N° 150

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2024

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2025,

TOME VII

JUSTICE JUDICIAIRE ET ACCÈS AU DROIT

Par Mmes Lauriane JOSENDE et Dominique VÉRIEN,

Sénatrices

(1) Cette commission est composée de : Mme Muriel Jourda, présidente ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Mmes Isabelle Florennes, Patricia Schillinger, Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Michel Masset, vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Marie Mercier, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Olivier Bitz, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Sophie Briante Guillemont, MM. Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Mme Corinne Narassiguin, MM. Georges Naturel, Paul Toussaint Parigi, Mmes Anne-Sophie Patru, Salama Ramia, M. Hervé Reynaud, Mme Olivia Richard, MM. Teva Rohfritsch, Pierre-Alain Roiron, Mme Elsa Schalck, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8

Sénat : 143 et 144 à 150 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

Le projet de loi de finances (ci-après, PLF) pour 2025 prévoit une baisse des crédits de la mission « Justice » par rapport à la trajectoire définie par la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice (ci-après, LOPJ) pour 2023-2027, un an seulement après l'adoption de celle-ci.

L'arbitrage budgétaire annoncé par le garde des Sceaux le 31 octobre 2024 permettrait de préserver le schéma de recrutement net du ministère et l'essentiel de ses investissements numériques. Il réduirait en outre de moitié la diminution des crédits alloués à l'immobilier judiciaire, initialement établie à 93 millions d'euros.

Dans l'attente de cet amendement, auquel elle ne pourra être que favorable, la commission sera attentive à la poursuite de l'amélioration de certaines politiques de la Chancellerie. Le maintien des recrutements projetés en LOPJ ne dispense pas le ministère de poursuivre ses actions favorables à l'attractivité des professions judiciaires, qu'il s'agisse des mesures catégorielles ou de l'amélioration générale des conditions de travail. Les politiques numérique et immobilière du ministère déterminent ainsi largement la qualité de travail des agents de la Chancellerie et, partant, l'attractivité des métiers qu'ils exercent. Il incombe donc au ministère de la justice de répondre aux inquiétudes de son personnel quant à sa politique immobilière et de résoudre les difficultés qui naissent souvent de la maintenance et du développement de ses applicatifs.

Sous ces réserves et après avoir entendu le garde des Sceaux, Didier Migaud, la commission a, sur la proposition de ses rapporteures, Lauriane Josende et Dominique Vérien, émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Justice judiciaire », « Accès au droit et à la justice », « Conduite et pilotage de la politique de la justice » et « Conseil supérieur de la magistrature » de la mission « Justice », inscrits au projet de loi de finances pour 2025.

I. UN ÉCART IMPORTANT AU REGARD DES OBJECTIFS DE LA LOPJ, POUR UN BUDGET DÉJÀ TRÈS CONTRAINT

A. L'ARBITRAGE BUDGÉTAIRE ANNONCÉ A TEMPÉRÉ - SANS LES ÉVACUER - LES PRÉOCCUPATIONS RÉSULTANT DE LA BAISSE DES CRÉDITS DE LA MISSION PAR RAPPORT À LA TRAJECTOIRE ÉTABLIE EN LOPJ

1. Le PLF initial induirait des conséquences regrettables sur le recrutement et l'investissement de la Chancellerie

Les crédits attribués à la mission « Justice » dans le PLF déposé par le Gouvernement apparaissent sensiblement inférieurs à la trajectoire prévue par la LOPJ. Cette diminution de 487 millions d'euros des crédits à l'échelle de la mission par rapport aux dispositions de la LOPJ entraînerait donc des conséquences significatives pour les différents programmes examinés.

Évolution des crédits en AE et CP entre la loi de finances initiale
pour 2024 et le projet de loi de finances pour 2025

 

LFI 2024

PLF 2025

Évolution 2024-2025

Programme

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Justice judiciaire

4 753 946 619

4 544 008 245

4 584 616 923

4 567 111 867

-3,56 %

+0,51 %

Accès au droit et à la justice

736 234 297

736 234 297

798 130 559

798 130 559

+8,41 %

+8,41 %

Conduite et pilotage de la politique de la justice

768 281 245

747 085 247

640 492 354

704 566 938

-16,63 %

-5,69 %

Conseil supérieur de la magistrature

4 638 029

5 720 822

4 832 456

5 915 249

+4,19 %

+3,40 %

Total

6 261 100 190

6 031 048 611

6 028 072 292

6 075 724 613

-3,72 %

+0,74 %

Source : commission des lois, d'après la documentation budgétaire

Le PLF prévoit ainsi dans sa version initiale le recrutement de 125 magistrats, 145 greffiers et d'aucun attaché de justice. Le maintien en l'état du texte compromettrait donc la satisfaction des objectifs de recrutement retenus au sein de la LOPJ, que plusieurs personnes auditionnées par les rapporteures estiment du reste insuffisants à terme.

Au-delà, les crédits consacrés à l'immobilier judiciaire connaîtraient - par rapport à la loi de finances initiale (ci-après, LFI) pour 2024 - une baisse de 93 millions d'euros, et ceux alloués à l'informatique ministérielle, de 37 millions d'euros.

2. L'arbitrage budgétaire obtenu par le garde des Sceaux préserverait la trajectoire de recrutement définie en LOPJ et les investissements numériques de la Chancellerie

Le ministre de la justice a annoncé le 31 octobre 2024 que la mission « Justice » bénéficierait d'un abondement de 250 millions d'euros, dont près de 140 millions d'euros seraient alloués aux programmes du présent avis budgétaire et ventilés comme suit parmi ces derniers : 86,43 millions d'euros pour le programme « Justice judiciaire », 4,3 millions d'euros pour « Accès au droit et à la justice », 50,3 millions d'euros pour « Conduite et pilotage de la politique de la justice » et plus de 375 000 euros pour le Conseil supérieur de la magistrature. Un autre amendement gouvernemental réduirait de 13,4 millions d'euros les crédits afférents aux programmes de cet avis, conformément à des mesures générales de régulation budgétaire. Les programmes connaîtraient donc au total une augmentation réelle de leurs crédits de paiement, à l'exception du programme 310.

Évolution des crédits en AE et CP entre la loi de finances initiale pour 2024
et le projet de loi de finances pour 2025 en cas d'adoption des deux
amendements gouvernementaux

 

LFI 2024

PLF 2025

Évolution 2024-2025

Programme

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Justice judiciaire

4 753 946 619

4 544 008 245

4 659 756 765

4 642 251 709

-1,98 %

+2,16 %

Accès au droit et à la justice

736 234 297

736 234 297

802 430 559

802 430 559

+8,99 %

+8,99 %

Conduite et pilotage de la politique de la justice

768 281 245

747 085 247

689 696 126

753 770 710

-10,23 %

0,89 %

Conseil supérieur de la magistrature

4 638 029

5 720 822

5 194 687

6 277 480

+12,00 %

+9,73 %

Total

6 261 100 190

6 031 048 611

6 028 072 292

6 075 724 613

-1,66 %

+2,88 %

Source : commission des lois, d'après la documentation budgétaire

Le garde des Sceaux et les services du ministère de la justice ont apporté lors de leur audition quelques précisions quant à l'emploi prévisionnel de ces crédits supplémentaires :

L'arbitrage budgétaire permettrait en premier lieu de préserver la trajectoire de recrutements nets établie en LOPJ. Cela porterait en conséquence le recrutement à 970 ETP supplémentaires pour les services judiciaires, lesquels seraient déclinés en 343 postes de magistrats, 320 de greffiers et 307 d'attachés de justice1(*).

Une part significative de ces crédits serait en outre consacrée à la politique numérique du ministère en général, et au second plan de transformation numérique en particulier. Le garde des Sceaux a confirmé que 49 millions d'euros supplémentaires seraient attribués au numérique - et qualifié de prioritaires les projets Portalis, Prisme et la procédure pénale numérique (ci-après, PPN). Parmi ces crédits, enfin, 47,4 millions d'euros seraient affectés à l'immobilier judiciaire et 6 millions d'euros à l'aide juridictionnelle.

B. LES CONSÉQUENCES DE LA SITUATION BUDGÉTAIRE ACTUELLE RAPPELLENT LA MARGE BUDGÉTAIRE LIMITÉE DONT DISPOSE LE MINISTÈRE DE LA JUSTICE

1. La mission « Justice », déjà éprouvée par la régulation budgétaire de l'année écoulée, repose largement sur des dépenses incompressibles

La régulation budgétaire conduite par le ministère de la justice en 2024 a souligné le fait que ce dernier dispose de marges de manoeuvre réduites. Le décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits a par exemple porté sur près de 129 millions d'euros de crédits pour le programme 166, 43 millions d'euros pour le programme 310 et 200 000 euros pour le programme 335 - dont, au total, pour ces trois programmes, près de 8,5 millions d'euros affectés aux dépenses de personnel. Certaines personnes auditionnées ont signalé que la régulation budgétaire a conduit au report au début de l'année 2025 de dépenses imputables à l'exercice 2024, ce qui grève les crédits du PLF pour 2025.

