvernement, par voie d'amendement à l'article
17, de ramener à 620 millions d'euros (4.067 millions de francs)
par opérateur ce versement et d'y ajouter une redevance en fonction des
résultats des entreprises attributaires a pour conséquence de
minorer très fortement les recettes du Fonds de réserve des
retraites, en les ramenant à 1,24 milliard d'euros.
(b) L'affectation d'une partie du produit des privatisations
Afin de
compenser cette perte de recettes déjà subie par le FRR - qui
serait venue s'ajouter à toutes celles précédemment subies
par le biais d'affectation au FOREC de ressources fiscales destinées
à alimenter le FRR par le biais du Fonds de solidarité vieillesse
(FSV) - le gouvernement a décidé d'alimenter pour 1,24 milliard
d'euros (8,13 milliards de francs) le FRR à partir des
excédents prévisionnels du compte n° 902-24
retraçant le produit des privatisations
42(
*
)
.
En pratique, cela signifie que le projet de loi de finances organise le
transfert vers le FRR, outre du produit de la vente les licences UMTS, d'une
partie du produit des cessions à venir des parts détenues par
l'Etat dans plusieurs entreprises : Thomson CSF, Thomson
Multimédia, Compagnie financière Hervet, Banque Hervet, fonds de
capital investissement, Société des autoroutes du sud de la
France.
2. Un transfert de recettes de la Sécurité sociale vers l'Etat
L'article 18 du projet de loi de finances pour 2002
prévoit
l'affectation au BAPSA, au titre de 2002, de 520 millions d'euros de produit de
la C3S destinée à financer le déficit du régime
vieillesse des exploitants agricoles et, notamment la dernière
étape du plan pluri-annuel de revalorisation des petites retraites
agricoles
43(
*
)
.
La conséquence de ce prélèvement est double :
- la subvention d'équilibre versée par le budget
général, donc les dépenses budgétaires, se voit
minorée d'autant ;
- la part de C3S destinée au Fonds de réserve des retraites se
voit aussi minorée d'autant, l'excédent de C3S étant
affecté à ce dernier.
En conséquence, l'article 18 du projet de loi de finances pour 2002
opère, par une voie détournée, un
prélèvement indirect du Fonds de réserve des retraites
afin de minorer le déficit budgétaire de l'Etat.
3. Les transferts de dépenses de l'État vers le champ de la loi de financement de la Sécurité sociale
a) Les transferts de dépenses budgétaires : 61 millions d'euros
Le
budget de la santé et de la solidarité a prévu pour 2002
un transfert de dépenses de l'État vers l'assurance maladie de 61
millions d'euros (400 millions de francs) correspondant à la prise
en charge des dépenses des écoles de formation relevant d'un
établissement public de santé et des dépenses liées
aux stages extrahospitaliers des résidents.
Ce transfert de dépenses fait suite à des mouvements similaires
réalisés depuis 1998 qui tendent, au nom de la clarification des
relations financières avec la Sécurité sociale, à
débudgétiser des dépenses de l'État.
b) L'inconnue du financement du protocole hospitalier : 305 millions d'euros
Le
gouvernement a signé, le 14 mars 2000, un protocole d'accord sur la
fonction publique hospitalière avec plusieurs organisations syndicales
représentatives.
Parmi les nombreuses dispositions de ce protocole, la plus importante en termes
financiers concerne l'accroissement des moyens budgétaires pour la prise
en charge des dépenses liées aux remplacements. 2 milliards de
francs par an soit 304,9 millions d'euros étaient ainsi
prévus, sous forme de crédits «
pérennes au
niveau national
». Ils furent inscrits dans le budget de
l'État, par voie de collectif budgétaire, en juin 2000.
Texte du protocole hospitalier du 14 mars 2000 relatif aux remplacements
«
Les hôpitaux rencontrent, à des degrés
divers, des difficultés de fonctionnement qui tiennent en particulier
à l'insuffisance des possibilités de remplacement des agents
absents. Des moyens seront dégagés à ce titre et
répartis en enveloppes régionales. L'attribution aux
établissements se fera après examen de leur situation existante.
2.000 millions de francs seront attribués aux établissements pour
faire face aux remplacements des congés maternité, maladie, de
formation, congés bonifiés et pour activité syndicale,
ainsi que ceux résultant de la mise en oeuvre des temps partiels ;
30 % de ces crédits seront spécifiquement affectés aux
remplacements des agents en formation au titre de la promotion
professionnelle ;
les crédits ainsi dégagés sont
pérennes au niveau national ;
Ils ont vocation à évoluer, pour chaque établissement, en
fonction de sa situation et des actions qui y sont
menées
».
En revanche, s'agissant de 2001, le gouvernement s'était engagé
lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001 à les
inscrire en collectif budgétaire. Le projet de loi de finances
rectificative n'ayant pas encore été déposé, votre
rapporteur général ne peut pour l'instant que constater que les
établissements hospitaliers, donc le champ de la loi de financement de
la Sécurité sociale, supportent sur leur trésorerie ces
305 millions d'euros manquants.
S'agissant de l'exercice 2002, il n'existe pour l'instant aucune
déclaration du gouvernement explicitant la manière dont il entend
tenir son imprudente promesse.
Il existe donc 305 millions d'euros (2 milliards de francs) de
dépenses hospitalières certaines pour 2002 dont on ne sait
où les trouver, dans le projet de loi de finances ou dans le projet de
loi de financement de la sécurité sociale.