N° 92
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001
Annexe au procès verbal de la séance du 23 novembre 2000. |
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M. Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES (Deuxième partie de la loi de finances) ANNEXE N° 10 CULTURE ET COMMUNICATION : PRESSE Rapporteur spécial : M. Claude BELOT |
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Alain Lambert,
président
; Jacques Oudin, Claude Belot,
Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels,
André Vallet,
vice-présidents
; Jacques-Richard
Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Philippe Marini,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Denis Badré, René
Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger
Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet,
Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre
Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain
Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier,
Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques
Pelletier,
Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René
Trégouët.
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570 .
Sénat : 91 (2000-2001).
Lois de finances. |
PRINCIPALES OBSERVATIONS
La presse se porte plutôt bien. Elle semble avoir enrayé le déclin de son lectorat comme le souligne le rapport de Diffusion contrôle : " L'ensemble des chiffres de Diffusion contrôle montre la remarquable vitalité de ce secteur et surtout le maintien de son extraordinaire diversité, avec une certitude : il n'y a pas de véritable usure structurelle de la presse ".
L'Observatoire statistique de la publicité de la direction du développement des médias - la nouvelle appellation du Service juridique et technique de l'information et de la publicité - a publié un compte provisoire pour l'année 1999, qui témoigne de ce que la presse a bien résisté et a donc profité de la forte expansion du marché publicitaire comme en témoigne le tableau ci-dessous.
Ce constat optimiste ne doit pas laisser croire qu'il n'y a pas de problèmes et que la presse écrite ne doit pas, encouragée par l'État - ou non découragée par lui -, s'adapter à son environnement économique .
L'actualité témoigne de la restructuration des titres qu'il s'agisse des régions du nord - avec Nord Eclair et la Voix du Nord - ou de l'Est - avec l'Est républicain et la Liberté de l'Est. Dans la presse magazine aussi, les concentrations s'accélèrent : les journaux du groupe Bonnier se rapprochent d'Hachette, Havas prend le contrôle de mieux vivre et de l'étudiant, tandis que les éditions Taillandier (Historia) passent sous le contrôle du Point.
M. Mario Monti, commissaire européen en charge de la concurrence s'intéresse aux aides à la presse française, tandis que, le 26 mai dernier, Mme Viviane Reding, commissaire européen à l'éducation et la culture, a déclaré : « Il est évident que la presse, activité économique, est soumise aux règles de la concurrence, notamment en ce qui concerne la distribution .»
Le Premier ministre a rappelé " que l'économie de la presse ne peut-être traitée seulement à l'aulne des règles de concurrence et commerciale s'il faut reconnaître que l'attitude soupçonneuse de Bruxelles nous oblige à attentifs et rigoureux dans l'attribution de ces aides . "
La conviction de votre rapporteur spécial est qu'il ne faut pas se faire trop d'illusion sur la capacité de notre pays à cultiver son exception française dans un monde rendu de plus en plus concurrentiel par les nouvelles technologies.
A. LES NOUVELLES FRONTIÈRES TECHNOLOGIQUES DE LA PRESSE
Face au défi des nouvelles technologies qui révolutionnent les techniques de fabrication mais aussi leur environnement concurrentiel avec Internet, la presse entre de plein pied dans l'ère du multimédia, au point de faire évoluer son attitude face aux médias audiovisuels.
Constatant le recul régulier de son lectorat dans les grandes villes, notamment auprès des jeunes lecteurs, la quasi-disparition de la radio locale d'information au profit des réseaux musicaux nationaux, ainsi que le fait que l'information locale se réduit bien souvent aux décrochages locaux, la presse quotidienne régionale, PQR, cantonnée actuellement à l'édition « papier », considère majoritairement que sa survie passe par l'acquisition d'un savoir-faire dans le domaine de l'image et du son .
C'est cet objectif consistant à constituer des groupes multimédias, qui l'ont ainsi amené à vouloir se développer dans les télévisions locales.
1. L'adaptation au multimédia et à Internet
La presse a dans l'ensemble compris que le multimédia constituait une chance pour elle de mettre en valeur ses multiples savoir-faire, notamment en matière d'information de proximité.
Confronté au problème de la rentabilité de ses initiatives, la presse a intensifié une forme de coopération.
L'expérience de couplage publicitaire connue aujourd'hui sous l'appellation PQR 66, a été étendue à Internet, le syndicat de la presse quotidienne régionale ayant formé au début de l'année 1998 le GIE Web 66, constitué avec Real Media Europe, afin de développer le marché publicitaire sur Internet. Ce groupement a vocation à commercialiser de l'espace publicitaire sur Internet, dont le prix sera fonction du nombre de pages effectivement vues. Il regroupe 18 titres (dont La Voix du Nord, Le Parisien, La Dépêche et Sud-Ouest) possédant au total une trentaine de sites sur Internet.
