4. Perspectives
Dans les conditions actuelles de chasse, 6 000 tonnes de plomb sont, chaque année, déversées dans la nature. La toxicité du plomb dans les milieux humides est avérée. Curieusement, la convention sur la protection de certaines espèces d'oiseaux d'eau, signée en 1996, n'a toujours pas été ratifiée, et cette question n'a été abordée à aucun moment au cours des récents débats sur la chasse, de crainte sans doute qu'elle apparaisse comme une nouvelle attaque à l'encontre des chasseurs. Mais, dans les milieux internationaux, la réputation des chasseurs français laisse à désirer.
La France sera-t-elle le dernier pays d'Europe à ratifier cette convention ? L'Office déplore ce retard.
Quand le calme sera revenu, la question des munitions devra être revue. Il faut une évolution de la chasse si l'on veut -et l'on veut- qu'elle continue. La plupart des utilisateurs du plomb se mobilisent pour limiter les risques d'exposition (essence) ou recycler les résidus (batteries). La chasse, même si elle n'est qu'un élément mineur dans cet ensemble, ne peut rester à l'écart de ce mouvement.
Cette substitution des cartouches de plomb par des cartouches à grenaille non toxiques est vivement souhaitable mais doit cependant être préparée par une double action.
Tout d'abord, la substitution doit être accompagnée d'un programme d'information adapté. S'il est vrai que les chasseurs contribuent à l'entretien de la faune et de la flore, les tirs de chasse ont, du seul point de vue environnemental, quelques inconvénients. Ces inconvénients peuvent être maîtrisés. La substitution des cartouches à plomb par des cartouches non toxiques doit être progressive afin de permettre le cas échéant de changer d'armes (le changement d'armes n'est pas impératif mais les conditions de tir sont meilleures avec un fusil adapté, à tube étroit). Elle doit s'accompagner d'une information expliquant les raisons de changement.
On peut aussi souligner qu'en dehors des plombs de chasse, les rejets de cartouche concernent aussi les douilles en laiton, encore trop souvent laissées à terre après les tirs. Les 250 millions de cartouches générent 1.000 tonnes de rebuts de laiton. Les actions de sensibilisation des chasseurs au ramassage et à la récupération des anciennes cartouches doivent être encouragées mais restent d'efficacité limitée.
Un système de consigne (rapporter les vieilles cartouches avant d'en acheter de nouvelles) pourrait être un relais utile de l'action pédagogique.
Cette substitution doit également être préparée par une action sur le gibier lui-même (action cynégétique par le biais d'un plan de repeuplement). L'expérience américaine peut être mise à profit. La baisse rapide des taux de perte est probablement liée à l'abondance du gibier. En apparence, les deux indicateurs sont inversement corrélés : moins il y a de gibier, moins il y a de tirs. Mais il est une règle non écrite que tous les chasseurs connaissent : moins il y a de gibier et plus on blesse, car on tire de plus loin, et la probabilité de toucher sans tuer est alors beaucoup plus grande. Ainsi, contrairement à l'idée courante, quand le gibier est abondant, le tir est plus responsable et donc moins fréquent. Le chasseur, quasi certain de ne pas rentrer bredouille, tire à bon escient, et dans de meilleures conditions. C'est ce qui s'est probablement passé aux États-Unis dans l'étude évoquée.