Projet de loi de finances pour 1999

BIMBENET (Jacques)

AVIS 70 (98-99), Tome VIII - COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Table des matières




N° 70

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VIII

LOGEMENT SOCIAL

Par M. Jacques BIMBENET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz,
MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1078 , 1111 à 1116 et T.A. 193 .

Sénat : 65 et 66 (annexe n° 22 ) (1998-1999).

Lois de finances.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Réunie le mardi 20 octobre 1998 , sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission a procédé à l'audition de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, sur les crédits de son département ministériel.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement,
a indiqué que le projet de budget pour 1999 confirmait la priorité accordée par le Gouvernement au logement. Il a précisé que les crédits s'élevaient à 49,1 milliards de francs en moyens de paiement, soit une croissance de 2,2 % par rapport à 1998. Il a cependant observé qu'il convenait de rajouter à cette enveloppe les mesures fiscales prévues pour couvrir l'ensemble des moyens budgétaires consacrés au logement.

Il a indiqué que ces crédits étaient mis au service d'une politique globale s'articulant autour de quatre axes prioritaires : la consolidation de l'effort budgétaire mené en 1998, la réaffirmation d'une politique sociale du logement, la création d'un statut du bailleur privé et la pérennisation du prêt à 0 %, l'ensemble de ces mesures intervenant dans un environnement fiscal amélioré.

Le ministre a déclaré que les crédits de son département ministériel concrétisaient d'abord une reconduction des programmes physiques de l'an passé. Il a souligné qu'ainsi 80.000 prêts locatifs aidés (PLA) (dont 20.000 PLA à loyer minoré et 10.000 PLA d'intégration) et 120.000 primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (PALULOS) seront budgétés.

Il a souligné que la baisse du taux du livret A permettrait par ailleurs d'offrir des prêts réduits d'un demi-point pour les opérations de construction et de réhabilitation menées par les organismes HLM.

Concernant la réhabilitation du parc privé, le ministre a annoncé que les crédits de la prime à l'amélioration de l'habitat (PAH) seraient maintenus à 800 millions de francs, soit un potentiel de 80.000 logements réhabilités, et que l'enveloppe de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) serait reconduite à 2,2 milliards de francs.

M. Louis Besson a ensuite indiqué que la politique sociale du logement constituait le second axe prioritaire. Il a observé que les aides personnelles au logement restaient, avec plus de 75 milliards de francs de prestations versées, un moyen primordial de justice sociale. Il a également rappelé que la politique d'actualisation régulière des aides personnelles au logement menée par le Gouvernement depuis juillet 1997 serait poursuivie.

Il a précisé que les aides personnelles au logement représentaient, au sein du budget 1999, une enveloppe de 34,6 milliards de francs, soit une hausse de 4,4 % par rapport à l'année passée.

En matière de logement des personnes les plus défavorisées, il a souligné que le budget reprenait en totalité les engagements pris par le Gouvernement lors de l'examen du vote de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. A cet égard, il a souligné que les dotations de l'Etat aux fonds de solidarité pour le logement (FSL) augmentaient de 44 % pour atteindre 490 millions de francs.

Il a par ailleurs annoncé que l'Etat aiderait les associations qui assurent la gestion de logements au bénéfice de personnes défavorisées grâce à un crédit de 60 millions de francs, que les moyens consacrés à l'aide au logement temporaire (ALT) seraient augmentés de 18 %, atteignant ainsi 130 millions de francs, et qu'une dotation de 50 millions de francs serait affectée à la lutte contre le saturnisme.

M. Louis Besson a ensuite affirmé que la création d'un statut du bailleur privé constituait la troisième priorité du Gouvernement en matière de logement.

Constatant " l'effritement " du parc locatif privé, il a observé qu'un statut pérenne et équilibré du bailleur privé était nécessaire afin de développer une offre de logements à loyer maîtrisé dans le parc privé. Estimant que le mécanisme de " l'amortissement Périssol " constituait plus une mesure de défiscalisation que l'institutionnalisation du bailleur privé, il a rappelé que cette mesure, prorogée jusqu'au 31 août 1999, serait remplacée par un nouveau statut fiscal. Il a indiqué que ce statut reposerait sur une contrepartie sociale aux aides fiscales et serait applicable à la fois au neuf et à l'ancien.

Il a précisé que l'incitation à l'investissement locatif dans le neuf prendrait la forme d'un régime d'amortissement avec pour contrepartie une double contrainte : le respect par le bailleur de plafonds de loyers ainsi que des ressources des locataires. Il a observé que le taux d'amortissement serait de 8 % pendant les cinq premières années et de 2,5 % les quatre années suivantes.

Il a déclaré que, dans le parc existant, l'aide prendrait la forme d'une majoration de la déduction forfaitaire des revenus fonciers, celle-ci passant de 14 % à 25 %. Il a affirmé que l'attractivité du dispositif serait accrue par la mise en place d'une meilleure sécurisation des bailleurs contre les impayés de loyers, notamment par le versement direct de l'allocation au bailleur, mais aussi par les dispositions de l'accord conclu entre l'Etat et les organismes du 1 % logement.

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a précisé que la modernisation du 1 % logement et la pérennisation du prêt à 0 % constituaient la quatrième priorité en matière de politique du logement. A cet égard, il a rappelé que l'Etat et les partenaires du 1 % logement avaient signé, le 3 août 1998, une convention modernisant les interventions du 1 % logement. Il a déclaré qu'un projet de loi entérinant cette réforme du 1 % logement serait examiné au Sénat le 12 novembre prochain.

Le ministre a précisé que cette convention, conclue pour cinq ans, visait à faciliter des parcours résidentiels plus diversifiés. Il a observé que les emplois du 1 % logement seraient ainsi étendus à la sécurisation des accédants à la propriété. Il a précisé que cette sécurisation interviendrait en cas de perte d'emploi ou pour le salarié des entreprises éligibles, faisant face à de fortes baisses de ressources, notamment en cas de rupture familiale. Il a également souligné que le 1 % logement favoriserait la mobilité professionnelle des salariés en aidant au financement des travaux d'entrée dans le logement et développerait de nouveaux systèmes de prise en charge gratuite des cautions et garanties d'impayés de loyers, orientés prioritairement vers les jeunes.

Le ministre a estimé que cette réorientation, parallèle à la rebudgétisation du prêt à 0 %, s'accompagnerait d'une réaffirmation des interventions traditionnelles du 1 % logement, notamment en ce qui concerne l'apport financier complémentaire à la construction et à la rénovation des HLM et l'aide à l'accession à la propriété.

Au-delà de ces quatre orientations majeures, M. Louis Besson a insisté sur les mesures fiscales du projet de loi de finances pour 1999. Il a ainsi rappelé que les droits de mutation seraient réduits de plus de 20 %, soit un allégement d'impôt de 3,7 milliards de francs. Il a d'ailleurs déclaré que l'Assemblée nationale avait complété ce dispositif par une exonération de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les terrains à bâtir pour les particuliers, à condition de construire dans les cinq ans.

Il a également indiqué que le taux réduit de TVA à 5,5 % s'appliquerait aux dépenses d'amélioration de l'habitat à condition que les bailleurs privés bénéficient d'une subvention de l'ANAH et d'un conventionnement éligible à l'aide personnalisée au logement (APL). Il a précisé que plus de 10.000 logements devraient être concernés par cette mesure.

Le ministre a aussi rappelé qu'un amendement voté en première lecture à l'Assemblée nationale avait par ailleurs plus que doublé le crédit d'impôt pour les travaux d'entretien et de revêtement à domicile en portant le taux de 15 % à 20 % et en doublant les plafonds de dépenses, par exemple de 10.000 à 20.000 francs pour un couple. Il a précisé que cette mesure, d'un coût de 200 millions de francs en 1999 et de 2,3 milliards de francs en 2000, permettrait de soutenir l'activité et de lutter contre le travail au noir.

Enfin, le ministre a rappelé que plusieurs mesures fiscales avaient été adoptées dans le cadre de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, citant notamment l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les opérations d'acquisition-amélioration de logements locatifs sociaux, ainsi que la clarification du régime fiscal de la sortie du bail à réhabilitation.

En conclusion, le ministre a estimé que le projet de budget pour 1999 s'inscrivait dans la recherche d'une plus grande justice sociale et permettait l'établissement d'un cadre stable et favorable pour tous les acteurs de la politique du logement.

M. Jean Delaneau, président, a interrogé le ministre sur la sécurisation de l'accession à la propriété. Il a, à cet égard, souligné qu'un dispositif de location-accession, permettant au locataire de se constituer un apport progressif pour l'accession, avait été mis en place à la fin de 1992 en Indre-et-Loire et s'est demandé si le ministre envisageait d'inscrire ce dispositif expérimental dans un projet de loi.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a ensuite interrogé le ministre sur les causes de la faible consommation des prêts locatifs aidés (PLA), sur l'effet des mesures fiscales en faveur de la construction et de la rénovation du parc locatif social instaurées en 1997 et 1998, sur l'effort du Gouvernement en matière de logement intermédiaire et sur le dispositif de sécurisation instauré par la convention signée entre l'Etat et les partenaires du 1 % logement.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a également estimé que les opérations de réhabilitation de l'ANAH devaient être intensifiées en zones rurales. Il a enfin interrogé le ministre sur la perspective d'un dépôt prochain d'un projet de loi relatif à l'habitat et sur la suppression de la taxe régionale grevant les ventes de locaux d'habitation, effective depuis le 1 er septembre, avant même le vote du Parlement.

En réponse à M. Jean Delaneau, président, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a reconnu que les opérations de location-accession avaient régulièrement diminué depuis plusieurs années. Il s'est déclaré prêt à réfléchir à une réforme ayant pour objectif de proposer les formules les plus souples possibles, cette réforme pouvant éventuellement être intégrée dans le prochain projet de loi relatif à l'habitat et à l'urbanisme, qui pourrait être déposé au Parlement l'été prochain.

Revenant sur les questions de M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, le ministre a reconnu une sous-consommation des PLA par rapport aux objectifs budgétaires. Il a cependant exprimé l'espoir de voir 60.000 PLA réalisés d'ici à la fin de l'année, en particulier grâce au redéploiement des crédits vers les départements les plus consommateurs. Il a souligné que la réticence des organismes HLM à utiliser le PLA pouvait s'expliquer de deux manières : le changement de nature du produit, l'aide passant d'une subvention à une baisse de taux de TVA, et le niveau élevé des taux d'intérêt réels. Il a en revanche estimé que les mesures prises en juillet dans le cadre de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, dont, notamment, la modification du régime d'attribution des HLM, favoriseraient la construction à venir des logements sociaux, même si la loi n'avait pas encore eu d'impact réel.

Concernant les PLA d'intégration (PLA-I), M. Louis Besson a regretté la réticence des collectivités locales à accueillir des logements d'intégration. Il a jugé que les PLA-I restaient des produits à la fois nécessaires car ils visent à offrir un logement aux familles en grande difficulté sociale et suffisamment attractifs, rappelant qu'aucun instrument de la politique du logement n'avait été autant subventionné. Mais il a également reconnu que les difficultés rencontrées pour identifier les familles en difficulté pouvaient expliquer la faible utilisation des PLA-I.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis , a précisé que des expériences intéressantes étaient conduites dans les départements, signalant en particulier une convention pour le logement des familles en grande difficulté signée, dans le Loir-et-Cher, entre le conseil général et l'Office public des habitations à loyer modéré (OPHLM).

Concernant les PLA à loyer minoré (PLA-LM), M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a rappelé que ces produits visaient à permettre le logement dans le parc locatif social des familles à faibles ressources. Il a observé une tendance à la paupérisation de la population HLM, une récente enquête du Centre de recherche et de documentation sur la consommation (CREDOC) montrant que 50 % des occupants de HLM avaient des ressources inférieures à 60 % du plafond HLM. Il a jugé que, dans ces conditions, les PLA-LM devraient être une priorité pour le mouvement HLM. A cet égard, il a indiqué qu'une circulaire du 4 août dernier avait introduit, à la demande du mouvement HLM, et à titre expérimental, des souplesses supplémentaires en matière de financement et de loyer qui devraient permettre une relance des PLA-LM.

Le ministre a également insisté sur la nécessité d'un renouvellement progressif du parc locatif social en soulignant que la vacance était coûteuse pour les organismes HLM. Il a estimé que les PLA construction-démolition, qui devraient augmenter sensiblement en 1999, permettraient de concourir efficacement à la réalisation de cet objectif.

Il a considéré que, d'une manière générale, un meilleur taux de réalisation des objectifs PLA restait une nécessité, les crédits non consommés étant annulés en fin d'année.

S'agissant de l'impact de la baisse du taux de TVA en 1997 et 1998, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a déclaré ne pas pouvoir évaluer le nombre de logements sociaux supplémentaires construits ou réhabilités. Il a toutefois signalé que ces mesures représentaient une aide fiscale de 2,8 milliards de francs et avaient donné lieu à la signature d'un accord avec le mouvement HLM, permettant la mise en oeuvre de travaux visant à une réduction des charges.

Concernant le logement intermédiaire, il a reconnu que le prêt locatif intermédiaire (PLI), qui est un produit non contingenté, avait du mal à trouver sa place. Mais il a estimé que la nouvelle mesure d'incitation à l'investissement locatif constituait un nouveau produit conventionné, susceptible de redynamiser le parc conventionnel.

Il a également confirmé qu'un projet de loi relatif à l'urbanisme et à l'habitat était en préparation.

Revenant sur la baisse des droits de mutation au 1 er septembre 1998, il a affirmé qu'en matière de locaux d'habitation le choix avait été fait d'anticiper sur le projet de loi de finances pour 1999 afin d'accompagner la reprise du marché immobilier. En revanche, il a souligné que la baisse des droits de mutation pour les locaux commerciaux ne serait effective qu'au 1 er janvier 1999.

M. Guy Fischer a, à son tour, regretté la trop faible consommation des programmes budgétés en matière de construction de logement social. Il s'est également interrogé sur les difficultés de plus en plus aiguës d'accès au logement alors que la vacance continuait à progresser dans les quartiers les plus difficiles. Il a enfin constaté qu'en dépit du vote de la loi relative à la lutte contre les exclusions, les personnes expulsées ne se voyaient pas proposer de solution de relogement.

Mme Gisèle Printz s'est inquiétée de la situation des gens du voyage en matière de logement, constatant que la loi de 1990 n'avait apporté que très peu d'amélioration.

M. Lilian Payet est intervenu pour insister sur les difficultés de logement outre-mer. Il a ainsi constaté qu'il faudrait construire 10.000 logements nouveaux par an à la Réunion pour répondre aux besoins. Il a constaté que la croissance des crédits inscrits sur la " ligne budgétaire unique " (LBU) restait peu efficace, ces crédits restant largement sous-consommés du fait de l'absence de politique de maîtrise foncière.

M. Gilbert Chabroux est revenu sur le projet de création d'un statut du bailleur privé. A cet égard, il s'est interrogé sur la possibilité de location du logement bénéficiant de l'aide fiscale aux ascendants et aux descendants et sur la possibilité de sous-location, notamment dans le cas des résidences pour étudiants. Il s'est aussi inquiété de l'effet du régime fiscal en cas de démembrement de propriété.

Répondant à ces intervenants, M. Louis Besson s'est déclaré préoccupé par la question de la vacance dans les grands ensembles. Il a cité le cas d'un département où 36.000 demandes de logement étaient en attente alors que 15.000 logements vacants ne trouvaient pas preneur. Il a cependant estimé que des conventions signées entre l'Etat et les collectivités locales dans le cadre des programmes locaux de l'habitat (PLH) devraient permettre de faire évoluer la situation.

Il a confirmé que le Conseil constitutionnel avait annulé l'article de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions donnant au préfet l'obligation, en cas d'expulsion, de s'assurer des conditions de relogement. Il a cependant estimé que le délai de deux mois entre la saisine du juge et le prononcé du jugement devait permettre au préfet de communiquer au juge les informations nécessaires concernant la situation de la famille tout en respectant les droits légitimes des propriétaires bailleurs. Il a jugé que ce délai devait permettre d'étudier les possibilités de relogement.

Il a également insisté sur la nécessité d'un travail préventif afin de connaître plus en amont les risques d'expulsion et de préparer des solutions de relogement dans le cadre des plans départementaux d'action pour le logement des défavorisés (PDALD).

M. Louis Besson a considéré que la question du logement des gens du voyage constituait un problème crucial. Il a annoncé qu'un projet de loi était en préparation, un travail interministériel s'étant engagé depuis l'adoption de la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye au Sénat. Reconnaissant les insuffisances du cadre juridique actuel qui rend obligatoire la réalisation d'aires d'accueil des gens du voyage et des schémas départementaux, mais qui ne prévoit ni délai, ni sanction, il a annoncé que seul un tiers des départements s'était doté d'un schéma départemental et que moins de 500 aires avaient été aménagées.

Concernant l'outre-mer, M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a souligné l'importance de l'effort budgétaire tout en constatant la faiblesse des moyens en matière de politique foncière. Il s'est interrogé sur la possibilité de reproduire dans les départements d'outre-mer l'expérience des établissements publics fonciers implantés en métropole.

M. Lilian Payet a indiqué qu'il avait été créé à la Réunion un fonds régional d'aménagement foncier et de l'urbanisme (FRAFU), géré en partenariat avec les collectivités et les opérateurs, mais que ce fonds restait insuffisant pour réformer en profondeur la politique foncière.

