C. LA PRÉPARATION DE L'AVENIR
Pour
l'Armée de terre, la situation actuelle peut être qualifiée
d'acceptable mais, à l'évidence, un effort important doit
être consacré à court terme à la préparation
de l'avenir au regard des recommandations du plan prospectif à 30 ans
(PP30).
La diversité des situations possibles et les innovations technologiques
attendues dans les domaines de l'énergie dirigée, des nouveaux
matériaux ou encore la miniaturisation incitent, en effet, à
accroître la part accordée aux études amont et au
développement afin d'anticiper des ruptures capacitaires susceptibles
d'engager la crédibilité des forces terrestres françaises
dans un cadre européen ou international.
La conception des matériels futurs passe par l'expression du besoin
opérationnel en terme " d'objectifs d'état-major " et
de " développement exploratoire " qui consiste à
réaliser et à étudier un dispositif expérimental
démonstratif.
Les principaux équipements futurs faisant actuellement l'objet
d'objectifs d'état-major ou développement exploratoire et pour
lesquels l'Amée de terre estime nécessaire d'engager un
développement, sont les suivants :
•
Le drone tactique Multi-Capteurs Multi-Missions (MCMM)
Le drone MCMM est un objectif d'état-major établi en juin 1999
dont le but est d'optimiser le domaine des drones tactiques en
privilégiant un système unique capable de répondre aux
spécificités de missions aussi diverses que le renseignement et
l'appui, la neutralisation par les feux ou par la guerre électronique.
Prévu pour être mis en oeuvre dans le cadre d'une force
opérationnelle terrestre, le système MCMM répond au besoin
de remplacement des drones actuels, obsolètes à l'horizon 2005,
et vise à donner à une force opérationnelle terrestre
(FOT) de nouvelles capacités de renseignement, d'acquisition et
d'agression.
Aérotransportable, modulable en fonction de la mission prioritaire, il
doit pouvoir s'intégrer dans un élément de réaction
immédiate et être à la fois compatible et
interopérable avec l'ensemble des systèmes similaires nationaux
et internationaux.
•
Le radar de surveillance et d'aide au tir terrestre (RAPSODIE)
Ce radar de courte portée est destiné à agir dans la
profondeur tactique au niveau brigade et force opérationnelle terrestre
(FOT) pour remplir indifféremment des missions de surveillance et d'aide
au tir. Associé à un châssis VBCI ou VAB, il devrait
équiper les forces au sein des régiments d'artillerie, du RBRR
(régiment blindé de recherche et de renseignement) et des EEI
(escadrons d'éclairage et d'investigation). Il doit donc
s'intégrer dans l'ensemble de moyens qui constitue le système
d'acquisition de l'Armée de terre. Il ne s'inscrit pas seulement dans la
logique du remplacement des RASIT (radars d'acquisition et de surveillance dans
les intervalles terrestres) et des RATAC (radars d'acquisition et de tir
d'artillerie de campagne) mais bien comme un nouveau radar détenant des
capacités duales et susceptibles de générer de nouveaux
modes d'action dans les domaines de la surveillance et de l'observation
d'artillerie.
Sa portée intrinsèque est de 40 km. Dans la zone de
responsabilité d'une FOT ou d'un EIAM (état-major
interarmées), il est complémentaire des drones courte
portée et des capteurs humains. Doté d'une capacité tout
temps, il offre la permanence et de très courts délais
d'acquisition. Il détecte et identifie à la fois les cibles fixes
et mobiles. Il procure une capacité de veille et de poursuite
simultanées de pistes multiples restituées sur une cartographie.
•
Le Système de Pose Rapide de Travures (SPRAT)
Etabli en juin 1999, l'objectif d'état-major SPRAT est destiné
à mettre en place un moyen complémentaire des autres
systèmes de franchissement.
Le SPRAT est destiné à fournir un appui direct à la
mobilité tactique des unités engagées dans la zone de
combat.
Seul système d'appui direct, en cohérence avec la manoeuvre du
char Leclerc, le SPRAT apportera aux forces terrestres la capacité de
franchir des coupures et des obstacles d'une largeur inférieure ou
égale à 25 mètres, dans des compartiments de terrain
où combattent les Leclerc.
•
La robotique
Les évolutions technologiques actuelles permettent d'envisager
l'introduction d'éléments robotisés sur le champ de
bataille avec deux objectifs :
- la réduction des risques physiques et psychiques encourus par le
combattant ;
- l'amélioration de l'efficacité opérationnelle des
systèmes d'armes par l'automatisation de certaines tâches.
