CHAPITRE III :
DES
AFFECTATIONS DE RECETTES
ARTICLE 17
Les
dérogations autorisées au principe de non-affectation des
recettes
Commentaire : le présent article prévoit les dérogations autorisées au principe de non-affectation des recettes.
En première lecture, le Sénat a souhaité rassembler à l'article 17 les principes budgétaires d'unité et d'universalité, la mention et la définition des prélèvements sur recettes et l'énoncé des dérogations apportées au principe de non affectation des recettes à des dépenses.
I. LES MODIFICATIONS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a, en deuxième lecture, déplacé ces dispositions à l'article 5, ne maintenant au présent article que le dernier alinéa relatif aux affectations de recettes et y apportant une modification purement rédactionnelle.
II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur a commenté à l'article 5 les modifications de fond apportées à cet article. Il ne vous proposera pas de revenir sur les déplacements opérés par l'Assemblée nationale.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 18
Les
procédures de fonds de concours et de rétablissement de
crédit
Commentaire : le présent article tend à définir les procédures particulières permettant de déroger, au sein du budget général, au principe de non-affectation des recettes.
Cet article a fait l'objet d'intenses discussions centrées sur la question de la budgétisation des fonds de concours.
I. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE :
Le texte adopté par l'Assemblée nationale comporte des modifications du II et du II bis de l'article.
S'agissant du II, qui concerne les fonds de concours, le texte adopté par le Sénat prévoyait que les fonds de concours soient évalués, en recettes et en crédits, dès le projet de loi de finances de l'année.
Toutefois, afin de tenir compte du caractère aléatoire de ces recettes, votre Haute Assemblée avait conditionné la consommation des crédits ainsi ouverts au rattachement effectif de la recette correspondante en exécution.
Le régime adopté par l'Assemblée nationale assure la budgétisation initiale des fonds de concours par une voie différente. Les recettes et les crédits de fonds de concours seront bien évalués en loi de finances initiale. Mais le mécanisme, en subordonnant la consommation par les services, emprunte la voie d'un rattachement formel en exécution en recettes, comme dans le texte du Sénat, mais aussi en crédits.
S'agissant du II bis , la modification adoptée par l'Assemblée nationale, de nature rédactionnelle, précise certains aspects de la procédure, introduite par le Sénat, des attributions de produits.
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur se félicite des précisions apportées au II bis du présent article.
S'agissant de la question des fonds de concours dont l'absence d'une obligation d'évaluation fine en loi de finances initiale aurait conduit à sanctuariser une atteinte particulièrement grave au principe de sincérité budgétaire, votre rapporteur se félicite que l'Assemblée nationale ait relayé l'insistance du Sénat.
Il tient à remercier, pour ses appréciations, le rapporteur de l'Assemblée nationale, Didier Migaud, qui a su rappeler que les recettes de fonds de concours, ne sont pas plus aléatoires que les recettes fiscales et que les dépenses ouvertes à ce titre ne devraient pas échapper à l'autorisation parlementaire.
Il observe que désormais, comme le Sénat l'avait souhaité, les fonds de concours seront, en recettes comme en charges, évalués en loi de finances initiale et ce, à la fois dans le plafond des charges fixé en première partie des lois de finances, et dans le détail des crédits des différents programmes.
Il reste toutefois une bizarrerie dans le mécanisme : celle qui consiste à prévoir que des crédits supplémentaires, déjà déterminées en loi de finances, même si c'est à travers les plafonds de crédits de la première partie, pourront être ouverts lorsque des recettes, déjà évaluées en loi de finances, auront été portées effectivement au budget de l'Etat.
Cependant, votre rapporteur veut privilégier une interprétation utile de cet article. Il considère que les rattachements en gestion dont il s'agit sont l'expression d'un mécanisme destiné à éviter une consommation anticipée des crédits par les gestionnaires et non une manière de vider de son sens et de sa portée l'obligation désormais incontestable d'évaluation, en recettes comme en dépenses, des fonds de concours par la loi de finances initiale.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 18 bis
Les budgets
annexes
Commentaire : inséré à l'initiative de votre commission, le présent article définit les règles applicables aux budgets annexes.
I. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale ayant accepté le maintien de la catégorie des budgets annexes comme unité particulière d'affectation de recettes et d'identification de dépenses a apporté au texte transmis par le Sénat les quelques précisions complémentaires suivantes :
- la création d'un budget annexe et l'affectation d'une recette à un budget annexe ne peuvent résulter que d'une disposition de loi de finances ;
- les activités industrielles et commerciales retracées sur les budgets annexes sont exercées à titre principal par les services de l'Etat qui gèrent de tels budgets ;
- de ce fait, les crédits de personnel des budgets annexes sont assortis de plafonds d'autorisations d'emplois, qui sont spécialisés par budget annexe ;
- la présentation des budgets annexes s'effectue selon les normes du plan comptable général, par dérogation à la règle posée à l'article 7 selon laquelle les crédits sont présentés par titres.
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur souscrit aux précisions adoptées par l'Assemblée nationale même si certaines d'entre elles lui paraissent d'une utilité relative. Il en est ainsi de la précision selon laquelle la création d'un budget annexe ne peut résulter que d'une disposition de loi de finances, mention qui ne s'imposait pas puisque chaque budget annexe constituant une mission, cette disposition figure déjà à l'article 7 de la présente proposition de loi organique.
Votre rapporteur souhaite apporter deux précisions afin de lever quelques doutes.
En premier lieu, il n'est pas favorable à ce que l'initiative parlementaire puisse proposer d'affecter une recette à un budget annexe. Cependant, comme l'utilité pratique d'une telle initiative serait nulle et comme elle n'est pas susceptible de déboucher sur une délégation de gestion à l'exécutif excessive, comme ce pourrait être le cas si une telle mesure était prévue dans le cadre des comptes d'affectation spéciale du fait des facultés de majoration administrative de crédits prévues pour ces comptes, votre rapporteur ne vous proposera pas de revenir au texte du Sénat. Il souligne toutefois que l'article 40 de la Constitution serait opposable à tout amendement d'initiative parlementaire qui tendrait à accroître une subvention versée par le budget général à un budget annexe.
En second lieu, votre rapporteur souligne que la référence aux normes du plan comptable général ne doit pas être considérée comme impliquant l'application de ces normes aux prévisions et à l'exécution des opérations des budgets annexes. Leur vocation est de ne s'appliquer qu'à la présentation en sections distinctes des opérations des budgets annexes, qui restent prévues selon la comptabilité de caisse.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 19
Les
catégories de comptes annexes
Commentaire : le présent article tend à définir les catégories de comptes annexes prévus à l'article 17, ainsi que les liens qu'ils entretiennent avec les lois de finances.
I. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le présent article traduit la défaveur qu'ont inspirée à l'Assemblée nationale les comptes spéciaux du Trésor.
L'Assemblée nationale n'a apporté qu'une modification à cet article tendant à préserver le droit d'initiative des parlementaires en matière d'affectation de recettes à un compte spécial.
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
La solution adoptée par l'Assemblée nationale qui consiste à ouvrir à l'initiative parlementaire la faculté de procéder à des affectations de recettes était apparue discutable à votre rapporteur. Il avait relevé que l'article 40 de la Constitution faisant obstacle à l'instauration d'une charge nouvelle, cette faculté ne déboucherait que sur la constitution de ressources dont le gouvernement serait libre de régler l'usage, en optant soit pour l'ouverture de crédits, soit pour une amélioration du solde budgétaire.
Il avait souligné l'intérêt pratique limité de cette faculté, les délégations excessives qu'elle offrirait à l'exécutif et sa compatibilité douteuse avec l'article 39 de la Constitution.
Il relève que le gouvernement a émis sur ce point le seul avis défavorable qu'il ait prononcé lors de la deuxième lecture de ce texte devant l'Assemblée nationale.
Dans ces conditions, pesant les arguments du Sénat et la préoccupation émanant de l'Assemblée nationale, votre commission s'en remet à la sagesse du Sénat pour décider s'il faut adopter le texte transmis par l'Assemblée nationale ou rétablir le texte du Sénat, inchangé en deuxième lecture devant l'Assemblée nationale, excepté sur ce point.
Décision de la commission : votre commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur cet article.