M. Louis Besson est enfin revenu sur le projet de statut du bailleur privé, jugeant que le dispositif proposé était équilibré, même s'il restait ouvert à toute proposition d'amendements. Il a justifié les différentes restrictions du projet (en particulier en matière de location aux descendants ou de démembrement de propriété) par le souci d'éviter certains abus qui avaient pu entacher le dispositif précédent.

II. EXAMEN DE L'AVIS

Réunie le mercredi 18 novembre 1998 , sous la présidence de M. Jean Delaneau, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis des crédits en faveur du logement social inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a indiqué que le budget, le second présenté par M. Louis Besson, s'inscrivait dans le contexte de nombreuses réformes, soit achevées, comme la loi d'orientation du 29 juillet 1998, relative à la lutte contre les exclusions, soit en cours, comme le projet de loi relatif à l'emploi des fonds du 1 % logement, adopté, le 12 novembre dernier, à l'unanimité au Sénat. Il a précisé que plusieurs mesures nouvelles étaient également incluses dans le projet de loi de finances, citant en particulier le nouveau statut du bailleur privé, la rebudgétisation progressive du prêt à taux zéro et diverses mesures fiscales.

Il a constaté que les crédits inscrits dans le bleu budgétaire, relatif à l'urbanisme et au logement, augmentaient de 13,9 % pour atteindre 45,4 milliards de francs. Il a cependant jugé cette présentation artificielle, estimant qu'elle ne recouvrait pas l'ensemble de l'effort budgétaire en faveur du logement. Il a considéré que, si on ajoutait au budget stricto sensu les crédits des comptes d'affectation spéciale, le budget du logement pour 1999 s'établissait à 49,1 milliards de francs en moyens de paiement, soit une progression de 2,2 %.

Il a constaté que cette progression était équivalente à l'évolution de l'ensemble des dépenses budgétaires, mais que l'effort budgétaire en faveur du logement se ralentissait sensiblement, après une hausse de 6,7 % inscrite au budget pour 1998.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a précisé que, si la faible augmentation des dotations budgétaires laissait suggérer un simple budget de reconduction, les nombreuses mesures nouvelles soulignaient, en revanche, l'évolution sensible des différents aspects de la politique du logement.

Il a ensuite abordé la question du logement locatif social. A cet égard, il a fait part de sa profonde préoccupation.

Il a constaté que l'objectif affiché par le Gouvernement visait à la reconduction des programmes budgétés pour 1998 : 80.000 prêts locatifs aidés (PLA) en construction et 120.000 primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (PALULOS). Mais il a également observé que les crédits de la ligne fongible, assurant le financement de ces opérations, diminuaient de 10 % par rapport à l'année passée.

Il a estimé que cette diminution correspondait à la très faible consommation des crédits réalisée ces dernières années en matière de construction de logements sociaux. Il a fait part de son inquiétude face à la diminution très rapide du nombre de PLA mis en chantier, ceux-ci étant passés de plus de 72.000 en 1994 à 40.000 seulement prévus pour 1998. Face à cette crise de la construction des logements locatifs sociaux, il a regretté l'inertie du Gouvernement.

Il a rappelé que le budget 1998 comportait pourtant des avancées significatives en faveur du logement social : application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les travaux réalisés dans les logements sociaux, diversification de l'offre des PLA, grâce, notamment, à la création des PLA d'intégration (PLA-I) et au lancement d'un programme de PLA " construction-démolition ". Mais il a regretté que cet effort ne se soit pas traduit par une relance de la construction.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a estimé que le fléchissement de la construction des logements sociaux s'expliquait par des raisons structurelles. Il a ainsi jugé qu'il existait une pénurie de la demande solvable, observant que 2,7 % du parc d'habitation à loyer modéré (HLM) était vacant en 1997. Il a considéré que cette vacance était le signe d'une plus faible attractivité du parc social, de nombreux ménages préférant accéder à la propriété, notamment grâce au prêt à taux zéro, ou rejoindre le secteur locatif privé. Il a expliqué que cette volatilité croissante de la demande n'incitait pas les organismes HLM à construire.

Il a également estimé que l'équilibre d'exploitation des constructions financées par les PLA n'était pas assuré, 80 % des loyers perçus par les HLM servant à rembourser les PLA contractés. Il a rappelé que la situation financière des organismes HLM s'était fragilisée depuis quelques années et que, dans ces conditions, la construction de logements neufs se traduisait par une charge supplémentaire pour les organismes.

Estimant que la politique menée par le Gouvernement ne permettait pas de relancer la construction, il a souligné que la réorientation des PLA vers les ménages sociaux ou très sociaux se heurtait à la faible solvabilité de la demande et que la hausse de 1 % des loyers HLM, récemment annoncée, ne faisait qu'accentuer la contrainte financière pesant sur les organismes HLM.

Considérant que le contexte préoccupant du logement social appelait des réponses fortes et rapides, M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis , a précisé que plusieurs pistes pouvaient être explorées. Il a d'abord insisté sur la nécessaire simplification des PLA. Constatant qu'il existait actuellement 15 à 16 types de PLA, il a jugé le dispositif trop complexe et a suggéré le retour à un produit à la fois unique et souple dans sa gestion.

Il a également estimé qu'une diminution du coût de la ressource devait être étudiée, soit par un allongement de la durée des prêts, soit par une accélération de la baisse des taux.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a ensuite abordé le second volet de la politique du logement, celle visant le parc privé. Il lui a semblé que les mesures nouvelles proposées par le projet de budget pour 1999 allaient globalement dans la bonne direction, même si les ambiguïtés pouvaient subsister.

S'agissant de l'accession sociale à la propriété, il s'est félicité de la pérennisation du prêt à taux zéro et de sa rebudgétisation progressive. Il a rappelé que le financement des prêts à taux zéro était jusqu'à présent assuré par un prélèvement, à hauteur de 7,6 milliards de francs en 1998, sur les ressources du 1 % logement. Il a indiqué que, conformément à la convention du 3 août dernier passée entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement (UESL), le projet de budget prévoyait la rebudgétisation de la moitié des crédits du prêt à taux zéro.

Il a ainsi estimé que 110.000 prêts pourraient être distribués en 1999, soit autant qu'en 1998. Il a également remarqué que cette rebudgétisation se doublait de la mise en place d'un dispositif de sécurisation des accédants à la propriété, dispositif présenté dans le projet de loi sur le 1 % logement, adopté en première lecture au Sénat le 12 novembre.

S'agissant de l'investissement locatif, il a rappelé que la commission se préoccupait, depuis plusieurs années, de la situation du logement intermédiaire. Il a indiqué que le projet de budget proposait la mise en place d'un régime fiscal spécifique en faveur d'un nouveau secteur privé conventionné, devant se substituer à " l'amortissement Périssol ". Il a estimé que ce nouveau dispositif apportait trois améliorations, mais restait handicapé par une incertitude.

Il a considéré que ces améliorations tenaient à l'extension du dispositif au parc ancien, à l'introduction d'un nouveau conventionnement, qui devrait permettre le redéploiement des investissements locatifs vers le logement intermédiaire et à la mise en place d'une sécurisation améliorant l'attractivité du dispositif pour le bailleur.

Rappelant que l'amortissement Périssol avait permis la construction d'environ 45.000 logements neufs par an, il s'est interrogé sur la capacité du nouveau dispositif, fiscalement moins avantageux, à poursuivre ce mouvement. Il a toutefois remarqué que les projections effectuées par le Professeur Mouillart concluaient au maintien du rythme de l'investissement.

S'agissant de la réhabilitation du parc privé, il a constaté que les interventions traditionnelles seraient reconduites en 1999 avec 800 millions de francs de dotation pour la prime à l'amélioration de l'habitat et 2,2 milliards de francs pour l'agence nationale d'amélioration de l'habitat (ANAH). Il a également indiqué que le budget comportait deux nouvelles mesures fiscales, selon lui positives, en faveur de la réhabilitation : l'application du taux réduit de TVA aux dépenses d'amélioration de l'habitat, lorsque les bailleurs privés bénéficient d'une subvention de l'ANAH, à condition que le logement fasse l'objet d'une convention avec l'Etat ouvrant droit à l'APL et le doublement du crédit d'impôt maximal lié aux travaux d'entretien à domicile, issu d'un amendement adopté à l'Assemblée nationale.

Abordant ensuite les aides personnelles au logement, M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a tenu à souligner le rôle capital que jouaient ces aides pour l'accès au logement des personnes les plus modestes. Il a ainsi remarqué que 6,2 millions de ménages bénéficiaient de ces aides pour un montant total de plus de 75 milliards de francs. Il a estimé que ces aides étaient désormais indispensables notamment dans le secteur HLM où un ménage sur deux avait des revenus inférieurs à 60 % du plafond de ressources fixé pour l'accès au logement social et un ménage sur six avait des revenus inférieurs à 20 % de ce plafond.

Il a indiqué que le projet de budget pour 1999 prévoyait une hausse de 4,5 % de ces crédits qui atteindront 34,6 milliards de francs. Il a estimé que cette hausse s'expliquait largement par la poursuite de la politique de revalorisation des aides, menée depuis 1997, précisant qu'une nouvelle actualisation interviendrait au 1 er juillet 1999.

Se félicitant de cette revalorisation, il a estimé qu'elle ne pourrait être réellement efficace qu'à la condition d'une réforme des aides à la personne dans le sens d'une plus grande cohérence et d'une plus grande transparence.

Il a rappelé qu'actuellement trois types d'aides coexistaient et rendaient le système particulièrement complexe et peu lisible, car les barèmes applicables, les niveaux de ressources pris en compte et les plafonds de loyers établis étaient extrêmement hétérogènes. Il a donc estimé qu'il fallait poursuivre la politique du précédent Gouvernement, qui visait à harmoniser toutes ces aides. A cet égard, il s'est félicité de l'engagement pris par le Premier ministre, lors de la conférence de la famille, d'aligner en trois ans les loyers plafonds de l'aide personnalisée au logement (APL) et de l'allocation de logement familiale (ALF). Il a toutefois jugé que l'harmonisation devait être poursuivie, notamment pour la définition des niveaux de ressources et des barèmes de l'allocation logement.

M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a enfin examiné la politique du logement en faveur des personnes les plus en difficulté. Il a estimé que cette action devait rester l'un des axes prioritaires de la politique sociale du logement. Rappelant que 10 % des ménages français, soit 5,5 millions de personnes, vivaient actuellement sous le seuil de la pauvreté, il a indiqué que l'accès et le maintien dans le logement devenaient très souvent synonymes de difficultés presque insurmontables pour ces ménages. Il a précisé que les dernières études disponibles évaluaient à environ 200.000 le nombre de personnes exclues du logement.

Il a reconnu que de nombreuses actions avaient été mises en oeuvre ces dernières années, citant en particulier le plan d'urgence de 1995 et certains aspects du volet logement de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.

Il a remarqué que le projet de budget traduisait cette loi en termes budgétaires, constatant que la participation de l'Etat au logement des personnes défavorisées augmentait de 51 % pour atteindre 685 millions de francs. Il a précisé que cet effort budgétaire prenait trois formes distinctes : une augmentation de 62 % de la subvention au financement des fonds de solidarité pour le logement, une hausse de 18 % des crédits consacrés à l'aide au logement temporaire et une nouvelle dotation de 50 millions de francs affectée à la lutte contre le saturnisme.

Jugeant cet effort budgétaire conséquent, il a estimé que la hausse ne devait pourtant pas occulter les insuffisances en matière de logement des plus démunis. Il a ainsi regretté que le Gouvernement ne réforme pas les produits destinés au logement des ménages très sociaux comme les PLA d'intégration, alors qu'ils ont fait la preuve d'une trop faible attractivité. Il s'est également interrogé sur la possibilité d'une modulation des aides personnelles en fonction des revenus, qui permettrait de concentrer les moyens financiers sur les personnes exclues ou en voie d'exclusion du logement.

En conclusion, M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis , a considéré que ce budget n'était pas un mauvais budget. Il a rappelé qu'il proposait certaines avancées positives et préservait globalement les réformes mises en oeuvre ces dernières années. Il a cependant regretté que ce budget soit grevé par une insuffisance évidente : l'absence de solution susceptible de contrecarrer le fléchissement de la construction de logements locatifs sociaux.

Pour cette raison, il a proposé à la commission d'émettre un avis de sagesse sur ce projet de budget.

M. Jean Delaneau, président, a souligné les aspects positifs du dispositif de location-accession actuellement expérimenté dans certains départements. Il a fait part de son souhait que ces produits expérimentaux soient codifiés dans le prochain projet de loi relatif à l'habitat et à l'urbanisme.

M. Jean Chérioux , après avoir félicité le rapporteur pour avis pour la clarté de son exposé sur une question pourtant extrêmement complexe, s'est interrogé sur les difficultés de financement des organismes HLM. Il a également estimé que les mécanismes de solvabilisation des ménages les plus modestes ne fonctionnaient pas bien, regrettant l'intervention tardive des fonds sociaux et leur mauvaise coordination avec l'APL. Jugeant les plafonds du prêt à taux zéro trop peu élevés pour l'accession à la propriété et les aides personnelles insuffisantes pour assurer la solvabilité des ménages, il s'est déclaré préoccupé par les difficultés persistantes d'accès au logement.

Soulignant les difficultés du secteur du logement et estimant que l'épanouissement de la famille passait aussi par le logement, M. Jacques Machet a jugé la politique du logement trop complexe. Evoquant l'exemple de la Marne, il a considéré qu'une simplification était possible en indiquant que le département abondait d'un franc supplémentaire tout franc versé par l'Etat.

M. Louis Boyer a déclaré partager l'opinion de M. Jacques Machet. Il s'est également déclaré favorable au versement direct des aides personnelles aux organismes HLM. Estimant que les subventions de l'ANAH jouaient un rôle important dans la réhabilitation des centres de villes moyennes, il a regretté la stagnation des crédits de l'ANAH.

M. Alain Gournac a fait part de sa préoccupation face à la faiblesse du nombre de logements sociaux mis en chantier. Il a déploré les difficultés d'accès aux logements sociaux pour les familles les plus modestes, ainsi que la trop faible fluidité dans l'attribution des logements sociaux. Il s'est, à son tour, interrogé sur la complexité des politiques du logement en France.

Après avoir souligné la qualité du travail du rapporteur, M. Gilbert Chabroux a regretté que celui-ci ne propose qu'un avis de sagesse, après avoir dressé une présentation pourtant positive du budget. Il a reconnu que le logement social posait problème. Mais il a estimé qu'une relance de la construction de logements sociaux nécessitait également une action des collectivités locales, notamment par la mise à disposition de terrains au profit des organismes HLM. Il a également considéré que le relèvement des plafonds de ressources pour l'attribution d'un logement HLM permettrait une plus grande mixité. Il s'est félicité des nouvelles mesures en faveur du parc privé et a jugé très positives la revalorisation et la réforme des aides personnelles. Il a souligné que le logement des plus démunis restait problématique, mais qu'un effort budgétaire certain était accompli.

M. Alain Vasselle , après avoir félicité le rapporteur pour son exposé, a souhaité attirer l'attention de la commission sur certaines difficultés. Il a ainsi jugé que le nouveau mode de financement des logements sociaux par l'application du taux réduit de TVA soulevait de lourds problèmes de gestion. Il s'est également inquiété de la faible consommation des dotations en PLA en indiquant qu'elle était actuellement de seulement 25 % pour le département de l'Oise. Il a estimé que la réticence des élus locaux à la construction de logements sociaux pouvait s'expliquer par la lourdeur et la rigidité des normes qui leur étaient appliquées, notamment en matière de sécurité incendie. Concernant les PLA à loyer modéré, il a souligné que les difficultés de gestion se traduisaient par des délais très longs, de trois à huit mois, avant la mise en chantier.

M. Charles Descours a estimé qu'une réforme structurelle de la politique du logement était à la fois nécessaire et urgente, jugeant que le maintien du système actuel pousserait les organismes HLM à ne plus construire.

M. Guy Fischer , rappelant que le logement social était un enjeu de société primordial, a estimé que tous les intervenants partageaient une analyse commune des problèmes du logement. Il s'est déclaré préoccupé par la croissance de la vacance dans le parc HLM, remarquant que de nombreuses familles quittaient les grands ensembles pour des raisons de sécurité, afin de rejoindre le secteur privé au prix de sacrifices financiers souvent très lourds. Il a également considéré que l'augmentation des impayés de loyers et la hausse des taxes foncières fragilisaient la situation des organismes HLM. S'agissant des PLA à loyer modéré, il a estimé que leur faible consommation s'expliquait par le fait que le risque d'impayés faisait plus que compenser les 8 % de subvention supplémentaire.

En réponse aux différents intervenants, M. Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis, a estimé qu'une réforme de la politique du logement était nécessaire. Il a considéré qu'elle devrait avant tout viser à une simplification des produits et des aides, mais aussi à une remise à plat des procédures et des critères d'attribution des logements sociaux. Il s'est déclaré persuadé qu'une meilleure organisation de la politique du logement la rendrait plus efficace, à effort budgétaire constant.

S'agissant de la subvention à l'ANAH, il a indiqué que les crédits de paiement augmentaient de 35 millions de francs, mais que l'application du taux réduit de TVA aux dépenses d'amélioration de l'habitat dans le secteur privé correspondait à une dépense fiscale supplémentaire de 200 millions de francs.

