C. LA MISE EN PLACE EXPÉRIMENTALE DE CONTRATS DE JURIDICTIONS OU DE CONTRATS DE PROCÉDURES
Tout en
poursuivant les actions déjà entreprises en vue d'une
déconcentration de la gestion au niveau des cours d'appel, notamment
avec la mise en place des services administratifs régionaux (SAR), la
Chancellerie travaille actuellement à l'élaboration de
contrats de juridiction
avec chacune des cours d'appel. Ces contrats ont
pour objet de déterminer les tâches prioritaires et les efforts de
productivité à mener en vue de parvenir à réduire
les délais et à résorber les stocks. Un contrat a
déjà été conclu avec la cour d'appel de Caen ;
il prévoit une résorption des stocks en trois ans. Un autre a
été proposé par la cour d'appel de Bordeaux.
Par ailleurs, dans certaines juridictions, des
contrats de
procédure
sont mis au point avec le Barreau afin d'améliorer
les conditions de la mise en état des dossiers, là encore en vue
de parvenir à une réduction des délais. M. Robert
Badinter a d'ailleurs fait observer que cette pratique avait déjà
été expérimentée entre 1983 et 1985 et avait alors
donné des résultats très positifs.
D. UN EFFORT SIGNIFICATIF DE MAÎTRISE DES FRAIS DE JUSTICE
Au cours
des dernières années, les dépenses de
frais de
justice
, qui ont atteint
1,62 milliard de francs en 1998
, se
sont accrues à un rythme extrêmement rapide, progressant d'environ
8 % par an, soit une centaine de millions de francs de plus chaque
année.
Face à cette augmentation, un ensemble de mesures ont été
récemment prises pour maîtriser l'évolution des frais de
justice.
Ainsi, le
décret n° 99-203 du 18 mars 1999
a
procédé à une refonte globale des dispositions
réglementaires du code de procédure pénale relatives aux
frais de justice criminelle, qui tendait notamment à une meilleure
maîtrise des coûts par le contrôle des conditions dans
lesquelles les tarifications sont élaborées et appliquées,
et par la vérification de la régularité des
dépenses prises en charge. En particulier, le champ de la tarification a
été étendu à de nouvelles catégories de
frais (frais de recherches de documents et de délivrance de copies,
prestations de cryptologie), une tarification spécifique a
été créée pour la garde des véhicules
placés sous main de justice et la procédure de contrôle de
la facturation des expertises non tarifées par le parquet a
été améliorée.
Ces dispositions réglementaires ont fait l'objet d'une circulaire du
5 juillet 1999 adressée aux magistrats et aux fonctionnaires
de justice.
En outre, la
loi n° 99-515 du 3 juin 1999
renforçant l'efficacité de la procédure pénale a
réformé le régime de conservation des objets placés
sous main de justice, ce qui devrait permettre d'obtenir une réduction
de la durée de gardiennage de ces objets et des frais correspondants.
Elle a également facilité l'utilisation de la
télécopie pour les notifications en matière pénale.
D'autre part, en dehors de ces mesures législatives et
réglementaires, des
contrats de gestion
avec les cours d'appel
ont été mis en place depuis 1998, prévoyant l'attribution
d'une enveloppe complémentaire de crédits de fonctionnement au
profit des cours ayant réalisé des économies sur les frais
de justice.
Ces actions en faveur d'une meilleure maîtrise des frais de justice
semblent commencer à porter leurs fruits, puisqu'on a constaté en
1999 une stabilisation des dépenses, ainsi que l'a souligné
Mme Elisabeth Guigou, garde des Sceaux, au cours de son audition
devant votre commission des Lois. Une
économie de 100 millions
de francs
devrait donc être réalisée cette année
par rapport aux crédits votés.
Compte tenu de cette évolution, l'accroissement de 109,2 millions
de francs de la dotation prévue par le projet de loi de finances pour
2000, qui atteint 1,88 milliard de francs, est essentiellement
destiné à financer différentes
mesures nouvelles
,
à savoir :
- l'affiliation au régime général de
sécurité sociale des collaborateurs occasionnels du service
public de la justice
14(
*
)
,
prévue par la loi de financement de la sécurité sociale
pour 1999 (41,03 millions de francs) ;
- le développement des missions confiées aux
délégués du procureur (10 millions de francs) ;
- l'indemnisation des personnes relaxées, acquittées ou
bénéficiant d'un non-lieu, prévue par le projet de loi
relatif à la présomption d'innocence (30 millions de
francs) ;
- enfin, le dépistage de l'usage de stupéfiants dans les
accidents mortels de la circulation, prévu par la loi du
18 juin 1999 relative à la sécurité
routière (19 millions de francs).
Dans le souci de renforcer les moyens d'une maîtrise efficace des frais
de justice, un
amendement présenté par notre collègue
Hubert Haenel
, rapporteur spécial du budget de la justice,
au nom de la commission des Finances
, tend à introduire un
article additionnel après l'article 71 du projet de loi de
finances
afin de prévoir l'obligation, à compter du
1
er
janvier 2000, d'établir dans chaque juridiction
une comptabilité retraçant le détail des dépenses
de frais de justice engagées par dossier d'instruction. Cet amendement a
donc pour objet de mettre en place un outil de suivi des dépenses
engagées pour chaque dossier d'instruction, ce qui permettrait
d'évaluer le coût d'une instruction et de permettre certaines
comparaisons entre affaires de nature similaire.
A titre personnel, votre rapporteur pour avis considère cette
idée intéressante mais se demande si sa mise en oeuvre pratique
ne risque pas de susciter des difficultés. En tout état de cause,
l'application effective d'un tel dispositif dès le
1
er
janvier 2000 lui semble peu réaliste.