N° 94

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME IV

JUSTICE :

SERVICES GÉNÉRAUX


Par Mme Dinah DERYCKE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Bernard Murat, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1805 , 1861 à 1866 et T.A. 370 .

Sénat : 88 et 89 (annexe n° 33 ) (1999-2000).

Lois de finances.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Après avoir procédé à l'audition de Mme Elisabeth Guigou, garde des Sceaux, ministre de la justice, le mardi 23 novembre 1999, la commission des Lois, réunie le mardi  7 décembre 1999 sous la présidence de M. Charles Jolibois, vice-président, a examiné, sur le rapport pour avis de Mme Dinah Derycke, les crédits consacrés aux services généraux du ministère de la justice (administration centrale - services judiciaires - juridictions administratives) inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.

Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a souligné la progression marquée des crédits du ministère de la justice, trois fois supérieure à celle de l'ensemble du budget de l'Etat, et l'achèvement de l'exécution de la loi de programme du 6 janvier 1995. Elle a néanmoins précisé que les crédits de paiement destinés aux services judiciaires n'augmentaient globalement que de 0,64 %, en raison d'une diminution de près de 40 % des crédits d'équipement s'expliquant par la prise en compte d'un retard dans la consommation des crédits d'investissement, ce qui ne devait pas dissimuler la progression substantielle (+ 5,15 %) des dépenses ordinaires.

Après avoir relevé l'encombrement persistant des juridictions marquées notamment par l'allongement des délais en appel et par l'accroissement des stocks en instance, Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, a mis l'accent sur les importants efforts de recrutement de magistrats, de fonctionnaires, d'assistants de justice, d'assistants spécialisés et d'emplois jeunes, ainsi que sur les actions menées en faveur de l'amélioration des équipements, de la rationalisation de la gestion des juridictions et de la maîtrise des frais de justice. Elle a toutefois constaté que les nombreuses créations de postes seraient pour une large part absorbées par la mise en oeuvre des nouvelles réformes, relevant que seules 34 créations de postes de magistrats judiciaires sur un total de 212 seraient spécifiquement affectées au renforcement des effectifs en vue de contribuer à la résorption des stocks.

En conclusion, le rapporteur pour avis a proposé de donner un avis favorable à l'adoption des crédits.

Après un échange de vues auquel ont pris part MM. Robert Badinter, Jean-Jacques Hyest, Jacques Peyrat, Charles Jolibois, vice-président et Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, la commission des Lois s'en est remise à la sagesse du Sénat sur l'adoption des crédits consacrés aux services généraux dans le projet de budget du ministère de la justice pour 2000.

Mesdames, Messieurs,

La progression des crédits du ministère de la justice inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000, trois fois supérieure à celle de l'ensemble du budget de l'Etat, traduit la priorité maintenue en faveur du renforcement des moyens des juridictions, dont la situation reste, cette année encore, marquée par des délais de jugement excessifs et un gonflement des stocks en instance.

Comme les années précédentes, votre commission des Lois, particulièrement soucieuse d'une amélioration du fonctionnement de la justice au quotidien, a souhaité analyser l'évolution de ces crédits à la lumière de la réalité des difficultés constatées sur le terrain et en prenant en compte les réformes envisagées, qui ne sauraient être menées à bien sans les moyens correspondants.

Après avoir présenté l'évolution générale des crédits affectés au services généraux du ministère de la justice et rappelé quelques données relatives à l'activité des juridictions, le présent avis s'attachera plus particulièrement aux incidences des efforts de recrutement, ainsi qu'à la poursuite de l'amélioration de l'équipement et de la gestion des juridictions.

Seront en outre évoqués le renforcement des moyens destinés à l'accès au droit, le début de la mise en oeuvre de la réforme de la carte judiciaire et la participation du ministère de la justice à l'élaboration des contrats de plan Etat-régions.

*

Dans le cadre de la préparation de cet avis budgétaire, votre rapporteur pour avis a entendu, comme chaque année, les représentants des principales organisations professionnelles de magistrats et de fonctionnaires de justice 1( * ) .