S'agissant du logement des plus démunis, il a insisté sur les opérations de maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS), soulignant qu'elles constituaient les compléments souvent indispensables aux opérations d'habitat adapté.

Il est également revenu sur les difficultés en matière de construction de logements sociaux. Il a ainsi estimé que l'application du taux réduit de TVA à la construction de logements HLM se traduisait par une lourdeur de gestion accrue, du fait de l'application du régime de livraison à soi-même. Il a reconnu que les difficultés d'obtention de terrains étaient réelles.

Concernant la situation financière des organismes HLM, il a rappelé qu'un tiers des organismes était confronté à des difficultés. Il a jugé que cette dégradation de la situation financière des organismes s'expliquait notamment par l'augmentation de la vacance, laquelle concernait 2,7 % du parc en 1997, mais avait encore augmenté, et par la hausse des taxes foncières.

A l'issue de ce débat, la commission, sur proposition de son rapporteur, a décidé d'émettre un avis de sagesse sur les crédits du logement social pour 1999 .


Mesdames, Messieurs,

Le projet de budget du logement pour 1999 intervient dans un contexte de profonde évolution de la politique du logement. La loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions comprenait un important volet logement, touchant aussi bien le parc social que les dispositifs spécifiques en faveur du logement des plus démunis. Le Parlement examine actuellement un projet de loi relatif à l'emploi des fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction qui tend non seulement à modifier les modalités de financement de l'ensemble de la politique du logement, mais aussi à mettre en place un nouveau mécanisme de garantie pour l'accession sociale à la propriété.

La politique du logement semble donc, en apparence, constituer l'une des priorités du Gouvernement.

Cela n'aurait d'ailleurs rien d'étonnant eu égard à la situation du logement en France. La dernière enquête logement réalisée par l'INSEE en 1997 souligne en effet certaines insuffisances persistantes en matière de logement :

- la croissance du nombre de logement, qui était de 290.000 par an entre 1992 et 1996, reste sans doute inférieure aux besoins réels de la population ;

- la vacance continue à augmenter : 2,2 millions de logements étaient vacants fin 1996, soit 7,9 % du parc total. Parallèlement, environ 200.000 personnes seraient exclues du logement et 1,6 million de personnes seraient mal logées ou occuperaient des logements de substitution ;

- l'accès et le maintien dans le logement restent souvent bien difficiles notamment pour les ménages les plus modestes. On estime ainsi que chaque ménage a dépensé en moyenne 44.000 francs en 1996 pour se loger. Plus de 300.000 ménages sont en situation d'impayés de loyer, dont les deux tiers dans le parc social.

Pour autant, l'examen des crédits relatifs au logement tend à relativiser sérieusement cette priorité apparente pour dévoiler une réalité bien plus sombre.

Selon le Gouvernement, le budget pour 1999 s'articulerait autour de cinq axes prioritaires :

- la consolidation de l'effort budgétaire mené en 1998 ;

- un approfondissement de la politique sociale du logement ;

- un effort substantiel en faveur du logement des plus démunis ;

- la pérennisation du prêt à taux zéro et la modernisation corrélative du 1 % logement ;

- la mise en place de plusieurs mesures fiscales d'accompagnement : nouveau statut du bailleur privé, diminution des droits de mutation, application du taux réduit de TVA aux dépenses d'amélioration de l'habitat.

Or, il semble que le budget soit plus un budget de reconduction qu'un budget de consolidation.

Si l'on ajoute au budget stricto sensu les crédits prévus aux comptes d'affectation spéciale ( fonds pour l'aménagement de la région Ile-de-France et fonds pour le financement de l'accession à la propriété ), le budget 1999 du logement -hors urbanisme- s'établit à 48,76 milliards de francs en moyens de paiement (dépenses ordinaires et crédits de paiement), soit une progression de 2,2 % par rapport à 1998. La progression des crédits, qui est équivalente à l'évolution de l'ensemble des dépenses budgétaires prévues en 1999, témoigne d'un ralentissement certain de l'effort budgétaire en faveur du logement après une hausse de 6,4 % en 1998.

Mais cette simple reconduction des crédits s'accompagne également d'une insuffisance des mesures nouvelles annoncées.

Votre commission, en dépit de certaines incertitudes, prend acte de la pérennisation du prêt à taux zéro, du nouveau dispositif en faveur de l'investissement locatif, de la revalorisation des aides à la personne, de l'effort budgétaire en faveur du logement des plus démunis.

Elle exprime cependant une double réserve sur ce projet de budget.

Votre commission s'inquiète en tout premier lieu de la situation préoccupante du logement social . Elle regrette ainsi vivement que le Gouvernement ne prévoie aucune mesure nouvelle susceptible de freiner le fléchissement actuel de la construction de logements sociaux.

Elle regrette également que le Gouvernement avance bien trop lentement dans la voie de l'indispensable réforme des aides à la personne .

Dans ces conditions, votre commission a souhaité s'en remettre à la sagesse de la Haute assemblée pour l'adoption des crédits relatifs au logement social dans le projet de budget pour 1999.

III. LE LOGEMENT LOCATIF SOCIAL : UNE SITUATION TRÈS PRÉOCCUPANTE QUE NE CORRIGE EN RIEN UN SIMPLE BUDGET DE RECONDUCTION

La place du parc social dans le logement est considérable. Plus de 9 millions de personnes vivent dans l'un des quelque 4,1 millions de logements locatifs sociaux. Le parc locatif social représentait, en 1996, 17,6 % du total des résidences principales et 44,3 % du parc locatif total.

Le rôle social du secteur HLM est incontestablement primordial. Le parc social offre en effet des loyers sensiblement inférieurs à ceux du parc privé. On estime ainsi que les ménages locataires en HLM devraient dépenser 35 milliards de francs supplémentaires chaque année s'ils étaient logés dans le parc privé alors même qu'ils versent 75 milliards de francs de loyer aux organismes HLM. On comprend alors pourquoi le parc social permet l'accès et le maintien dans le logement pour les ménages les plus modestes.

Pourtant, en dépit de l'importance des masses budgétaires, le budget pour 1999 ne cherche pas à apporter une réponse aux perspectives inquiétantes qui menacent le logement social.

A. LE BUDGET POUR 1999 NE PERMETTRA PAS DE RELANCER LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS LOCATIFS SOCIAUX

1. Le fléchissement de la construction dans le parc social

Depuis 1994, on assiste chaque année à une diminution à la fois continue et sensible du nombre de logements sociaux mis en chantier.

Cette tendance se vérifie pour l'année en cours. L'UNFOHLM 1( * ) évalue en effet à 45.000 le nombre de logements sociaux qui seront mis en chantier cette année alors que 80.000 étaient prévus par la loi de finances initiale.

Evolution de l'investissement locatif social financé par PLA depuis 1992

 

PLA BUDGÉTÉS

PLA

PLA MIS EN

Proportion de PLA effectivement mis

 

PLA normaux

PLA-I et PLA-TS
PLA-LM

TOTAL

FINANCÉS

CHANTIER

en chantier par rapport aux PLA budgétés

1992

80.000

10.000 PLA-I

90.000

83.876

63.000

70 %

1993

88.000

13.000 PLA-I

101.000

92.868

72.000

71 %

1994

80.000

20.000 PLA-TS

100.000

89.324

72.500

73 %

1995

60.000

28.000 PLA-TS

88.000

66.440

60.000

68 %

1996

60.000

20.000 PLA-TS

80.000

59.879

54.000

68 %

1997

50.000

30.000 PLA-TS

80.000

59.911

45.600

57 %

1998

50.000

30.000 PLA-LM et PLA-I

80.000

-

45.000*

56 %*

1999

50.000

30.000 PLA-LM et PLA-I

80.000

-

-

-

* : Estimation avancée par l'UNFOHLM en fonction de la tendance au 30.09.98 Source : Secrétariat d'Etat au logement

Or, il est à craindre que, sauf si une politique de relance de la construction de logements sociaux était décidée et rendue possible, ce fléchissement tendanciel se poursuive dans les années à venir.

Votre commission estime en effet que la crise actuelle de la construction de logements sociaux relève de facteurs structurels.

Ces facteurs structurels tiennent à la conjonction de deux effets opposés.

L'instabilité de la demande

Les besoins en logements sociaux restent importants dans notre pays. Le coût souvent élevé des loyers dans le secteur locatif privé rend difficile l'accès à ce secteur pour les ménages les plus modestes, tandis que le vieillissement progressif du parc HLM rend nécessaire son renouvellement.

Mais, paradoxalement, l'existence de besoins ne garantit pas la réalité d'une demande.

On observe en effet une vacance croissante dans le parc social : le taux moyen de vacance est passé de 1,9 % en 1993 à 2,7 % en 1997 dans le parc HLM. Cette vacance peut s'interpréter largement comme le signe de la plus faible attractivité du parc social pour les ménages. Elle s'expliquerait de deux manières :

- la dégradation de l'environnement urbain pousserait les ménages habitant les quartiers difficiles à quitter leur logement pour rejoindre des zones plus paisibles, fréquemment dans le secteur privé, même au prix de lourds sacrifices financiers. Or, près du tiers du parc HLM -soit un million de logements environ- est situé dans les zones urbaines sensibles (ZUS). Le parc social est alors la première victime du malaise urbain ;

- on assiste parallèlement à une progression de l'accession à la propriété. Entre 1992 et 1996, la proportion de ménages propriétaires de leur logement est passée de 53,8 % à 54,3 %. Le succès du prêt à taux zéro n'a, depuis, fait qu'accentuer cette tendance, notamment chez les ménages les plus modestes.

Il semble alors que le secteur HLM soit victime d'un double effet. D'une part, les ménages les plus aisés n'hésitent plus à quitter le parc social, soit pour une location dans le parc privé, soit pour accéder à la propriété. D'autre part, les plus défavorisés n'ont pas toujours les ressources suffisantes pour accéder au parc social.

Les carences de l'offre

De leur côté, les organismes HLM ne sont pas en mesure de proposer un développement de l'offre face à la volatilité croissante de la demande.

En premier lieu, la situation financière des organismes HLM tend à nouveau à se dégrader.

D'une part, les charges restent lourdes. Les taux d'intérêt réels sont élevés : les PLA ordinaires accordés par la caisse des dépôts sont actuellement versés à un taux de 4,3 %, ce qui se traduit par des taux réels supérieurs à 3 % au rythme actuel de l'inflation. La hausse des taxes foncières constitue également une charge croissante pour les organismes.

D'autre part, les ressources n'augmentent que très faiblement : les produits financiers stagnent alors que les impayés progressent (en 1996, le taux de non-recouvrement des loyers atteignait 4,5 % pour les offices publics d'HLM) et le manque à gagner lié à la vacance pèse lourdement.

Dans ces conditions, l'équilibre d'exploitation des constructions financées par les PLA n'est plus assurée dans la mesure où 80 % des loyers perçus par les HLM servent à financer le remboursement des PLA. L'équilibre d'exploitation des logements PLA repose en définitive sur les autres logements. La construction de logement est désormais plus considérée comme une charge que comme une ressource supplémentaire. C'est particulièrement le cas pour les PLA-LM et les PLA-I pour lesquels les risques d'impayés sont perçus comme plus importants.

En second lieu, face à la progression de la vacance, les organismes HLM privilégient bien souvent les opérations de réhabilitation de façon à mieux valoriser le parc existant .

En troisième lieu, la gestion des PLA se révèle souvent très complexe pour les organismes . Ainsi, la délivrance des agréments préfectoraux peut demander des délais importants pouvant parfois dépasser six mois, ce délai étant d'ailleurs fonction de la nature des PLA (il est plus long pour les PLA-LM et les PLA-I). De même, la multiplication des produits PLA tend à rendre l'offre plus opaque, et non à l'adapter à la demande.

Enfin, l'insuffisance de l'offre est parfois accentuée par les difficultés rencontrées par les organismes HLM pour acquérir du foncier . Certaines communes sont en effet réticentes à accepter l'implantation de nouveaux logements sociaux sur leur territoire. Cette réticence peut s'expliquer diversement, mais pour les petites communes, il est clair que la rigidité des normes techniques imposées -notamment en matière de sécurité- implique des travaux tellement lourds que le recours au PLA est ainsi découragé.

2. Un budget qui n'apporte aucune réponse

Face à cette situation préoccupante, le projet de budget pour 1999 est loin d'être à la hauteur des enjeux.

a) Un simple budget de reconduction

Le budget pour 1999 prévoit la reconduction des programmes physiques prévus pour 1998 : 80.000 PLA dont 20.000 PLA-LM et 10.000 PLA-I sont ainsi budgétés.

Mais parallèlement, le Gouvernement semble prendre acte de la très faible consommation des crédits PLA en prévoyant une diminution de 10 % des dotations de la " ligne fongible " destinée à financer les opérations de construction et de réhabilitation de l'habitat locatif social. Les crédits passent de 3,20 milliards de francs en loi de finances initiale pour 1998 à 2,88 milliards de francs pour 1999.

Plus encore que cette diminution des crédits, c'est l'absence de mesures nouvelles en faveur du logement social dans ce budget qui témoigne de l'inertie du Gouvernement.

b) Des mesures contestables

Certes, le Gouvernement a adopté en cours d'année deux mesures destinées à faciliter la construction de logements sociaux :

- le 15 juin, une baisse de 0,5 % de la rémunération du livret A est intervenue, sa rémunération passant de 3,5 à 3 %. Or, les ressources collectées par l'intermédiaire du livret A sont utilisées pour le financement de l'investissement locatif social. Cette baisse visait donc à rendre l'offre de logement social moins coûteuse.

- l'arrêté du 28 juin a relevé d'en moyenne 10 % les plafonds de ressources régissant l'accès au parc social. Destinée à favoriser la mixité, cette mesure est sensée renforcer l'attractivité du logement social auprès de la demande solvable.

Votre commission craint néanmoins que ces mesures ne soient très largement insuffisantes.

D'une part, si la baisse de la rémunération des livrets A a effectivement permis une diminution corrélative du coût de la ressource pour les organismes HLM, l'impact de cette mesure est bien faible. Les effets de cette baisse sur l'équilibre de l'exploitation des organismes HLM ne seront sensibles qu'à moyen terme. En outre, on évalue à 2 % le niveau des taux d'intérêt réels des prêts PLA susceptibles de garantir l'équilibre d'exploitation d'un logement financé par un PLA. Mais, après la baisse, le taux d'intérêt réel des PLA reste supérieur à 3 %.

D'autre part, la hausse du plafond de ressources apparaît bien dérisoire face aux mouvements de fond qui régissent actuellement la demande de logement social.

Votre commission s'interroge également sur les conséquences de la réforme des PLA instituée par la loi de finances pour 1998.

Cette réforme s'est traduite par la mise en place de deux types de nouveaux produits :

- les PLA-TS sont remplacés depuis le 1 er janvier 1998 par les PLA-LM (qui conservent les caractéristiques des PLA-TS) et par les PLA-I. Les PLA-I sont destinés à des ménages qui cumulent des ressources faibles et des difficultés sociales. Ils bénéficient d'une subvention majorée pouvant aller jusqu'à 25 % ainsi que de l'application du taux réduit de TVA. Le plafond de ressources des locataires à l'entrée dans le logement est limité à 60 % de celui du PLA neuf.

- les PLA " construction-démolition ", également créés en janvier 1998, doivent permettre le relogement des ménages occupant des logements sociaux destinés à être démolis. Ils bénéficient d'une subvention majorée de 12 % en complément de l'application du taux réduit de TVA.

Ces nouveaux produits ne semblent pourtant pas en mesure de remédier à la trop faible construction de logements sociaux :

- les PLA-I n'ont permis de financer que 1.054 logements au 30 septembre 1998 contre 10.000 prévus. Il semble que les subventions supplémentaires ne soient pas suffisantes pour compenser le risque lié à la très faible solvabilité des ménages ;

- la mise en place de ces nouveaux produits ne fait en définitive que complexifier plus encore le dispositif des PLA et accroître d'autant la lourdeur de gestion.

Votre commission regrette également que le Gouvernement envoie des signaux contradictoires aux organismes HLM. Alors qu'il affirme vouloir relancer la construction du logement social, le secrétaire d'Etat au logement vient de demander 2( * ) que la hausse des loyers des logements HLM en 1999 soit limitée à 1 %. Il semble pourtant que ces deux objectifs soient très largement contradictoires : la dégradation de la situation financière des organismes HLM rend en effet nécessaire la reconstruction de marges de manoeuvres financières pour que les organismes puissent adapter leurs ressources à leurs charges. La limitation de la hausse des loyers à 1 % en 1999 risque alors de contribuer à la fragilisation financière des organismes et alimentera, par là même, leur réticence à construire.

3. Une nécessaire réforme des aides à l'investissement locatif social

Les PLA apparaissent incontestablement comme un produit à la fois coûteux et complexe pour les organismes constructeurs de logements sociaux.

Pourtant, le Gouvernement considère que, " en ce qui concerne les logements sociaux, la réforme de leur financement peut désormais être considérée comme achevée " 3( * ) .

Votre commission ne partage pas ce point de vue. Bien au contraire, elle estime urgent de réformer en profondeur les aides à l'investissement locatif social.

Plusieurs pistes de réformes peuvent ainsi être explorées.

