B. UNE ANNÉE MARQUÉE PAR L'ADOPTION DE LA LOI D'ORIENTATION AGRICOLE ET DE LA LOI PORTANT CRÉATION DE LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
1. L'enrichissement du volet social de la loi d'orientation agricole
Même si le Gouvernement n'a pas souhaité que des
objectifs de long terme soient définis par le projet de loi, notamment
en matière de revalorisation des retraites agricoles, la discussion
parlementaire a permis d'enrichir le volet social, d'abord à
l'Assemblée nationale, et ensuite au Sénat.
Votre commission s'était saisie du projet de loi pour avis
2(
*
)
.
Titre
II - Exploitations et personnes -
Chapitre III Statut des conjoints
travaillant dans les exploitations ou les entreprises et des retraités
agricoles non salariés
(en
italiques : les articles introduits à l'initiative du Sénat)
Article 25 - Statut de conjoint collaborateur d'exploitation ou d'entreprise
agricole
Article 26 - Application aux conjoints d'associé d'une exploitation ou
d'une entreprise de cultures marines (Assemblée nationale)
Article 27 - Droit à la retraite forfaitaire pour les conjoints
collaborateurs
Article 28 - Droits à la retraite proportionnelle pour les conjoints
collaborateurs
Article 29 - Cotisations
Article 30 - Attribution gratuite de points de retraite proportionnelle
Article 31 - Niveau minimum des pensions de réversion
Article 32 - Baisse de 50 % à 30 % de l'actif pris en compte pour le
recours sur succession
Article 33 - Allocation de remplacement totale
Article 34 - Nouveau mécanisme de calcul des cotisations des jeunes
installés
Articles 35 et 36 - Droit de créance
Article 37 - Insaisissabilité et incessibilité des
allocations, pensions et rentes des régimes d'assurance vieillesse.
Par ailleurs, deux rapports ont été prévus :
- le premier, à l'article 3, sur les retraites agricoles. Confié
à M. Germinal Peiro, député de la Dordogne, ce
rapport devrait être disponible très prochainement ; il a
d'ores et déjà été remis à M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche, qui en a fait état lors
de la discussion du BAPSA à l'Assemblée nationale ;
- le second, à l'article 141, sur les charges fiscales et sociales des
exploitants agricoles. Ce rapport a été confié à
Mme Béatrice Marre et M. Jérôme Cahuzac,
députés. M. Jérôme Cahuzac est plus
spécialement chargé du volet social.
2. Les interrogations de la couverture maladie universelle
La loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle a des conséquences sur le régime agricole.
a) La question de l'équité
Une cotisation minimale d'assurance maladie est due, quel que soit le revenu de l'agriculteur ou la superficie de l'exploitation.
|
Montant cotisation annuelle |
Exploitations inférieures à 1,5 S.M.I. |
800 SMIC |
Exploitations entre 1,5 et 3,5 SMI |
800 SMIC + majoration modulée |
Exploitations au-delà de 3,5 SMI |
800 SMIC +majoration fixe |
Exploitants bénéficiant du RMI |
200 SMIC |
De plus,
les chefs d'exploitation à titre principal et exerçant une
activité salariée ou non salariée non agricole
bénéficient d'une réduction de 10 % de leurs cotisations
en maladie lorsque celles-ci sont calculées sur l'assiette minimum de
800 SMIC.
Environ 200.000 exploitants agricoles acquittent la cotisation minimale
d'assurance maladie et bénéficient ainsi, pour une charge
mensuelle inférieure à 300 francs, de l'ensemble des prestations.
La conséquence est ainsi la suivante : des personnes
bénéficiant des mêmes revenus, l'une active, l'autre
inactive, seront soumises à des règles distinctes. L'exploitant
agricole devra s'acquitter de la cotisation minimale tandis que l'inactif ne
paiera pas de cotisations et bénéficiera néanmoins d'une
couverture complète, comprise dans " le panier de soins " pris
en charge par la CPAM ou la mutuelle.