L'objectif du groupement est d'offrir aux annonceurs sur Internet une plate-forme nationale capable de valoriser des audiences régionales. Il permet à ses membres de créer une seule régie publicitaire avec une tarification unifiée et des bilans de campagne publicitaire centralisés.
La presse hebdomadaire régionale s'est également dotée d'un site Internet et d'un outil publicitaire commun qui doit permettre à un annonceur de publier ses campagnes nationales dans les 215 titres concernés (régie contrôlée à 51 % par les éditeurs et à 49 % par Havas régie).
Il peut également être mentionné une fédération de l'offre de contenus par certains groupes de presse (exemple du site Internet du groupe Sud-Ouest).
On note enfin dans le cadre du Fonds de modernisation, chaque famille de presse a déposé un projet collectif dont les investissements sont subventionnés à hauteur de 50 %. La presse quotidienne nationale regroupe 4 titres (Le Monde, Le Parisien, Libération, Le Figaro) pour l'aménagement de distributeurs automatiques de journaux dans le métro et obtient une aide de 5 MF.
La presse quotidienne départementale a présenté un projet de gestion des actifs numériques et bénéficie de 780 000 francs.
La presse quotidienne régionale a déposé 3 dossiers collectifs concernant la gestion des petites annonces, la collecte publicitaires et l'étude du lectorat pour une aide globale de 3,6 MF.
Enfin, les agences regroupées dans un projet KIOSK-Agence (création d'un site Internet commun aux 13 agences "pionnières") bénéficient d'une subvention de 172 000 F.
On note que l'enquête de presse devrait permettre à partir de 2000 d'estimer les recettes de la presse issues d'Internet en les distinguant de celles provenant des services minitel.
2. Des initiatives dans le domaine de la télévision de proximité et des médias
Au titre des initiatives de regroupement de la PQR, il convient également de mentionner la création en 1995 du GIE "France Images Régions", réseau des sociétés de production de la PQR regroupant dix titres. Celui-ci collabore notamment avec TF1 et LCI, ainsi que pour les décrochages locaux de M6.
Mais, l'essentiel du changement s'est concrétisé dans le domaine de la télévision où la presse, en l'occurrence la PQR a manifesté clairement son intention de prendre l'initiative.
Ainsi, a-t-elle créé au premier semestre 1999 un GIE de réflexion, Télévision Presse Région (TPR). Celui-ci s'est exprimé à l'occasion de la consultation publique lancée par le gouvernement sur la télévision numérique terrestre. Cette consultation a été effectuée de juin à la fin septembre 1999 sur quatre thèmes: la place du secteur public audiovisuel dans la diffusion numérique terrestre ; l'impact de celle-ci sur l'industrie des programmes ; les conditions du meilleur équilibre possible entre câble, satellite et hertzien terrestre et la compatibilité de ce développement technologique avec la création de télévisions locales.
La Presse Quotidienne Régionale réclame un statut spécifique dans l'articulation télévision locale/numérique hertzien. La PQR estime indispensable pour son avenir à moyen terme de se situer dans ce développement technologique en accédant aux télévisions locales. Elle précisait que, dès aujourd'hui, un ensemble de télévisions locales en diffusion terrestre analogique est économiquement viable s'il constitue une offre cohérente.
En conséquence, le TPR indiquait qu'il est candidat sur des fréquences analogiques disponibles en s'engageant à terme à une double diffusion analogique et numérique et demandait que la numérisation du réseau fasse l'objet d'un projet de financement adapté.
On peut noter que, pour être économiquement viable avec un budget d'exploitation compris entre 12 et 20 MF (les ressources publicitaires locales ne couvrant que 20 ou 30 % du budget annuel), il faut compter des investissements compris entre 7 et 12 MF et un effectif de 25 à 50 permanents.
Ces moyens permettraient à toute télévision locale de produire deux heures quotidiennes de production propre en première diffusion qui seraient multidiffusées.
La rentabilité de l'ensemble suppose selon le groupement qu'existe simultanément 15 à 20 télévisions de ce type exploitées «prioritairement» par la PQR.
La presse est déjà présente en tant qu'opérateur dans les télévisions locales :
• La société Clermontoise de Télévision (groupe La Montagne) à Clermont-Ferrand
Décision d'autorisation n°2000-247 du 6 juin 2000 (la SCT n'avait pas sollicité d'appel aux candidatures, elle s'était portée candidate en réponse à l'appel du 17 novembre 1998 sur l'agglomération de Clermont-Ferrand). Une convention en vue de son autorisation a été signée le 29 mai 2000 ;
• La société Tv7 Bordeaux (groupe Sud Ouest) à Bordeaux
Décision d'autorisation n°2000-529 du 26 juillet 2000 (la société Tv7 Bordeaux n'avait pas sollicité d'appel aux candidatures, elle s'est portée candidate en réponse à l'appel du 2 février 1999 sur l'agglomération de Bordeaux. La société a été entendue en audition publique le 26 octobre 1999. Une convention en vue de son autorisation a été signée le 26 juillet 2000.