Le secrétariat général et la direction des services judiciaires ont toutefois identifié, lors de leurs échanges avec la direction du budget, deux manières de contenir la croissance des dépenses du ministère de la justice. Il s'agit d'oeuvrer à la réduction du dynamisme des frais de justice, d'une part, et de l'aide juridictionnelle, d'autre part :

· La maîtrise des frais de justice apparaît nécessaire au regard de leur augmentation significative ces dernières années. Le PLF initial prévoit ainsi une hausse des crédits qui leur sont consacrés de 68 millions d'euros, ce qui porte l'ensemble à 743 millions d'euros. Ce dynamisme s'explique notamment par la progression sensible de certains segments ; les coûts relatifs aux investigations numériques et aux expertises médicales augmentent ainsi respectivement de 37,3 % et 26,2 %. La direction des services judiciaires déploie ainsi un plan de maîtrise des frais de justice, assorti d'une amélioration de la gouvernance de cette dépense et d'une politique de sensibilisation interministérielle pour associer les officiers de police judiciaire à cette démarche2(*). Ces différentes actions participent à la réduction progressive de la croissance du coût des mémoires déposés ; cette dernière s'élevait à 5 % entre 2023 et 2024, contre 12 % entre 2020 et 2021. Aussi importe-t-il de poursuivre ces actions pour réduire la hausse des frais de justice à sa part incompressible. Les rapporteures accueillent donc favorablement les priorités identifiées pour 2025 par la direction des services judiciaires, que sont la réduction de 20 % des coûts du gardiennage de véhicules et le développement du recours à la plateforme nationale des interceptions judiciaires (ci-après, PNIJ) ;

· La modulation de l'aide juridictionnelle, préconisée par la Cour des comptes dans un rapport du 13 octobre 2023 et avancée par plusieurs personnes auditionnées, a été envisagée par les services du ministère de la justice. Les crédits alloués à l'aide juridictionnelle ont en effet crû de près de 35 % entre 2020 et 2024. Si cette hausse est largement due aux revalorisations de la rétribution des avocats, le ministère entend toutefois la modérer grâce à deux actions principales. La première consiste en l'introduction d'une procédure de recouvrement de l'aide juridictionnelle « garantie » versée à des bénéficiaires non exigibles3(*), qui entrera en vigueur le 1er janvier 2026. La seconde, en la réduction de la rétribution d'un avocat qui assiste plusieurs justiciables à l'occasion d'affaires similaires, soit lors des « grands procès ».

2. Le ministère de la justice souffre d'un sous-investissement durable auquel il est impérieux de remédier

Le rapport remis au président de la République à l'issue des États généraux de la justice a dressé le constat d'un « sous-investissement chronique » qui suscite le consensus et justifia l'adoption de la loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027. Aussi les rapporteures sont-elles vivement attachées à la préservation des dépenses d'investissement du ministère de la justice.

Le récent rapport de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (ci-après, CEPEJ), diffusé le 16 octobre 2024 quoiqu'élaboré à partir des données de 2022, a ainsi été cité à plusieurs reprises au cours des auditions qui ont rappelé que la hausse significative du budget alloué au ministère de la justice depuis 2017 n'a pas encore pallié l'insuffisance durable de l'investissement de la Chancellerie. La CEPEJ observe ainsi que les pays comparables à la France consacrent en moyenne 92,10 euros par habitant et 0,30 % de leur produit intérieur brut (ci-après, PIB) à la justice, tandis que ces données s'élèvent respectivement à 77,20 euros et à 0,20 % pour la France.

Source : CEPEJ, « Système judiciaires européens », 2024, à partir des données de 2022

Ces éléments soulignent la nécessité de préserver les objectifs consacrés par la LOPJ, et de soigner leur suivi pour envisager leur prolongement à terme. Il semble en effet que le rattrapage des divers retards accumulés par le ministère de la justice ne sera pas achevé dès 2027.

II. LA MISSION « JUSTICE » SUSCITE DES PRÉOCCUPATIONS PLURIELLES QUI EXIGENT UN SUIVI ADAPTÉ ET DES MOYENS PÉRENNES

A. LA POURSUITE DES INVESTISSEMENTS NUMÉRIQUES ET IMMOBILIERS INDISPENSABLES AU MINISTÈRE DE LA JUSTICE NÉCESSITE UNE PRÉVISIBILITÉ ACCRUE

1. La Chancellerie doit poursuivre son rattrapage numérique et répondre aux attentes légitimes de ses agents en la matière

Plusieurs volets de la politique informatique et numérique de la Chancellerie suscitent l'inquiétude durable des agents du ministère, qui avait été accentuée par la baisse initialement prévue des crédits attribués à ces actions. Les rapporteures constatent la permanence des difficultés rencontrées par les personnels à l'usage des applicatifs désuets voire dysfonctionnels du ministère. L'exemple de Cassiopée est éloquent. Plusieurs personnes auditionnées ont souligné les nombreuses défaillances techniques de ce logiciel et le risque juridique que son usage entraîne, car de nombreuses trames contiennent des erreurs procédurales ou n'apparaissent pas à jour des réformes législatives. Le secrétariat général du ministère s'attache actuellement à la réduction du nombre des trames, de 1 500 à quelques centaines, pour simplifier la maintenance - coûteuse - de cette application et, par là même, satisfaire les attentes des agents. Le remplacement de Cassiopée n'apparaît toutefois pas envisagé à l'heure actuelle.

Au-delà des questions de maintenance, la Chancellerie connaît aussi des problèmes de développement de ses grands projets numériques. L'expérimentation de Portalis auprès des conseils de prud'hommes et de certains juges aux affaires familiales n'apparaît, selon les agents du ministère, pas concluante pour l'instant. Le secrétariat général explique ces difficultés par la méthode employée, qui vise à adapter l'application continuellement, au regard des retours qui lui parviennent. Si cette pratique présente évidemment des vertus, au premier rang desquelles l'assurance d'aboutir in fine à un applicatif conforme aux attentes des agents, elle ne doit pas pour autant compromettre la qualité de travail de ces derniers. La substitution de Prisme à APPI à la cour d'appel de Colmar se serait ainsi soldée par la restauration immédiate d'APPI au regard des lacunes actuelles de Prisme. Le ministère de la justice doit donc continuer d'oeuvrer à l'amélioration de sa politique numérique ; le maintien, voire l'augmentation des crédits qui y sont alloués apparaît donc comme une condition primordiale, mais insuffisante.

« Fondation », l'outil de travail développé par le CSM

L'activité de nomination du CSM repose actuellement sur l'usage d'un logiciel développé en interne, Lodam, qui apparaît désormais obsolète et contient des failles de sécurité significatives. Le CSM a donc engagé le développement d'un nouvel outil de travail suivant la démarche de beta.gouv.fr ; l'expression des besoins des utilisateurs constitue dans ce cadre le principal déterminant de l'élaboration de l'applicatif. La première version de Fondation est éprouvée par quatre membres du CSM, dits « beta-testeurs », depuis le 30 octobre 2024, et l'objectif serait de donner accès à l'« espace membres » de Fondation à l'ensemble des 22 membres du CSM dès le 17 mars 2025.

Les agents du ministère de la justice connaissent également des difficultés pratiques quotidiennes en matière informatique, qu'ils peinent à résoudre aisément. Les services du ministère de la justice ont assuré aux rapporteures qu'ils entendent favoriser la décentralisation de cette assistance informatique. Le recrutement récent de plus de 100 techniciens informatiques de proximité (ci-après, TIP) y participe. Le ministère s'attache désormais à l'amélioration du service rendu, notamment en ajustant dans le temps les droits d'accès des TIP pour leur permettre de répondre à l'essentiel des sollicitations qu'ils reçoivent en juridiction.

2. La politique immobilière du ministère constitue l'une des préoccupations les plus sensibles dans un contexte budgétaire contraint

L'immobilier judiciaire demeurerait, dans l'hypothèse de l'adoption des amendements gouvernementaux, l'une des préoccupations principales suscitées par la mission « Justice ». La baisse de 93 millions d'euros des crédits consacrés à cette politique publique serait donc ramenée à 45,6 millions d'euros. Cette hausse des crédits permettra d'assurer la poursuite de projets en conception, au premier rang desquels, selon le garde des Sceaux, ceux de Perpignan, Meaux, Toulon, Bobigny et de l'île de la Cité. Le contexte budgétaire souligne en outre la nécessité de garantir une certaine prévisibilité pour réaliser de grandes opérations, qui exigent par définition des engagements fermes et pluriannuels de crédits.

Les rapporteures ont constaté au surplus le mécontentement pérenne des personnels quant aux projets livrés. Une amélioration de la politique actuelle de consultation du ministère permettrait d'y remédier, en veillant à ce que les agents soient non seulement entendus, mais écoutés. La déconcentration croissante des budgets dédiés à la menue maintenance dont disposent les chefs de juridiction et le recrutement de techniciens immobiliers à l'échelle des cours d'appel témoignent de la volonté du ministère de la justice d'apporter des solutions rapides aux personnels judiciaires. Enfin, la direction des services judiciaires consacrera plus de la moitié de la hausse des crédits alloués à l'immobilier occupant, soit 5,2 millions d'euros, à l'adaptation nécessitée par les évolutions d'effectifs4(*).

L'Agence publique pour l'immobilier de la justice

La maîtrise d'ouvrage des opérations complexes repose sur une organisation tripartite, dans laquelle la tutelle budgétaire revient au secrétariat général du ministère de la justice, la tutelle « métier », à la direction des services judiciaires et dont l'opérateur est l'Agence publique pour l'immobilier de la justice (ci-après, APIJ), créée en 2001. Cette organisation permet à la Chancellerie de bénéficier d'une expertise spécifique, qui est précieuse compte tenu du nombre d'opérations d'ampleur à conduire. L'incertitude quant à la réalisation des projets pourrait accentuer les difficultés de recrutement de l'APIJ, dont deux tiers des effectifs sont des contractuels et un tiers, des fonctionnaires détachés. Les rapporteures seront attentives aux conclusions du prochain contrôle de la Cour des comptes relatif à l'organisation de l'immobilier judiciaire que les représentants de l'APIJ ont mentionné à l'occasion de leur audition.

