B. DES PRÉVISIONS DE RECETTES POUR 2002 ÉTROITEMENT DÉPENDANTES DE CELLES DE 2001

1. Une hausse des recettes fiscales pour 2002 témoignant d'un grand optimisme

Pour 2002, le gouvernement retient une hypothèse de croissance en volume de 2,5 % (4,2 % en valeur). Les recettes nettes du budget général devraient progresser de 2,3 % à structure constante, avec une hausse spontanée de 2,5 % pour les recettes fiscales nettes 31( * ) et un bond presque sans précédent de 13,4 % pour les recettes non fiscales. Les recettes du budget général hors recettes d'ordre s'élèveraient ainsi à 233,6 milliards d'euros (1.532,3 milliards de francs), soit 4,6 milliards d'euros (30 milliards de francs) de plus que l'exécution prévue pour 2001.

a) Les prévisions pour les impôts indirects

La hausse des recettes fiscales nettes de 2,5 %, soit en valeur 6,2 milliards d'euros (40,7 milliards de francs) s'expliquerait presque entièrement par le dynamisme de la TVA . Le projet de loi de finances retient une hypothèse de 5 % de croissance de la TVA nette des remboursements en 2002 : son produit augmenterait de 5,3 milliards d'euros (35 milliards de francs) pour s'établir à 111,3 milliards d'euros (730 milliards de francs).

On peut s'interroger sur les raisons d'une telle hausse, alors que les estimations révisées du projet de loi de finances montrent que la TVA devrait progresser de 1 % seulement cette année , soit un surplus de 1,2 milliard d'euros (7,8 milliards de francs). Quelles raisons permettent de penser que les rentrées de TVA, beaucoup plus faibles que prévu cette année, retrouveraient un dynamisme l'an prochain ? L'exposé des motifs du présent projet de loi de finances explique que la progression attendue de la TVA suivrait la prévision de consommation des ménages en 2002 (+ 4,3 %). Le gouvernement fait donc le pari d'une consommation soutenue des ménages l'an prochain, malgré la dégradation de l'indice de confiance de ces ménages au cours de ce dernier trimestre 2001.

Par ailleurs, mais pour des montants plus faibles, la TIPP pour laquelle on attend une baisse de 4,5 % en 2001 (1,1 milliard d'euros, 7,2 milliards de francs en valeur) devrait progresser de 4 % l'an prochain soit un gain de 918 millions d'euros (6 milliards de francs). Cette prévision s'appuie sur l'hypothèse d'un abandon, courant 2002, de la réduction des tarifs consécutive à la mise en place du mécanisme dit de « TIPP flottante » par la loi de finances pour 2001. Cet abandon résulterait de l'évolution du prix du baril. Il est vrai que l'évolution à la baisse des cours pétroliers est un constat qui peut légitimement se traduire par l'abandon d'un mécanisme créé pour compenser la flambée du prix du baril au cours de l'année 2000.

b) Les prévisions pour les impôts directs

De même, l'impôt sur le revenu progresserait de 1,2 % en 2002 , soit 617 millions d'euros en valeur (4 milliards de francs) malgré la réduction des taux d'imposition décidée par l'article 2 de la loi de finances pour 2001 dont le coût fiscal est estimé à 1,98 milliard d'euros (13 milliards de francs) et les mesures du présent projet de loi de finances dont le coût s'élève à 1,348 milliard d'euros (8,8 milliards de francs), soit au total 3,3 milliards d'euros (21,6 milliards de francs) d'aménagements.

Le gouvernement annonce que la progression tendancielle attendue de l'impôt sur le revenu s'établirait à 5,6 %, ce qui reflète le maintien d'une progression dynamique des revenus des ménages en 2001 et notamment de la masse salariale. On peut rappeler que l'impôt sur le revenu devrait pourtant connaître une progression limitée à 135 millions d'euros cette année (885 millions de francs).

S'agissant de l'impôt sur les sociétés , le produit net devrait diminuer de 1,1 milliard d'euros (7 milliards de francs) en 2002, pour s'établir à 40,08 milliards d'euros (263 milliards de francs) sous l'effet du ralentissement de la croissance du bénéfice fiscal des entreprises en 2001 qui se traduirait, par le jeu de soldes et acomptes par une stabilité des recouvrements prévisionnels en 2002, et sous l'effet des conséquences de la suppression progressive de la majoration de 10 % instaurée en 1995.