ARTICLE 20
Les
règles générales applicables aux comptes annexes
Commentaire : le présent article tend à préciser certaines règles générales applicables aux comptes annexes dans leur ensemble ou aux seuls comptes annexes dotés de crédits.
I. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a apporté quelques compléments minimes à cet article pour :
- interdire, sans dérogation possible, même par l'intermédiaire d'une disposition de loi de finances, d'imputer directement sur un compte spécial des dépenses de personnel ;
- et mieux marquer la distinction entre les règles applicables à l'ensemble des comptes spéciaux et celles applicables aux comptes spéciaux dotés de crédits.
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur se range aux modifications adoptées par l'Assemblée nationale. Il observe que dans l'hypothèse où des programmes imputés sur des comptes spéciaux mobiliseraient des crédits de personnel, il conviendrait qu'une information soit, sur ce point, apportée dans les rapports de performances desdits programmes.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 20 bis
Les
règles particulières applicables aux comptes d'affectation
spéciale
Commentaire : le présent article définit les règles particulières applicables aux comptes d'affectation spéciale.
I. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a introduit quelques modifications substantielles au régime des comptes d'affectation spéciale.
Elle a d'abord souhaité préciser que les recettes inscrites sur un compte d'affectation spéciale devraient entretenir « par nature » une « relation directe » avec les dépenses imputées sur le compte.
Elle a ensuite voulu encadrer les versements du budget général vers les comptes d'affectation spéciale.
Enfin, elle a préféré substituer une information préalable des commissions des finances de chaque assemblée à l' avis préalable exigé d'elles dans le texte adopté par le Sénat, dans le cas où le ministre chargé des finances, constatant des recettes supérieures aux prévisions des lois de finances, envisage d'ouvrir des crédits supplémentaires sur un compte d'affectation spéciale.
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
A. L'ÉTABLISSEMENT D'UNE RELATION DIRECTE ENTRE LES RECETTES D'UN COMPTE ET SES DÉPENSES EST SUSCEPTIBLE D'ENGENDRER DES DIFFICULTÉS INUTILES
Votre rapporteur a bien conscience des abus auxquels les comptes d'affectation spéciale peuvent donner lieu. Il avait ainsi recherché les moyens d'en limiter l'occurrence par un encadrement du recours à cette formule de budgétisation, fondé sur sa mise sous conditions.
Il avait exploré les possibilités de resserrer le lien, assez lâche dans le texte de l'ordonnance organique, entre les recettes et les dépenses de ces comptes en énonçant une règle visant à établir une sorte de correspondance naturelle entre les recettes et les dépenses de chaque compte d'affectation spéciale.
A l'examen, une telle démarche, certainement valable dans un grand nombre d'hypothèses, lui avait paru, si elle avait été généralisée, déboucher sur des exclusions peu souhaitables. Votre rapporteur avait illustré cette conclusion en remarquant qu'il n'était pas certain que les opérations résultant de la gestion des participations de l'Etat auraient pu, si cette règle avait été posée, être toujours retracées dans un compte d'affectation spéciale alors même que ce rattachement, voulu de droit par l'Assemblée nationale, apparaît en effet souhaitable quelles que soient les modalités de financement des charges correspondantes.
Le texte de l'Assemblée nationale suppose réglées ces difficultés. Cependant après l'énoncé d'une condition de relation entre les recettes et les dépenses inscrites à un compte d'affectation spéciale, elle y déroge tout aussitôt en admettant que le budget général puisse, certes sous conditions, abonder les recettes de tels comptes.
Votre rapporteur considère que cette dérogation, utile d'ailleurs pourrait ne pas suffire. Il se demande par exemple en quoi le produit des cessions des licences UMTS entretient par « nature » une relation « directe » avec les charges de pensions ... sinon par le biais de leur rattachement au compte d'affectation spéciale concerné.
Aussi, votre rapporteur, qui partage l'intention de l'Assemblée nationale, souhaiterait reporter à l'examen rigoureux des dispositions des lois de finances le soin d'appliquer un principe auquel son énoncé dans la loi organique pouvait conférer un caractère excessivement rigoriste en pratique.