Les rapporteures saluent par ailleurs l'appropriation, par les services du ministère de la justice, de l'outil de suivi des fluides (ci-après, OSFi) développé en interministériel par la direction de l'immobilier de l'État. L'OSFi permet de suivre la consommation par fluide et par bâtiment et, partant, d'évaluer les économies induites par la rénovation énergétique du bâti. Un poste d'ingénieur énergéticien a récemment été pourvu au bureau de l'immobilier, et des référents « énergie » ont été nommés au sein des services administratifs régionaux pour faciliter le recours à l'OSFi.

B. LA POLITIQUE AMBITIEUSE DE RECRUTEMENT DU MINISTÈRE REPOSE SUR LA RESTAURATION ENCORE INACHEVÉE DE L'ATTRACTIVITÉ DES PROFESSIONS JUDICIAIRES

1. L'application bienvenue de l'accord du 26 octobre 2023 ne dispense pas d'un suivi attentif de l'attractivité de la profession de greffier

L'exécution des mesures encore pendantes de l'accord signé le 26 octobre 2023 par le directeur des services judiciaires et trois des quatre organisations syndicales représentatives des fonctionnaires des services judiciaires a significativement avancé au cours des dernières semaines :

- Le décret n°2024-1050 du 22 novembre 2024 portant sur le plan de requalification de 700 adjoints administratifs faisant fonction de greffier ;

- Le projet de décret relatif à la création du « cadre greffier » devait être examiné au Conseil d'État le 20 novembre dernier et publié dans les meilleurs délais.

La direction des services judiciaires évalue à 24 millions d'euros le coût prévisionnel, pour 2025, des mesures évoquées - la création du « cadre greffier » (10 millions d'euros), le plan de requalification des adjoints administratifs faisant fonction de greffiers (1 million d'euros) - et de la revalorisation indiciaire des greffiers entrée en vigueur dès 2024 (13 millions d'euros).

Le manque d'attractivité de la profession de greffier demeure toutefois encore criant, comme en atteste le taux de sélectivité anormal des récents concours. Lors du deuxième concours externe au titre de l'année 2024, le taux de présence à l'écrit s'élevait à 15,5 %, le taux d'admissibilité à 60 % et le taux d'admission à 74 %. Si cela s'explique tant par un phénomène général, qui frappe l'ensemble des concours publics, que par des raisons spécifiques aux concours des greffes5(*), la situation n'en demeure pas moins préoccupante. Les actions conduites par le ministère pour développer l'attractivité de cette profession sont donc bienvenues - ainsi de l'adaptation des calendriers de concours, de l'expérimentation des concours nationaux à affectation locale ou de l'accueil en détachement dans le corps des greffiers. Enfin, si le ministère de la justice a adopté plusieurs mesures de valorisation des fonctions de directeur des services de greffe en 2022 et 20236(*), plusieurs personnes auditionnées attendent de véritables négociations relatives à la valorisation et à l'évolution de cette profession.

Il serait bienvenu que le ministère entreprenne la clarification de l'organisation des juridictions ; les organisations syndicales auditionnées ont en effet réitéré leurs critiques à ce sujet. Cette organisation, perturbée par un déficit pluriannuel de recrutement, puis par le recours à des contractuels aux fonctions partiellement indéterminées, ne satisfait plus bon nombre d'agents. La direction de projet « Modélisation des organisations » instituée en 2023 au sein de la direction des services judiciaires s'attache à améliorer l'organisation du travail en juridiction. Elle déploiera à cette fin dès la fin de l'année 2024 des guides propres à chaque activité juridictionnelle. Il sera précieux de recueillir l'avis des agents à ce sujet. En outre, un comité restreint a rendu en août dernier un rapport relatif à la révision du code de l'organisation judiciaire, dont il importera de suivre les effets.

2. Plusieurs actions attendues par les professions judiciaires demeurent pendantes voire incertaines

Plusieurs personnes auditionnées ont signalé aux rapporteures l'interruption subite de la réforme annoncée de la grille indiciaire des magistrats judiciaires, qui n'a pas progressé depuis 1996. Il s'agirait de la rapprocher de celle des magistrats administratifs et ainsi d'améliorer l'attractivité de cette profession. Il a par exemple été souligné que le traitement brut d'un magistrat en début de carrière, qui s'élevait à l'équivalent de 1 851 euros en 1996, soit près de 2 SMIC à cette date, n'était en 2022 que de 2 157 euros, ce qui ne représente que 1,28 SMIC et traduit donc une baisse réelle. Le directeur des services judiciaires avait annoncé lors de la commission permanente d'étude du 29 mai 2024 que cette réforme aboutirait dès avant l'exercice 2025. Si le contexte institutionnel et budgétaire explique largement la suspension provisoire de cette démarche, il n'exempte pas le ministère de la justice d'une présentation rapide du calendrier nouveau de cette réforme.

Le ministère de la justice a oeuvré à l'élaboration d'un outil d'évaluation de la charge de travail des magistrats dans le cadre d'un groupe de travail auquel étaient associés la direction des services judiciaires, les organisations syndicales représentatives, les conférences et les associations professionnelles. Cette logique, initiée en 2011, a été reprise en 2021 sur l'instigation de la Cour des comptes et dans le contexte des États généraux de la justice. Les organisations syndicales représentatives auditionnées saluent la qualité des échanges au sein de ce groupe de travail, mais regrettent vivement que le ministère de la justice s'en soit en partie désolidarisé en 2024, lors de l'adoption pourtant consensuelle de plusieurs référentiels. Le directeur des services judiciaires aurait écarté l'application immédiate de ces outils et requis de nouveaux travaux d'adaptation de ces derniers7(*). Les rapporteures souhaiteraient la bonne poursuite de ces travaux, dont les résultats seront précieux à l'élaboration de la politique de recrutement du ministère au-delà de la LOPJ.

*

* *

La commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Justice judiciaire », « Accès au droit et à la justice », « Conduite et pilotage de la politique de la justice » et « Conseil supérieur de la magistrature » de la mission « Justice », inscrits au projet de loi de finances pour 2025.

EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 27 NOVEMBRE 2024

Mme Lauriane Josende, rapporteure pour avis des programmes « Justice judiciaire » et « Accès au droit et à la justice ». - Il nous revient, avec Dominique Vérien, de vous présenter les crédits de certains programmes de la mission « Justice » du projet de loi de finances (PLF) pour 2025.

Pour rappel, le champ de cet avis budgétaire couvre les programmes « Justice judiciaire », « Accès au droit et à la justice », « Conduite et pilotage de la politique de la justice » et « Conseil supérieur de la magistrature ».

Je commencerai par exposer la situation budgétaire du ministère de la justice, avant que Dominique Vérien ne partage avec vous nos préoccupations principales à ce sujet. Il est inutile de revenir sur la place spécifique de la mission « Justice » au sein du budget, telle qu'elle résulte des conclusions des États généraux de la justice et de l'adoption, l'an dernier, de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (LOPJ).

Nous partageons tous le constat d'une justice qui souffre d'un sous-investissement et d'un manque de personnel chroniques, auxquels nous entendions justement remédier. Seulement, le contexte budgétaire a conduit à l'adoption d'une lettre plafond qui aurait, à l'échelle de la mission, entraîné une réduction de 487 millions d'euros par rapport à la trajectoire définie dans la LOPJ. Le PLF initial se fondait sur cette hypothèse, et les conséquences auraient été lourdes.

Dans un tel scénario, il aurait fallu revoir à la baisse les objectifs de recrutement et abandonner une grande partie des investissements numériques et immobiliers du ministère. Les crédits dédiés à l'immobilier judiciaire auraient ainsi diminué de 93 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2024, et ceux qui sont consacrés à l'informatique ministérielle de 37 millions d'euros. Cela revenait quasiment à abandonner l'ambition portée par la LOPJ, un an seulement après son adoption.

Le garde des sceaux a toutefois annoncé le 31 octobre dernier qu'il avait obtenu un arbitrage budgétaire favorable de 250 millions d'euros. L'amendement gouvernemental qui ventile ces crédits indique que les programmes de notre avis budgétaire obtiendraient plus de la moitié de ces crédits, soit près de 140 millions d'euros. Nous accueillons fort favorablement cet amendement, qui permet de préserver certaines politiques essentielles à la qualité de notre justice.

Nous songeons d'abord à la trajectoire de recrutement du ministère établie en LOPJ, qui serait respectée avec la création de 343 postes de magistrats, 320 postes de greffiers et 307 postes d'attachés de justice. Nous pensons ensuite à l'investissement immobilier et numérique de la Chancellerie, qui aurait connu une baisse drastique sans cet arbitrage, car les dépenses de ce ministère sont particulièrement contraintes. Grâce à cet amendement, ces deux lignes seraient abondées respectivement de 47,4 millions d'euros et de 49 millions d'euros.

Cette hausse de crédits nous paraît nécessaire, car, du fait des marges de manoeuvre budgétaires réduites du ministère, toute diminution de crédits entraîne des conséquences sur les dépenses prioritaires.

Nous avons toutefois interrogé les services de la Chancellerie quant à des pistes éventuelles de bonne gestion, qui permettraient, sinon de réduire certaines dépenses, du moins de contenir leur dynamisme. Deux pistes nous ont été présentées : d'une part, la maîtrise des frais de justice, qui connaissaient une hausse aiguë depuis plusieurs années et qui diminuent grâce aux politiques conduites par le ministère ; d'autre part, la modulation de l'aide juridictionnelle, grâce à des mesures portant sur l'aide juridictionnelle « garantie » et sur la rétribution des avocats lors des « grands procès ».

Nous sommes satisfaites de ces efforts de bonne gestion financière et nous souhaitons qu'ils s'étendent aux politiques les plus sensibles de la Chancellerie.