Les recettes du budget de l'Etat en 2002

(en millions d'euros)

Désignation des recettes

Résultats 2000

LFI 2001

Evalua-tions révisées pour 2001

PLF 2002 à structure constante

Evolution à structure constante

Variation de périmètre

PLF 2002

Evolution 2002/2001

A. Recettes fiscales brutes

296.179

304.839

305.187

318.820

2,8 %

- 760

313.060

2,6 %

Impôt sur le revenu

52.253

52.445

53.388

54.005

1,2 %

 

54.005

1,2 %

Autres impôts directs perçus par voie d'émission de rôles

8.269

8.278

8.842

9.000

1,8 %

 

9.000

1,8 %

Impôt sur les sociétés

45.147

49.826

49.698

49.530

- 0,3 %

 

49.530

- 0,3 %

Impôt sur les sociétés net des restitutions

37.702

42.814

41.161

40.080

- 2,6 %

 

40.080

- 2,6 %

Autres impôts directs et taxes assimilées

14.544

15.707

15.931

16.354

2,7 %

 

16.354

2,7 %

Taxe intérieure sur les produits pétroliers

24.271

25.305

23.172

24.090

4,0 %

 

24.090

4,0 %

Taxe sur la valeur ajoutée

133.265

137.475

137.204

143.610

4,7 %

 

143.610

4,7 %

Taxe sur la valeur ajoutée nette des remboursements

104.750

108.967

105.952

111.300

5,0 %

 

111.300

5,0 %

Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

17.430

15.803

16.952

17.231

1,6 %

- 760

16.471

- 2,8 %

B. Remboursements et dégrèvements

- 56.133

- 56.017

- 60.217

- 62.660

4,1 %

0

- 62.660

4,1 %

Restitutions d'impôt sur les sociétés

- 7.445

- 7.012

- 8.537

- 9.450

10,7 %

 

- 9.450

10,7 %

Remboursements de TVA

- 28.515

- 28.508

- 31.252

- 32.310

3,4 %

 

- 32.310

3,4 %

Autres remboursements et dégrèvements

- 20.173

- 20.497

- 20.428

- 20.900

2,3 %

 

- 20.900

2,3 %

A'. Recettes fiscales nettes (A + B)

240.046

248.822

244.970

251.160

2,5 %

- 760

250.400

2,2 %

C. Recettes non fiscales (hors fonds de stabilisation des charges)

30.487

31.897

33.039

37.473

13,4 %

42

37.515

13,5 %

Recettes d'ordre

3.039

2.820

2.613

2.716

3,9 %

 

2.716

3,9 %

C'. Autres recettes non fiscales (hors fonds de stabilisation des charges)

27.448

29.077

30.426

34.757

14,2 %

42

34.799

14,4 %

D. Prélèvements sur les recettes de l'Etat

- 43.512

- 46.838

- 46.339

- 51.607

11,4 %

0

- 51.607

11,4 %

Au profit des collectivités locales

- 28.852

- 31.669

- 31.643

- 34.737

9,8 %

 

- 37.737

9,8 %

Au profit des communautés européennes

- 14.660

- 15.169

- 14.696

- 16.870

14,8 %

 

- 16.870

14,8 %

Recettes du budget général (A+C+D)

283.154

289.898

291.887

299.686

2,7 %

- 718

298.968

2,4 %

Recettes nettes du budget général (A'+C+D)

227.021

233.881

231.670

237.026

2,3 %

- 718

236.308

2,0 %

dont recettes fiscales nettes des prélèvements (A' + D)

196.534

201.984

198.631

199.553

0,5 %

- 760

198.793

0,1 %

Recettes nettes du budget général, hors recettes d'ordre (A'+C'+D)

223.982

231.061

229.057

234.310

2,3 %

- 718

233.592

2,0 %

2. Le pari d'une croissance « volontariste » du PIB

a) Une élasticité des recettes fiscales à la croissance égale à l'unité

D'une manière générale, votre rapporteur général note que le gouvernement met en valeur le fait qu'il retient une « évaluation prudente » des recettes fiscales, avec une élasticité des recettes au PIB ramenée à 1 contre 1,6 en 2001 et 1,9 en 2000. La baisse de l'élasticité en 2002 résulterait largement de l'évolution de l'impôt sur les sociétés.