La diminution du coût de la ressource

Les PLA sont actuellement assujettis à un taux d'intérêt réel trop élevé pour assurer l'équilibre financier des opérations.

Deux solutions sont envisageables pour alléger le coût de la ressource.

L'allongement de la durée des prêts serait possible. Toutefois, la marge de manoeuvre reste étroite dans la mesure où leur durée est déjà de 30 à 32 ans.

La diminution du taux d'intérêt est une voie plus praticable. Actuellement, le PLA est financé quasi essentiellement sur les ressources du livret A dont le taux d'intérêt est de 3 %. A ce taux s'ajoute une rémunération des organismes collecteurs (1,2 % pour les caisses d'épargne et 1,5 % pour la Poste). Dans ces conditions, il serait possible de diminuer le taux d'intérêt du PLA soit en baissant le taux de rémunération du livret A, soit en réduisant la rémunération des organismes collecteurs. Toutefois, il apparaît délicat d'abaisser la rémunération d'une épargne à laquelle sont attachés les ménages modestes et dont le taux réel net d'impôt, qui sera de 1,7 % en 1999, si on prend en compte les prévisions de hausse des prix à la consommation, ne semble pas déraisonnable. En outre, la diminution des taux n'exercerait d'effets réels qu'à moyen terme sur l'équilibre financier des opérations PLA, à moins de réaligner le taux de l'encours des prêts.

La simplification des aides

Le régime des PLA est en effet extrêmement complexe et opaque.

Ainsi, 15 à 16 types de PLA coexistent suivant des régimes différents. Le tableau ci-dessous recense les différents régimes des PLA actuellement versés par la Caisse des dépôts. A ces PLA, il faut ajouter les PLA contractés avant la réforme de 1998 et les PLA versés par le Crédit foncier de France. La multiplicité des PLA accroît alors la complexité du système.

Régime des PLA de la Caisse des dépôts

(en %)

Type de PLA

Taux de TVA applicable

Taux de subvention

Taux d'intérêt nominal du prêt

Construction neuve

 
 
 

- PLA " normal "

5,5

0

4,3

- PLA-LM

5,5

8 à 13

3,8

- PLA-I

5,5

20

3,8

- PLA " expérimental "

5,5

3

nc

- PLA " construction-démolition "

5,5

12

3,8

Acquisition-amélioration

 
 
 

- PLA " normal "

5,5

5

4,3

- PLA-LM

5,5

13 à 18

4,3

- PLA-I

5,5

20 à 25

4,3

La complexité des PLA est encore accrue par les lourdeurs administratives présidant à la délivrance des agréments. Des délais de six mois ne sont en effet guère acceptables.

Dans ces conditions, une simplification du système semble bien nécessaire.

Une simplification des modalités de gestion des PLA-LM et des PLA-I serait une première étape, qui pourrait contribuer au lancement d'un volume plus important d'opérations. Il semble cependant qu'il faille aller plus loin. Une harmonisation, voire une unification des PLA, pourraient ainsi être envisagées.

Une plus grande décentralisation du financement du logement social

On assiste actuellement au développement de nombreuses expériences innovantes à l'échelon local en matière de logement social. Ces expériences sont d'ailleurs souvent motivées par la faiblesse des crédits d'Etat ou par la rigidité des instruments trop centralisés.

Votre commission tient ici à souligner deux types d'opérations particulièrement innovantes, menées par les départements.

La première expérience est celle des programmes de location-accession sociale à la propriété. La rigidité des procédures administratives est particulièrement importante dans le domaine de l'accession très sociale, alors que les chances de réussite du parcours d'accession sont pourtant souvent très élevées. Certains départements -dont l'Indre-et-Loire- cherchent actuellement à contourner cette difficulté en proposant des logements en accession différée après une période transitoire pendant laquelle le futur accédant paye un loyer et se constitue progressivement un apport personnel. Cette expérience permet alors de réaliser des logements en accession par le biais d'opérations de construction ou d'acquisition de logements locatifs sociaux.

La seconde expérience, plus développée, s'apparente à un abondement budgétaire. Pour chaque franc investi par l'Etat dans le logement social, le département investit à son tour un franc dans le même secteur. Cette expérience a l'avantage de la souplesse et, grâce à son effet multiplicateur, incite à un investissement accru dans le logement social.

Ces expériences ont, selon votre commission, le mérite de souligner qu'une plus grande décentralisation de la politique du logement social donne des résultats prometteurs.

Il importe donc de développer une " territorialisation " de la politique du logement social. Plus à l'écoute du terrain, les acteurs locaux sont les plus à même de définir les besoins en matière de logement social et les produits les plus adaptés. On pourrait donc imaginer une nouvelle forme de contractualisation entre l'Etat et les acteurs locaux permettant à ceux-ci, avec l'accord du préfet, de définir les paramètres des produits -et notamment des PLA- en fonction du contexte local.

Votre commission considère que l'examen du prochain projet de loi relatif à l'habitat et à l'urbanisme devrait être l'occasion de valider dans la loi les expériences locales les plus innovantes et de permettre une plus grande souplesse des aides à l'investissement locatif social, dans le cadre d'une contractualisation locale plus étendue et plus approfondie.

En tout état de cause, des voies de réforme des aides au logement locatif social existent et doivent être étudiées en détail. Votre rapporteur se propose d'ailleurs de poursuivre cette réflexion, au sein de votre commission, dans le cadre qui lui semblera le plus approprié.

B. L'EFFORT DE RÉHABILITATION DU PARC LOCATIF SOCIAL RISQUE DE MARQUER LE PAS

1. La poursuite apparente du programme de réhabilitation du parc social

Le parc social est relativement récent, comparé à l'ensemble du parc français. Il ne compte que 6 % de logements construits avant 1950 contre 36 % pour l'ensemble du parc. Le rythme de construction a été très élevé de 1960 à 1980. 56 % des logements sociaux ont été construits à cette période. Il reste que le vieillissement progressif du parc social implique un effort de réhabilitation important.

La convention signée le 17 janvier 1995 entre le Gouvernement et l'Union nationale des fédérations d'organismes d'HLM (UNFOHLM) a retenu un programme de réhabilitation du parc locatif social de 600.000 logements en cinq ans. Ce programme prévoit de financer en priorité les opérations inscrites dans le cadre du traitement des quartiers les plus prioritaires de la politique de la ville.

L'aide à la réhabilitation des logements sociaux est assurée par deux dispositifs.

Les primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (PALULOS)

La réhabilitation du parc social depuis 1990

PALULOS

Crédits consommés (en millions de francs)

Nombre de logements réhabilités (1)

Coût moyen
(en francs)

1990

2.161,6

173.161

12.483

1991

2.222,3

161.148

13.790

1992

2.581,8

170.643

15.130

1993

2.704,8

167.391

16.159

1994

2.069,2

136.414

15.168

1995

1.423,3

94.086

15.128

1996

1.493,5

108.273

13.794

1997

2.109,7

156.073

13.517

(1) Le nombre de logements réhabilités concerne uniquement ceux dont le coût des travaux est supérieur à 15.000 francs

Source : Secrétariat d'Etat au logement


L'UNFOHLM estime que le nombre de réhabilitations financées avec PALULOS se situe actuellement sur un rythme de 160.000 logements pour 1998, soit un rythme supérieur aux 120.000 PALULOS budgétées en loi de finances initiale.

Le projet de budget pour 1999 prévoit de financer 120.000 PALULOS supplémentaires.

L'application du taux réduit de TVA pour les travaux de réhabilitation du parc social

L'article 14 de la loi de finances pour 1998 a en outre étendu aux travaux de réhabilitation, transformation et rénovation des logements locatifs sociaux le bénéfice du taux réduit de TVA de 5,5 % déjà applicable à la construction sociale.

Au total, les opérations éligibles à la PALULOS cumulent l'avantage d'une subvention et celui d'un allégement fiscal. L'aide globale atteint environ 22 % du montant des travaux.

2. Le risque d'un ralentissement de l'effort en faveur de la réhabilitation

Si l'effort budgétaire consenti ces dernières années a permis la poursuite du programme de réhabilitation du parc social, votre commission craint qu'un ralentissement du programme de réhabilitation n'intervienne dans les mois à venir.

D'une part, le rythme élevé de réhabilitations tient pour beaucoup au programme supplémentaire de 50.000 logements annoncé en 1997. Ce programme arrivant à échéance, le rythme de réhabilitations devrait diminuer sensiblement.

D'autre part, l'application de la TVA à taux réduit pose des difficultés importantes aux organismes HLM. Ce dispositif se traduit en effet par une lourdeur de gestion accrue qui risque de pousser les organismes HLM à renoncer au bénéfice de la mesure. Le dispositif prévoit un agrément préalable du préfet pour toute opération afin de vérifier l'éligibilité des travaux. Or, le délai d'instruction des demandes d'agrément est souvent très long, ce qui ralentit d'autant les travaux. En outre, l'agrément n'est pas opposable aux services fiscaux en cas de contrôle ultérieur, ce qui place les organismes dans une situation d'insécurité fiscale pénalisante.

Votre commission, dans le souci de permettre la nécessaire poursuite de l'effort de réhabilitation, est favorable à une simplification de ce mécanisme d'incitation fiscale . Elle estime souhaitable d'examiner l'opportunité de la suppression de l'agrément préalable en se contentant d'un contrôle unique a posteriori par les services fiscaux.

IV. LE PARC PRIVÉ : L'AMORCE D'UNE RÉORIENTATION SOCIALE

La politique sociale du logement concerne en premier chef le parc social. Mais elle vise également le parc privé dans la mesure où elle permet d'ouvrir l'accès au parc privé aux familles modestes, soit en accession, soit en location, mais également de favoriser leur maintien dans le logement, notamment grâce à la réhabilitation de l'habitat dégradé.

Le projet de budget pour 1999 tend à renforcer la vocation sociale du parc privé dans une triple direction.

A. L'ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ EST PÉRENNISÉE ET PROTÉGÉE

1. La pérennisation du prêt à taux zéro

a) Les aides à la pierre pour l'accession sociale

L'accession sociale à la propriété est actuellement principalement assurée par deux mécanismes complémentaires.

Le prêt à taux zéro

Ce dispositif a été institué en octobre 1995 en remplacement des prêts aidés à l'accession à la propriété (PAP) et des mesures fiscales qui y étaient attachées. Il permet de financer des opérations de construction ou d'acquisition d'un logement neuf ou d'acquisition-amélioration d'un logement existant par les ménages de condition modeste.

Le prêt à taux zéro est destiné aux personnes physiques sous condition de ressources qui acquièrent un logement en vue de l'occuper en tant que résidence principale. Les plafonds de ressources varient en fonction du nombre de personnes composant le ménage accédant à la propriété et de la zone d'implantation du logement. A titre d'exemple, le plafond de ressources est de 207.100 francs pour un ménage de trois personnes habitant en Ile-de-France ou de quatre personnes habitant en province.

Son montant ne peut excéder 20 % du coût de l'opération retenue dans la limite d'un prix maximal également déterminé en fonction de la composition familiale du ménage et de la localisation du logement et 50 % du montant du ou des autres prêts d'une durée supérieure à deux ans concourant au financement de l'opération.

Le prêt à taux zéro (PTZ) se distingue des anciens PAP notamment par :

- des plafonds de ressources plus élevés que pour les PAP, permettant pratiquement à environ 80 % des accédants de bénéficier d'un tel prêt ;

- un non-contingentement du nombre de prêts distribués, permettant d'éviter l'effet " file d'attente " parfois engendré par les PAP ;

- son caractère de prêt complémentaire, le PTZ ne peut jamais être un prêt principal et doit donc être associé à un ou plusieurs autres prêts

- un mode de diffusion banalisé, permettant à tout établissement financier ayant signé une convention avec l'Etat de distribuer le prêt à taux zéro. Il autorise ainsi une mise en concurrence de ceux-ci pour les prêts qui lui sont associés.

Le prêt à taux zéro est aujourd'hui incontestablement un succès.

Le succès se traduit d'abord sur le plan quantitatif : depuis 1996, plus de 300.000 prêts à taux zéro ont été " mis en force " selon la terminologie en cours au secrétariat d'Etat au logement.

 

1996

1997

1 er semestre 1998

Total

Nombre de PTZ mis en force

117.900

129.150

56.800

303.850

Source : Secrétariat d'Etat au logement

Mais le mérite le plus évident du prêt à taux zéro tient à son rôle social : il a permis à de nombreuses personnes aux ressources très modestes d'accéder à la propriété. Ainsi 36 % des ménages bénéficiaires d'un prêt à taux zéro avaient des revenus annuels inférieurs à 82.900 francs.

Bénéficiaires du prêt à 0 % et structure des financements associés

Tranche

Effectifs

Structure de financement

de revenus

en %

Prêt à 0 %

Prêt principal

Autres prêts

Autofinancement

de 0 à 82.900

36 %

17 %

55 %

9 %

19 %

de 82.901 à 103.600

21 %

17 %

54 %

11 %

18 %

de 103.601 à 124.300

17 %

16 %

51 %

12 %

21 %

de 124.301 à 145.00

12 %

16 %

49 %

12 %

23 %

de 145.001 à 165.700

8 %

15 %

48 %

12 %

25 %

de 165.701 à 186.400

4 %

14 %

46 %

12 %

28 %

186.401 et plus

2 %

13 %

45 %

11 %

30 %

TOTAL

100 %

16 %

52 %

11 %

21 %

Source : SGFGAS

Ce résultat est d'autant plus remarquable qu'il permet la mise en place de plans de financement très supportables pour les ménages, même les plus modestes comme en témoigne le tableau suivant.

Plan de financement moyen

Année d'émission

1997
(montants en francs)

1997
(en %)

Prêt à taux zéro

102.000

16,7

Prêt principal

350.000

57,4

Autres prêts (1)

55.000

9,0

Apport personnel

103.000

16,9

Total

610.00

100

Mensualité moyenne

3.685

 

Source : SGFGAS

(1) y compris épargne-logement si elle existe.

Le prêt à l'accession sociale (PAS)

Le prêt à l'accession sociale (PAS), créé en 1993, est un prêt conventionné qui bénéficie d'une garantie de l'Etat par l'intermédiaire du Fonds de garantie de l'accession sociale (FGAS). Son taux, son éligibilité à l'APL et l'existence d'un plafond de ressources en font un produit ciblé sur l'accession sociale, et en cela complémentaire au prêt à 0 %. La production de PAS a ainsi augmenté sensiblement dès la mise en place du prêt à 0 %, auquel il est associé dans plus de 40 % des cas, comme en témoigne le tableau suivant.

 

1993

1994

1995

1996

1997

Nombre de PAS mis en force

8.748

39.700

36.600

78.153

65.819

% opérations en acquisition dans l'ancien

84

86

77

49

36

% bénéficiaires de l'APL

45

44

48

55

56

Source : SGFGAS

Environ 70.000 PAS devraient être distribués en 1998.

b) Une pérennisation nécessaire

En dépit du succès manifeste du prêt à taux zéro, le nouveau gouvernement n'a pas fait de l'accession sociale à la propriété une de ses priorités en matière de logement.

Bien au contraire, il a fragilisé le mécanisme du prêt à taux zéro de deux manières :

- le prêt à taux zéro est réservé depuis le 1 er novembre 1997 aux primo-accédants ;

- la durée d'amortissement maximale du prêt est réduite.

Dans ces conditions, votre commission craignait que l'existence même du prêt à taux zéro soit menacée.

Le Gouvernement s'est pourtant engagé à pérenniser le prêt à taux zéro. Le budget pour 1999 confirme cet engagement en prévoyant une rebudgétisation progressive des crédits destinés à le financer.

Jusqu'à présent, l'Etat finançait, à hauteur de 7 milliards de francs par an, les prêts à taux zéro par un prélèvement sur les ressources des organismes gérant le 1 % logement.

La convention du 3 août dernier signée entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement (UESL) prévoit l'extinction progressive de la contribution du 1 % logement d'ici à 2003. Parallèlement, les crédits relatifs au prêt à taux zéro sont en partie rebudgétisés. Ainsi, les nouveaux prêts accordés en 1999 seront directement financés par le budget de l'Etat, 3,1 milliards de francs y étant affectés. Mais les prêts accordés en 1998 resteront financés par le compte d'affectation spéciale " Fonds pour le financement de l'accession à la propriété ". La rebudgétisation devrait être totale en 2000.

Les moyens prévus par le budget pour 1999 devraient alors permettre de poursuivre la distribution de ces prêts au même niveau qu'en 1998, soit 110.000 prêts environ, et à barème inchangé.

Votre commission se félicite de la décision de pérenniser et de rebudgétiser le prêt à taux zéro. Mais elle s'inquiète pourtant de l'avenir de ce dispositif.

Le financement du prêt à taux zéro reposera en effet à l'avenir sur le budget général. Compte tenu du contexte budgétaire, on ne peut exclure que le Gouvernement ne cherchera ultérieurement à réduire la portée de ce prêt réglementé, soit en instituant un strict contingentement, soit en revoyant les barèmes.

Votre commission sera donc très vigilante à ce que la pérennisation annoncée du prêt à taux zéro soit réelle.

2. La " sécurisation " de l'accession sociale

a) La fragilité des mécanismes de " sécurisation " existants

Face à l'évolution du marché du travail et des modes de vie, caractérisée par une précarité accrue, les dispositifs destinés à garantir la sécurité des investissements immobiliers, notamment ceux effectués par les ménages les plus modestes ou les plus vulnérables, constituent un enjeu important pour la pérennité de la politique de l'accession sociale à la propriété.