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis des programmes « Justice judiciaire » et « Accès au droit et à la justice ». - Nous avons en effet orienté nos travaux autour de trois politiques principales, à savoir le recrutement, le numérique et l'immobilier. Ce n'est certes pas la première fois, mais cela est logique : le ministère de la justice connaît un tel retard dans ces domaines que nous devons en assurer un suivi annuel. Cette approche est essentielle à la qualité de nos travaux.

Commençons par le recrutement : en cas d'adoption de l'amendement gouvernemental, que nous souhaitons, les objectifs de recrutement posés par la LOPJ seront donc satisfaits. C'est une bonne nouvelle, qui nous paraît nécessaire, bien qu'insuffisante !

Au-delà de l'approche quantitative, une analyse qualitative est nécessaire, car les professions judiciaires peinent souvent à attirer des candidats. Nous nous réjouissons donc de l'avancée de l'application des accords du 26 octobre 2023, qui visent à revaloriser certaines professions judiciaires, au premier rang desquelles la profession de greffier.

Il y a cependant encore du chemin ! Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Prenons l'exemple du recrutement des greffiers : lors du deuxième concours externe au titre de l'année 2024, le taux de présence à l'écrit s'élevait à 15,5 %, le taux d'admissibilité à 60 % et le taux d'admission à 74 % ! Des mesures de revalorisation, dont le ministère estime le coût annuel à près de 24 millions d'euros, ont pourtant été prises, mais l'effort doit se poursuivre.

La Chancellerie doit donc encore oeuvrer à l'attractivité des métiers judiciaires. Cela exige notamment de poursuivre les travaux relatifs à l'organisation des juridictions, mais aussi de répondre aux inquiétudes des magistrats relatives à l'évolution de leur grille indiciaire ou à l'évaluation de leur charge de travail. Tout cela est primordial pour que les objectifs de la LOPJ soient atteints.

Venons-en désormais aux investissements numériques et immobiliers du ministère. Nous parlions à l'instant de l'attractivité de ces professions, et les personnels judiciaires que nous avons auditionnés ont tous relié ce manque d'attractivité à leurs conditions de travail dégradées. Les greffiers, par exemple, craignent de perdre certains lauréats des concours à cause de leur environnement de travail obsolète.

La politique de recrutement audacieuse de la Chancellerie doit donc impérativement s'accompagner d'une amélioration de ses politiques numérique et immobilière.

La politique numérique suscite des préoccupations qui tiennent tant à la maintenance qu'au développement des applicatifs. Du point de vue de la maintenance, l'exemple le plus éloquent est celui de Cassiopée, un applicatif essentiel en matière pénale. Les magistrats nous ont alertées, car l'obsolescence de ce logiciel entraîne des risques juridiques importants, au-delà de la question de ses nombreuses défaillances techniques.

Concernant le développement des grands projets numériques de la Chancellerie, les exemples abondent. L'expérimentation actuelle de Portalis paraît ainsi laborieuse selon les agents. Les services du ministère s'en défendent, avec des arguments a priori rassurants : les difficultés actuelles seraient liées au fait que le ministère entend désormais multiplier les retours des utilisateurs pour aboutir à un logiciel satisfaisant pour le personnel. Espérons-le ! Nous pourrons - et devrons - contrôler cela lors du prochain PLF.

La politique immobilière, enfin, doit éviter deux écueils principaux, le premier étant strictement budgétaire. Le risque le plus important est de voir les crédits alloués à l'immobilier judiciaire diminuer dans le contexte budgétaire que nous connaissons. Ce serait inquiétant, car le bâti, qui n'était déjà pas satisfaisant, ne permettrait pas d'accueillir les nouveaux effectifs. En outre, la réalisation de ces projets nécessite une prévisibilité que nous pourrions perdre dans les prochaines années...

Le second écueil est institutionnel : les personnels que nous avons auditionnés se plaignent d'être insuffisamment entendus lors de l'élaboration des projets immobiliers. Le ministère et son opérateur, l'Agence publique pour l'immobilier de la justice (APIJ), nous ont exposé leur politique de consultation. Elle est certes bien structurée, mais il ne faudrait pas qu'elle soit essentiellement formelle !

Le ministère de la justice s'attache donc à remédier aux différentes préoccupations que nous avons évoquées. Il faut s'en réjouir, mais, la confiance n'excluant pas le contrôle, nous nous assurerons que la Chancellerie continue d'améliorer sa gestion.

Au regard de l'arbitrage budgétaire obtenu et des efforts accomplis par la Chancellerie pour améliorer ses politiques structurantes, nous vous proposons de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de ces différents programmes de la mission « Justice ».

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Le budget de la justice a connu des hausses successives et considérables ces dernières années, ce dont il faut se féliciter, même si les besoins restent immenses.

Dans le contexte budgétaire actuel, notre groupe déposera des amendements se cantonnant à quelques sujets, et n'abordera pas certaines demandes pourtant pertinentes. Nous nous basons sur le budget tel qu'il a été déposé, car nous verrons bien en séance ce qui adviendra de l'amendement du Gouvernement.

Le premier sujet d'importance a trait aux recrutements : nous proposerons ainsi la création de 500 postes de magistrats, de 500 postes de greffiers et de 1 000 postes d'attachés de justice, mais également des créations de postes spécifiques au sein des juridictions spécialisées dans le domaine des violences intrafamiliales, un sujet sur lequel j'ai toujours fait preuve de la plus grande détermination. Nous avons déjà eu ce débat lorsque Dominique Vérien, chargée d'une mission sur le sujet, avait conclu qu'il était nécessaire de créer des pôles, qui certes l'ont été, mais insuffisamment à nos yeux. Nous proposerons donc l'instauration d'une juridiction spécialisée dans chaque tribunal, dont le fonctionnement nécessiterait trois juges, deux parquetiers et trois greffiers.

Nous déposerons également un amendement concernant l'informatique, point qui préoccupe à juste titre Dominique Vérien : les travaux sur l'intelligence artificielle et les métiers du droit que je mène avec Christophe-André Frassa ne nous ont guère rassurés sur ces sujets. Ces crédits alloués à l'informatique ne sont pas suffisants et nous demanderons que le niveau de la LOPJ soit respecté.

Par ailleurs, les téléphones grave danger (TGD), fournis par le Parquet aux victimes d'agressions sexuelles, semblent être en nombre insuffisant, d'où un amendement visant à abonder cette ligne de crédits.

Enfin, certains de nos collègues Les Républicains proposent de réinstaurer le droit de timbre, qui serait acquitté par tout contribuable engageant une procédure de justice. Ce droit s'élevait à 35 euros lorsqu'il a été supprimé par Christiane Taubira afin de répondre aux demandes de tous ceux qui se préoccupent de l'accès au droit. Le montant proposé par nos collègues - 50 euros - n'est pas anodin, et nous nous y opposerons. Je tiens à préciser que bien qu'avocate, je ne représente aucunement un quelconque corporatisme de cette profession, ma préoccupation étant bien celle de l'accès au droit.

Par souci de cohérence, nous nous abstenons aujourd'hui avant de voir ce qui se passera en séance. C'est une approche différente de la vôtre, madame la présidente, qui avez proposé l'adoption des crédits, tout en formulant des critiques sur ces derniers.

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis. - Il ne m'a pas été signalé un nombre insuffisant de TGD, l'aide aux victimes progressant même avant les 250 millions d'euros redonnés au ministère de la justice.

Concernant l'informatique, les problèmes de Cassiopée sont désormais traités en ne se bornant plus à des réparations d'urgence ; le secrétariat général du ministère de la justice travaille ainsi à la réduction des trames du logiciel pour faciliter leur mise à jour et leur maintenance. Par ailleurs, il sera progressivement remédié aux lacunes et aux défaillances de Cassiopée au gré du développement d'autres applicatifs, ce qui est plus positif.

Les pôles dédiés aux violences intrafamiliales sont en cours de déploiement. Nous étions nous-mêmes inquiètes quant aux recrutements, mais la hausse du budget à hauteur de 250 millions d'euros devrait nous permettre de respecter la trajectoire définie par la LOPJ. Notre avis est favorable grâce à cette hausse.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Cela semble paradoxal.

Mme Dominique Vérien, rapporteure pour avis. - Nous avons le droit de faire confiance au Gouvernement sur ce point.

Mme Lauriane Josende, rapporteure pour avis. - Au-delà d'une augmentation des moyens bienvenue, les professions judiciaires expriment un besoin général de clarification et de rationalisation des fonctions et de l'organisation des juridictions. Selon les magistrats, octroyer simplement des moyens humains supplémentaires reviendrait à calmer la douleur sans guérir le malade, alors qu'il importe de réfléchir en amont à la répartition des fonctions et à une rationalisation d'ensemble.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 166 « Justice judiciaire » et du programme 101 « Accès au droit et à la justice » de la mission « Justice ».

COMPTE RENDU DE L'AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE

MARDI 19 NOVEMBRE 2024

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous allons entendre Didier Migaud, garde des sceaux, ministre de la justice, dans le cadre de l'examen par la commission des lois des crédits de la mission « Justice » prévus par la loi de finances pour 2025.

Je rappelle que la commission des lois a nommé plusieurs rapporteurs pour avis sur cette mission : sur les crédits du programme « Justice judiciaire », Lauriane Josende et Dominique Vérien ; sur les crédits du programme « Administration pénitentiaire », Louis Vogel ; et, sur les crédits du programme « Protection judiciaire de jeunesse », Laurence Harribey. Cette audition a été ouverte au rapporteur spécial de la commission des finances, Antoine Lefèvre.