Les prévisions de recettes fiscales 2000-2002

 

2000

2001

2002

Elasticité au PIB nominal

1,9

1,6

1,0

PIB (variation aux prix courants)

4,0 %

3,9 %

4,2 %

Evolution à législation et périmètre constants

7,9 %

6,4 %

4,0 %

Recettes fiscales nettes à législation de l'année n-1 (en Mds d'euros)

 

255,5

254,9

Impact des mesures nouvelles (en Mds d'euros)

 

- 10,5

- 4,5

Recettes fiscales nettes à législation constante (en Mds d'euros)

240,0

245,0

250,4

Evolution à législation courante

2,5 %

2,0 %

2,2 %

Source : rapport économique, social et financier pour 2002

Comme le souligne le tableau ci-dessus, issu du rapport économique, social et financier associé au présent projet de loi de finances pour 2002, la variation du PIB aux prix courants et l'élasticité au PIB nominal sont les deux données essentielles pour l'évaluation des recettes fiscales tendancielles, avant d'intégrer les aménagements de droit (qui représenteront 4,5 milliards d'euros en 2002).

b) Le pari d'une croissance « volontariste » du PIB

Si la prévision d'élasticité est jugée « prudente », il est évident que celle du PIB nominal a un caractère plus « volontariste » comme l'a souligné le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie lui-même, puisque la progression du PIB en valeur serait de 4,2 % en 2002 contre 4,0 % en 2001 et 3,9 % en 2000 . Dans ces conditions, la variable essentielle, qui fonde les prévisions de recettes fiscales, est davantage l'évolution du PIB pour l'année à venir que la prévision d'élasticité.

De surcroît, si l'élasticité en volume des recettes fiscales s'est révélée bien supérieure à 1 depuis 1999, elle était comprise entre 0,4 et 0,6 de 1994 à 1996 et plus récemment en 1998 . Sans remonter aux années d'élasticité négative (1992 et 1993), pour lesquelles une comparaison n'est sans aucun doute pas de mise, force est de constater que l'affaiblissement de la croissance s'est souvent accompagné d'une diminution sensible de l'élasticité des recettes fiscales alors que la période de forte croissance en 1999 et 2000 a vu au contraire une « explosion » du coefficient d'élasticité fiscale.

Dans ces conditions, il apparaît effectivement raisonnable à votre rapporteur général de ne pas « exagérer » le niveau d'élasticité fiscale des recettes au PIB, compte tenu, de surcroît d'une prévision de croissance « volontariste ».

3. Des recettes non fiscales à un niveau jamais atteint : la nécessité de « boucler le budget »

Les recettes non fiscales devraient progresser fortement en 2002, avec une hausse attendue de 13,4 % par rapport au révisé 2001, soit 4,4 milliards d'euros en valeur (29 milliards de francs). Compte tenu de la révision à la hausse des recettes non fiscales en 2001, la hausse par rapport à la loi de finances initiale 2001 s'élève dans le projet de loi de finances 2002 présenté par le gouvernement à 5,6 milliards d'euros soit 36,5 milliards de francs (+ 17,6 %). Après l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale, la hausse s'élève à 5,8 milliards d'euros, soit 38 milliards de francs.

Evolution des recettes non fiscales 1997-2002

(en millions d'euros)

Cette hausse substantielle montre clairement que les recettes non fiscales seront utilisées dès 2002 pour « boucler » le volet recettes du budget de l'Etat, alors même que les hypothèses de croissance retenues par le gouvernement (+ 2,5 % en volume) sont supérieures pour 2002 à ce que sera l'exécution 2001 (+ 2,1 %).

Il y a donc là un signe inquiétant de l'utilisation des « marges de manoeuvre » que l'on pourrait justifier en temps de crise mais qui s'explique difficilement alors que le projet de loi de finances pour 2002 anticipe une bonne tenue des recettes fiscales tendancielles en 2002. L'utilisation massive des recettes non fiscales montre que les allégements d'impôts promis par le gouvernement ne sont financés que par le recours à des recettes non pérennes 32( * ) . Il en résultera inéluctablement de graves problèmes d'équilibre budgétaire dans les années à venir.

a) Les produits des entreprises du secteur public

Les ressources provenant des entreprises industrielles et commerciales et des établissements publics à caractère financier devraient ainsi s'élever à 5,67 milliards d'euros (37,2 milliards de francs) contre 3,42 milliards d'euros (22,4 milliards de francs) prévus dans la loi de finances de l'an dernier. Il y aura donc un quasi-doublement des prélèvements avec une hausse importante des produits des participations de l'Etat dans les entreprises financières (de 815 millions d'euros à 1,4 milliard d'euros) et encore plus significative dans les entreprises non financières (de 1 milliard d'euros à 2,6 milliards d'euros).

