III. UNE RÉFORME ATTENDUE ET NÉCESSAIRE DU PORTAGE ET DU POSTAGE
Par un communiqué de presse en date du 20 septembre 2021, les ministres de l'économie et de la culture ont annoncé une réforme ambitieuse du transport de presse . Si ses contours exacts ne sont pas encore connus, elle serait mise en place par voie réglementaire à compter du début de l'année 2022 . Cette réforme serait très largement inspirée des travaux d'Emmanuel Giannesini, conseiller maitre à la Cour des comptes, qui a remis en 2015 et 2020 deux rapports appelant à une profonde évolution des soutiens publics à l'acheminement des abonnements de presse , par voie postale ou par la voie de portage 1 ( * ) .
A. UN SYSTÈME À BOUT DE SOUFFLE
L'aide de l'État à l'acheminement des abonnements prend en compte le postage et le portage .
a) Le postage : une aide sous forme de compensation insuffisante et sans garantie sur la qualité du service
Le transport et la distribution des journaux et des publications périodiques constituent, en application de l'article 2 de la loi du 2 juillet 1990, une mission de service public et d'intérêt général de La Poste . Les éditeurs bénéficient, dans le cadre de cette prestation, de tarifs postaux préférentiels ayant pour objectif de favoriser le pluralisme de la presse.
Il existe ainsi trois familles de tarifs : les tarifs « Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) », les tarifs « Presse IPG » et tarifs « quotidiens à faible ressources publicitaires (QFRP) ».
Le groupe La Poste reçoit chaque année une compensation pour cette mission de service public. Son montant a évolué en application d'une convention passée entre l'État et La Poste entre 2016 et 2020. En 2021, la compensation s'est élevée à 87,8 millions d'euros .
Les volumes distribués par La Poste ont connu une baisse de 38 % entre 2018 et 2021, passant de 780 millions d'exemplaires à 545 millions .
L'évolution des tarifs postaux depuis plus de 10 ans n'a pas permis de résoudre les difficultés qui gangrènent aujourd'hui le régime de tarification spécifique.
D'une part, la compensation versée à La Poste ne couvre pas son coût . L'opérateur se retrouve donc déficitaire sur cette activité, pour un montant estimé à 186 millions d'euros en 2021, avec une qualité de service jugée comme déclinante.
D'autre part, le régime ne permet pas une évolution favorisant le recours au portage de presse , jugé comme étant, dans beaucoup de zones du territoire, la solution économiquement la plus viable.
b) Une aide au portage insuffisamment incitative
Le portage de presse constitue la seconde grande modalité de distribution des abonnements.
Le portage est fortement majoritaire dans l'acheminement des abonnements, avec une part de 78,16 % en 2019 . On observe cependant de fortes disparités, puisque si près de 90 % de la presse quotidienne régionale est portée, seule 23 % de la presse magazine et moins de 45 % de la presse quotidienne nationale usent de ce canal pour leur distribution.
Le portage bénéficie d'une enveloppe d'aide d'un montant de 26,5 millions d'euros en 2022, soit trois fois moins que la compensation versée à La Poste, pour un nombre d'exemplaires quatre fois supérieur .
Le régime actuel s'avère insuffisamment incitatif pour développer un réseau de portage mutualisé, en particulier entre la presse nationale et régionale, et trop coûteux pour La Poste.
* 1 Il convient de noter que Patrick Chaize a déposé le 30 avril 2021 une proposition de loi pour l'encadrement du service postal qui reprend plusieurs propositions d'Emmanuel Giannesini.