C. LES DIVERSES MISSIONS DE L'ARMÉE DE TERRE (AFRIQUE, OUTRE MER, OPÉRATIONS EXTÉRIEURES ET CONTRIBUTION A LA SÉCURITÉ DU TERRITOIRE) : CONSÉQUENCES DE LA PROFESSIONNALISATION
L'armée de terre assure une contribution décisive à la présence militaire française hors de l'hexagone (qu'il s'agisse des effectifs stationnés dans les territoires sous souveraineté française, des forces de présence en Afrique, ou de la participation de l'armée de terre aux diverses formes d'engagement militaires français sur des théâtres extérieurs). La participation des forces terrestres au renforcement de la sécurité générale, notamment dans le cadre du plan Vigipirate, est également très importante, et confirme la disponibilité de l'armée de terre à accomplir des missions qui ne relèvent pas nécessairement de sa vocation première.
1. Une contribution décisive et justifiée à la présence militaire française hors de la métropole
a) Les forces de souveraineté (Outre-mer)
Au ler
juillet 1998, les
unités de l'armée de terre
stationnées dans les départements et territoire d'outre-mer
représentaient un effectif total de
10 458 hommes
(dont
3 334 personnels servant dans le cadre du service militaire
adapté), ainsi réparti :
- Guyane : 2 563 (dont SMA : 835) ;
- Guadeloupe : 770 (dont SMA : 462) ;
- Martinique : 1 635 (dont SMA : 548) ;
- La Réunion : 2 006 (dont SMA : 936) ;
- Mayotte : 375 (dont SMA : 131) ;
- TAAF : 20 ;
- Polynésie : 1 469 (dont SMA : 214) ;
- Nouvelle-Calédonie : 1 620 (dont SMA : 208).
La majorité des unités opérationnelles est composée
de compagnies d'infanterie motorisée, ainsi que d'éléments
spécifiques à chaque territoire (sections d'éclairage et
de renseignement, moyens antichars, artillerie sol-air, blindés
légers, parachutistes).
Le coût des forces permanentes dans les DOM-TOM est évalué,
pour 1996, à 1,5 milliards de francs, l'essentiel (73 %)
étant constitué par les rémunérations et charges
sociales.
Les effectifs de l'armée de terre stationnées Outre-mer
équivalent à
57 % du dispositif interarmées
et
, compte non tenu du SMA dont l'armée de terre a la charge,
à plus des deux-tiers du total des effectifs stationnés par
les trois armées.
Les parts de la
marine
(2 244 hommes), de l'
armée de
l'air
(1 123 hommes) et de la
gendarmerie
(4 449 hommes) se situent
nettement en retrait
, soit respectivement 12,3 %, 6 % et
24,4 % du dispositif.
Cette forte proportion ne devrait pas être remise en cause par la
professionnalisation
.
Par ailleurs, l'armée de terre a entrepris une
adaptation
substantielle de son dispositif Outre-mer
:
- rééquilibrage des effectifs au profit des
compagnies
tournantes
12(
*
)
, qui
devraient, à partir de 2001, constituer
60 % des effectifs
totaux
compte non tenu du SMA ;
- création d'une compagnie de réservistes par DOM et par TOM,
accueil de volontaires du service national dans le cadre du service militaire
adapté ;
- déconcentration du dispositif à partir du commandement
organique des forces terrestres stationnées outre-mer,
créé le ler août 1998, la planification des modules
tournants étant à la charge du commandement de la force d'action
terrestre.
Il est probable que, en augmentant le nombre de personnels appelés
à servir -même pour des missions de courte durée- en
Outre-Mer, le développement du recours aux compagnies tournantes
contribue à conforter la
motivation des personnels militaires
,
particulièrement importante dans le contexte issu de la
professionnalisation.
Notons enfin la relation entre le développement des modules tournants et
le souci de limiter la charge budgétaire due aux
rémunérations des personnels affectés en Outre-mer. En
effet, les personnels des compagnies tournantes effectueront des séjours
de courte durée (de l'ordre de quatre mois) n'impliquant pas
d'être suivis par leur famille. Cette formule sera
légèrement moins coûteuse en rémunérations et
charges sociales, compte tenu du lien entre les indemnités de service
outre-mer et le nombre de personnes à charge
concernées.
b) Les forces de présence en Afrique
Le tableau ci-après détaille la répartition des effectifs de l'armée de terre entre les différents pays d'Afrique subsaharienne où sont stationnées des forces. Celles-ci représentaient, au 31 mai 1998, 3 509 hommes , (dont 1 854 à Djibouti), soit 68 % de l'ensemble des effectifs interarmées. La participation des autres armées et de la gendarmerie est, là encore, très inférieure à celle de l'armée de terre : 379 hommes pour la marine (soit 6,8 % du dispositif), 1 256 pour l' armée de l'air (soit 22,7 %), 30 pour la gendarmerie (soit 0,5 %).