Produit des exploitations industrielles et commerciales et établissements publics à caractère financier

(en millions d'euros)

Les entreprises plus particulièrement touchées par l'augmentation du produit des participations devraient être celles appartenant au secteur de l'énergie (EDF-GDF).

Dans un premier temps, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'a pas souhaité détailler les produits de la ligne 116 en expliquant que « le produit prévisionnel des participations de l'Etat dans les entreprises cotées en bourse (Renault, France Telecom etc..) dépend directement du dividende attendu, dont la fixation est du ressort du conseil d'administration des sociétés. Il constitue donc une donnée sensible . Dans ces conditions, l'estimation des recettes attendues par l'Etat au titre de ses participations dans les entreprises non financières ne fait plus l'objet que d'une estimation globale en loi de finances afin d'éviter la divulgation d'informations individuelles non publiques aussi bien directement (affichage de la donnée) qu'indirectement (donnée obtenue par recoupement de résultats agrégés) » 33( * ) .

Dans un second temps, votre rapporteur général a reçu de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, la réponse selon laquelle EDF versera 1.219,5 millions d'euros (8 milliards de francs) en 2002, contre 217,85 millions d'euros (1,4 milliard de francs) en 2001. Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, en l'absence de conclusion du nouveau contrat de groupe, EDF aurait versé 656 millions d'euros (4,3 milliards de francs) de moins au budget de l'Etat. En effet, les nouveaux contrats de groupe signés en 2001 pour la période 2001-2003 entre l'Etat et les entreprises EDF et GDF modifient le mode de rémunération de l'Etat en déterminant, comme seul mode de rémunération, le dividende dû à l'Etat comme représentant 35 % du résultat net part du groupe pour GDF et 37,5 % du résultat net du groupe pour EDF. Ces contrats rendent obsolètes les dispositions actuelles du décret n° 56-493 du 14 mai 1956 modifié qui prévoient jusqu'à présent que les dotations en capital d'EDF et GDF donnaient lieu à l'attribution au profit de l'Etat d'un intérêt ainsi que d'une rémunération complémentaire fixée sur la base du résultat.

Par ailleurs, votre rapporteur général a également obtenu du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie des explications sur le dividende versé par la Caisse des dépôts et consignations . Celui-ci s'élèvera à 915 millions d'euros pour 2002 dont 465 millions d'euros (3 milliards de francs) résultant de dividendes versés à l'occasion de la constitution entre le groupe CDC et le groupe des caisses d'épargne, d'ici la fin de l'année, d'une société commune.

Enfin, votre rapporteur général regrette que la société Gaz de France, légalement tenue de fournir les informations en cause, n'ait pas souhaité répondre de manière chiffrée à ses questions.

b) Les autres recettes non fiscales

Les produits et revenus du domaine de l'Etat s'établiraient à 425,4 millions d'euros (2,8 milliards de francs) soit une hausse de 25 % par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2001.

Les taxes, redevances et recettes assimilées devraient légèrement baisser dans le projet de loi de finances pour 2002, à 6,67 milliards d'euros contre 6,84 milliards d'euros dans la loi de finances initiale pour 2001. Cette baisse s'expliquait en particulier par la diminution pour 252 millions d'euros (1,6 milliard de francs) des recettes perçues au titre de la participation des employeurs à l'effort de construction, conformément aux termes de la convention conclue en 1998 entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement (UESL). Cependant, la conclusion d'une convention entre l'Etat et l'UESL le 11 octobre 2001 a conduit à réviser à la hausse les contributions des associés collecteurs de l'UESL, avec la création d'une ligne nouvelle dotée de 427 millions d'euros.

Les intérêts des avances, des prêts et dotations en capital chuteront fortement en 2002, passant de 973,5 millions d'euros (6,4 milliards de francs) à 602,6 millions d'euros (3,9 milliards de francs). La raison essentielle est la quasi-disparition des intérêts des dotations en capital et des avances d'actionnaires accordées par l'Etat (passés de 294 millions d'euros soit 1,9 milliard de francs à 17,1 millions d'euros soit 112 millions de francs) et de la baisse des intérêts des prêts du Trésor qui passent de 594,5 millions d'euros (3,9 milliards de francs) à 488 millions d'euros (3,2 milliards d'euros).