Monsieur le ministre, vous savez toute l'importance que la commission des lois accorde au bon fonctionnement de la justice, qui dépend pour beaucoup des moyens humains et matériels qui lui sont assignés. Nous sommes donc heureux de vous accueillir dans cette commission - pour la première fois d'ailleurs dans vos nouvelles fonctions - pour que vous puissiez nous présenter les grandes lignes du budget consacré à la justice judiciaire, dans un contexte de finances publiques que nous savons particulièrement contraint et qui conduit à des arbitrages difficiles, quelles que soient les missions concernées.

En l'absence de Louis Vogel, retenu à la Cour de justice de la République, permettez-moi d'ores et déjà de formuler quelques questions qui je souhaitais vous poser concernant l'administration pénitentiaire. La première question porte sur le plan 15 000, dont vous avez annoncé avec une certaine objectivité, me semble-t-il, qu'il ne serait pas terminé pour 2027 comme initialement prévu. Plusieurs observateurs et rapports, d'ailleurs, dont ceux du Sénat, avaient critiqué l'excessive mobilisation des moyens alloués à l'administration pénitentiaire par la construction de ces nouvelles places. Au-delà de la question de la livraison, envisagez-vous l'abandon de certains projets ou des redéploiements de crédits ?

La deuxième question, en lien avec la première, porte sur l'état des prisons françaises, accentué par la surpopulation carcérale et qui engage la responsabilité de la France. Les crédits prévus pour l'entretien des prisons baissent pour 2025. Allez-vous abonder ces crédits pour permettre l'entretien du bâti existant ?

M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Je suis très heureux de me retrouver parmi vous pour vous présenter le budget 2025 attribué à la justice.

Le projet de loi de finances (PLF) constitue incontestablement pour tous les acteurs de la justice - mais aussi et surtout pour l'ensemble de nos concitoyens - le marqueur de la force et de la réalité de nos engagements en matière de justice dans notre pays. Comme j'ai eu l'occasion de le dire, le PLF présenté sur la base de la lettre plafond ne pouvait pas être satisfaisant. Le volume de crédits ouverts pour la mission « Justice » - 10,2 milliards d'euros - était certes en augmentation de 100 millions d'euros par rapport au précédent exercice, mais ne correspondait pas aux engagements pris dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice (LOPJ), et surtout ne permettait pas de répondre aux engagements pris en termes d'effectifs. Le PLF tel qu'il était présenté autorisait en effet 619 créations d'emplois, alors même que lesdits engagements portaient sur le recrutement de 1 500 magistrats, de 1 800 greffiers et de 1 100 attachés de justice d'ici à 2027.

C'est pour cette raison que j'ai demandé au Premier ministre de procéder à un arbitrage à la hausse en faveur du ministère de la justice. Ledit arbitrage s'élève à 250 millions d'euros, ce qui nous permet de respecter les engagements pris en termes d'effectifs et tous les accords, notamment sur les rémunérations et les positions indiciaires des chefs de juridiction et de cour, sans oublier tous les protocoles négociés avec les organisations syndicales des personnels pénitentiaires après le drame d'Incarville, que nous serons en mesure de respecter intégralement.

Entre 2024 et 2025, les crédits du ministère vont augmenter de 358 millions d'euros, soit une hausse de 3,5 % ; pour les rémunérations versées aux agents du ministère, l'enveloppe passera de 5,05 milliards d'euros en 2024 à 5,15 milliards d'euros, soit une hausse de 2 %. Ces moyens permettront d'alimenter chacune des grandes composantes de la justice et de mener à bien les missions cardinales du ministère, ainsi que la mise en oeuvre opérationnelle de la déclaration de politique générale du Premier ministre.

Je m'étais engagé en priorité à respecter les engagements pris sur les effectifs, qui sont une condition sine qua non, mais pas l'unique solution aux problèmes de la justice, qui ne tiennent pas qu'aux moyens, car il nous faut trouver en interne des solutions pour améliorer le fonctionnement de la justice. L'augmentation des effectifs n'en reste pas moins indispensable pour contribuer à désengorger les tribunaux et les cours, dont les délais d'audiencement sont devenus inacceptables dans un certain nombre de cas. L'exemple du délai de quatre ans entre la déclaration d'appel et l'audience de plaidoirie devant certaines chambres civiles de la cour d'appel de Lyon est à lui seul particulièrement éloquent.

Nous poursuivrons donc ces recrutements. Dans le détail, une autorisation de recrutement de 1 543 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires est donnée pour 2025, soit 924 emplois supplémentaires par rapport à ce qui était prévu dans le PLF initial. Ces personnels se répartissent de la façon suivante : sur le champ judiciaire, plus de 970 ETP viendront renforcer les services judiciaires et le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), dont 343 magistrats, 320 greffiers et 307 attachés de justice ; dans le champ pénitentiaire, 528 ETP viendront armer les établissements qui seront mis en service ; enfin, pour la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), qui a connu de sérieuses difficultés au cours de l'été 2024 compte tenu de la suppression d'un certain nombre de contrats, 45 ETP viendront renforcer les effectifs et accompagner l'ouverture de nouveaux établissements.

De manière générale, l'attention aux personnels et aux conditions de travail représente un engagement majeur de la LOPJ, tout comme la garantie de l'attractivité des rémunérations des métiers de la justice.

En outre, l'efficacité dans l'exécution des peines et l'accélération des procédures pénales seront deux axes essentiels de mon mandat. À ce titre, je rappelle que rien ne pourra se faire si nous ne disposons pas de la capacité de prendre en charge les personnes placées sous main de justice - en particulier les personnes détenues - dans le respect et la dignité dus à chacun. C'est pourquoi j'insiste sur l'importance des crédits dédiés à la réhabilitation et à la maintenance, au moins aussi essentiels que les moyens alloués à la construction.

S'agissant justement de la programmation immobilière pénitentiaire, Madame la présidente, les crédits dévolus dans le PLF pour 2025 permettront de poursuivre le plan de construction de 15 000 places supplémentaires, avec un accroissement de la capacité de la maison d'arrêt de Nîmes, ainsi que de celle de la structure d'accompagnement à la sortie de Ducos et du centre pénitentiaire des Baumettes 3, dont la construction et la réalisation se passent bien, comme j'ai eu l'occasion de le vérifier à Marseille. Sont également prévues les premières phases des opérations du centre pénitentiaire de Baie-Mahault et de la maison d'arrêt de Basse-Terre, qui seront livrés. Enfin, la rénovation et la modernisation du parc pénitentiaire existant se poursuivra. Des autorisations d'engagement (AE) permettront ainsi d'initier la restructuration du centre pénitentiaire de Fresnes, dont la vétusté nécessite une intervention à court terme.

Je tiens à confirmer que nous rencontrons des difficultés dans le calendrier des grandes opérations de construction. Ainsi, la réalisation du plan 15 000 est très en retard, puisque moins d'un tiers des opérations est déjà réalisé, tandis que 42 % d'entre elles le seront d'ici à 2027 : si tout se déroule correctement, 6 421 places seront mises à disposition au lieu des 15 000 places prévues, soit un écart considérable.

Ces difficultés sont liées à des aléas exogènes, indépendants de la volonté du ministère, dont certains sont d'ordre technique et environnemental. Des tensions sur l'approvisionnement découlant de différentes crises ont des répercussions sur les délais, sans oublier la fragilité du tissu économique, ainsi que le fait - je dois le dire très franchement devant votre Haute Assemblée - qu'il est souvent très difficile de convaincre les élus de nous laisser bâtir un établissement pénitentiaire sur leur territoire.

Ayant moi-même été élu local, je peux parfaitement comprendre ces réticences et ces résistances, qui n'expliquent pas toutes nos difficultés, mais je pense que le temps d'une prise de conscience collective est venu si nous souhaitons que ce programme se réalise.

L'achèvement du plan 15 000 ne sera pas possible sur le plan opérationnel avant 2029 dans le meilleur des cas et suppose des efforts budgétaires substantiels dans les prochaines années. Nous y travaillons avec le ministre du budget et des comptes publics dans la perspective du PLF pour 2026 et au-delà.

Un certain nombre de dossiers sont bloqués au niveau du conseil d'administration de l'Agence publique pour l'immobilier de la justice (Apij) par la direction du budget, qui considère que la soutenabilité budgétaire de ces opérations n'est pas assurée. Au-delà de 2025, ce plan n'était en effet pas financé, puisque vous ne retrouverez pas les sommes nécessaires à la réalisation de l'ensemble de ces places dans la LOPJ. Certes, il existait une clause de revoyure en 2025 qui devait éventuellement permettre d'abonder ces crédits, mais, en l'absence de ce rendez-vous, la direction du budget a, dans le rôle qui est le sien, bloqué les opérations.

Je m'en suis bien sûr ouvert auprès du ministre des comptes publics et du Premier ministre, afin que nous puissions lever ces blocages le plus rapidement possible et être en mesure d'accomplir le plan 15 000 à l'échéance de 2029.

Nous nous efforcerons d'agir sur l'ensemble des leviers pour tenter d'améliorer les résultats de l'année 2027, en proposant des solutions d'accélération juridique, en explorant toutes les pistes opérationnelles sur la base du foncier dont nous disposons et en réfléchissant à d'autres types de prisons tenant compte de la diversité de notre population de 80 000 détenus. En Allemagne, en Belgique, au Québec ou encore en Suisse, des solutions de type modulaire ont prouvé leur efficacité : elles peuvent à la fois être réalisées bien plus rapidement, offrir des conditions de sécurité satisfaisantes et être construites à des coûts moindres.

Nous essaierons donc d'encourager le développement de solutions de ce type afin de respecter les engagements qui ont été pris, en rappelant que la population carcérale augmente d'année en année, à un rythme d'environ 5 500 détenus par année, soit environ 450 détenus supplémentaires chaque mois. De fait, la construction de nouvelles places de prison ne suit pas le rythme d'augmentation du nombre de détenus, ce qui laisse présager une dégradation du ratio en 2027. Il nous faut donc trouver des solutions permettant de répondre à cette situation.