Elle tient à souligner que deux organisations syndicales de magistrats, après avoir accepté le principe de cette audition, ont finalement décidé de ne pas s'y rendre. L'Union syndicale des magistrats (USM) a motivé cette décision par un rappel au règlement effectué par notre collègue Michel Charasse notamment à la suite des propos tenus à l'encontre des sénateurs par M. Valéry Turcey, président de l'USM, dans les colonnes du journal Les Echos daté du 29 novembre 1999, propos au sujet desquels votre commission des Lois a d'ailleurs décidé, à l'unanimité, de saisir M. le Président du Sénat. Pour sa part, le Syndicat de la magistrature, sans excuses préalables, a fait valoir a posteriori un emploi du temps surchargé.

I. UN BUDGET PRIORITAIRE ET EN NETTE PROGRESSION

Après le vote de la loi de programme en 1995, le budget en forte hausse de 1996, la limitation de cette progression comme de celle de l'ensemble du budget en 1997 et l'augmentation significative des crédits pour 1998 (+ 4,03 %) et pour 1999 (+ 5,59 %), le budget de la justice demeure, cette année encore, une priorité nationale.

En effet, les crédits de paiement pour 2000, qui atteignent un montant total de 27.291,15 millions de francs, enregistrent une hausse d'un milliard de francs, soit une progression de 3,91 % par rapport à 1999, trois fois supérieure à la moyenne des autres budgets civils (+ 1,2 %), les autorisations de programme marquant toutefois une régression de 9,27 %, avec un montant total de 1.571,50 millions de francs.

En outre, la progression des effectifs du ministère de la justice est, avec au total 1.237 créations de postes, la plus importante de tous les ministères.

Cependant, la part du budget de la justice dans le budget général de l'Etat ne s'accroît que lentement, passant de 1,56 % en 1998 à 1,61 % en 1999 et 1,62 % en 2000.

A. UNE PROGRESSION MARQUÉE DES CRÉDITS POUR 2000

Le tableau suivant récapitule l'évolution des crédits des trois agrégats qui font l'objet du présent avis présenté par votre commission des Lois ; l'administration générale, les services judiciaires et les juridictions administratives.

Les crédits consacrés d'une part, aux services pénitentiaires et, d'autre part, aux services de la protection judiciaire de la jeunesse, sont quant à eux examinés dans le cadre de deux autres avis présentés au nom de votre commission des Lois, respectivement par nos collègues Georges Othily et Patrice Gélard.

Evolution des crédits de paiement

 

Dotations 1999

Crédits demandés pour 2000

Evolution

 

Montant

% du total

Montant

% du total

1999-2000 en %

Ensemble du ministère de la justice dont :

26 264,85

(100 %)

27 291,15

(100 %)

+ 3,91

- administration générale

3 594,08

13,68

3 671,77

13,45

+ 2,16

- services judiciaires

11 667,91

44,42

11 742,19

43,03

+ 0,64

- juridictions administratives

810,00

3,08

841,66

3,08

+ 3,91

(en millions de francs)

S'agissant des services judiciaires , qui représentent à eux seuls près de la moitié des crédits du ministère de la justice, la stagnation observée des moyens de paiement (+ 0,64 %) s'explique par une diminution de près de 40 % des crédits d'équipement, qui ne doit pas dissimuler la progression substantielle (+ 5,15 %) des dépenses ordinaires destinées à financer les rémunérations et recrutements, les moyens de fonctionnement, notamment les frais de justice, et les dépenses d'intervention, en particulier l'aide juridique.

La forte diminution des crédits de paiement concernant les dépenses d'équipement des services judiciaires, qui passent de 961,6 millions de francs en 1999 à 585,5 millions de francs en 2000, doit elle-même être relativisée, car elle devrait être pour une large part compensée par d'importants reports de crédits de 1999 sur l'exercice 2000, en raison d'un retard pris dans la consommation des crédits d'équipement sur lequel on reviendra dans la quatrième partie du présent avis. D'autre part, les autorisations de programme allouées aux services judiciaires sont en progression de 19,61 %, passant de 673 à 805 millions de francs.

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