B. L'ENCADREMENT DES VERSEMENTS DU BUDGET GÉNÉRAL AUX COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE POURRAIT POSER DES PROBLÈMES
Après avoir limité à 10 % des crédits initiaux de chaque compte le montant d'une éventuelle subvention du budget général versée en recettes des comptes d'affectation spéciale, l'Assemblée nationale a écarté cette règle pour deux comptes particuliers : celui des participations de l'Etat et celui des pensions.
Là également, votre rapporteur redoute que les règles organiques puissent se révéler trop strictes. S'il comprend l'intention de l'Assemblée nationale, il considère qu'il appartient au Parlement d'en assurer la traduction dans les lois de finances successives.
C. LA SUBSTITUTION D'UNE INFORMATION À UN AVIS PRÉALABLE DES COMMISSIONS DES FINANCES EN CAS D'ARRÊTÉ DE MAJORATION DES CRÉDITS DE COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE
Cette mesure permettra d'éclairer pleinement le Parlement sur des majorations de crédits qui, dans leur détail, peuvent être de faible ampleur, mais aussi, cumulées, atteindre des montants considérables.
III. LES RECOMMANDATIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur vous recommandera d'adopter le présent article sous réserve de deux modifications.
La première est destinée à ne pas conditionner dans la loi organique l'affectation d'une recette au constat d'une relation directe entre cette recette et les dépenses d'un compte. Elle veut préserver l'avenir.
La seconde est destinée à prévoir que les lois de finances pourront déroger au plafond retenu pour limiter les versements du budget général à un compte d'affectation spéciale.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
ARTICLE 21 bis
Les
règles applicables aux comptes de commerce
Commentaire : le présent article définit les règles applicables aux comptes de commerce.
I. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a adopté deux amendements à cet article.
Le premier amendement vise à substituer le concept de « découvert » à celui de « déficit de fin d'année » comme limite du solde de ces comptes.
Le second amendement vise à préciser les règles posées par le Sénat pour encadrer les conditions dans lesquelles une loi de finances règlera le détail de l'organisation et du fonctionnement du compte de gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat.
Ainsi, il est prévu que chaque section de ce compte sera dotée d'une autorisation de découvert et que les lois de finances devront déterminer le caractère limitatif ou évaluatif de chacune de ces autorisations de découvert.
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur se félicite d'abord très vivement de ce que l'Assemblée nationale ait adhéré au principe d'un regroupement dans un compte unique de l'ensemble des opérations de charges et de recettes résultant des instruments de dette et de trésorerie de l'Etat.
Il considère ensuite qu'un tel regroupement ne doit pas être synonyme de confusion. C'est la raison pour laquelle votre Haute Assemblée avait souhaité que soit clairement distinguées les opérations de « gestion active » de la dette et de la trésorerie de l'Etat. Ce souhait perdure et, si le texte adopté par l'Assemblée nationale garantit moins que celui du Sénat sa traduction concrète, elle ne l'empêche pas. C'est heureux.
Enfin, votre rapporteur n'est pas insensible à l'argumentaire au terme duquel l'Assemblée nationale a souhaité revenir à la notion consacrée par l'ordonnance de 1959 de « découvert » en lieu et place de « l'autorisation de déficit de fin d'année » même si ce choix peut appeler des amodiations particulières pour le « compte de la dette ».
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 23
Les comptes
d'opérations monétaires
Commentaire : le présent article tend à maintenir dans le nouveau texte organique les comptes d'opérations monétaires.
I. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale a, dans des conditions fort peu satisfaisantes, transmis un texte substituant le terme « découvert » au terme « déficit de fin d'année » qu'avait privilégié le Sénat alors qu'aucun amendement formel n'a été adopté en ce sens .
II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur s'étonne de la substance du texte transmis. Néanmoins, il prend acte de la modification souhaitée par l'Assemblée nationale.
Il observe que, pour certaines opérations de change notamment, il aurait sans doute été utile de s'interroger sur l'insertion d'un mécanisme analogue à celui retenu pour le compte de la dette et de la trésorerie de l'Etat, prévoyant la faculté pour la loi de finances de fixer un caractère limitatif ou évaluatif au découvert de chaque compte d'opérations monétaires.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.