CHAPITRE VI :
POLITIQUE D'INSTALLATION : DES
RÉSULTATS INSUFFISANTS
I. DES INSTALLATIONS AIDÉES EN PERTE DE VITESSE
Malgré une politique volontariste engagée il y a vingt-cinq ans, les installations aidées sont en perte de vitesse tandis que celles non aidées progressent. Il est donc nécessaire de redéfinir les objectifs de la politique d'installation, ce que le ministère ne semble pas encore prêt à faire.
La politique d'installation a permis d'obtenir des résultats certes qualitativement satisfaisants mais encore insuffisants. En effet, si on ne relève que 5,8 % de cessations d'activité dix ans après l'installation, le nombre des installations aidées est à nouveau en perte de vitesse : 12.939 DJA (Dotation aux jeunes agriculteurs) accordées en 1990, 7.245 seulement en 1994 soit une installation pour cinq départs. Pour prendre le contre-pied de cette évolution, la Charte nationale pour l'installation, signée le 6 novembre 1995, se fixait pour objectif une installation pour un départ à l'horizon 2005 / 2010 et une stabilisation du nombre des exploitations agricoles à 550.000 sur la période. L'effet de cette charte a induit une tendance de croissance éphémère (1996 : 8.700 ; 1997 : 9.113 DJA). En effet, en 1998, un nouveau recul des installations aidées (6,7 % soit 8.306 DJA) a été enregistré. Cette tendance s'est prolongée en 1999 (à peine 7.000 DJA).
II. LA NÉCESSAIRE RÉFORME DE LA POLITIQUE D'INSTALLATION
Dans le projet de loi de finances pour 2001 , la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) reste stable par rapport à l'année 2000 à 490 millions de francs, ce qui correspond à 8.000 installations. Ce budget ne reflète donc pas la priorité à l'installation fixée par la loi d'orientation agricole de 1999. Une revalorisation de la DJA aurait pu être envisagée mais il s'agit surtout aujourd'hui de mettre en oeuvre des actions de promotion du métier d'agriculteur afin de susciter plus de vocations, notamment hors du cadre familial.
Le contexte démographique est aujourd'hui moins favorable à l'installation. De 1992 à 1998, les régimes de préretraite mis en oeuvre sur le territoire national ont fortement accéléré les départs d'agriculteurs âgés. Toutefois, jusqu'en 1998, alors que le nombre de retraités et de préretraités a augmenté très rapidement, le nombre d'installés s'est révélé moindre qu'auparavant. Depuis 1996, la baisse du nombre d'exploitants retrouve une tendance naturelle autour de 2 % par an. En conséquence, l'offre totale d'exploitations libérables par des agriculteurs âgés pour des candidats à l'installation commence à se raréfier. La demande élevée des agriculteurs soucieux d'agrandir leur exploitation a donc pour effet d'accélérer l'augmentation du prix du foncier agricole. Cette évolution du prix de la terre exacerbe la concurrence entre installation et agrandissement.
Le phénomène de l'installation ne concerne pas uniquement les agriculteurs bénéficiant d'aides à cet effet. Les installations non aidées sont elles en augmentation.
La baisse du nombre d'installations de jeunes agriculteurs a de graves conséquences en termes d'emplois et d'aménagement rural. S'il apparaît que 75 % des installations aidées se réalisent encore aujourd'hui dans le cadre familial, la reprise d'exploitation d'agriculteurs sans successeur par des jeunes extérieurs à leur famille n'est plus une situation marginale.
L'installation n'intervenant plus uniquement sur les bases du modèle ancestral d'exploitation familiale, il est nécessaire de redéfinir les objectifs de la politique d'installation afin d'élargir le recrutement des jeunes agriculteurs et de favoriser de nouvelles voies d'accès au métier.
Des outils existent mais sont encore insuffisamment exploités . Par exemple, la mise en oeuvre du dispositif des CTE aurait dû permettre d'ouvrir de nouvelles perspectives tant en termes d'installation que de transmission. Mais, comme votre rapporteur spécial l'a déjà souligné, cet outil est encore très largement sous-utilisé.
En outre, des outils fiscaux pourraient être utilisés à bon escient. Ainsi, le récent rapport Marre-Cahuzac relatif à la réforme de la fiscalité agricole et remis au Premier ministre en mars 2000 souligne à quel point l'actuel régime fiscal des transmissions est un réel obstacle à l'installation. Il propose une réforme de la taxation des plus-values.
Des solutions existent, votre rapporteur spécial se désole de ne pas voir le gouvernement les prendre en compte.