Or, à l'heure actuelle, ces mécanismes de " sécurisation " sont d'une ampleur très limitée.

Il n'existe en réalité qu'un seul mécanisme de ce type : le fonds de garantie d'accession à la propriété (FGAS).

Créé par la loi de finances pour 1993, le FGAS est chargé de gérer, pour le compte de l'Etat, la garantie que celui-ci accorde aux prêts PAS et, depuis 1995, à certains prêts à taux zéro. Il est essentiellement financé par une cotisation égale à 2,5 % des prêts garantis, versée pour moitié par l'Etat et pour l'autre moitié par les établissements de crédits. Il est géré par la société de gestion du FGAS (SGFGAS), société anonyme. Il est chargé d'indemniser les établissements de crédits pour les sinistres survenus pendant la durée des prêts garantis.

Mais, jusqu'à présent, le FGAS n'est que peu intervenu : de mars 1994 à mars 1998, il n'a versé que moins d'un million de francs au titre des sinistres intervenus, pour un stock de près de 300.000 PAS.

Or, votre commission estime qu'un renforcement de la " sécurisation " est nécessaire pour deux raisons.

D'une part, le FGAS n'apporte qu'un soutien a posteriori aux établissements de crédits. Il serait alors souhaitable de le compléter par un mécanisme de soutien aux accédants, intervenant en amont de la constatation du sinistre et permettant aux ménages de se maintenir dans leur logement pour ne pas accentuer la dégradation financière par l'exclusion par le logement.

D'autre part, le succès du prêt à taux zéro a conduit des ménages très modestes à se lancer dans l'accession. Dans la mesure où les ménages accédants deviennent plus vulnérables, la sécurisation doit être renforcée.

b) La mise en oeuvre d'une nouvelle " sécurisation "

La convention quinquennale signée le 3 août dernier entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement (UESL) met en place un dispositif de sécurisation des accédants à la propriété, comprenant deux volets.

Le premier volet concerne l'ensemble des ménages titulaires d'un PAS, leur permettant de bénéficier en cas de chômage d'un report en fin de prêt de 50 % au maximum du montant de leurs mensualités PAS et éventuellement de celles du prêt à taux zéro. A cette fin, l'UESL abondera un fonds " sécurisation chômage ", géré par la SGFGAS mais dont le risque est supporté par l'UESL. La " garantie de bonne fin " en cas de sinistralité réelle supérieure à la sinistralité prévisionnelle sera apportée par l'UESL.

Le second volet, réservé aux accédants salariés d'entreprises assujetties à la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), leur permettra, si leurs revenus sont inférieurs aux plafonds d'éligibilité au prêt à taux zéro et en cas de forte réduction de leurs ressources, consécutivement à une situation de chômage ou d'éclatement de la cellule familiale, de bénéficier d'une aide sous la forme d'une avance remboursable non rémunérée pour leur faciliter le remboursement des mensualités de leurs emprunts pour la résidence principale. Un fonds " prévention 1 % " est créé à cet effet au sein de l'UESL, dont la dotation sera fixée chaque année par son conseil d'administration dans la limite de 800 millions de francs.

Le projet de loi relatif à l'emploi des fonds de la participation des employeurs à l'effort de construction reprend les principales dispositions de cette convention. Il a été adopté à l'unanimité en première lecture au Sénat le 12 novembre dernier.

Votre commission se félicite de la mise en oeuvre d'un tel mécanisme de " sécurisation ". Elle tient néanmoins à formuler une observation.

L'extinction progressive du financement du prêt à taux zéro par le 1 % logement permet à celui-ci de retrouver d'importantes marges de manoeuvres financières. Mais il ne faudrait pas que ces marges de manoeuvres soient totalement affectées à des interventions nouvelles. Votre commission estime en effet que le 1 % logement doit aussi développer ses interventions traditionnelles. Les fonds du 1 % logement ont en effet joué un rôle d'appoint important pour le bouclage financier des opérations de construction à caractère social. Ainsi, en 1997, les emplois du 1 % logement (hors financement du prêt à taux zéro) étaient consacrés, pour 37 %, à des versements à des organismes de logement social à hauteur de 4,1 milliards de francs. En 1996, le 1 % logement a permis de financer 140.000 logements locatifs, dont 50.000 en construction.

Votre commission souhaite que la nouvelle mission dévolue à l'UESL se fasse parallèlement à la réaffirmation de son intervention dans la construction de logements sociaux.

B. L'INVESTISSEMENT LOCATIF EST RÉORIENTÉ VERS LE LOGEMENT INTERMÉDIAIRE

1. Les difficultés persistantes du logement locatif intermédiaire

Une frange importante de ménages à revenus moyens, souvent de jeunes ménages, sont exclus du parc social, mais rencontrent des difficultés d'accès au logement locatif privé, ne pouvant supporter les niveaux de loyer du marché libre.

Un prêt spécifique -le prêt locatif intermédiaire- a été institué en 1987 pour financer des opérations répondant aux besoins de ces ménages.

Le prêt locatif intermédiaire (PLI) a pour objet le financement de logements situés dans des zones géographiques souffrant d'une tension manifeste de leur marché locatif et dont le loyer est appelé à se situer entre celui que pratique le secteur social pour un habitat financé par un prêt locatif aidé et celui qui s'observe sur le marché libre.

Les emprunteurs qui souscrivent un prêt locatif intermédiaire s'engagent à affecter les logements financés à la location pendant une période minimale (durée du prêt lui-même pour les bailleurs sociaux, douze ans en règle générale pour les bailleurs privés) en respectant des plafonds de ressources et de loyers.

Les établissements prêteurs sont, à titre exclusif, la Caisse des dépôts et consignations, le Crédit foncier de France et le Comptoir des entrepreneurs.

Depuis son institution, le PLI a fait l'objet d'ajustements successifs touchant le taux du prêt, sa durée, les plafonds de ressources des locataires, les plafonds de loyer, la durée minimale de location.

Actuellement, le PLI est un prêt à taux fixe de 5,5 % dont la durée n'excède pas 25 ans. Les autres règles ont été progressivement assouplies : les plafonds de ressources permettent l'égibilité de 85 % des ménages, la durée minimale de location est ramenée à 6 ans.

Pourtant, le nombre de PLI distribués diminue régulièrement , comme en témoigne le tableau ci-après. M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, a ainsi reconnu devant votre commission que le PLI est " un produit qui n'a pas trouvé sa place " .

Nombre de PLI distribués depuis 1993

(en nombre de logements financés ou agréés)

 

1993

1994

1995

1996

1997

PLI Caisse des dépôts et consignations

4.000

6.000

6.000

4.700

3.300

PLI Crédit foncier de France

3.000

2.300

2.800

4.100

2.500

PLI Comptoir des entrepreneurs

1.100

1.000

1.200

800

800

TOTAL

8.100

9.300

9.600

9.600

6.600

Source : Secrétariat d'Etat au logement

En effet, malgré les multiples adaptations dont le PLI a été l'objet, les opérations montées avec ce financement connaissent des difficultés importantes pour parvenir à un équilibre satisfaisant. La rentabilité de ces opérations est en effet très incertaine. Les loyers qui seraient nécessaires pour parvenir à l'équilibre sont trop élevés par rapport aux capacités des ménages ou aux marchés locaux. De plus, l'accès à d'autres ressources comme le 1 % logement ou les subventions des collectivités locales reste très difficile.

Votre commission s'inquiète du rétrécissement du parc de logement intermédiaire. Elle considère pourtant que ce type de logement correspond à un véritable besoin, mais constate une inadéquation persistante entre l'offre et la demande.

2. Un effort en faveur du logement intermédiaire, notamment par le biais du nouveau statut du bailleur privé, aux effets incertains

Le Gouvernement semble avoir pris conscience des difficultés rencontrées par le logement intermédiaire.

Déjà, la convention conclue entre l'Etat et l'UESL prévoit explicitement une mobilisation de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) à hauteur de 300 millions de francs annuels pendant les cinq années à venir, ce qui devrait contribuer à rendre possible le montage d'opérations PLI avec un loyer de sortie d'un montant compatible avec les ressources des ménages visés.

Le projet de budget pour 1999 propose une mesure d'une tout autre ampleur : la réorientation des incitations fiscales à l'investissement locatif vers un nouveau secteur privé conventionné.

Jusqu'à présent, le mécanisme d'incitation fiscale à l'investissement locatif privé est celui d'un régime d'amortissement accéléré, dit " amortissement Périssol ".

Institué par la loi du 12 avril 1996, l'" amortissement Périssol " permet aux propriétaires de logements neufs situés en France de demander à bénéficier d'une déduction de leurs revenus fonciers au titre de l'amortissement égale à 10 % du prix d'achat pour les quatre premières années et à 2 % pour les vingt années suivantes. Le total des déductions représente donc 80 % de la valeur du logement. En contrepartie, le propriétaire doit s'engager à louer le logement pour une durée de neuf ans.

La loi du 2 juillet 1998 portant diverses mesures d'ordre économique et financier a prolongé ce dispositif jusqu'au 31 août 1999, pour les permis de construire délivrés avant le 1 er janvier prochain.

L'article 68 du projet de loi de finances prévoit une alternative à la disparition programmée de l'amortissement Périssol. Le dispositif proposé comporte quatre différences majeures avec le régime fiscal actuel :

- un taux d'amortissement moins attractif
. Pour les logements neufs, le taux d'amortissement sera de 8 % de la valeur de l'investissement pendant les cinq premières années, puis de 2,5 % les quatre années suivantes. Le total des déductions ne représentera alors plus que 50 % de la valeur de l'investissement ;

- l'extension du régime d'incitation fiscale au parc ancien . Le taux de déduction forfaitaire sur les revenus fonciers (fixé à 14 % actuellement) sera majoré de 25 % pour les six premières années de location ;

- l'instauration de " contreparties sociales " . Pour bénéficier de l'avantage fiscal, le bailleur devra respecter des plafonds de ressources (il s'agirait du plafond de ressources PLA majoré de 40 %) des locataires et des plafonds de loyers (pour le neuf, 75 francs par m² à Paris et dans les communes limitrophes, 65 francs par m² dans l'agglomération parisienne, 50 francs par m² dans les agglomérations de plus de 100.000 habitants, 45 francs par m 2 ailleurs).

- la mise en place d'une meilleure " sécurisation " pour les bailleurs. Celle-ci prendra deux formes : l'allocation logement sera versée directement au bailleur et le bailleur pourra bénéficier d'une garantie de loyer en vertu de la convention signée entre l'Etat et l'UESL.

Votre commission estime que ce nouveau " statut du bailleur privé " apporte des améliorations par rapport au régime existant, mais reste handicapé par une incertitude .

Les améliorations sont au nombre de trois.

En premier lieu, la mise en place d'une " contrepartie sociale " devrait permettre de réorienter l'investissement locatif privé vers le secteur intermédiaire dont on a vu la situation très dégradée . Les plafonds de ressources et de loyers qui seront retenus sont en effet très proches des paramètres des PLI.

En second lieu, l'extension du dispositif à l'ancien permet de remédier à la principale insuffisance de l'amortissement Périssol.

Enfin, la nouvelle " sécurisation " permettrait de compenser la diminution de l'avantage fiscal et d'assurer l'attractivité du nouveau régime en protégeant les bailleurs contre les impayés de loyer . ( cf. encadré ci-dessous ).

La " sécurisation " du bailleur privé

Une garantie de paiement du loyer et des charges locatives peut être octroyée, en cas d'impayés. Le montant de la garantie est plafonné à neuf mois de loyers et charges, et son intervention est limitée à une période de trois ans ; cependant, dans le parc locatif privé conventionné, le montant maximum de l'aide est porté à trois ans de loyers et charges , si le logement fait l'objet d'une réservation locative en contrepartie de la garantie. Lorsque la garantie est mise en oeuvre, les fonds versés au bailleur sont ensuite remboursés par le locataire sous la forme d'une avance sans intérêts.

Peuvent bénéficier de cette mesure, les bailleurs qui donnent un logement en location aux locataires suivants :

- les salariés des entreprises assujetties à la participation, souhaitant accéder uniquement à un logement du parc locatif privé conventionné ;

- les jeunes de moins de trente ans en recherche de premier emploi et les salariés en situation de mobilité professionnelle.

Mais il subsiste une incertitude. " L'amortissement Périssol " était incontestablement un succès. Votre commission se demande si le " dispositif Besson " permettra la poursuite de ce mouvement. Le plafonnement des loyers réduit la rentabilité économique de l'investissement locatif, tandis que le nouveau régime d'amortissement en limite l'avantage fiscal. Votre commission observe cependant que la projection présentée par le professeur Michel Mouillart 4( * ) aboutit à deux conclusions équilibrées :

- le dispositif pourrait se traduire par une diminution de l'ordre de 10.000 mises en chantier, en année pleine, essentiellement à Paris et en Provence Côte d'Azur ;

- mais il pourrait également favoriser l'émergence d'un logement locatif de taille familiale, notamment en province (les grands logements et la province étant moins touchés par le plafonnement des loyers).

Votre commission restera donc tout particulièrement vigilante et examinera avec attention les effets concrets de ce nouveau dispositif.

C. L'EFFORT EN FAVEUR DE LA RÉHABILITATION DU PARC PRIVÉ EST CONFIRMÉ

La dernière enquête logement de l'INSEE réalisée en 1997 montre que les besoins en matière de réhabilitation restent importants.

Malgré une importante amélioration au cours des quinze dernières années, le parc privé de logements existants nécessite encore des besoins importants à la fois d'amélioration du parc inconfortable et de remise à niveau de logements achevés dans les années 50 et 60.

L'enquête logement fait ressortir que le nombre de logements auxquels il manque un des éléments de confort tel que eau, installations sanitaires et chauffage central est de 2.315.000. Parmi eux, 388.000 sont jugés très inconfortables, c'est-à-dire qu'ils ne disposent d'aucune installation sanitaire. Le parc de logements sans confort comprend 935.000 résidences principales, soit environ 4 % du parc des résidences principales.

La politique de réhabilitation est une composante importante de la politique sociale du logement. D'une part, ce sont souvent les ménages les plus modestes qui vivent dans un habitat dégradé. D'autre part, les instruments de la politique de réhabilitation tendent de plus en plus à inclure des clauses sociales : plafonds de ressources, plafonds de loyers, conventionnement...

Le budget pour 1999 témoigne d'un important effort en faveur de la réhabilitation du parc privé. Les dispositifs traditionnels sont reconduits et de nouvelles incitations fiscales sont mises en place.

1. La reconduction des dispositifs existants

a) Les primes à l'amélioration de l'habitat

La prime à l'amélioration de l'habitat est une subvention réservée aux propriétaires occupants dont les ressources ne dépassent pas 70 % des plafonds de ressources des anciens PAP. Le taux de base de la subvention est de 20 % (25 % dans les opérations programmées d'amélioration de l'habitat). Le taux est majoré à 35 % lorsque les ressources sont inférieures à 50 % des plafonds PAP, le tout dans la limite d'une dépense subventionnable de 70.000 francs par logement.

Mais ce régime général comporte de nombreuses exceptions : le taux de la subvention et le plafond des dépenses subventionnables peuvent être majorés en fonction des caractéristiques du ménage (personnes handicapées par exemple) et du cadre de réalisation de la PAH (opération programmée d'amélioration de l'habitat par exemple).

Bilan des PAH depuis 1990

 

Nombre de primes accordées

Montant total des primes
(en millions de francs)

Montant moyen unitaire
(en francs)

1990

49.663

505,5

10.179

1991

47.234

507,9

10.755

1992

52.276

559,0

10.694

1993

60.802

646,8

10.638

1994

68.771

728,9

10.599

1995

55.909

591,4

10.578

1996

72.510

767,0

10.578

1997

66.623

718,9

10.791

Source : Secrétariat d'Etat au logement

Le budget pour 1999 prévoit une reconduction des dotations budgétaires : 800 millions de francs qui pourraient permettre de financer 80.000 réhabilitations.

Constatant le caractère très social de la PAH et observant l'aide importante qu'apporte cette prime à des propriétaires occupants souvent modestes, votre commission prend acte du maintien des crédits budgétaires à ce niveau.

b) L'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH)

L'ANAH a pour objet d'aider à l'amélioration des logements locatifs appartenant à des propriétaires privés.

A cet effet, l'ANAH reçoit une dotation du budget de l'Etat et attribue des subventions aux propriétaires privés qui réalisent des travaux d'amélioration dans les logements locatifs de plus de quinze ans et qui s'engagent à les louer pendant dix ans à titre de résidence principale.

Après travaux, les logements doivent être loués à titre de résidence principale pendant dix ans et être assujettis au versement de la taxe additionnelle au droit de bail, mais ils peuvent être exonérés de celle-ci en raison du faible montant des loyers.

En règle générale, le taux de subvention est égal à 25 % d'un montant plafonné de travaux subventionnables. Il peut être porté à 35 % lorsque le logement situé dans une opération programmée d'amélioration de l'habitat (OPAH) fait l'objet d'une convention passée entre l'Etat et le bailleur rendant obligatoire un plafond de ressources pour les locataires, ainsi qu'un plafond de loyer. Dans le cadre d'un Programme social thématique (PST) destiné au logement des personnes défavorisées, le taux de subvention peut alors atteindre 70 % moyennant certaines conditions. De plus, dans les OPAH, le taux de subvention peut être porté de 35 à 40 % sous réserve qu'une collectivité locale accorde une subvention complémentaire au taux de 5 %.

