III. LA PLACE DE LA RECHERCHE FRANÇAISE DOIT ÊTRE NETTEMENT AFFIRMÉE DANS LE DOMAINE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, ET DANS CELUI DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
A. LES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
L'état de l'utilisation de ce réseau à
l'heure
actuelle dans notre pays a été dressé par le
ministère de l'économie et des finances à la fin du mois
d'octobre dernier, en réponse à une question écrite de
notre collègue Jean-Pierre Raffarin :
Le développement d'Internet et des nouvelles technologies de
l'information et de la communication (NTIC), et plus globalement de la
société de l'information, représente des enjeux
considérables pour notre pays. L'analyse de la situation de la France
par rapport au développement de la société de
l'information ne saurait se réduire au nombre de serveurs Web par
milliers d'habitants ou au nombre d'utilisateurs d'Internet, mais doit prendre
en compte des aspects diversifiés : utilisation des NTIC par les
services publics (enseignement, santé, administrations) et les
entreprises, développement du commerce électronique,
créations de valeur et d'emplois par les entreprises industrielles et de
services du secteur des NTIC en France, etc. En ce qui le concerne, le
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a
décidé de publier un tableau de bord de l'innovation, qui
comporte différents indicateurs qui permettront de mesurer le
développement des NTIC en France : chiffres d'affaires des secteurs
liés aux TIC, création d'entreprises et fonds levés sur le
nouveau marché, nombre d'internautes, etc. Tout en disposant d'atouts
certains, comme la qualité de son tissu industriel (secteur des
télécommunications, services informatiques, semi-conducteurs,
carte à puce, etc.) et de recherche, la qualité de ses
réseaux de télécommunications ou l'expérience
acquise grâce au Minitel, la France a tardé à prendre
résolument le virage des nouvelles technologies de l'information et de
la communication, en comparaison des pays les plus avancés. C'est
pourquoi le Gouvernement a adopté en janvier 1998 un " Programme
d'action gouvernemental pour la société de l'information ".
Un comité interministériel s'est réuni le 19 janvier
dernier pour examiner l'état d'avancement de ce programme, qui
représente un effort budgétaire évalué à 5,7
milliards de francs sur deux ans, dont 2,1 milliards en 1998 et
3,6 milliards en 1999. Le comité a pu constater qu'une très
large majorité des mesures préconisées ont
été mises en place au cours de l'année passée, et a
permis de fixer les priorités pour 1999. Le bilan complet des mesures
prises est diffusé sur le site internet dédié au PAGSI,
www.internet.gouv.fr. Des réalisations significatives peuvent
déjà être constatées. Ainsi, par exemple : le nombre
d'internautes a considérablement augmenté : entre 4 et 6 millions
de Français utilisent Internet aujourd'hui selon les différentes
études.
L'objectif est de 10 millions d'internautes avant la fin 2000. En un an, le
nombre d'établissements connectés à l'Internet est
passé pour les lycées de moins de 40 % à 85 %, pour les
collèges de 20 % à 55 %. La modernisation de services publics
s'est déjà traduite par certaines réalisations
opérationnelles : diffusion gratuite des principaux rapports
administratifs et parlementaires, ouverture du portail administratif
Admifrance, mise en ligne de 300 formulaires couvrant 50 % du volume des
procédures, lancement des services à distance comme le paiement
des impôts ou l'accomplissement de certaines formalités ; la
télé-déclaration et le télépaiement de la
TVA pour toutes les entreprises seront opérationnels au premier
trimestre 2000. L'innovation industrielle et technologique a été
fortement favorisée, en particulier par le développement du
capital-risque (création d'un fonds de 600 millions de francs,
porté à 900 millions de francs), par la reconduction et
l'élargissement en loi de finances pour 1999 des mesures fiscales
adoptées en loi de finances 1998 en vue de favoriser l'initiative en
matière de création d'entreprises. Les technologies de
l'information et de la communication sont une priorité marquée
des crédits de recherche et de développement industriels
(lancement d'un programme " Société de l'information " de 300 MF
par le secrétariat d'Etat à l'industrie, comportant un volet
important dédié au développement des outils de production
audiovisuelle et multimédia ; lancement du Réseau national de la
recherche en télécommunications doté de 260 MF en 1998).