Concernant l'immobilier judiciaire, le budget permettra de couvrir les opérations d'ores et déjà en chantier et de poursuivre la mise à niveau du parc immobilier, notamment au regard de la sécurité des personnes, des mises aux normes réglementaires, de la mise en sûreté des palais de justice et des opérations de gros entretien indispensables à la pérennité du patrimoine, même si nous ne pourrons pas mener toutes les opérations en même temps. L'état d'un certain nombre de tribunaux et de cours d'appel montre que nous avons du retard, mais nos moyens ne nous permettent pas de répondre à toutes les attentes.

En outre, 7 millions d'euros seront consacrés à la construction de centres éducatifs fermés (CEF) sur le secteur associatif habilité. Parallèlement à l'état des lieux relatif au programme pénitentiaire, un état des lieux de ce plan sera réalisé, de même qu'un point sur les autres formats de prise en charge.

Je souhaite également mettre en lumière certaines enveloppes ayant vocation à moderniser et améliorer concrètement le fonctionnement du service public de la justice, ainsi que les conditions de travail de ses agents. Tout d'abord, les crédits d'investissement de l'informatique ministériel seront portés à 285 millions d'euros, soit une hausse de 4,7 % par rapport à 2024. Je m'en réjouis, dans la mesure où ces crédits permettront de poursuivre les projets du second plan de transformation numérique du ministère. En outre, les crédits consacrés aux techniques d'enquête numérique atteindront 49 millions d'euros.

Tous ces projets numériques doivent permettre d'améliorer les conditions de travail et surtout l'efficacité du travail de la justice. Je souhaite insister sur ces crédits supplémentaires qui permettront au ministère d'avancer de manière décisive dans sa transformation numérique, et en particulier de financer la poursuite de projets prioritaires qui déboucheront sur des gains majeurs d'efficacité et de temps dans nos services. Il s'agit également de refondre des outils dont l'état d'obsolescence met en risque la continuité de la justice et la qualité du service rendu au justiciable.

Ces crédits vont en particulier nous permettre de poursuivre la dématérialisation et la modernisation de nos chaînes judiciaires civiles et pénales avec la procédure pénale numérique, le projet de refonte de l'application Portalis, la dématérialisation complète du casier judiciaire national, la convergence de nos outils applicatifs pénaux ou encore le nouveau système d'information de l'application des peines, Prisme.

Les crédits dédiés à l'accès au droit et la justice s'élèveront à 802 millions d'euros pour 2025, contre 790 millions d'euros en 2024. Plus spécifiquement, les crédits dédiés à l'aide juridictionnelle continueront de croître pour atteindre 718 millions d'euros, soit une hausse de 6 millions d'euros par rapport à l'exercice précédent. Parallèlement, l'aide aux victimes est portée à 51 millions d'euros en 2025, soit une hausse de 4,5 millions d'euros. Sur ce point, je tiens à souligner que l'aide aux victimes de violences intrafamiliales constitue désormais 37 % du budget dévolu aux victimes, l'effort devant se poursuivre sur cette politique pénale.

En ce qui concerne l'action sociale offerte par le ministère à ses agents, essentielle pour contribuer à l'attractivité de notre institution, le projet de budget prévoit la mobilisation de plus de 36 millions d'euros. Ce budget permettra notamment d'agir en faveur de la politique d'aides aux familles, de réduire les restes à charge en termes de restauration et de faciliter l'accès des agents au logement et à la propriété.

J'en viens au plan de lutte contre la criminalité organisée. Le ministère a identifié quelques possibilités de recettes supplémentaires à compter de 2025 et travaille avec le ministère des comptes publics à de nouvelles propositions. Parmi celles-ci, deux mesures sont déjà en cours d'adoption dans le cadre du PLF, à savoir le rehaussement du droit fixe de procédure dû par les condamnés et la mise en oeuvre de la contribution pour la justice économique.

Nous avons suggéré au ministère des comptes publics qu'une partie de ces nouvelles recettes pourrait être rétrocédée au ministère de la justice pour financer les mesures qui lui incombent dans le cadre du plan de lutte contre la criminalité organisée que nous avons présenté le 7 novembre avec le ministre de l'intérieur.

Ce plan comprend, notamment sur le volet pénitentiaire, la création de quartiers de prise en charge spécifique nécessitant un abondement supplémentaire en PLF. Dans le combat contre la criminalité organisée, il me semble très important que nous puissions réaliser davantage de quartiers d'isolement dans les prisons, afin d'éviter qu'environ 300 de ces condamnés puissent continuer à organiser leurs trafics et à commanditer des meurtres depuis leurs cellules. Si nous éprouvons parfois des difficultés à brouiller un quartier complet, l'opération est en revanche plus aisée pour une ou deux cellules avec les appareils existants.

Pour terminer, je suis parfaitement conscient des contraintes budgétaires auxquelles est confronté le Gouvernement et je suis comme vous attaché à la crédibilité financière de notre pays. À ce titre, je rappelle que le ministère de la justice a pris part à l'effort budgétaire rendu nécessaire par la situation des finances publiques tout au long de l'exercice 2024.

Un certain nombre de régulations, de gels et de rabots sont ainsi intervenus au cours de l'année pour un total d'environ 730 millions d'euros que nous avons réussi à réduire à hauteur de 350 millions d'euros, ce qui nous permet d'aboutir à une fin de gestion acceptable. Nous sommes conscients de la nécessité de nous organiser pour réaliser les économies nécessaires, tout en faisant en sorte que la justice ait les moyens de fonctionner.

Pour ce qui est des frais de justice, l'enveloppe des crédits est portée à 748 millions d'euros en 2025 et augmentera de 11 % par rapport à 2024. Nous veillons à la maîtrise de ces dépenses, sans remettre en cause la capacité d'investigation de nos magistrats en la matière.

Mme Lauriane Josende, rapporteur pour avis de la mission « Justice », sur le programme 101 relatif à la justice judiciaire et à l'accès au droit et à la justice. - Vous soulignez les conséquences regrettables de la situation budgétaire du pays sur vos crédits : nous partageons votre inquiétude. Le Sénat est très attaché aux objectifs de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, aussi vos annonces sur leur maintien nous réjouissent-elles, tout comme elles réjouissent les personnes que nous avons auditionnées - et c'est pourquoi aussi, les professionnels de la justice s'inquiètent à la lecture de ce projet de loi de finances.

La politique immobilière, d'abord, suscite beaucoup d'inquiétudes parmi le personnel judiciaire et les avocats, qui nous disent ne pas être suffisamment consultés, notamment au sujet du guide de programmation judiciaire récemment actualisé et lors de la réalisation des diverses opérations immobilières. David Barjon, directeur de l'Apij, nous assure que l'élaboration du guide a impliqué les professionnels concernés. Cependant, certains ont déploré que ce guide ne prévoyait plus de places de parkings pour les personnels de la justice ; on comprend leur préoccupation, sachant que les trois-quarts des actifs se rendent au travail en voiture, faute le plus souvent de transports en commun. La consultation des professionnels a-t-elle bien été menée - nous assurez-vous que les critiques énoncées seront prises en compte ? Quelles adaptations de la politique immobilière sont possibles sur la question des parkings ?

Quel bilan dressez-vous, ensuite, du recours au partenariat public-privé (PPP) pour les programmes immobiliers de la justice ?

Vous avez évoqué la hausse des frais de justice. Quelle vous paraît être la part incompressible de cette hausse ? Quel bilan tirez-vous du plan de maîtrise des frais de justice ?

Enfin, les personnels judiciaires que nous avons auditionnés ont tous critiqué l'organisation actuelle des juridictions. Elle a été perturbée par un déficit chronique de recrutement puis par le recours à des contractuels pour des fonctions partiellement indéterminées. Les agents du ministère attendent une évolution significative pour clarifier les fonctions, les rôles de chaque profession au sein des juridictions. Qu'envisagez-vous en la matière ?

Mme Laurence Harribey, rapporteur pour avis sur la mission « Justice » sur le programme 182 relatif à la protection judiciaire de la jeunesse. - Les professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) s'inquiètent également, vous l'avez dit.

Cet été, le non-renouvellement de contractuels a provoqué une grève du personnel de la PJJ et de grandes inquiétudes. Bien que la situation se soit améliorée, les auditions nous montrent un changement profond d'orientation depuis l'entrée en vigueur du code pénal de la justice des mineurs. Vous l'avez très justement dit, il ne s'agit pas uniquement d'une question de crédits, mais également de méthodes de travail et d'acculturation à une nouvelle manière de fonctionner. La réforme a, en fait, alourdi les charges de travail, ce que montre l'alourdissement du stock de mesures : il augmentait d'environ 1 000 mesures par an depuis 2021, puis il a bondi à 4 300 mesures nouvelles entre décembre 2022 et décembre 2023, en plus des 3 000 mesures en attente. Or, l'augmentation de la charge de travail n'est pas traduite dans les effectifs - les 45 créations d'équivalent temps plein ne suffiront pas à combler ce décalage. Nous avons été surpris par le manque de vision à long terme sur ces évolutions. Quelle analyse en avez-vous et que comptez-vous faire ?

Vous vous dites fier, ensuite, d'augmenter les crédits pour la numérisation et l'informatique, donc, pour le logiciel « Parcours », mis en place à la PJJ. C'est une très bonne chose, puisque ce logiciel devrait permettre aux éducateurs de suivre le parcours des jeunes, dont les professionnels déplorent le manque de traçabilité. Cependant, ce logiciel est en retard : la première phase n'est toujours pas achevée, alors que son déploiement a débuté en 2021, le secteur associatif habilité n'est toujours pas intégré et le coût du projet s'élève déjà à 19 millions d'euros. Qu'en pensez-vous ? Comment comptez-vous reprendre en main ce projet, qui semble se diriger dangereusement vers un échec ?