L'article 54 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a étendu le champ d'intervention de l'ANAH aux zones de revitalisation rurale (ZRR) pour financer la transformation en logements locatifs d'immeubles non initialement affectés à l'habitation.

Activité et financement de l'ANAH depuis 1994

 

1994

1995

1996

1997

Subventions engagées (en millions de francs)

2.724

2.731

2.595

2.338

Nombre de logements subventionnés

143.600

126.500

111.800

107.600

Votre commission juge le bilan de l'ANAH très positif à deux égards.

D'une part, l'ANAH, dans le cadre des OPAH, joue un rôle fondamental en milieu rural.
Les OPAH constituent en effet l'instrument privilégié pour la mise en oeuvre des politiques locales de l'habitat. Votre commission observe notamment que les subventions de l'ANAH contribuent très fortement à la revitalisation des centres bourgs.

D'autre part, les interventions de l'ANAH, et plus particulièrement dans le cadre des PST, favorisent de manière très sensible l'accès au logement des personnes défavorisées. Elles permettent en effet de remettre sur le marché au profit des plus démunis des logements dégradés restés vacants avant réhabilitation ( cf. infra IV ).

Le budget pour 1999 prévoit une augmentation de 35 millions de francs des subventions d'investissement de l'ANAH. Elles atteindront 2,14 milliards de francs en 1999 permettant de financer environ 100.000 opérations de réhabilitation.

Observant que cette légère progression des crédits se double d'une mesure nouvelle en matière fiscale, votre commission prend acte de cette évolution des crédits.

2. La mise en place de nouvelles incitations fiscales

Outre la reconduction des interventions traditionnelles, le projet de loi de finances tel qu'il arrive sur le bureau du Sénat contient deux nouvelles mesures d'incitations fiscales en faveur de la réhabilitation du parc privé.

L'article 22 prévoit l'application du taux réduit de 5,5 % de TVA aux travaux subventionnés par l'ANAH, dans des logements faisant l'objet d'un conventionnement APL. Le coût de la mesure est estimé à 200 millions de francs. Il s'agit en fait de l'extension au parc privé de la mesure de la loi de finances initiale pour 1998 appliquant le taux réduit de TVA aux travaux dans le logement social.

Considérant que le conventionnement APL permettra de garantir le caractère social de la mesure, votre commission en prend acte tout en s'interrogeant sur la complexité du mécanisme prévu (système de la " livraison à soi-même ") pour les petits bailleurs.

L'article 22 bis (nouveau), issu d'un amendement de la commission des finances et adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, vise à doubler le plafond de dépenses d'entretien afférentes à l'habitation principale ouvrant droit à crédit d'impôt. Il prévoit également de majorer le taux de leur prise en charge de 15 à 20 %.

V. LES AIDES À LA PERSONNE : UN EFFORT BUDGÉTAIRE DOUBLÉ D'UNE RÉFORME TIMORÉE

En 1997, 75,3 milliards de francs de prestations d'aides personnelles au logement ont été versés à 6,17 millions de ménages. Le budget de l'Etat a participé pour 32,4 milliards de francs -soit 43 % du total- au financement des aides à la personne.

Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit une augmentation de 6 % des aides à la personne par rapport à la loi de finances initiale pour 1998. Elles devraient atteindre 34,6 milliards de francs.

Rendue nécessaire par la persistance de difficultés importantes d'accès au logement des ménages les plus modestes, la forte progression des aides personnelles au logement ne semble pourtant pas avoir permis une diminution du " taux d'effort " 5( * ) des bénéficiaires. Une réforme en profondeur des aides à la personne est donc nécessaire pour renforcer leur efficacité sociale.

A. LA PROGRESSION DES AIDES À LA PERSONNE SE POURSUIVRA EN 1999

1. Un rôle majeur pour l'accès au logement

Les revenus des ménages sont bien souvent insuffisants pour leur assurer l'accès et le maintien dans le logement, même dans le parc social. Ainsi, une enquête réalisée en 1997 par les organismes HLM a montré qu'un ménage sur deux a des revenus inférieurs à 60 % du plafond de ressources fixé pour l'accès au parc HLM (soit l'équivalent de moins d'un SMIC net pour une personne seule et de moins de 1,5 SMIC net pour un couple avec un enfant) et qu'un ménage sur six a des revenus inférieurs à 20 % des plafonds.

Dans ces conditions, les aides personnelles au logement, en permettant la solvabilisation des ménages, visent à leur garantir un accès effectif au logement.

Les aides personnelles au logement sont au nombre de trois.

L'allocation de logement à caractère familial (ALF)

L'ALF est une prestation familiale qui a été créée à l'occasion de la réforme du régime des loyers par la loi du 1 er septembre 1948. Elle est attribuée aux personnes isolées et aux couples ayant des personnes à charge, ainsi qu'aux jeunes ménages, sans personne à charge, mariés depuis moins de 5 ans.

En 1997, 1.169.625 ménages bénéficiaient de l'ALF pour un montant de 16,2 milliards de francs. Le montant mensuel moyen de l'ALF versé était de 1.156 francs en location et de 848 francs en accession en décembre 1996.

L'allocation de logement à caractère social (ALS)

L'ALS a été créée par la loi du 16 juillet 1971 afin de venir en aide à des catégories de personnes, autres que les familles, caractérisées par le niveau modeste de leurs ressources (personnes âgées, handicapés, jeunes travailleurs salariés de moins de 25 ans).

Depuis le 1 er janvier 1993, toute personne, qui n'entre pas dans les conditions fixées pour bénéficier de l'APL ou de l'ALF, peut bénéficier de l'ALS sous seule condition de ressources en application de la réforme dite du " bouclage " des aides au logement lancée en 1991.

En 1997, 2.155.255 ménages bénéficiaient de l'ALS (dont 530.000 étudiants) pour un total de prestations de 21 milliards de francs. Le montant moyen mensuel était de 833 francs en location et de 607 francs en accession en décembre 1996.

L'aide personnalisée au logement (APL)

L'APL, créée par la loi du 3 janvier 1977, s'applique à un parc de logements déterminés, quelles que soient les caractéristiques familiales des occupants, qui comprend :

- en accession à la propriété : les logements financés avec des prêts aidés par l'Etat (PAP ou PC) ;

- en secteur locatif : les logements conventionnés, financés avec des PLA ou des PC locatifs, ou conventionnés avec des subventions à l'amélioration (PALULOS ou ANAH), ainsi que les logements existants, conventionnés sans travaux, appartenant à des organismes d'habitation à loyer modéré ou des sociétés d'économie mixte ou appartenant à d'autres bailleurs, lorsque ces logements ont bénéficié avant 1977 des anciennes aides de l'Etat.

En 1997, 2.844.105 ménages ont bénéficié de l'APL pour une dépense totale de 38,1 milliards de francs. Le montant moyen de l'APL était de 1.104 francs en location et de 1.116 francs en accession pour l'APL en décembre 1996.

Ces trois types d'aides relèvent d'un régime largement commun :

- les trois aides (ALF, ALS et APL) sont versées sous seule condition de ressources aux personnes qui s'acquittent d'un minimum de loyer ou de mensualité de remboursement d'emprunt, sous réserve que le logement constitue bien leur résidence principale, c'est-à-dire qu'il soit occupé pendant au moins huit mois par an par elles-mêmes ou leur conjoint ou des personnes à charge ;

- le barème, selon lequel sont calculées les trois aides, tient compte de la situation familiale du demandeur, du montant du loyer, des charges de remboursement de prêts dans la limite d'un plafond, et de ses ressources, ainsi que, s'il y a lieu, de celles de son conjoint et des personnes vivant habituellement à son foyer ;

- les ressources qui servent au calcul de l'aide sont, en règle générale, les revenus nets catégoriels de l'année n-1, abstraction faite des reports de déficit de l'année précédente et après application, le cas échéant, de certains abattements pour tenir compte de la situation particulière du bénéficiaire (divorce, invalidité, chômage,...) ;

- les aides personnelles au logement sont liquidées par les caisses d'allocations familiales et de mutualité sociale agricole ; leur versement s'effectue mensuellement à terme échu. Contrairement à l'ALF et l'ALS, qui sont en règle générale versées directement aux bénéficiaires, l'APL est versée en tiers payant.

2. Une forte augmentation qui ne permet pourtant pas la diminution du taux d'effort des ménages

a) Une croissance continue

On assiste depuis plusieurs années à une forte croissance des dépenses d'aides personnelles. Sur la période, la croissance annuelle moyenne est de 5,85 % en francs courants. On remarquera toutefois que cette progression se ralentit en fin de période : + 1,2 % en 1996, + 2,1 % en 1997.

Montant des prestations des aides personnelles au logement

(en milliards de francs)

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

ALF

12,3

12,8

13,2

14,2

14,9

15,4

15,6

16,2

ALS

9,5

10,4

13,1

16,9

19,1

20,1

20,1

21,0

APL

28,2

30,9

32,6

33,9

35,7

37,3

38,0

38,1

TOTAL

50,6

54,1

58,9

65,0

69,7

72,8

73,7

75,3

La croissance des aides est également différenciée. Alors que pendant les années 1980, c'était l'APL qui avait le plus augmenté, la progression des dépenses dans les années 1990 est avant tout imputable à l'ALS qui a plus que doublé en 8 ans. Il importe cependant d'observer que si la croissance de l'APL reste modérée, cela s'explique par un phénomène de compensation, la diminution des dépenses d'APL-accession limitant la progression des dépenses d'APL-location.

Cette progression des dépenses tient à deux facteurs, dont l'importance est inégale.

La forte croissance du nombre de bénéficiaires

1,6 million de ménages supplémentaires touchent une aide personnelle au logement depuis 1990.

Nombre de bénéficiaires des aides personnelles au logement

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

ALF

1.155

1.119

1.104

1.110

1.145

1.185

1.151

1.170

ALS

1.043

1.075

1.459

1.787

1.953

2.069

2.142

2.155

APL

2.380

2.507

2.557

2.628

2.728

2.795

2.855

2.844

TOTAL

4.578

4.701

5.120

5.525

5.826

6.049

6.148

6.169

Alors que le nombre de bénéficiaires de l'ALF est stable et que celui de l'APL n'a augmenté que de 20 %, le nombre de bénéficiaires de l'ALS a plus que doublé depuis 1990.

Cette évolution s'explique d'une double manière :

- la montée du chômage et de la précarité ont fragilisé la situation financière de nombreux ménages. Or, l'ALS a largement vocation à servir de " filet de sécurité-logement " pour ces ménages menacés par l'exclusion.

- la généralisation de l'ALS sous seule condition de ressources (le " bouclage ") a étendu le nombre de bénéficiaires potentiels de cette aide au logement.

Au total, en 1995, 27 % des ménages français percevaient une aide personnelle au logement. Cette proportion apparaît élevée par rapport à d'autres pays européens comme en témoigne le tableau ci-dessous.

Proportion de ménages percevant
une aide au logement en 1995

(en %)

 

1995

Allemagne

7

Danemark

22

Finlande

9

France

27

Pays-Bas

14

Grande-Bretagne

20

Suède

27

Source : le compte du logement, 1998

Une progression limitée du montant moyen des aides

La progression du montant moyen des aides a été bien plus lente que celle du nombre de bénéficiaires.

Montant moyen mensuel des aides à la personne

(en francs courants)

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

ALF accession

660

709

765

789

817

851

848

ALF location

920

983

1.051

1.088

1.134

1.143

1.156

ALS accession

580

622

656

637

600

578

607

ALS location

714

758

810

796

825

825

833

APL accession

1.062

1.078

1.094

1.104

1.115

1.099

1.116

APL location

896

910

941

969

999

1.015

1.104

Source : le compte du logement, 1998

Cette faible progression tient avant tout à l'absence de revalorisation des aides en 1993, 1995 et 1996.

b) Une croissance qui n'améliore pas l'efficacité sociale

La croissance constatée ces dernières années des aides à la personne n'a pas permis de diminuer le taux d'effort, notamment pour les ménages les plus modestes ou pour les familles. Globalement, le taux d'effort reste stable.

Évolution des taux d'effort

(en %)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

APL location

 
 
 
 
 
 

- personne isolée touchant le SMIC

25,7

25,9

25,8

25,8

25,1

25,7

- ménage avec deux enfants touchant 2 SMIC

20,6

20,7

20,8

22,2

21,7

22,2

APL accession

 
 
 
 
 
 

- ménage avec deux enfants touchant 2 SMIC

ND

ND

30,7

30,9

30,6

31

ALF location

 
 
 
 
 
 

- ménage avec deux enfants touchant 2 SMIC

22,7

22,7

22,7

22,7

22,1

22,4

ALS location

 
 
 
 
 
 

- personne isolée touchant le SMIC

28,0

27,9

28,0

27,9

26,3

27,6

Source :Secrétariat d'Etat au logement

Cette stabilité du taux d'effort peut sembler étonnante quand on observe la forte croissance des aides à la personne. Elle s'explique en réalité par le fait que la faible augmentation du montant de chaque aide a été largement compensée par l'évolution des loyers.

3. Une poursuite de l'effort budgétaire en 1999

Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit que la contribution de l'Etat au financement des aides à la personne atteindra 34,6 milliards de francs en 1999. La progression sera de 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998.

En réalité, la progression serait légèrement moindre (+ 4,5 %) dans la mesure où les dépenses budgétaires relatives aux aides à la personne devraient être plus proches de 33,1 milliards de francs en 1998 que de 32,7 milliards de francs prévus par la loi de finances initiale.

Hors effet de rebudgétisation, 1,5 milliard de francs supplémentaire est donc dégagé pour financer les aides à la personne. Cette somme devrait avoir une double affectation :

- la prise en compte en année pleine de la revalorisation des aides à la personne effective au 1 er juillet 1998. Environ, un milliard de francs sera nécessaire ;

- une nouvelle revalorisation des aides au 1 er juillet 1999 pour environ 500 millions de francs.

B. LA NÉCESSAIRE RÉFORME DES AIDES À LA PERSONNE RESTE INACHEVÉE

La forte progression des dépenses relatives aux aides à la personne ne s'est pas traduite par une amélioration substantielle de l'efficacité sociale de celles-ci. Votre commission estime qu'à effort budgétaire constant une réforme des aides à la personne devrait permettre de simplifier ces aides, d'en améliorer l'efficacité sociale et d'en renforcer l'équité . Mais, si le Gouvernement s'engage dans la voie d'une réforme, celle-ci reste bien timorée.

1. L'esquisse d'une réforme

Les aides à la personne souffrent aujourd'hui de trois évolutions défavorables :

- une progression ininterrompue des dépenses ;

- une stagnation de leur efficacité sociale ;

- une complexité croissante qui rend les aides à la fois illisibles et parfois inéquitables.

Dans ce contexte préoccupant, l'actuel Gouvernement a entrepris une démarche visant à réformer progressivement le système des aides à la personne.

Ces réformes ont pour l'instant pris deux aspects : la revalorisation des aides et l'alignement des loyers-plafonds.

a) La revalorisation des aides à la personne

Afin d'assurer le maintien de l'efficacité sociale des aides, le Gouvernement a décidé de revaloriser les aides à la personne. Deux premières revalorisations ont eu lieu le 1 er juillet 1997 et le 1 er juillet 1998. Une nouvelle revalorisation devrait intervenir le 1 er juillet 1999.

Ces mesures ont permis d'actualiser -plus que de revaloriser- les paramètres de calcul des aides personnelles de la façon suivante :

- les plafonds de ressources ont été réévalués en fonction de la valeur moyenne de l'indice des prix à la consommation hors tabac (soit + 1,9 % en 1997 et + 1,1 % en 1998) ;

- les loyers-plafonds ont été réévalués, mais de manière différenciée selon la taille des ménages en 1997. Pour les " petits ménages " (personnes isolées et couples sans enfant), ils ont été actualisés de 3,5 % en AL et en APL. Pour les familles, ils ont été actualisés de 2 % en APL et de 3,5 % en ALF. En 1998, les loyers-plafonds ont été actualisés de 2,4 %, soit un taux égal à l'évolution de l'indice du coût de la construction ;

- le forfait de charge a été revalorisé de 2,5 % en 1997 et de 1,5 % en 1998.

Ces mesures ont coûté 2,5 milliards de francs en 1997 et 1,5 milliard de francs en 1998.

b) L'alignement des loyers-plafonds

Lors de la conférence pour la famille en juin dernier, le Premier ministre a annoncé une augmentation moyenne de 25 % en 3 ans des loyers-plafonds de l'ALF.

Cette mesure devrait permettre d'aligner en 3 ans les loyers-plafonds de l'ALF sur ceux de l'APL. Ainsi, l'alignement des loyers-plafonds de l'APL et de l'ALS étant déjà réalisé, cette mesure devrait permettre l'harmonisation des loyers-plafonds des trois aides au logement.

Votre commission est favorable à cette mesure. Elle observe en effet que 65 % des allocataires de l'ALF ont déjà des loyers supérieurs aux loyers-plafonds. Elle constate en outre qu'à l'heure actuelle des écarts pouvant varier de 4 à 50 % selon la zone géographique et la taille de la famille subsistent entre l'APL et l'ALF.