Dans sa décision n°99-416 DC du 23 juillet 1999, le Conseil
constitutionnel a considéré qu'il n'y avait pas de remise en
cause du principe d'égalité :
" Considérant, par ailleurs, que le législateur s'est
fixé pour objectif, selon les termes de l'article L. 380-1
précité, d'offrir une couverture de base aux personnes n'ayant "
droit à aucun autre titre aux prestations en nature d'un régime
d'assurance maladie et maternité " ; que le principe
d'égalité ne saurait imposer au législateur, lorsqu'il
s'efforce, comme en l'espèce, de réduire les disparités de
traitement en matière de protection sociale, de remédier
concomitamment à l'ensemble des disparités existantes ; que la
différence de traitement dénoncée par les
requérants entre les nouveaux bénéficiaires de la
couverture maladie universelle et les personnes qui, déjà
assujetties à un régime d'assurance maladie, restent
obligées, à revenu équivalent, de verser des cotisations,
est inhérente aux modalités selon lesquelles s'est
progressivement développée l'assurance maladie en France ainsi
qu'à la diversité corrélative des régimes, que la
loi déférée ne remet pas en cause. "
De plus, à partir du 1er janvier 2000, date d'entrée en vigueur
de la loi portant création de la couverture maladie universelle, le lien
entre versement des cotisations et bénéfice des prestations en
nature des assurances maladie et maternité est rompu.
En conséquence, les dispositions du code rural liant le versement des
prestations au paiement des cotisations ont été
abrogées ; seule demeure la suspension du versement des prestations
en nature de l'assurance maladie,
" lorsqu'elle est le fait de la
mauvaise foi du bénéficiaire "
(art. 6,
paragraphe III, de la loi du 27 juillet 1999).
Les agriculteurs " déchus de droit " pourront être ainsi
réintégrés, lorsque leur bonne foi sera établie. Le
régime de protection sociale agricole comprendra alors les exploitants
s'étant toujours acquittés de leurs cotisations minimales et des
exploitants ne versant plus de telles cotisations depuis, parfois, un certain
nombre d'années.
A tout le moins, une réflexion sur l'avenir des cotisations minimales
devrait être engagée.
b) La question de la gestion des assurés
Les assurés de la couverture maladie universelle sont pris en charge, pour leur couverture de base, par les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM). Néanmoins, pour des raisons de simplicité, le législateur a explicitement prévu que les personnes affiliées au régime de l'assurance personnelle au 1er janvier 2000 par l'intermédiaire des caisses de MSA, puissent rester dans ce régime.
L'article 19, paragraphe II, de la Loi no 99-641 du 27
juillet
1999
portant création d'une couverture maladie universelle
II. -
Les personnes relevant des dispositions de l'article L. 380-1 du code de la
sécurité sociale, affiliées au régime de
l'assurance personnelle à la date d'entrée en vigueur de la
présente loi, dont les prestations d'assurance maladie et
maternité sont servies par un organisme de protection sociale agricole
au titre de sa participation à la gestion de l'assurance personnelle,
continuent de bénéficier du service de ces prestations. Le
service de ces prestations, ainsi que le recouvrement de la cotisation
définie à l'article L. 380-2 du code de la sécurité
sociale si elle est due, sont assurés par cet organisme pour le compte
du régime général dans des conditions définies par
décret en Conseil d'Etat.
En revanche, les personnes qui bénéficieront de la couverture
maladie universelle à compter du 1er janvier 2000, et qui ne
bénéficiaient pas auparavant du régime de l'assurance
personnelle, seront affiliées aux caisses primaires d'assurance maladie.
La logique de cette répartition administrative n'apparaît pas
clairement.
En ce qui concerne la couverture du risque complémentaire, les caisses
de Mutualité sociale se retrouvent dans la même situation que les
caisses primaires d'assurance maladie. Elles sont tenues de prendre en charge
les personnes relevant de la CMU, à la différence des
institutions de prévoyance, des organismes mutualistes et des
sociétés d'assurance, qui peuvent décider de ne pas
prendre en compte ces assurés, moyennant le paiement d'une contribution.
Les caisses de MSA seront remboursées par le fonds de financement de la
protection complémentaire de la couverture universelle du risque
maladie, établissement public créé par l'article 27 de la
loi du 27 juillet 1999. Mais ce remboursement risque fort d'être
tardif ; en conséquence, la charge de trésorerie sur les
caisses de MSA risque d'être bien réelle.
Les décrets de mise en place de la CMU ne sont pas encore publiés
alors que la réforme doit entrer en vigueur au 1
er
janvier
2000, c'est-à-dire dans moins d'un mois.
De même que l'ensemble des acteurs de la CMU, les caisses de MSA sont
dans l'expectative.