III. LA POURSUITE DE LA REMONTÉE DES CONTRIBUTIONS VOLONTAIRES SUFFIT-ELLE POUR ACCROÎTRE LE RAYONNEMENT DE LA FRANCE ?
Le programme 105 est le programme support du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Il regroupe toutes les dépenses de fonctionnement des services en administration centrale et des implantations à l'étranger ainsi que les contributions obligatoires de la France aux organisations européennes et internationales et aux opérations de maintien de la paix (CI-OMP) . Cette structure budgétaire laisse très peu de marge de manoeuvre pour piloter la politique mise en oeuvre dans le cadre du P105.
Sur les 652,2 M€ dédiés aux CI-OMP, les 15 principales contributions représentent 603,77 M€ des crédits du P105 en 2021.
La quote-part de la France au budget de l'ONU se réduit peu à peu, en raison de nos résultats économiques et de la montée en puissance des pays émergents, passant de 6,03 % sur la période 2004-2006 à 4,43 % sur 2019-2021 . Pour rester dans le classement des 10 premiers contributeurs à l'ONU, il faudrait à l'avenir fournir un effort de plusieurs centaines de millions d'euros .
La somme des contributions volontaires et obligatoires françaises la place au 9 e rang des contributeurs des agences onusiennes, avec une participation annuelle dix fois inférieure à la contribution américaine, 1 er contributeur avec 10,5 milliards d'euros par an. Arrivent ensuite l'Allemagne, au deuxième rang, avec une contribution près de 4 fois supérieure à la nôtre, de 3,7 milliards, et le Royaume-Uni, au 3 ème rang, avec 2,8 milliards, puis, le Japon, la Suède, la Norvège, le Canada, et les Pays-Bas (avec 1,32 milliard par an). Notre classement en tant que contributeur devrait diminuer avec la progression de la Chine notamment. Les économies sur les contributions obligatoires permettent de financer les mesures en faveur du réseau déjà évoquées , mais elles induisent également un risque de perte d'influence de la France et un impact négatif sur la capacité de la France à peser à l'avenir sur les orientations des organisations internationales . Un certain décalage a pu être observé en raison de l'écart entre l'activisme diplomatique français et notre contribution réelle. Notre pays, à la manoeuvre politique et diplomatique, s'est retrouvé dans la gestion de certaines crises humanitaires 10 fois moins disant que nos partenaires européens. Notre capacité d'entrainement vis-à-vis de nos partenaires européens pourrait s'en ressentir cruellement . Ce serait d'autant plus regrettable que nos OPEX requièrent la participation de ces partenaires et des organisations internationales, pour que l'action militaire puisse aboutir à des solutions politiques et de développement économique durables.
Des contributions volontaires portées à 29,8 M€ en 2022 : un levier d'action qui doit être amplifié par l'union des efforts européens.
Face à cette situation, en 2021, 20,2 M€ de contributions volontaires ont été inscrits sur le programme 105, parmi lesquels 17,2 M€ de mesures reconduites , auxquelles s'ajouteront 9,6 millions de mesures nouvelles en 2022 pour porter ces contributions volontaires du programme 105 à 29,8 M€.
Pour mémoire les 17,2 M€ reconduits en 2022 sont ainsi répartis :
Les 9,6M€ de mesures nouvelles seront ainsi ventilés :
Si ces choix traduisent bien la vision française en faveur d'une approche coopérative et multilatérale , le mouvement d'affaiblissement et de contestation du système multilatéral est en voie d'accélération, malgré le réengagement de l'administration Biden, et alors que la France est attendue sur ce sujet. Il serait donc souhaitable que cet effort soit renforcé grâce à :
- son inscription dans la durée . Ainsi lorsque des effets de change permettent de retrouver une marge de manoeuvre, il conviendrait qu'elle ne soit pas intégralement captée par Bercy , mais qu'une partie revienne au Quai, et plus encore lorsque ce sont des négociations qui permettent de diminuer la quote-part française. Que les gains ainsi réalisés permettent d'accroître l'influence française serait une mesure de bonne gestion ,
- la coordination et la mutualisation des initiatives et efforts déployés par les pays de l'Union européenne en termes de contributions volontaires. Un effort ciblé non sur l'ensemble du spectre mais sur quelques priorités à forts effets de levier est réalisé. Il peut être décuplé grâce à la coopération européenne . Ainsi, la France et l'Allemagne ont choisi de coordonner leurs interventions en faveur des jeunes experts associés des Nations unies qui sont les leviers d'influence du futur à court et long terme. Cette coopération est d'autant plus importante que la Chine investit 20 fois plus dans ce seul levier d'action que la France . Si les Européens ne regroupent pas leurs efforts, leur poids au sein des organisations internationales risque un déclin extrêmement rapide .