M. Antoine Lefèvre, rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Justice ». - Le projet de budget du ministère de la justice marque un ralentissement dans la mise en oeuvre de la loi de programmation. Je comprends la nécessité de participer à l'effort d'assainissement des finances publiques et j'ai bien vu que le Gouvernement avait déposé un amendement augmentant ces crédits de 250 millions d'euros, alors que des économies supplémentaires sont demandées à la quasi-totalité des autres ministères.

La justice n'a pas été épargnée cette année avec une annulation de crédits de 328 millions d'euros le 21 février dernier, puis des « surgels » successifs qui ont causé de réelles difficultés dans certains services.

Dans le budget 2025, la priorité est donnée aux moyens humains : le projet de loi de finances prévoit d'augmenter les effectifs de 619 emplois, voire de plus de 1 500 emplois si les amendements du Gouvernement sont adoptés. Cette augmentation des effectifs s'appuie sur une politique de revalorisation des métiers, qui est indispensable pour attirer et retenir les personnels. Tout ceci est important pour améliorer le service public de la justice.

Je porte une attention toute particulière aux projets immobiliers, notamment la mise en oeuvre du plan « 15 000 ». Vous avez déclaré qu'il prendrait du retard et vous venez de nous en parler - mais conservez-vous au moins la cible, quitte à la reculer ? Ce plan n'est pas un luxe, il ne résout pas le problème de la surpopulation carcérale mais le contient tout au plus.

Les autres dépenses sont soumises à de fortes restrictions, ce qui pourrait par exemple impacter la modernisation de la fonction informatique.

J'ai été alerté sur la hausse des frais de justice : moins de 500 millions d'euros en 2017, près de 750 millions d'euros en 2025. Que peut-on faire, par exemple au sujet des frais de gardiennage de véhicules ou du coût des interceptions téléphoniques qui ne sont peut-être pas toujours indispensables ?

S'agissant de l'aide juridictionnelle, on nous a indiqué que certaines réformes sont en réflexion ou prévues au sujet du coût de l'aide juridictionnelle, par exemple une suppression de l'aide juridictionnelle partielle ou une ponction sur la trésorerie de la caisse des règlements pécuniaires des avocats (Carpa) en fin d'exercice budgétaire. Avez-vous des éléments à ce sujet ?

Enfin, vous avez annoncé, avec le ministre de l'intérieur, la création d'un parquet national consacré au narco-trafic, ce qui était l'une des recommandations de la commission d'enquête du Sénat. Pouvez-vous nous en dire plus et cela se fera-t-il à moyens constants, puisque ce n'est pas prévu dans le budget pour 2025 ?

M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Le rapporteur Louis Vogel a dit que les crédits du programme 107 « Administration pénitentiaire » prévus pour la réhabilitation des établissements pénitentiaires seraient en diminution ; ils sont en réalité maintenus à 130 millions d'euros - alors qu'ils étaient autour de 60 millions d'euros avant 2019. Cela ne suffit certes pas à couvrir tous les besoins, mais l'enveloppe est maintenue.

Sur les changements de missions intervenues dans la PJJ depuis l'entrée en vigueur du code de justice pénale des mineurs, je signale qu'un rapport au Parlement de l'année dernière fait état de résultats positifs. Cependant, je sais que les personnels de la PJJ ne s'y retrouvent pas : une évaluation interne est en cours, pour objectiver les choses et ajuster ce qui doit l'être.

Le déploiement du logiciel « Parcours » est en retard, effectivement, mais les financements sont maintenus, nous voulons aboutir l'an prochain.

En matière de politique immobilière pour le programme pénitentiaire, ce que nous pouvons obtenir budgétairement est bien loin de suffire aux besoins, je le constate. Je vois aussi que ce programme souffre plus que les autres du décalage entre la loi de programmation et le PLF.

Normalement, les personnels des palais de justice ont été consultés sur leurs besoins de places de parking, il y a eu des groupes de travail ; la voiture reste effectivement très utilisée, des places de parkings restent nécessaires - si la consultation n'a pas bien défini les besoins, il faut peut-être y revenir.

Quelle est la part incompressible des frais de justice ? C'est une question difficile. Les magistrats peuvent vouloir engager plus de frais, mais ils sont conscients des faibles marges que nous avons, sur les interventions téléphoniques par exemple, ou sur le gardiennage des véhicules. Une gestion plus dynamique devrait permettre des économies. En matière d'écoutes judiciaire, par exemple, l'Agence nationale des techniques d'enquêtes numériques judiciaires (ANTENJ) est devenue un service performant et moins coûteux que les sociétés privées qui sont sollicitées par des parquets locaux, il faut habituer nos magistrats à y recourir davantage.

L'organisation des juridictions est un travail continu, elle pose la question du soutien au travail des magistrats. Les attachés de justice sont désormais très appréciés par les magistrats, ils sont un soutien utile. On le voit par exemple lorsque des tribunaux ont constitué un pôle « violences intrafamiliales », en affectant des attachés de justice à ce contentieux, le soutien au travail du juge est important - si au départ il y a eu du scepticisme, ce n'est plus le cas aujourd'hui, les magistrats apprécient cette aide ; c'est une réussite.

Le recours aux PPP a donné lieu à des rapports très critiques, notamment pour ce qui concerne le programme pénitentiaire et l'immobilier judiciaire. Il a permis de belles réalisations, qui malheureusement coûtent parfois cher en fonctionnement... Ces solutions résultent d'un défaut d'investissement de l'État, les entreprises ne sont pas des philanthropes et leur intervention représente un coût supplémentaire. Je ne propose donc pas, vous l'aurez compris, de revenir au PPP pour la réalisation du programme immobilier de mon ministère...

J'ai répondu sur les frais de justice, il y a des marges de progrès. L'enveloppe a augmenté, une mission de l'inspection générale de la justice (IGJ) est en cours pour mieux prendre en compte les demandes des magistrats, je vous en communiquerai les résultats.

Contre la criminalité organisée, la réponse passe par de nouveaux quartiers sécurisés et d'isolement, donc par des moyens supplémentaires ; ce point est très important parce qu'il y a urgence, on le sait bien. Il faut mieux isoler ces condamnés : il n'est pas acceptable que des trafiquants continuent leurs crimes depuis leur prison, qu'ils puissent même y commanditer des meurtres - c'est tout à fait inacceptable. Il faut donc les isoler de l'extérieur, ce qui nécessite des travaux puisque nos quartiers d'isolement sont déjà occupés, notamment par les condamnés pour terrorisme. En ce qui concerne le nouveau parquet national contre le narcotrafic, nous le financerons sur nos crédits. J'affecterai des magistrats pour renforcer le parquet de Paris et pour mettre en place une cellule de coordination ; je veux également renforcer le siège, pour juger plus rapidement, et je souhaite renforcer nos 8 juridictions interrégionales spécialisées dans la criminalité organisée - là encore, nous financerons ces postes supplémentaires sur nos crédits.

Mme Audrey Linkenheld. - Les quelque 316 millions d'euros prévus pour l'immobilier judiciaire devraient servir à la mise aux normes, à l'entretien des bâtiments, et aux opérations nouvelles en cours. L'une m'intéresse particulièrement : le nouveau palais de justice de Lille. Il est très attendu mais il défraie la chronique avant même sa livraison : on a appris, lors de la rentrée solennelle du barreau, que le ministère rechercherait des locaux supplémentaires parce que le nouveau palais de justice... serait trop petit pour accueillir les professionnels de justice ! Vous nous confirmez aujourd'hui que vos moyens ne suffiront pas à couvrir les besoins immobiliers, en général : est-ce à dire que vous n'en aurez pas non plus pour trouver un complément au nouveau palais de justice de Lille, comme on l'espère localement ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Vous évoquez un amendement du Gouvernement qui augmente vos crédits : peut-on l'avoir, pour examiner la ventilation de ces crédits supplémentaires ?

Une remarque, ensuite : les Français vont avoir du mal à comprendre qu'il faut faire de nouveaux quartiers réservés parce qu'on ne parviendrait pas à brouiller des lignes téléphoniques...

Avec un taux d'occupation des prisons à 153,6 %, la situation carcérale est alarmante, nous soutiendrons donc votre demande de crédits supplémentaires. Mais ce qu'il faut voir, c'est que quand on a 450 détenus de plus chaque mois, la solution n'est plus de construire davantage de prisons : qu'en pensez-vous ? Nous avons, pour notre part, fait des propositions depuis des années pour éviter une telle surpopulation carcérale, c'est un sujet très complexe et sensible - du fait en particulier que l'opinion pense que la justice est laxiste, alors que les peines n'ont jamais été aussi lourdes, ni les prisons si pleines... Quelles sont vos perspectives et vos propositions sur ce qu'on a appelé communément la régulation carcérale ?

Par ailleurs, le 6 novembre dernier, la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) a rappelé à l'ordre votre ministère pour non-conformité à la loi de votre fichier de traitement des antécédents judiciaires (Taj) - qui comprend 24 millions de fiches. Comment comptez-vous répondre à ce rappel à l'ordre ? Vous avez un an pour répondre, mais la question est là : les magistrats n'ont-ils pas mieux à faire que de mettre à jour les données d'un fichier national qui n'est jamais opérationnel ?