2. Une réforme au milieu du gué

Mais votre commission estime que la réforme des aides personnelles au logement doit être plus ambitieuse. Elle considère en effet que la revalorisation des aides ne sera en mesure d'accroître leur efficacité sociale qu'à la condition que les aides à la personne soient réformées dans le sens d'une plus grande cohérence et d'une plus grande transparence.

Le précédent Gouvernement avait initié un mouvement plus profond de réforme des aides à la personne. Il visait à la fois l'harmonisation des barèmes et une prise en compte plus équitable des ressources des ménages.

Ainsi, l'article 134 de la loi de finances pour 1997 a permis d'unifier les barèmes de l'APL. Le barème actuel est plus lisible, mais aussi plus juste car le calcul de l'APL se fait désormais à partir du taux d'effort des ménages, lui-même fonction de leur situation familiale, de leurs revenus et du niveau de loyer.

Le décret du 30 janvier 1997 a permis de garantir une prise en compte équitable des ressources pour le calcul des aides à la personne quelle que soit leur situation.

Votre commission considère que ce mouvement doit être poursuivi. En effet, si la prise en compte des ressources est désormais harmonisée quelle que soit l'aide à la personne et si les loyers-plafonds vont également être harmonisés, il reste nécessaire d'avancer dans la voie de l'unification des barèmes des aides à la personne.

Ainsi, dans son rapport sur les aides au logement de 1994, la Cour des comptes proposait d'envisager " une fusion des aides à la personne, fondée sur les mécanismes de base de l'APL (...). C'est en rendant le système plus simple, plus efficace et plus équitable que le principe d'une aide aux catégories trop démunies pour se loger décemment sera le mieux respecté ".

VI. LE LOGEMENT DES PLUS DÉFAVORISÉS : UN BUDGET QUI ACCOMPAGNE LA LOI D'ORIENTATION RELATIVE À LA LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS

A. LA RECHERCHE DE NOUVELLES SOLUTIONS INTERVIENT DANS UN CONTEXTE TOUJOURS PRÉOCCUPANT

1. Une situation inquiétante, évolutive et encore mal connue

a) Une situation inquiétante

La persistance d'une population importante de personnes mal logées ou sans abri, malgré les efforts entrepris depuis le début des années 1990, témoigne des difficultés continues d'accès et de maintien dans le logement.

Les chiffres de référence sont ceux d'une étude réalisée en 1992 par le Bureau d'information et de prévision économique. Cette enquête évalue, pour 1990, à 202.000 le nombre de personnes exclues du logement et à plus de 2 millions celles qui sont mal logées ou qui occupent les logements de substitution.

Les " sans abri " et les " mal-logés "

France entière (estimation en 1990)

 

Nombre de personnes

Nombre d'équivalents logement

LES EXCLUS DU LOGEMENT

202.000

147.000

Sans domicile fixe

98.000

82.000

Abris de fortune

45.000

20.000

Centre d'urgence

59.000

45.000

LES OCCUPANTS DE LOGEMENT DE SUBSTITUTION (meublés, chambres d'hôtel)

470.000

304.000

LES MAL-LOGÉS

1.576.000

864.000

Habitations mobiles (gens du voyage, etc.)

147.000

50.000

Logements hors normes

1.429.000

814.000

ENSEMBLE

2.248.000

1.315.000

NON PRIS EN COMPTE

Foyers de travailleurs

176.000

160.000

Hébergés par des parents ou amis

2.800.000

1.283.000

Source : BIPE

Le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, dans son dernier rapport 6( * ) , estime que cette étude reste d'actualité. Il considère en effet qu'" en l'absence de données plus actuelles, les ordres de grandeur du BIPE doivent être retenus pour évaluer, notamment, le nombre de personnes exclues du logement que l'on peut encore aujourd'hui estimer à un flux de 200.000 même si, avec les effets du plan d'urgence, la répartition de ces 200.000 personnes entre sans-abri, personnes hébergées en centres d'urgence ou en abris de fortune a subi quelques modifications. "

La question de l'accès au logement reste donc toujours aussi douloureuse.

b) Une situation évolutive

Mais la question de l'accès au logement se double désormais de celle du maintien dans le logement. Dans un contexte de précarité croissante, de nombreux ménages parmi les plus modestes connaissent ou risquent de connaître des difficultés de maintien dans le logement.

Une récente enquête de l'INSEE 7( * ) montre en effet que le maintien dans le logement des ménages les plus pauvres devient de plus en plus problématique.

Le logement des ménages pauvres en 1996

Analysant la situation du logement des 12 % des ménages les plus pauvres (soit 2,8 millions de ménages), l'enquête conclut à une précarisation croissante et à une fragilité accrue en matière de logement.

Ces ménages connaissent des situations de logement difficiles : 11 % des logements sont " inconfortables " et 28 % " surpeuplés " selon les critères de l'INSEE.

Ces ménages connaissent des dépenses croissantes de logement. En 1984, 60 % d'entre eux n'avaient aucunes dépenses de logement. En 1996, ce n'était plus le cas que pour 45 % d'entre eux. Or, ils connaissent des difficultés d'accès au parc social : seuls 24 % d'entre eux y sont locataires. Ils sont donc de plus en plus souvent logés dans le secteur locatif privé.

En outre, le parc locatif à très bas loyer est en voie de disposition. En 1984, 3 millions de logement -soit un tiers du total du parc locatif- offrait des loyers mensuels inférieurs à 10 francs le mètre carré. Il en reste aujourd'hui 820.000, soit moins de 9 % du parc locatif total.

c) Une situation mal connue

Eu égard à l'importance de l'enjeu, on aurait pu s'attendre à ce que des études statistiques analysent la situation du logement des plus défavorisés. Or, il n'en est rien. L'étude de référence date -on l'a vu- de 1992.

Pourtant, dans son rapport de mars 1996, le Conseil national de l'information statistique (CNIS) demandait qu'une enquête nationale soit réalisée auprès des personnes fréquentant les lieux d'hébergement et d'accueil, afin de " mieux comprendre les processus conduisant à la perte du logement et les conditions de vie des personnes dans cette situation ".

Votre commission regrette l'absence d'informations statistiques précises et fiables sur cette question cruciale . Elle suggère que le prochain recensement, qui aura lieu l'an prochain, prenne mieux en compte les personnes exclues du logement.

2. Les limites des dispositifs existants

Depuis le début des années 1990, la politique en faveur du logement des personnes défavorisées s'est articulée autour de deux axes complémentaires :

- accroître l'offre de logement en faveur des personnes exclues du logement ;

Cet effort a pris plusieurs formes : construction de logements d'hébergement d'urgence, construction de logements d'insertion, réquisition, mise en place de l'aide au logement temporaire (ALT) pour permettre aux associations de disposer d'un parc plus important, mise en oeuvre des baux à réhabilitation avec le soutien de l'ANAH...

- favoriser l'accès et le maintien dans le logement des ménages défavorisés.

Cette fonction est très largement attribuée aux fonds de solidarité pour le logement (FSL).

Ces fonds sont destinés à aider les ménages défavorisés à se maintenir dans des logements locatifs, en cas d'impayés, à accéder à un logement locatif par des aides telles que cautions, prêts, garanties et subventions, ainsi qu'à assurer la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement social lié au logement (ASLL) nécessaires à l'accès et au maintien dans un logement.

Pourtant, en dépit de l'effort budgétaire consenti et de la forte implication des collectivités locales, les dispositions mises en place n'ont pas permis d'apporter de solutions définitives.

a) Les difficultés d'une offre adaptée

L'objectif de la politique de mise en place d'une offre adaptée est le rétablissement d'un véritable parcours d'insertion résidentiel. Le logement d'urgence ne doit être qu'un lieu de passage transitoire vers le logement d'insertion, puis vers le parc social normal.

Logements d'urgence et logements d'insertion

Les dénominations de " logements d'urgence " et de " logements d'insertion " ne correspondent ni à de nouveaux produits financiers, ni à des produits physiques spécifiques.

Les logements d'urgence sont destinés à accueillir des personnes ou des familles sans domicile fixe ou brutalement confrontées à une absence de logement. Ils doivent leur permettre de séjourner, selon les cas, quelques semaines ou quelques mois dans un véritable logement meublé pour répondre aux besoins essentiels des familles. Ce court séjour doit être complété par un accompagnement social, voire sanitaire, de nature à permettre la définition d'un projet d'insertion.

Ces logements ont généralement le statut de meublé ou de résidence sociale. Il peut s'agir de logements mis à disposition par l'Etat, par les entreprises publiques ou par d'autres partenaires.

Les logements d'insertion ont vocation à recevoir, pour quelques mois ou quelques semestres, des ménages ayant besoin d'un accompagnement social pour retrouver une situation et un logement plus stables. Ces logements pourront notamment servir à faciliter la sortie d'hébergements collectifs ou de logements d'urgence.

Sauf dans le cas des résidences sociales dans lesquelles les occupants disposent d'un titre de résident, les logements d'insertion sont en général loués à une association, à un centre communal d'action sociale (CCAS) ou à un organisme intermédiaire ayant en charge de les sous-louer.

Dans les deux types de logement, une offre de relogement définitif, correspondant aux besoins et aux possibilités des familles, doit être proposée aux locataires dans un délai qui est fonction du projet d'insertion préalablement défini et de l'évolution de la situation familiale.

Or, il semble que, si l'offre d'urgence s'est effectivement accrue, le développement des logements d'insertion soit plus difficile.

Il existe actuellement 15.000 places d'hébergements d'urgence, auxquelles il faut ajouter les 30.000 places en centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS).

A cet égard, votre commission tient à rappeler l'impact très positif du plan d'urgence lancé par le précédent gouvernement en juillet 1995 . 9.000 logements ou places d'hébergement d'urgence ont ainsi été réalisés d'août 1995 à décembre 1996. En revanche, en 1997, seules 221 ont été financées.

L'aide au logement temporaire a notamment permis un meilleur accueil d'urgence. Le nombre de logements et de places mobilisées grâce à l'ALT a sensiblement augmenté.

Logements et chambres bénéficiant de l'ALT

(en nombre de mois d'occupation)

 

oct. 1993 à sept. 1994

oct. 1994 à sept. 1995

oct. 1995 à sept. 1996

Occupation d'une chambre

22.890

45.924

63.323

Occupation d'un logement

8.151

24.087

41.353

Source : DGUHC

En revanche, le nombre de logements d'insertion financé à l'aide de financements très sociaux est resté très inférieur aux prévisions.

Trois types de produits ont successivement été mis en place. De 1990 à 1993, le PLA d'insertion (PLA-I) a permis le financement d'opérations d'acquisition de logements anciens avec ou sans travaux. De 1994 à 1997, le PLA très social (PLA-TS) reprenait les caractéristiques du PLA-I mais permettait également la construction de logements neufs. En 1998, le Gouvernement a réformé les PLA-TS en distinguant les PLA à loyer minoré (PLA-LM) pour les ménages ayant des difficultés économiques et les PLA d'intégration (PLA-I) pour les ménages cumulant difficultés économiques et financières. Seuls ces nouveaux PLA-I peuvent être considérés comme destinés au financement de logements d'insertion.

Financement des PLA " sociaux "

 

PLA-I

PLA-TS

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Nombre de logements prévus

10.000

10.000

10.000

10.000

20.000

28.000

20.000

30.000

Nombre de logements effectivement financés

5.075

6.334

7.016

6.908

11.708

15.481

11.419

11.783

Source : DGUHC

Fin 1997, il existait 75.000 logements financés par des PLA " sociaux ".

Mais ces logements ne sont pas forcément affectés aux personnes les plus en difficulté, effectivement exclues du logement. Ils peuvent être également attribués aux familles les plus modestes, sans pour autant que ces logements soient transitoires ou que les familles aient besoin d'un accompagnement social. Il est donc difficile d'estimer, parmi ces logements, la proportion relevant effectivement de la stricte définition du logement d'insertion. Toujours est-il que seuls 1.054 PLA-I ont été financés pendant les neuf premiers mois de 1998.

b) Les limites des FSL

Le FSL s'est progressivement affirmé comme l'instrument privilégié d'aide au logement des plus défavorisés.

Les aides financées par les FSL sont ainsi passées de 709 millions de francs en 1993 à 1.106 millions de francs en 1997.

Dépenses des fonds de solidarité logement depuis 1993

(en millions de francs)

 

1993

1994

1995

1996

1997

Aides au maintien

296,5

337,7

336,8

339,9

359,9

Aides à l'accès dans les lieux

196,0

247,0

321,2

382,3

406,0

Paiement de garanties

9,6

17,4

22,4

30,4

41,5

ASLL (1)

124,2

148,0

171,0

202,4

245,0

Gestion locative

-

-

8,4

10,6

19,8

Subventions aux associations

7,0

15,9

20,1

30,2

34,3

Fonctionnement

55,0

72,2

80,2

98,7

117,9

Dépenses totales

709,2

846,1

965,6

1.099,7

1.230,6

dont aides (2)

633,5

766,2

880,4

996,1

1.106,5

(1) Accompagnement social lié au logement.

(2) Total des dépenses des FSL non compris les frais de fonctionnement et les dépenses diverses.

Source : secrétariat d'Etat au logement

L'augmentation des dépenses des FSL se fait parallèlement à celle du nombre de ménages aidés. Selon une estimation du secrétariat d'Etat au logement, plus de 200.000 personnes ont bénéficié du soutien des FSL en 1996, l'aide moyenne étant de 6.617 francs pour le maintien dans le logement et de 3.187 francs pour l'accès au logement.

Evolution du nombre de ménages aidés par les FSL de 1992 à 1996

(en nombre de ménages)

 

1992

1993

1994

1995

1996

Aides au maintien*

42.00

47.360

53.700

55.140

56.020

Aides à l'accès**

38.500

63.000

88.000

112.750

130.415

Total aides au maintien et à l'accès (paiements de garantie exclus)

80.500

110.360

141.700

167.890

186.435

Paiements de garantie

-

2.770

3.975

6.040

7.500

ASLL***

18.000

30.000

38.860

42.900

50.440

* prêt ou subvention Source : DGUHC

** prêt, subvention, garantie octroyée

*** accompagnement social lié au logement

Mais le succès des FSL témoigne paradoxalement de la persistance, voire de l'aggravation, des difficultés d'accès et de maintien dans le logement.

En outre, la montée en charge très rapide des FSL ne s'est pas faite sans l'apparition d'un certain nombre de difficultés qui, sans remettre en cause l'action des FSL, peuvent parfois en limiter l'efficacité.


Ces difficultés, mises en évidence par le comité de pilotage de l'évaluation de la loi du 31 mai 1990 visant la mise en oeuvre du droit au logement 8( * ) , sont les suivantes.

Des tensions sur le financement des FSL

En dépit de la croissance des financements accordés, de nombreux FSL rencontrent des difficultés certaines pour faire face à leurs dépenses. Ils peuvent être alors conduits à restreindre leurs actions.

Evolution des financements des FSL

(en millions de francs)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997*

Etat

150

171

177

208

328

249

275

Conseils généraux

164

187

183

210

322

265

301

Financeurs volontaires

73

93

94

139

134

139

131

dont :

 
 
 
 
 
 
 

CAF

31

33

36

59

50

48

50

Communes et groupements

11

24

26

31

37

40

37

Organismes HLM et SEM

18

29

25

38

35

38

44

Total

387

451

454

557

784

653

707

* Estimation Source : DGUHC

Une coordination parfois insuffisante avec les autres dispositifs

La création des FSL n'a pas empêché que se maintiennent ou se créent d'autres fonds ou d'autres structures fonctionnant en parallèle et de manière pas toujours coordonnée : fonds d'aide aux accédants en difficulté, fonds d'aide au paiement des charges, fonds associatifs, commission de surendettement, fonds d'aide aux jeunes...

La superposition de ces différents dispositifs réduit la cohérence de l'action en faveur du logement des plus défavorisés.

De plus, l'articulation des FSL avec les caisses d'allocations familiales qui gèrent les aides personnelles au logement et avec les instances judiciaires qui se prononcent sur les expulsions reste souvent insuffisante.

Des difficultés persistantes d'accès aux FSL

Le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées observe, dans son dernier rapport précité, que " beaucoup de ménages ne connaissent pas l'existence du FSL et n'y ont pas d'accès direct ".

Il existe en effet une certaine opacité de l'intervention du FSL. Dans de nombreux départements, il n'y a pas de possibilité de saisine directe du FSL par les ménages. Dans d'autres, la saisine directe existe mais les ménages mal informés n'y ont pas recours.

En outre, la contrainte financière qui pèse sur les FSL les amène souvent à en restreindre l'accès. Le comité de pilotage estime ainsi que " les FSL oscillent entre deux positions contradictoires : prendre en compte le plus grand nombre de personnes en difficulté de logement pour accompagner le mouvement de banalisation de la précarité, ou resserrer l'intervention publique sur les ménages les plus défavorisés pour garantir leur droit au logement. L'élargissement du nombre des ménages aidés pourrait conduire à une dilution et une perte d'efficacité des aides, une trop grande spécialisation pourrait contribuer à exclure des ménages pour lesquels les aides ont un effet solvabilisateur certain ".

Un rôle préventif insuffisant

L'aggravation des difficultés d'accès au logement conduit les FSL à concentrer l'essentiel de leur action sur le traitement des situations les plus dégradées. Cette action, certes nécessaire, se fait pourtant souvent au détriment du travail de prévention.