Les retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat passent de 9 milliards d'euros (59,6 milliards de francs) à 9,37 milliards d'euros (61,5 milliards de francs) en raison de la hausse des retenues pour pensions 42 millions d'euros soit 932 millions de francs et des contributions aux charges de pensions de la Poste.

Les recettes provenant de l'extérieur progressent de 259 à 832 millions d'euros, en raison de la hausse du remboursement par les communautés européennes des frais d'assiette et de perception des impôts et taxes perçus au profit de son budget (+ 573 millions d'euros, soit 3,75 milliards de francs).

Les opérations entre administrations et services publics s'élèvent à 87,7 millions d'euros, ce qui est équivalent à l'année précédente.

c) Les recettes diverses

La rubrique « divers » sert une fois de plus de variable d'ajustement.

Elle passe de 10,8 milliards d'euros (71 milliards de francs) à 12 milliards d'euros (79 milliards de francs), soit une hausse de 11 % dans le projet de loi de finances. La hausse essentielle se situe sur le prélèvement de la CADES pour 3 milliards d'euros (19,7 milliards de francs) soit 1,1 milliard d'euros de plus que le versement en 2001 (+ 7 milliards de francs). Il est en effet proposé de raccourcir le calendrier des versements de la CADES de 2008 à 2005 et de porter ainsi le versement annuel à 3 milliards d'euros. Il est difficile de croire le gouvernement lorsqu'il explique que cet avancement du calendrier est neutre pour la CADES : dès 2002, il est à craindre que l'augmentation du versement à l'Etat aura pour conséquence de dégrader la crédibilité de la CADES pour ses opérations d'emprunts auprès des marchés financiers.

Par ailleurs, les prélèvements sur les fonds d'épargne gérés par la Caisse des dépôts et consignations s'élevaient à 3,2 milliards d'euros (21,1 milliards de francs) dans le projet de loi de finances pour 2002 mais ils ont été ramenés à 2,9 milliards d'euros après le vote de la première partie de la loi de finances à l'Assemblée nationale. Dans le même temps, une ligne nouvelle a été créée en recettes non fiscales (dans la catégorie taxes, redevances, et recettes assimilées) pour accueillir une contribution des associés collecteurs de l'Union d'économie sociale du logement pour 427 millions d'euros.

Ces deux mouvements ont en réalité une seule explication, décrite ci-dessous.

La contribution des collecteurs du 1 % logement au budget 2002 ou comment ne pas respecter ses engagements sans se faire remarquer

Pour boucler son budget 2002, le gouvernement souhaitait que les organismes collecteurs du 1 % logement contribuent, d'une manière ou d'une autre, à hauteur de près de 732 millions d'euros (4,8 milliards de francs) au budget de l'Etat.

Mais le gouvernement était tenu de respecter la convention conclue entre l'Etat et les collecteurs le 3 août 1998, qui prévoyait un prélèvement sur les collecteurs du 1 % logement à hauteur de 274,4 millions d'euros en 2002 (1,8 milliard de francs) avant une extinction totale du prélèvement en 2003. L'article 3 de la convention énonçait explicitement que « l'Etat s'engage sur la durée de la convention (c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre 2003) à n'effectuer aucun prélèvement sur les associés collecteurs de l'UESL en sus de la contribution prévue au présent article ».

L'idée du projet de loi de finances pour 2002 était donc de faire passer un prélèvement qui taisait son nom par l'intermédiaire des fonds d'épargne gérés par la Caisse des dépôts . Le 1 % logement versait une dotation aux fonds d'épargne ce qui leur permettait de reprendre un montant équivalent de provisions passées sur les prêts accordés en deçà du coût de la ressource en faveur du renouvellement urbain et du logement social. Les prélèvements de l'Etat étaient alors augmentés d'autant sur les fonds d'épargne, avec une grande discrétion 34( * ) et sans que les ressources supplémentaires soient perçues comme un prélèvement direct sur le 1 % logement.