M. Georges Naturel. - J'évoquerai la situation carcérale en Nouvelle-Calédonie, qui a valu une condamnation de l'État tant les conditions d'incarcération sont indignes, les présidents des deux assemblées parlementaires l'ont constaté en se rendant sur place. Des moyens supplémentaires ont été annoncés pour les enquêtes, pour le traitement des dossiers, pour des places de prison - mais la prison de Nouméa est déjà surpeuplée, des prisonniers sont déjà envoyés dans l'Hexagone, en particulier des commanditaires des exactions et de jeunes délinquants. Un projet de construction d'une prison est annoncé, pour 2032 ; je doute que ce calendrier soit tenu, et que fait-on entre temps ? Vous évoquez d'autres solutions, et nous avons écrit dans ce sens à votre prédécesseur, en visant en particulier l'expérience d'une prison agricole en Corse : peut-on étudier de telles solutions en Nouvelle-Calédonie, surtout pour des jeunes délinquants, qu'il faut insérer ?

M. Didier Migaud, garde des sceaux. - Nous allons poursuivre la modernisation du parc immobilier, en particulier les travaux déjà lancés et inscrits dans la loi de programmation. Nous avons 269 millions d'euros en crédits de paiement pour 2025, en baisse par rapport à la loi de finances initiale. L'amendement du Gouvernement les augmente de 47,4 millions d'euros, ce qui réduit la baisse de moitié. Cela va nous permettre de poursuivre des opérations en phase études, comme la réhabilitation du palais de justice historique de l'île de la Cité, à Paris, l'extension du tribunal judiciaire de Bobigny et les autres projets prioritaires de Toulon, Perpignan et Meaux.

Pour le nouveau palais de justice de Lille, des solutions sont recherchées. Il y a eu des renforts d'effectifs qui n'étaient pas prévus initialement, il est certes dommage qu'il n'y ait pas eu d'anticipation, mais nous allons rechercher des solutions pour les magistrats supplémentaires.

L'amendement du Gouvernement est celui que nous avions déposé à l'Assemblée nationale, votre commission des finances devrait en être saisie. Il faut explorer toutes les solutions pour tenir l'objectif de 15 000 places d'ici 2029, donc augmenter le rythme actuel, qui vise les 6 400 places pour 2027 ; il faut imaginer des solutions diversifiées, en fonction de la population des détenus qui sont eux-mêmes très divers - il faut sortir du modèle de la prison unique, il y a déjà des alternatives, comme les centres fermés, il faut aller plus loin dans le panel de propositions pour faire exécuter les peines prononcées. Il y a aussi le problème du délai d'exécution des peines, des travaux sont conduits pour voir comment raccourcir ces délais quelle que soit la peine. On sait que les travaux d'intérêt général (TIG) sont moins utilisés qu'ils pourraient l'être, parce que le délai d'exécution peut atteindre jusqu'à deux ou trois années, ce qui n'a alors plus de sens. La justice fait preuve de fermeté, les peines prononcées sont plus longues qu'auparavant et il n'y a jamais eu autant de monde en prison, mais nos concitoyens ont davantage qu'avant l'idée que la justice est laxiste. Il faut aussi compter avec le temps de prévention, d'accompagnement ; il faut penser à la réinsertion, c'est un vrai défi - beaucoup se fait mais il y a des marges de progrès.

La Cnil nous rappelle à l'ordre sur un fichier national et elle a adressé ses observations au le ministère de l'intérieur dont dépend ce fichier ; nous avons une année pour nous mettre en conformité avec le règlement européen sur la protection des données, le RGPD, ce qui constitue un travail long et difficile. Nous nous y attelons et j'espère vous dire, l'an prochain, que nous y serons parvenus...

Parmi les systèmes de brouillage des téléphones, ceux qui portent sur des bâtiments entiers sont moins efficaces que ceux qui ne visent qu'une partie d'un bâtiment, et ils ont des conséquences sur le voisinage : ils sont donc moins utilisables en milieu urbain. C'est pourquoi nous préférons des brouilleurs ciblant une ou quelques cellules, où nous voulons isoler les grands trafiquants. Il faut être d'une fermeté absolue face à l'ultra-violence dont font preuve les narco-trafiquants. Les médias ne rendent pas compte de tous les faits, en particulier de la terreur qu'exercent les narco-trafiquants sur leurs victimes et sur leurs familles, en plus de crimes odieux qu'ils commanditent. Le phénomène a pris une dimension nouvelle ces dernières années : l'État doit se réarmer et augmenter sa puissance de combat contre ces organisations criminelles.

Je suis conscient de la situation carcérale en Nouvelle-Calédonie est indigne, la présidente de l'Assemblée nationale m'a adressé des photos édifiantes après sa visite ; il faut construire une nouvelle prison, mais le projet n'est pas financé - il n'est pas financé non plus à Mayotte... Vous avez raison d'appeler à l'action sans attendre la nouvelle prison. Il faut regarder ce qui se fait avec des bâtiments modulaires : cela s'est fait en Allemagne, en Suisse et en Belgique. Il faut trouver des solutions avant 2032. Il y a, en France, 4 000 détenus qui dorment au sol, cela ne devrait pas exister.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Merci pour toutes ces précisions.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Conseil national des barreaux

Mme Julie Couturier, présidente

Mme Anne-Sophie Lepinard, présidente de la commission accès au droit

Mme Anne-Charlotte Varin, directrice des affaires publiques

Syndicat de la magistrature

M. Thibaut Spriet, secrétaire national

Mme Judith Allenbach, secrétaire permanente

Table ronde des organisations syndicales relative aux greffiers

CFDT Services judiciaires

M. Guillaume Grassaud, secrétaire général

UNSa Services judiciaires

M. Hervé Bonglet, secrétaire administratif à la Cour d'appel de Dijon

Mme Isabelle Fernandez, greffière au tribunal judiciaire de Marseille

Syndicat des greffiers de France Force ouvrière

M. Jean-Jacques Pieron, délégué régional pour la Bretagne

Mme Isabelle Besnier Houben, secrétaire générale

Table ronde des organisations syndicales relative aux autres professions judiciaires

CFDT Services judiciaires

M. Guillaume Grassaud, secrétaire général

UNSa Services judiciaires

M. Hervé Bonglet, secrétaire administratif à la Cour d'appel de Dijon

Mme Isabelle Fernandez, greffière au tribunal judiciaire de Marseille

Syndicat des greffiers de France Force ouvrière

M. Jean-Jacques Pieron, délégué régional pour la Bretagne

Unité magistrats Force ouvrière

Mme Béatrice Brugère, secrétaire générale d'Unité Magistrats

Mme Valérie Dervieux, membre du Conseil national

Mme Delphine Blot, membre du Conseil national

Conseil supérieur de la magistrature (CSM)

M. Christophe Soulard, premier président de la Cour de cassation

M. Rémy Heitz, procureur général près la Cour de cassation

M. Xavier Serrier, secrétaire général

Union syndicale des magistrats (USM)

M. Ludovic Friat, président

Agence publique pour l'immobilier de la justice (APIJ)

M. David Barjon, directeur général

M. Guilhem Blanchard, directeur général adjoint

Secrétariat général du ministère de la justice

M. Philippe Clergeot, directeur, secrétaire général adjoint

M. Xavier Albouy, directeur du numérique

M. Nizar Azouz, adjoint au chef du service de l'immobilier ministériel

M. Olivier Vuattier, chef de la cellule de synthèse budgétaire du service de l'accès au droit et à la justice et de l'aide aux victimes

Direction des services judiciaires (DSJ)

M. Roland de Lesquen, directeur des services judiciaires adjoint

Mme Christine Julard, sous-directrice des finances, de l'immobilier et de la performance

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

CGT des chancelleries et services judiciaires


* 1 Le statut des attachés de justice est entré en vigueur le 1er novembre 2024.

* 2 Les autres directions du ministère (DACG, ANTENJ, par exemple) et du ministère de l'intérieur (DGPN, DGGN) participent désormais au comité stratégique des frais de justice et le plan d'action est inter-directionnel depuis 2024. Ce dernier a entraîné notamment l'institution de tableaux de bord mensuels prévisionnels, le déploiement d'un réseau de référents frais de justice, l'expérimentation des services centralisateurs régionalisés des frais de justice et le développement des actions de formation et de sensibilisation.

* 3 L'aide juridictionnelle « garantie », introduite par décret et entrée en vigueur le 1er juillet 2021, permet dans certaines procédures aux avocats d'obtenir, sans examen a priori des conditions d'éligibilité du justiciable, une rétribution au titre de l'aide juridictionnelle. Le décret n° 2024-193 du 6 mars 2024 introduit une procédure d'examen a posteriori de cette aide juridictionnelle « garantie ».

* 4 Ces crédits se répartiront principalement en trois dépenses, que sont les prises à bail, les travaux d'adaptation ou d'entretien des locaux existants et le surcroît de frais de nettoyage.

* 5 La direction des services judiciaires souligne notamment que l'organisation de deux sessions par an porte à la baisse le taux de présence, car les candidats admis sur liste complémentaire au premier concours s'inscrivent par vigilance au second. L'existence d'une autre voie d'accès interne à la profession de greffier par examen professionnel explique, par ailleurs, le manque d'attractivité du concours interne.

* 6 La direction des services judiciaires cite notamment la revalorisation forfaitaire de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (ci-après, IFSE) en 2022, et plusieurs autres mesures au titre de l'année 2023 (nouvelle revalorisation de l'IFSE, augmentation du forfait du complément indemnitaire annuel, des forfaits « mobilité », etc.).

* 7 La direction des services judiciaires aurait avancé deux arguments principaux. Le premier tiendrait à la nécessité d'adapter ces référentiels au regard des conséquences sur le travail juridictionnel de l'institution de l'équipe « autour du magistrat » et de l'intégration des magistrats à titre temporaire et des magistrats honoraires. Le second, à la nécessité d'améliorer ces outils d'un point de vue statistique et technique.

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