Ce rôle de prévention est indispensable car, en l'état actuel des choses, les FSL accordent des aides à des familles qui, faute d'une solvabilisation dans la durée, vont de rechute en rechute, sans véritable espoir d'assainir un jour leur situation.

3. La loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions

La loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions comporte un volet logement important qui vise à améliorer l'accès et le maintien dans le logement des personnes les plus défavorisées, en corrigeant certaines imperfections existantes ( cf. encadré ci-après) .

Les principales dispositions de la loi d'orientation concernant le logement

1. Les mesures favorisant l'accès au logement

a) La prise en charge des plus défavorisés

•  Révision de la durée (3 ans au minimum) et extension du contenu des plans départementaux d'action pour le logement des plus défavorisés ( art. 30 à 35 )

•  Réforme des FSL : harmonisation des critères d'éligibilité, clarification des conditions de gestion, affirmation du rôle d'accompagnement social ( art. 36 à 39 )

•  Mise en place d'une aide forfaitaire aux associations et aux partenaires qui pratiquent la sous-location ou la gestion immobilière de logements pour les plus défavorisés ( art. 40 )

•  Ouverture de l'ALT aux CCAS ( art. 53 )

•  Dégrèvement d'office de la taxe d'habitation pour les gestionnaires de résidences sociales en cas de sous-location ( art. 42 )

•  Perception des aides personnelles au logement dès le premier mois si les personnes qui entrent dans le nouveau logement bénéficiaient auparavant indirectement de l'ALT ( art. 44 à 45 )

b) La recherche du développement de l'offre de logements

•  Mise en place d'une taxe sur les logements vacants. Le Conseil constitutionnel a censuré en grande partie cette disposition en excluant du champ de la contribution les logements nécessitant des travaux importants et ceux mis en vente ou en location au prix du marché ( art. 51 )

•  Modification de la procédure de réquisition de logement avec la mise en place d'un régime de réquisition avec attributaire ( art. 52 )

•  Exonérations fiscales pour le bail à réhabilitation ( art. 49 )

•  Renforcement des dispositions de la loi d'orientation sur la ville en matière de construction de logements sociaux ( art. 64 et 65 )

•  Limitation du nombre de places de parkings obligatoires dans les logements sociaux ( art. 46 et 47 )

•  Réforme du régime d'attribution des logements sociaux ( art. 56 )

•  Revalorisation des plafonds de ressources et relèvement du seuil de déclenchement du surloyer dans le parc social afin de favoriser la mixité ( art. 56 )

•  Exonération pendant 15 ans de la taxe foncière pour les logements acquis grâce à un PLA acquisition-amélioration et par les logements améliorés par des organismes sans but lucratif avec l'aide de l'ANAH ( art. 50 )

2. Les mesures favorisant le maintien dans le logement

a) La prévention des expulsions (art. 114 à 122)

b) La réduction de la précarité dans l'habitat


•  Mesures de lutte contre le saturnisme ( art. 123 )

•  Mesures de prévention des coupures d'eau, d'énergie et de téléphone ( art. 136 )

•  Renforcement de la lutte contre les " marchands de sommeil " ( art. 41 et 124 )

•  Consolidation du statut des sous-locataires et des habitants d'hôtels meublés ( art. 125 et 126 )

Votre commission observe toutefois que cette loi reprend très largement les dispositions incluses dans le projet de loi d'orientation relatif au renforcement de la cohésion sociale présenté par le précédent gouvernement.

Ce projet de loi comprenait notamment des dispositions relatives aux missions du parc locatif social, aux réquisitions, aux attributions, aux mesures destinées à faciliter la construction de logements d'insertion, à la clarification du statut des sous-locataires, à la protection des occupants des hôtels meublés, à l'extension des compétences de certains organismes HLM, à l'extension aux centres communaux d'action sociale du bénéfice de l'aide aux organismes logeant à titre temporaire des personnes en difficulté, aux modifications du régime juridique des fonds de solidarité pour le logement, au relogement des occupants d'un immeuble évacué en application d'un arrêté municipal et à la prévention des expulsions.

B. L'EFFORT BUDGÉTAIRE ACTUEL DOIT S'ACCOMPAGNER DE LA POURSUITE DE L'ADAPTATION DES DISPOSITIFS EXISTANTS

1. Un effort budgétaire certain, mais différencié

Le budget du logement pour 1999 traduit largement la loi d'orientation en termes budgétaires. L'effort budgétaire total en faveur du logement des plus défavorisés augmente de 20 % en 1999 pour atteindre 967,5 millions de francs.

A l'heure actuelle, deux lignes budgétaires regroupent les crédits affectés au logement des plus démunis :

- le chapitre 46-50 rassemble les crédits d'intervention ;

Il comprend la participation de l'Etat aux FSL et aux fonds d'aide aux accédants en difficulté, ainsi que la subvention aux associations logeant les personnes défavorisées.

- l'article 65-48-60 regroupe les subventions d'investissement en faveur des opérations les plus sociales : réquisition, logements d'urgence, démolition, maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS), lutte contre le saturnisme.

Evolution des crédits budgétaires en faveur
du logement des plus défavorisés

(en dépenses ordinaires et crédits de paiement)

(en millions de francs)

Chapitre ou article

LFI 1998

PLF 1999

Evolution
(en %)

46-50

456,5

685,0

+ 50 %

65-48-60

349,0

282,5

- 19 %

Total

805,5

967,5

+ 20 %

L'analyse des crédits budgétaires met en évidence deux évolutions contradictoires.

Les crédits d'intervention (chapitre 46-50) progressent fortement. Ils augmentent de 50 % en 1999 pour atteindre 685 millions en francs. Cette progression s'explique par :

- la forte progression de la dotation de l'Etat aux FSL. Cette dotation passe de 340 à 560 millions de francs, soit une hausse de 62 % ;

- les moyens consacrés à l'ALT versée aux associations logement des personnes défavorisées sont en hausse de 18 % pour atteindre 130 millions de francs. Cette évolution prend en compte l'ouverture de l'ALT aux centres communaux d'action sociale, prévue à l'article 53 de la loi d'orientation.

Votre commission prend acte de cette évolution des crédits.

En revanche, les subventions d'investissement (article 65-48-60) diminuent de 19 %. La diminution est encore plus importante si on tient compte d'une mesure nouvelle affectant 50 millions de francs pour financer la lutte contre le saturnisme. Hors mesure nouvelle, la diminution est de 33 %.

Votre commission s'inquiète de la diminution de ces crédits. Alors que le Gouvernement prétendait accroître l'offre de logements en faveur des plus défavorisés lors de l'examen de la loi d'orientation, elle observe que les crédits effectifs en faveur de la réalisation de cet objectif diminuent d'un tiers. Votre commission y voit le signe d'un désengagement financier de l'Etat qui ne manquera pas de se répercuter sur les collectivités locales.

2. Une adaptation nécessaire

Si la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions devrait améliorer les conditions d'accès et de maintien dans le logement des personnes défavorisées, votre commission craint cependant que ne subsiste deux points de blocage : une offre de logement insuffisante et une solvabilisation trop faible des ménages les plus en difficulté.

a) Garantir une offre de logements à la fois suffisante et adaptée

Les difficultés d'accès à un logement adapté aux besoins et aux ressources des personnes les plus défavorisées constituent la cause principale d'une exclusion durable par le logement.

Dans ces conditions, il importe de développer une offre adaptée. Le Gouvernement propose ainsi de participer au financement de 20.000 PLA-LM et de 10.000 PLA-I en 1999.

Le PLA-LM est destiné aux ménages éprouvant essentiellement des difficultés financières, il est similaire à l'ancien PLA-TS, le taux de subvention est de 8 % pour le neuf et de 13 % pour l'acquisition-amélioration, le préfet pouvant déroger respectivement jusqu'à 13 et 18 %. Le PLA-I qui a pour vocation de loger des ménages cumulant des difficultés financières et d'insertion a des taux de subvention plus importants : 20 % pour le neuf et l'acquisition-amélioration, le préfet ayant la possibilité de déroger jusqu'à 25 % pour l'acquisition-amélioration.

Votre commission doute cependant de l'efficacité de cette politique de l'offre. Elle constate en effet que seuls 12.000 PLA-LM et PLA-I seront construits cette année pour un objectif de 30.000. Elle craint que cette sous-consommation intervienne également l'année prochaine dans la mesure où ces produits n'ont pas fait la preuve de leur attractivité.

Aussi, votre commission souligne que l'accroissement de l'offre de logements pour les personnes défavorisées ne pourra être réellement mis en oeuvre que dans un cadre décentralisé, en s'appuyant sur les nombreuses expériences innovantes menées sur le terrain par les collectivités locales.

Les plans départementaux d'action par le logement des personnes défavorisées (PDLD) doivent être le cadre de réactivation de la démarche contractuelle. Mais votre commission estime que cette démarche doit évoluer : l'Etat ne doit plus être le pilote de la contractualisation, il doit plutôt accompagner et soutenir les programmes définis au niveau local.

Les plans départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées

Institués dans chaque département par la loi du 31 mai 1990 (loi Besson), révisés lors de la loi d'orientation du 29 juillet 1998, les plans départementaux sont élaborés, pour une durée minimale de trois ans, par l'Etat et le département en association avec les autres collectivités territoriales, leurs groupements et les autres personnes morales concernées : associations d'insertion ou d'aide au logement des personnes démunies, caisses d'allocations familiales, bailleurs publics ou privés, organismes collecteurs du 1 % logement. Le conseil départemental de l'habitat (CDH) et le conseil départemental d'insertion sont consultés avant la publication du plan.

Les publics visés par le plan sont toutes les personnes susceptibles de rencontrer des difficultés pour accéder à un logement ou s'y maintenir mais une priorité doit être accordée aux personnes et aux familles sans domicile fixe, menacées d'expulsion sans relogement ou logées dans des taudis ou des habitations insalubres, précaires ou de fortune.

Le plan constitue un outil de programmation et met en place un dispositif d'aide financière :

- tout d'abord, il analyse les besoins et fixe, par bassin d'habitat, les objectifs à atteindre, notamment par la centralisation des demandes de logement et la création d'une offre supplémentaire de logements ;

- ensuite, le plan institue un fonds de solidarité pour le logement (FSL), financé à parité par l'Etat et par le département, destiné à accorder des aides financières et à prendre en charge des mesures d'accompagnement spécifique en faveur des bénéficiaires du plan.

La mise en oeuvre du plan peut donner lieu à la conclusion de conventions d'application spécifiques, adossées à des procédures de financement ad hoc avec les partenaires des collectivités territoriales.

Les plans sont applicables dans les départements d'outre-mer.

En se fondant sur les expériences locales, votre commission observe que deux types de conventions se traduisent souvent par des réalisations prometteuses en matière de développement de l'habitat adapté.

Les programmes sociaux thématiques (PST)

Ces opérations, financées avec le soutien de l'ANAH, ont permis d'améliorer plus de 26.000 logements depuis 1990 et de les affecter au logement des personnes les plus défavorisées.

Les Programmes sociaux thématiques

Les PST ont été créés dès 1990 dans le cadre de la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement.

Le PST est une convention signée entre l'Etat, l'ANAH et une collectivité locale. Il est fondé sur une négociation avec les propriétaires privés ; en contrepartie d'une subvention majorée de l'ANAH pour les travaux et d'un certain nombre de services (assistance technique aux bailleurs, garantie de loyer, accompagnement social des locataires...), le propriétaire s'engage à respecter un loyer conventionné pendant 9 ans et à loger des personnes en difficulté qui lui sont proposées par une commission ou un organisme désigné dans la convention de PST et chargé de l'attribution des logements dans le cadre du plan départemental pour le logement des personnes défavorisées.

Les taux de subvention de l'ANAH peuvent varier de 40 à 70 % d'un montant de travaux plafonné. La subvention moyenne est assez élevée : elle atteignait 116.000 francs par logement en 1997.

1992 1993 1994 1995 1996 1997

Nombre de conventions PST en vigueur 177 206 263 273 219 222

Montant des engagements (millions de F) 268 328 317 426 479 374

Logements améliorés 3.300 3.900 3.600 4.000 4.200 3.200

Source : Secrétariat d'Etat au logement

Le principal intérêt de ce programme est de remettre sur le marché, au profit des plus défavorisés, des logements vacants très dégradés . 78 % des logements améliorés en PST étaient en effet initialement vacants.

Les maîtrises d'oeuvre urbaine et sociale (MOUS)

Les conventions MOUS constituent un complément pertinent au montage et à la réussite des opérations d'habitat adapté.

Ces conventions visent à mettre en place un partenariat opérationnel entre les différents acteurs (collectivités locales, Etat, organismes HLM, financeurs...). Elles permettent l'émergence d'une structure de pilotage capable de coordonner l'action des différents partenaires et de mettre en oeuvre les programmes d'habitat adaptés. Elles évitent ainsi la dispersion de l'action publique en faveur du logement des personnes défavorisées.

En 1997, 202 MOUS étaient en cours de réalisation.

b) Mieux assurer la solvabilisation des ménages

Les FSL constituent un dispositif efficace de soutien financier temporaire, mais ils ne peuvent garantir une solvabilisation durable des ménages les plus défavorisés pour leurs dépenses de logement.

Votre commission estime que la solvabilisation des ménages les plus défavorisés ne doit pas nécessairement passer par une intervention financière croissante des FSL. Elle considère que la réforme indispensable des aides à la personne pourrait en revanche la permettre.

On pourrait ainsi imaginer une plus grande modulation des aides en fonction des revenus, ce qui permettrait alors de concentrer l'effort financier sur les personnes les plus défavorisées.

*

* *

En conclusion, votre commission prend acte de l'évolution satisfaisante des crédits pour le logement social. Elle observe que le projet de loi de finances propose quelques mesures nouvelles favorables et préserve globalement les réformes mises en oeuvre ces dernières années.

En revanche, elle s'inquiète tout particulièrement de la situation très préoccupante du parc social et regrette l'absence de réforme du financement du logement social. Elle déplore également la lenteur de la réforme des aides personnelles au logement.

Dans ces conditions, votre commission a décidé de s'en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée quant à l'adoption des crédits consacrés au logement social par le projet de loi de finances pour 1999.

ANNEXE
-
GLOSSAIRE DES SIGLES



ALF

Allocation de logement familiale

ALS

Allocation de logement sociale

ALT

Aide au logement temporaire

ANAH

Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat

ANPEEC

Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction

APL

Aide personnalisée au logement

ASLL

Accompagnement social lié au logement

CCAS

Centres communaux d'action sociale

CHRS

Centre d'hébergement et de réinsertion sociale

CIAT

Comité interministériel pour l'aménagement du territoire

CIL

Comité interprofessionnel du logement

CIV

Comité interministériel pour la ville

CVH

Convention ville-habitat

DGUHC

Direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction

DSQ

Développement social des quartiers

DSU

Développement social urbain

DTA

Directive territoriale d'aménagement

FAAD

Fonds départemental d'aide aux accédants en difficulté

FARG

Fonds d'aide au relogement et de garantie

FGAS

Fonds de garantie à l'accession sociale

FNAL

Fonds national de l'aide au logement

FNH

Fonds national de l'habitation

FSL

Fonds de solidarité pour le logement

LOV

Loi d'orientation pour la ville

MOUS

Maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale

OPAH

Opération programmée d'amélioration de l'habitat

PACT

Protection, amélioration, conservation, transformation

PAH

Prime à l'amélioration de l'habitat

PALULOS

Prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale

PAP

Prêt aidé pour l'accession à la propriété

PAS

Prêt à l'accession sociale

PC

Prêt conventionné

PCL

Prêt conventionné locatif

PDLD

Plan départemental pour le logement des personnes défavorisées

PLA

Prêt locatif aidé

PLA-I

Prêt locatif aidé d'intégration

PLA-LM

Prêt locatif aidé à loyer minoré

PLA-TS

Prêt locatif aidé à financement très social

PLH

Programme local de l'habitat

PLI

Prêt locatif intermédiaire

POPS

Protocole d'occupation du patrimoine social

PST

Programme social thématique

PTZ

Prêt à taux zéro

RHI

Résorption de l'habitat insalubre

SDAU

Schéma départemental d'aménagement urbain

SGFGAS

Société de gestion du FGAS

UESL

Union d'économie sociale du logement

UNFOHLM

Union nationale des fédérations d'organismes HLM

ZRR

Zone de revitalisation rurale

ZUS

Zone urbaine sensible



1 Voir le glossaire en annexe.

2 Circulaire n° 98-100 du 29 octobre 1998.

3 Réponse du Secrétaire d'Etat au logement au questionnaire budgétaire de la commission des Affaires sociales du Sénat.

4 Michel Mouillart, " Perspectives du secteur et du financement du logement à l'horizon 2000 ", document préparé pour les rencontres " Construction " au Sénat le 15 octobre 1998.

5 Le taux d'effort constitue l'indicateur de référence de l'efficacité des aides. Il est égal au loyer (ou à la mensualité pour les accédants) moins l'aide perçue, rapporté au revenu mensuel.

6 Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, " Lever les obstacles au logement des personnes défavorisées ", juillet 1997.

7 INSEE première " Le logement des ménages pauvres en 1996 ", juin 1998.

8 " Promouvoir le droit au logement ", contribution à l'évaluation de la loi du 31 mai 1990,
1998.




Page mise à jour le

Partager cette page