LES FORCES DE PRÉSENCE EN AFRIQUE AU 31 MAI 1998
TERRITOIRES |
UNITÉS |
TYPES D'UNITÉ |
EFFECTIFS |
TOTAL |
||
|
|
|
OFF |
S/OFF |
MDR |
|
COTE D'IVOIRE |
43° BIMa |
PERMANENT
|
22
|
95
|
84
|
201
|
GABON |
6° BIMa |
PERMANENT
|
10
|
52
|
105
|
167
|
CAMEROUN |
MISLOG |
PERMANENT
|
1
|
2
|
3
|
6
|
SÉNÉGAL |
23°
BIMa
|
PERMANENT
|
23
|
63
|
253
|
339
|
DJIBOUTI |
EMIA |
PERMANENT |
30 |
72 |
59 |
161 |
|
5OIA/OVIA) |
TOURNANT |
1 |
7 |
2 |
10 |
|
5° RIAOM |
PERMANENT |
29 |
92 |
359 |
480 |
|
|
TOURNANT |
14 |
62 |
119 |
295 |
|
13° DBLE |
PERMANENT |
29 |
103 |
494 |
626 |
|
|
TOURNANT |
9 |
57 |
145 |
211 |
|
DETALAT |
PERMANENT |
4 |
23 |
14 |
41 |
|
|
TOURNANT |
1 |
17 |
12 |
30 |
|
|
TOTAL |
117 |
433 |
1204 |
1854 |
TOTAL DES FORCES DE PRÉSENCE |
219 |
858 |
2332 |
3509 |
En 1998,
les effectifs stationnés en Afrique étaient, pour les trois pays
suivants, très comparables aux effectifs enregistrés en 1996 :
- 546 hommes au Gabon (562 en 1996),
- 536 hommes au Sénégal (557 en 1996),
- 561hommes en Côte d'Ivoire (514 en 1996).
Toutefois, à
Djibouti,
le dispositif terrestre français
est passé de 2 093 hommes en 1996 à 1 854 en 1998, soit
une baisse de 11,4 %.
Le redimensionnement du dispositif militaire français en Afrique repose,
pour l'essentiel, sur le
retrait des forces françaises de
République Centrafricaine
, qui relevaient du régime des
opérations extérieures et non des forces de présence (voir
ci-dessous c.), de même que le dispositif français au Tchad
(Epervier) et au Cameroun (Aramis).
Conformément à l'évolution ci-dessus évoquée
s'agissant de l'Outre-mer, la part des
compagnies tournantes
, qui
équivaut déjà à 44 % du total des effectifs
(compte tenu des renforts stationnés au Gabon et au Cameroun), devrait,
à l'échéance de 2001, s'élever à 70 %
du dispositif. A terme, les unités opérationnelles
relèveront donc toutes du régime des compagnies tournantes, des
noyaux permanents importants étant prévus dans chaque organisme
de commandement et de soutien.
Le nombre des modules tournants doit passer (Outre-mer et Afrique confondus) de
7 en 1996 à 17 en 1998, pour atteindre 26 en 2001.
Rappelons que cette nouvelle organisation, fondée sur un recours accru
aux personnels tournants, relève du souci d'alléger une
contrainte financière forte due au poids croissant des
rémunérations et charges sociales dans une armée
professionnelle. En effet, les personnels tournants seront affectés pour
des séjours de courte durée (généralement 4 mois),
sans leur famille et bénéficieront d'un régime de
"surrémunération" moins favorable que celui de personnels
affectés pour une longue période (personnels
prépositionnés). Le choix de privilégier les compagnies
tournantes tient aussi à la nécessité de permettre au plus
grand nombre d'acquérir les compétences indispensables à
des forces projetables. Il permettra également de susciter des vocations
d'engagés parmi les jeunes pour qui l'expérience de la vie
militaire n'est tentante que si elle comporte une part d'aventure.
c) Les opérations extérieures
Il est
désormais classique d'opposer les opérations extérieures
effectuées sous souveraineté française aux
opérations conduites dans un cadre multilatéral (ex-Yougoslavie)
ou dans le cadre de l'ONU (Liban, Angola...).
.
La
contribution de l'armée de terre aux diverses
opérations extérieures
, au 31 mai 1998, s'élevait
à
4 057 hommes
,
soit 75 % des effectifs
interarmées,
ainsi répartis entre les différents types
d'opérations :
1) Opérations françaises |
|
- Tchad (Epervier) |
665 hommes |
- RCA (Murène) |
33 |
- Cameroun (Aramis) |
66 |
- Total |
764 |
2) Opérations multinationales |
|
- ex-Yougoslavie - SFOR |
2 875 |
- ECCM 13( * ) |
46 |
- Observateurs (OSCE, CEE...) |
9 |
- Total |
2 930 |
3) Opérations ONU |
|
- Liban (Finul) |
245 |
- RCA (Minurca) |
170 |
- Angola (Unops et Monua) |
13 |
- Sahara (Minurso) |
20 |
- Observateurs |
15 |
- Total |
463 |
L'importance relative des effectifs déployés en
ex-Yougoslavie
dans le cadre de la SFOR est, cette année encore,
avérée. En mai 1998, ils représentaient à eux
seuls, en effet,
78,8 % des effectifs engagés par l'armée
de terre sur des théâtres extérieurs.