Par ailleurs, des expérimentations de nouvelles technologies de
télécommunications et audiovisuelles (télévision
numérique terrestre) ont été lancées et les
infrastructures de télécommunications pour la recherche et
l'enseignement (réseau RENATER 2 à 155 MBits) sont
renforcées afin de faire face aux besoins croissants de communication.
Le Gouvernement a décidé la libéralisation de la
cryptologie et, dans l'attente des dispositions législatives
correspondantes, le seuil de la cryptologie dont l'utilisation est libre a
été relevé de 40 bits à 128 bits. A la suite de la
remise au Gouvernement du rapport du Conseil d'Etat sur le cadre juridique
d'Internet, des travaux ont été engagés au niveau
interministériel sur ce thème. Afin de mettre en place un cadre
juridique clair et stable, le Premier ministre a annoncé, le 26
août dernier, que le Gouvernement présentera au Parlement au
début de l'année 2000 un projet de loi sur la
société de l'information. Ce texte sera préparé par
le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avec le
secrétaire d'Etat à l'industrie, et en étroite liaison
avec le ministre de la justice et la ministre de la culture et de la
communication. Un tel cadre, qui permettra de renforcer la confiance des
acteurs sur Internet, est nécessaire pour accompagner le
développement du commerce électronique et de la
société de l'information. Par ailleurs, la France participe
activement aux travaux concernant les différentes propositions de
directives européennes sur le sujet, notamment celles sur la signature
électronique et sur les aspects juridiques du commerce
électronique. Le Premier ministre a également annoncé
qu'un comité interministériel pour la société de
l'information qui pourrait se tenir à la fin de l'année sera
consacré au développement de la deuxième
génération de l'Internet. La France rattrape son retard en
matière d'utilisation des technologies de l'information et de la
communication et rejoint progressivement les pays développés les
plus avancés dans ce domaine. Pour y parvenir, il est cependant
nécessaire de poursuivre les efforts dans le cadre des orientations
fixées par le programme d'action gouvernemental.
Votre rapporteur craint, cependant, que cette réponse pèche par
excès d'optimisme. Le chiffre des dépenses évoqué
par le programme d'action gouvernemental, 5,7 milliards de francs en deux
ans pour la France, doit être comparé à celui qui est
consacré par le seul Land de Bavière au profit du programme
national allemand pour la seule année 2000 (8,87 milliards de
francs). De même, RENATER 2 n'est qu'un réseau à 155
mégabits, alors que des liaisons d'un niveau de plusieurs gigabits sont
fréquentes en Californie : on constate, par cet exemple, que nous
ne rattrapons pas notre retard.
Votre rapporteur a appelé l'attention du ministre de l'industrie par une
récente question orale, formulée le 2 novembre dernier, sur
l'urgence du dépôt d'un texte législatif
réglementant les modalités de la signature électronique,
sans pouvoir obtenir d'engagement du gouvernement sur la date envisagée
pour le nécessaire débat, ce qu'il regrette.
Votre rapporteur a également déposé au mois d'octobre,
conjointement avec MM. Cabanel et Trégouët, une proposition de loi
tendant à généraliser dans l'administration l'usage
d'Internet, et des logiciels libres, pour que les services publics et les
collectivités territoriales soient un moteur dans l'utilisation des
NTIC. Le débat ouvert sur ce point sur le forum de discussion
présent au sein du site " web " du Sénat
démontre éloquemment, par son succès, que le sujet est
d'actualité et qu'il convient donc de réagir rapidement.