Outre l'aspect, fort peu transparent, de cette méthode, il faut noter que le prélèvement de l'Etat sur les fonds d'épargne n'est sensé être réalisé qu'au titre de la rémunération de la garantie qu'il leur accorde . Ainsi, un allègement des charges pesant sur les fonds d'épargne aurait eu pour conséquence d'augmenter le prélèvement de l'Etat au titre de la garantie qu'il accorde à ces mêmes fonds...Preuve, s'il en était encore besoin, puisque votre commission l'a maintes fois dit, que les modalités de prélèvements de l'Etat sur les fonds d'épargne sont particulièrement archaïques et relèvent bien davantage de la rente que de la rémunération d'une garantie.

Mais cette opération ne s'est pas confirmée. En définitive, après d'importantes négociations, les organismes collecteurs ont signé une convention le 11 octobre 2001 avec l'Etat dans laquelle ils s'engagent à participer à la politique de démolition-reconstruction pour 460 millions d'euros par an (3 milliards de francs) et 430 millions d'euros (2,8 milliards de francs) dès 2002 sous forme de versement au budget de l'Etat en recettes non fiscales sous la ligne « taxes, redevances et recettes assimilées ». Compte tenu du principe de non affectation des recettes du budget général aux dépenses, il n'est évidemment pas question d'affecter directement ce versement aux démolitions, et ce nouveau prélèvement en 2002, en plus du versement contractuel de 1,8 milliard de francs, est donc bien en contradiction avec les termes de la convention du 3 août 1998.

4. L'accroissement des recettes non fiscales malgré tout insuffisant pour faire face à de nouvelles charges

Un certain nombre de déconvenues, en particulier sur le produit des licences UMTS et l'apparition de charges nouvelles liées au « plan de relance décidé par le gouvernement » (300 millions d'euros, soit 2 milliards de francs), ont manifestement amené le gouvernement à réfléchir à la mobilisation de nouvelles ressources disponibles .

« L'idée trouvée » a été l'ouverture partielle du capital d'Autoroutes du Sud de la France (ASF), pour un montant pour le moment estimé par le secrétaire d'Etat à l'industrie à 1,54 milliard d'euros qui seront versés pour l'essentiel au Fonds de réserve des retraites (1,24 milliard d'euros), le reste allant à égalité au secteur aérien (150 millions d'euros) et à la Banque de développement des petites et moyennes entreprises BDPME (150 millions d'euros).

5. Des interrogations sur l'ouverture du capital d'ASF

Si votre commission n'est évidemment pas opposée, sur le principe, à une telle ouverture de capital, il est légitime de s'interroger sur le montant de ressources qui en est attendu et sur les modalités suivant lesquelles elle sera réalisée . Concernant le montant de ressources tirées de l'ouverture du capital, le chiffre de 1,54 milliard d'euros est très en retrait des estimations des acteurs économiques, et les ressources potentielles sont plutôt évaluées à 2,3 milliards d'euros (15 milliards de francs). De fait, le ministre chargé des transports a annoncé que 762 millions d'euros iront à un fonds pour l'intermodalité sans que les crédits soient inscrits nulle part.

La répartition du produit de l'ouverture du capital d'ASF

(en milliards d'euros)

 

Ressources

Affectation

Évaluation PLF 2002

1,54

1,240

Fonds de réserve des retraites

 
 

0,150

Secteur aérien

 
 

0,150

BDPME

Déclarations devant l'AN et le Sénat du ministre chargé des transports

0,762

0,762

Versement au budget des transports

Total

2,3

2,3

 

Par ailleurs, l'Etat est en cours de renégociation complète de ses relations contractuelles avec les sociétés d'autoroutes et doit signer des contrats de plan qui engageront l'avenir de ces sociétés en fixant les montants d'investissement, les évolutions de tarifs... Il a entièrement modifié le régime comptable de ces sociétés, en supprimant le mécanisme des amortissements différés, et le régime fiscal en soumettant les péages autoroutiers à la taxe sur la valeur ajoutée, selon des modalités pour le moment très défavorables aux sociétés d'autoroutes. Il est dès lors possible de constater qu'une ouverture du capital d'ASF interviendrait au plus mauvais moment si le contrat de plan, le cadre comptable et le régime fiscal de la société n'étaient pas clarifiés au plus tôt.

Surtout, les ressources tirées de l'ouverture du capital d'ASF, qui abonderont le compte spécial des privatisations, devraient en toute logique servir à des dotations en capital , ce qui n'est pas l'objectif principal du gouvernement, qui entend surtout respecter formellement le montant annoncé de crédits pour le fonds de réserve des retraites en 2002, soit 2,48 milliards d'euros.

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