Art.
64 octies (nouveau)
(art. L. 124-2-3 et L. 241-6-2 du code du
travail)
Procédure de licenciement d'un médecin du travail
Objet : Cet article a pour objet d'interdire le recours au travail temporaire pour remplacer un médecin du travail et d'inscrire au niveau de la loi les règles applicables en matière de licenciement d'un médecin du travail.
I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture
Cet article a été introduit par l'Assemblée nationale en deuxième lecture par adoption d'un amendement du Gouvernement.
Financés par les employeurs dans le cadre d'une entreprise ou d'un service interentreprise, les médecins du travail ont un rôle exclusivement préventif, qui est d'éviter toute altération de la santé des travailleurs, notamment en surveillant les conditions d'hygiène du travail, les risques de contagion et l'état de santé des salariés (art. L. 241-2 à L. 241-3 du code du travail).
Actuellement, les règles applicables en matière de nomination et de licenciement des médecins du travail relèvent exclusivement de la partie réglementaire du code du travail : le médecin du travail est lié à l'entreprise par un contrat de travail conclu dans les conditions prévues par le code de déontologie médicale (art. R. 241-30 ) ; la nomination, comme le licenciement, d'un médecin du travail ne peuvent intervenir qu'avec l'accord du comité d'entreprise, du comité d'établissement, du comité interentreprises ou de la commission de contrôle du service interentreprises (art. R. 241-31) .
Cet article comprend deux paragraphes.
Le I interdit de conclure un contrat de travail temporaire pour remplacer un médecin du travail .
Si le médecin du travail a vocation à rester durablement dans l'entreprise, il reste que certaines d'entre elles ont déjà été confrontées à des situations d'absence prévisible du médecin du travail (congé maladie, congé maternité) ; dans ce cas, le code du travail n'interdisait pas à ce jour de recourir à un remplacement dans le cadre d'une mission de travail temporaire.
On rappellera que les cas d'interdiction du remplacement (art. L. 124-2-3) sont aujourd'hui limités à deux hypothèses : le remplacement du salarié suspendu par suite d'une grève et l'exécution de travaux particulièrement dangereux.
En cas d'absence temporaire, l'entreprise pourra recourir à un recrutement sous contrat à durée déterminée (CDD). Cette procédure renforce les garanties d'indépendance du médecin du travail puisque ledit contrat, contrairement au contrat de travail temporaire, devra impérativement être soumis à l'accord du comité d'entreprise ou de la commission de contrôle.
Le II reprend en fait un dispositif relatif aux modalités de licenciement du médecin du travail , qui est déjà codifié à l'article R. 241-31 du code du travail, en lui apportant deux modifications : il instaure un mécanisme d'autorisation administrative du licenciement par l'inspecteur du travail et il envisage le cas d'une mise à pied immédiate pour faute grave.
Actuellement, le dispositif de l'article R. 241-31 précité est le suivant :
Le licenciement du médecin du travail est soumis à l'accord 37 ( * ) du comité d'entreprise, du comité d'établissement, du comité interentreprises de la commission de contrôle du service interentreprises ( alinéa premier ) ou du conseil d'administration des services interentreprises administrés paritairement ( deuxième alinéa ).
Ce n'est qu'à défaut d'accord, que le licenciement est subordonné à l'avis conforme (c'est-à-dire en fait à l'autorisation) de l'inspection du travail, après avis du médecin inspecteur régional du travail.
Le schéma proposé dans cet article est sensiblement différent.
L'avis du comité d'entreprise ou de l'instance compétente est toujours requis ; mais que celui-ci ait émis un avis favorable ou défavorable au licenciement, la procédure devra, en tout état de cause, être autorisée par l'inspecteur du travail, après avis du médecin inspecteur-régional.
Cet article rétablit donc un régime d'autorisation administrative du licenciement pour le médecin du travail.
Le seul élément de souplesse en faveur de l'entreprise est l'instauration d'une procédure de mise à pied immédiate pour faute grave qui n'existe pas dans les textes aujourd'hui ; il est prévu que cette procédure est annulée avec effet rétroactif en cas de décision de refus de l'inspecteur du travail d'autoriser le licenciement.
Enfin, cet article prévoit une disposition protectrice nouvelle pour les médecins du travail. En cas de recours hiérarchique ou contentieux conduisant à invalider le licenciement, le médecin du travail bénéficie d'un droit à réintégration dans l'entreprise dans son emploi ou un emploi équivalent au même titre qu'un salarié protégé ( art. L. 425-3 du code du travail ).
II - La position de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter deux amendements à cet article :
Un premier amendement a pour objet de maintenir le dispositif actuellement en vigueur aux termes duquel l'intervention de l'inspecteur du travail, pour autoriser le licenciement d'un médecin du travail, n'est requise que si le comité d'entreprise, le comité d'établissement, la commission de contrôle ou le conseil d'administration compétent a exprimé son désaccord sur les motifs du licenciement.
Cet amendement a pour objet de redonner une valeur à l'avis des instances représentatives du personnel.
En effet l'article 64 octies tel qu'adopté par l'Assemblée nationale peut avoir des conséquences négatives : dès lors que l'inspecteur du travail autorise le licenciement, quel que soit l'avis de l'instance consultative, les représentants du personnel sont, dans les faits, dépossédés de leur pouvoir de consultation, puisque celui-ci n'a aucune conséquence pratique. Sachant que l'inspecteur du travail sera toujours consulté et dans l'ignorance de la décision finale, les comités d'entreprise pourraient même trouver logique d'émettre systématiquement un avis négatif.
Le second amendement est un amendement de coordination, par rapport à l'amendement précédent, visant à préciser que l'autorisation de l'inspecteur du travail est toujours requise lorsque le licenciement d'un médecin du travail est assorti d'une mesure de mise à pied immédiate.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.
* 37 La décision est prise à bulletins secrets et le médecin du travail peut, au préalable, présenter ses observations.