Rappelons, pour
mémoire, les effectifs engagés en opérations
extérieures par les autres armées et par la gendarmerie : 120
hommes pour la
marine
(soit 2 % du dispositif total), 1 027 pour
l'armée de l'air (soit 18,3 % de l'ensemble), et 236 pour la
gendarmerie
(soit 4,2 %).
.
Le
surcoût
imputable, en 1997, pour l'armée de
terre, aux opérations extérieures, s'est élevé
à 2 011,19 millions de francs, soit
la plus grande part
(58,28 %) du surcoût total par le budget de la défense
(3 450,76 millions de francs).
Le poids budgétaire des opérations extérieures devrait
être aussi important en 1998, puisque les prévisions
effectuées au 31 mai 1998 portent sur un surcoût de
1 181,83 millions de francs pour la seule armée de terre,
équivalent à
56,4 % d'un surcoût total
estimé à 2 094,17 millions de francs pour le budget de la
défense.
De manière désormais très classique, on relève
l'
importance du poste rémunérations et charges sociales
,
qui représente à lui seul 72 % du surcoût de
l'armée de terre en 1997 (74 % en 1998), ce qu'illustre le tableau
ci-joint.
Surcoût global des opérations extérieures pour l'armée de terre et comparaison avec le surcoût global pour la défense (au 31 mai 1998)
|
1996 |
1997 |
1998 *( * ) |
RÉMUNÉRATIONS - CHARGES SOCIALES |
1 941,91 |
1450,33 |
875,64 |
ALIMENTATION |
125,32 |
94,49 |
60,62 |
FONCTIONNEMENT |
430,04 |
261,89 |
156,93 |
ENTRETIEN PROGRAMME DU MATERIEL |
17,72 |
34,64 |
26,73 |
TOTAL TITRE III |
2 514,99 |
1 841,35 |
1 119,92 |
TOTAL TITRE III DEFENSE |
3 933,74 |
2 752,09 |
1 847,39 |
ENTRETIEN PROGRAMME DU MATERIEL |
110,97 |
43,48 |
25,11 |
FAB. HCCA 14( * ) |
219,51 |
66,28 |
18,19 |
FAB. SUBSISTANCES |
143,15 |
40,00 |
5,00 |
MUNITIONS |
32,27 |
15,08 |
11,21 |
INFRASTRUCTURE |
38,62 |
5,00 |
2,40 |
TOTAL TITRE V |
544,52 |
169,84 |
61,91 |
CESSIONS |
10,00 |
- |
- |
TOTAL TITRE V DEFENSE |
1 213,42 |
698,67 |
246,78 |
TOTAL GENERAL TERRE |
3 069,51 |
2 011,19 |
1 181,83 |
TOTAL GENERAL DEFENSE |
5 147,16 |
3 450,76 |
2 094,17 |
La
réforme récente de la rémunération des personnels
en opex
vise précisément à atténuer ce
surcoût en rémunérations et charges sociales, afin de
limiter un besoin de financement des opex en cours d'année qui se
traduit régulièrement par l'ouverture de crédits
supplémentaires par décrets d'avance ou collectifs
budgétaires.
Cette réforme s'appuie sur un régime de
rémunération désormais
constant quel que soit le
théâtre d'opérations.
Il est composé d'une
indemnité de sujétion pour service à l'étranger qui
équivaut à 1,5 fois la solde de base, complétée par
un supplément par enfant à charge. Cette indemnité
s'ajoute à la rémunération servie au militaire en
métropole.
En revanche, les militaires affectés à des forces
prépositionnées continueront à percevoir la
rémunération des agents de l'Etat en poste à
l'étranger.
Par ailleurs, une dotation de 179 millions de francs a, pour la
première fois en 1998, été inscrite au budget de la
défense, afin de couvrir le coût des rémunérations
des personnels de l'armée de terre servant dans le cadre de forces
d'intervention Afrique. Jusqu'à cette date en effet, seule une partie de
ces surcoûts était budgétisée, rendant
nécessaire des ouvertures de crédits en cours d'exercice. La
dotation prévue pour 1999 représente
98 millions de
francs au titre des rémunérations des forces en opérations
extérieures "normales"
(par opposition aux forces
multilatérales ou engagées dans le cadre de l'ONU). Cette
réduction par rapport à 1998 tient au redéploiement de
notre dispositif en Afrique, en particulier au retrait de RCA.