L'emploi de robots télé-opérés est envisagé
prioritairement pour les opérations de déminage ou de
dépiégeage, de surveillance («alerteurs»), mais
également, par la suite, pour des systèmes plus autonomes dans
les domaines du soutien (logistique). Deux concepts paraissent
particulièrement prometteurs :
le robot de combat en zone urbaine, qui pourra être doté de
différents capteurs dans des missions telles que l'observation, la
surveillance ou l'agression (tir jusqu'à 300 mètres
environ) ;
le robot de reconnaissance aérienne de zone (drone) à moyenne
portée (inférieure à 20 km ). Son développement
s'inscrira dans la filiation des MCMM.
Le démonstrateur SYRANO (système robotisé d'acquisition et
de neutralisation d'objectifs - développement exploratoire lancé
en 1994 et livré aux forces en juillet 99) permettra d'affiner le
concept opérationnel d'emploi des systèmes robotisés.
•
Le missile à fibre optique (ex-POLYPHEME)
Le missile à fibre optique est un système d'arme dont le
développement exploratoire a été initié en 1992,
dans un cadre tripartite (France, Allemagne et Italie).
Ce développement exploratoire a démontré la
possibilité d'utiliser la technologie des missiles guidés par
fibre optique pour des missions d'appui feu (tir réussi en fin de
développement exploratoire contre un véhicule à roues
à une distance de 60 km). Après le succès de cette
première phase expérimentale, les partenaires envisagent de
fabriquer, dans le cadre d'une coopération internationale, un
système d'armes s'appuyant sur la technologie à fibre optique.
Il devra répondre au besoin opérationnel suivant : traiter des
objectifs ponctuels dans la profondeur (distance jusqu'à 60 km) avec des
effets collatéraux réduits et une bonne efficacité
terminale. En outre, il offrira des capacités d'enregistrement
vidéo des attaques et d'observation et, peu encombrant, il sera
aisément projetable. Il apparaît donc comme un outil de gestion
des crises tout à fait intéressant.
Le financement nécessaire à la vérification de la
faisabilité d'un tel système d'arme est assuré sur la
période de la loi de programmation. Cette phase doit permettre de
valider les choix techniques et de préciser les conditions d'emploi. A
l'issue, la décision de participer ou non au développement sera
prise, en fonction des résultats obtenus et des ressources disponibles.
•
Le système Battlefield Identification Friend and Foe
(BIFF).
Les tirs fratricides sont déjà pris en compte par les
différentes armées de l'air dont le milieu d'action est
foncièrement homogène, grâce aux systèmes IFF. Ce
risque doit maintenant être pris en compte par les armées de
terre, dans le combat au sol ou près du sol, malgré les
caractéristiques d'hétérogénéité de
leurs milieux d'action. En effet, cinq facteurs en augmentent la
nécessité :
- l'accroissement de la portée des armes ;
- la brièveté du temps de réaction face à un
agresseur potentiel, dès le plus bas échelon d'utilisation d'un
système d'arme ;
- la généralisation de l'emploi de moyens de vision tout
temps ;
- l'accélération du rythme de la manoeuvre ;
- la généralisation des engagements multinationaux.
Conscientes de ce problème, remis en lumière par la guerre du
Golfe, les armées occidentales cherchent à se doter d'une
capacité d'identification sur le champ de bataille. Le dispositif BIFF
devra répondre à ce besoin.
Ce dispositif d'identification de cibles par question-réponse sera
installé sur les équipements du type char, véhicule
blindé, hélicoptère. Il devra être
interopérable entre les différentes armées occidentales et
compatible avec le système en cours de développement pour les
aéronefs (NATO Identification System - NIS).
•
La protection des véhicules blindés.
Il s'agit de se protéger des agressions du champ de bataille, en
fonction de la progression des menaces, des concepts d'emploi et des missions
des véhicules. Le niveau de protection des blindés est un facteur
très important pour l'obtention d'une supériorité
opérationnelle :
- la menace est plus diffuse et variée ;
- la répartition de la protection doit être plus
homogène ;
- la protection doit aller au-delà des solutions classiques
fondées sur le blindage et doit jouer sur d'autres
éléments (furtivité, contre-mesures), pour permettre une
diminution de masse tout en augmentant la survivabilité ;
- la protection doit avoir une capacité d'adaptation, selon les menaces
et les conditions d'engagement et de modularité (adaptable à
plusieurs véhicules).